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sitôt qu'il le pourrait, soumettrait aux Cortès, après avoir entendu les provinces, les modifications qu'il croirait indispensables pour concilier l'intérêt de ces provinces avec l'intérêt général de la nation et la constitution politique de la monarchie.

Bien que les sentiments parussent partagés, les opinions se turent devant les exigences du moment, et le projet fut adopté (7 octobre) à l'unanimité par les 123 députés présents.

Une loi d'amnistie (1er octobre), présentée quelques jours auparavant, complétait cette résolution.

Ces diverses lois furent portées ensuite devant le sénat qui les discuta avec calme, et leur donna sa sanction.

Cependant le ministère ne triompha pas de même sur d'autres points. L'adresse, en réponse au discours de la couronne, désapprouvait la politique du Cabinet. Dans l'intervalle (22 octobre), les ministres de l'intérieur et de la marine s'étaient démis de leurs fonctions. Dans ces conjonctures, la prorogation des Cortès, prononcée le 31 octobre, ne pouvait être qu'un avant-coureur de la dissolution qui eut lieu en effet. Les ministres démissionnaires furent remplacés (18 novembre); celui de la marine par M. Montès de Oca, et celui de l'intérieur par M. Calderon Collantés.

Les choses étaient donc en cet état. Tous, exaltés et modérés, se préparaient à une nouvelle bataille électorale. Les deux partis recouraient également aux moyens ordinaires : à la presse, à l'organisation de comités dirigeants. Cependant un écrit où le brigadier Linage, chef d'étatmajor d'Espartero, attaquait la conduite du ministère, vint ajouter, non sans raison, aux espérances des exaltés. On pouvait, en effet, considérer cette publication comme l'expression des sentiments du duc de la Victoire.

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- Etat du pays.

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Sénat. Premiers travaux législatifs.
Nomination d'un nouveau ministère.

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Sa politique.- Relations financières avec l'Angleterre. — Clôture des Cortès. Question de la traite des Noirs. - Difficultés à ce sujet avec l'Angleterre. Manifeste de la reine aux grandes Puissances.-Situa

tion. - Découverte d'une conspiration migueliste.
démêlés avec la Grande-Bretagne.
pape. Chute du Cabinet.

Continuation des Complications.- Manifeste du Administration nouvelle. Espéran

ces de réconciliation entre la Grande-Bretagne et le gouvernement de dona Maria. Retards apportés aux négociations par un événement arrivé dans les eaux du Zair. Etat des relations avec le SaintSiége et la Hollande.- Prise de Remechido et de Miltas.

La session de 1858-39 avait été ouverte par la reine le 8 octobre; mais le Sénat n'étant parvenu à se constituer définitivement que vers la fin de janvier, ce fut alors seulement que commencèrent les travaux législatifs.

Le premier acte de la Chambre des députés devait être la réponse au discours royal, qui était attendue avec autant de crainte par les hommes du pouvoir, que d'espérance par les partis hostiles au gouvernement. La commission de l'Adresse présenta un projet peu favorable au ministère, spécialement sur la question de la po~ litique extérieure. Le paragraphe relatif à la traite des nègres était peu significatif; mais celui qui avait trait aux affaires d'Espagne renfermait une expression de sympathie plus vive que le discours de la couronne ne l'avait lui-même provoquée. Enfin on remarquait dans le projet ces paroles sur le sens desquelles l'administration ne dut pas se méprendre :

La Chambre ne peut dissimuler à votre majesté le profond chagrin dont elle est pénétrée en voyant que l'on viole les principes constitu→

ionnels et les premières garanties du système représentatif, par des décrets qui autorisent la perception des taxes votées par les Cortes.

La discussion fat ardente et animée ; et à l'extérieur l'opinion publique en suivit avec anxiété les progrès. La plus grande agitation régnait à Lisbonne, où circulaient maints bruits de conspiration, dont la presse ne craignait pas de se faire l'écho.

On accusait le parti ultrà de travailler sourdement à renverser l'ordre de choses existant, et de vouloir recourir aux moyens violents, si le ministère sortait victorieux de cette lutte. On ajoutait même que Franza, Mantos et d'autres chefs du quartier de l'Arsenal, avaient formé un complot révolutionnaire qui devait commencer par l'explosion du magasin à poudre.

Enfin, et c'était là ce qui effrayait surtout les esprits, il paraissait constant que si la reine ne parvenait pas à composer un ministère de coalition pour remplacer l'administration actuelle devenue insuffisante, il y aurait nécessité de dissoudre les Chambres dans lesquelles les trois partis ordeiros, ultrà et chartistes se balançaient avec des pouvoirs presque égaux. D'un autre côté, les hommes influents sur lesquels on aurait pu compter, refusaient le pouvoir plutôt que de faire partie d'une combinaison ministérielle où leurs opinions auraient rencontré des contradicteurs. C'est ainsi que le comte de Villaréal, en rejetant les propositions de la reine, avait protesté plusieurs fois de sa ferme détermination à n'entrer que dans un Cabinet qui serait exclusivement composé de chartistes.

Cependant le Cabinet obtenait, dans la discussion de l'Adresse, un triomphe d'autant plus éclatant qu'il était inattendu : tous les paragraphes de blâme avaient été rejetés. Mais une défaite décisive vint bientôt compenser ce succès. La proposition faite par les ministres d'augmenter l'armée, souleva contre eux une majorité de 20 voix, et

ilsdurent déposer définitivement leur démission entre les mains de la reine. De nombreux et inutiles essais de reconstitution sortit enfin une nouvelle administration.

Le baron Ribeira de Sabrosa obtint la présidence du Conseil, le département de la guerre et par interim celui des affaires étrangères. Le portefeuille de l'intérieur fut donné à M. Silva Sanchez; celui de la justice et des cultes, M. Cordosa d'Acunha; enfin, Silva Carvalho, selon le vœu général, resta aux finances.

Cette combinaison formait une sorte de juste-milieu entre les ultrà et les chartistes, et semblait assurer au ministère une majorité compacte. D'ailleurs, les chefs des deux partis extrêmes avaient pu se convaincre pendant les négociations qu'aucun n'était assez fort pour contraindre l'autre à céder.

Le nouveau Cabinet qui se proposait de maintenir dans son intégrité la constitution de 1858, sut tout d'abord se concilier l'opinion publique en fermant les yeux sur la traite des noirs, pour laquelle le peuple, en dépit de l'exemple donné par l'Europe chrétienne, avait encore conservé ses anciens préjugés. Plus tard, nous verrons cette cause de popularité devenir, pour le ministère, la cause même de sa chute.

Pendant les luttes parlementaires, les relations financières du gouvernement avec l'Angleterre avaient fait peu de progrès; l'emprunt de 1,400 contos n'était point encore liquidé, et tous les plans proposés à cet effet ne conduisaient à aucun résultat. Pourtant un comité spécial avait été nommé par décret du 18 juillet 1858, à l'effet de prendre connaissance de la dette étrangère, de chercher les moyens de payer les dividendes et d'établir un fond d'amortissement. Le comité, après un an de travaux ou de délais, présenta enfin au gouvernement le projet suivant :

1. Convertir toute la dette étrangère en dette nationale, (intérieure), pour 010; 2o Payer régulièrement l'intérêt

et l'amortissement à 1 pour 020 sur le capital; 3o Convertir les arriérés de dividendes non payés et les bons de la dette intérieure, qui toutefois ne porteraient pas intérêt, mais seraient remboursés dans un certain nombre d'années; 40 Suspendre pendant un temps déterminé toute affectation de fonds à l'amortissement de la dette intérieure. L'intérêt et le fonds d'amortissement devaient s'élever à 508 millions de reis que paierait le bureau de crédit public. Pour se procurer cette somme on disposerait d'abord de celle qui avait été primitivement destinée au rachat des bons de la dette intérieure, savoir: 82,650,000 reis ; et ensuite de l'impôt additionnel sur le riz et le poisson sec établi par décret du 31 octobre 1838, savoir : 225,550,000 reis.

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Mais ce projet longuement discuté, n'amena aucune décision, et la clôture des Cortès eut lieu sans que le gouvernement eût pris aucune mesure pour le remboursement de la dette.

Ce fut vers la même époque que l'on souleva de nouveau la question sociale de la traite des noirs le ministère Melbourne avait présenté au Parlement anglais un bill qui fut adopté et par lequel l'Angleterre était autorisée à faire capturer par ses croisières et à confisquer tous les navires marchands portugais qui seraient rencontrés au sud de l'équateur, employés ou soupçonnés, d'être employés au trafic de la traite.

Lord Minto en appuyant cette proposition à la Chambre des lords, avait dit : « Il n'y a plus à balancer, il faut que le Portugal tienne les promesses qu'il a faites à l'Angleterre au sujet de la traite, ou que celle-ci balaie, d'un seul coup, tous les vaisseaux négriers portagais qui se trouvent sur la surface de l'Océan; cette menace, sur laquelle avait encore renchéri lord Brougham, produisit une grande effervescence dans le peuple portu

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