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Une seule couche d'enduit suffit si elle a été appliquée, unie et refoulée avec soin,

L'enduit s'applique à la main contre les bords des toits, des croisées et du faîte; on y passe ensuite légèrement une petite pièce de bois formant gorge ou quart de rond, trempée de temps en temps dans un seau d'eau.

On croit devoir rappeler ici que les échelles des couvreurs doivent être garnies à leurs extrémités d'une fascine de paille ou de jonc, pour ne point endommager les couches d'enduit.

Dans les lieux ou il sera possible de se procurer du goudron ou brai liquide dont on fait usage pour calfater les bateaux, il sera très-bon d'en appliquer une couche au pinceau sur l'enduit quand il sera à peu près sec; mais cet emploi n'est pas indispensable, et le sang de bœuf peut d'ailleurs y suppléer.

§ 71. Colorage.

De quelque sorte que l'on ait choisi et employé les enduits ci-dessus, il est nécessaire, après leur dessiccation, de les revêtir de deux couches de couleur, tant pour donner aux toitures un aspect agréable que pour les rendre totalement imperméables à l'humidité. On peut, à volonté, leur faire imiter la tuile ou l'ardoise. Voici les proportions des matières qui composent la couleur.

§ 72. Imitation des tuiles.

Lait écrémé et non tourné, 20 litres ou 20 kilog Chaux vive,

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Huile de lin, de noix ou d'œillette,

21/2

Poix blanche de Bourgogne,
Rouge de Prusse bien pulvérisé,
Blanc de Bougival,

22420

Ces proportions suffisent pour 150 mètres de

couverture.

PRÉPARATION.

On écrase la poix de Bourgogne et on la met fondre dans l'huile à une douce chaleur; on plonge la chaux dans l'eau et on la laisse effleurer à l'air; aprês quoi on la met dans un vase de grandeur convenable et on verse dessus une portion de lait suffisante pour en former une bouillie assez épaisse. On ajoute ensuite l'huile dans laquelle on a fait dissoudre la poix, en ayant soin de remuer le composé avec une spatule; puis on verse le restant du lait en agitant toujours le mélange. - On écrase le blanc de Bougival et on le répand doucement à la surface du liquide; il s'imbibe bientôt et finit par plonger : on mêle alors avec la spatule, et on termine en incorporant le rouge de Prusse; enfin on passe le tout à travers une grosse étamine ou une passoire.

On emploie, pour appliquer deux couches de cette couleur, la brosse du badigeonneur, fixée au besoin à une perche pour atteindre le sommet du toit. Ces deux couches doivent être données le plus promptement possible, afin d'éviter le caillage du lait, et il faut avoir soin de mêler de temps en temps le composé avant de reprendre de la couleur, afin d'obtenir une teinte égale. Si elle devenait trop épaisse, on ajouterait du lait écrémé et on l'emploierait immédiatement.

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La composition est absolument la même que pour la couleur des tuiles; seulement, on substitue au rouge de Prusse 100 kilogramme de noir d'ivoire ou d'os et kilog. de bleu commun, ce dernier détrempé pendant 48 heures dans l'eau; alors on incorpore le noir en poudre dans les autres matières, et on suit en tout, pour l'application, le même procédé que pour la couleur des tuiles. Pour l'une comme pour l'autre, il faut laisser parfaitement sécher la première couche avant de donner la seconde.

Le prix des couvertures ignifuges ne va pas au sixième de celui de l'ardoise; il est à peu près la moitié de celui de la tuile ordinaire, comme des pannes, et enfin ce mode de couverture est encore moins dispendieux que la paille et le chaume dont l'usage expose à tant de dangers.

Sous le rapport de la légèreté, il a été reconnu que le poids de 400 de couverture en ardoises, compris la volige, était de 85 kilog. ; que celui de 400 en tuiles plates ou en pannes était au moins de 340 kilog.; enfin que 4m00 couverts en chaume ou en paille pèsent 170 kil. dans l'état de parfaite siccité.

Dans les temps pluvieux et humides, le poids des tuiles ou du chaume augmente d'un huitième au moins.

Une surface de 4m00 de couverture ignifuge toute finie et séchée pèse au plus 90 kilog. et n'augmente pas de 5 p. % après plusieurs jours d'exposition à la pluie.

Il est donc évident que, sous le rapport de la lé

gèreté, comme sous celui du moindre coût, le mode ignifuge mériterait la préférence. - Quant à la solidité, on peut l'apprécier d'après les épreuves qui ont été faites; et puisqu'il est démontré que les transitions de sécheresse et d'humidité, les alternatives de gelée, de verglas et de dégel ne peuvent en rien détériorer l'enduit, on peut présumer avec fondement que la durée égalera celle des plafonds intérieurs, sauf toutefois les cas majeurs et accidentels auxquels toute autre espèce de couverture est également exposée.

L'humidité qui règne constamment dans les étables ou écuries pourrait peut-être nuire à la conservation de la paille dont les panneaux sont formés; mais il sera facile de remédier à cet inconvénient en délayant dans un baquet trois parties d'argile, une partie de chaux en pâte et un sixième de partie de bourre éparpillée ou de balle d'orge, en se servant de ce composé réduit à la consistance de bouillie épaisse pour crépir les panneaux à l'intérieur au moyen d'un balai de bouleau.

§ 74. Avantages principaux résultant de l'usage du mode ignifuge.

Si le principal mérite du mode économique dont il est question réside dans sa propriété reconnue de s'opposer aux incendies qui ont lieu par communication, à cet avantage inappréciable s'en joignent d'autres qu'il convient d'énumérer :

1o Les panneaux ignifuges peuvent être appliqués à toute espèce d'édifice, comme usines, celliers, magasins, etc., mais plus particulièrement aux habitations rurales et aux bâtiments qui en

dépendent, même aux meules de grains. Ils pourront par la suite être susceptibles de beaucoup d'autres destinations; mais leur utilité actuelle se restreint à remplacer le chaume et la paille, tels qu'on les emploie journellement dans les constructions rurales.

2o Une fois fixés sur les charpentes, ces panneaux auront rarement besoin de réparations. Si par l'effet imprévu d'une grêle de grosseur extraordinaire, chassée par un ouragan, quelques parcelles de l'enduit qui les recouvre venaient à se fendre ou à se détacher, l'habitant pourra y remédier lui-même au moyen de l'enduit dont il connaîtra la composition; tandis que toutes autres couvertures, sans en excepter celle d'ardoises, réclament souvent la visite et la main du couvreur.

3o Les panneaux n'ont pas, comme l'ardoise et la tuile, l'inconvénient de retenir et de concentrer la chaleur des rayons solaires, chaleur qui nuit singulièrement à la conservation des grains dans les granges et des vins dans les celliers. La paille tissue dont ils sont formés n'est rien moins que calorifère, et c'est ce seul motif de l'échauffement des céréales qui a porté jusqu'à présent les cultivateurs à préférer, malgré le danger de leur emploi, le chaume et la paille à la tuile et à l'ardoise pour couverture de leurs bâtiments.

4o Les couvertures ignifuges seront sans doute reconnues par la suite éminemment préservatrices des effets du tonnerre, et l'expérience a prouvé que le fluide électrique fulminant se partage et se divise à l'infini dans chaque tube séparé du végétal qui forme les panneaux.

5° L'enduit ne peut que se consolider par le contact d'un feu médiocre et qui ne le rougirait pas;

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