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Le 13 au soir, les Prussiens de Lestocq et les Russes de Kamenski se retiraient à Königsberg; les troupes de Murat couchaient sur leurs emplacements. La brigade Pajol était rentrée dans Wittenberg. Les autres corps de l'armée française, restés avec Napoléon, avaient établi leurs bivouacs entre Eylau et Domnau. Lannes occupait cette dernière ville, surveillant Friedland, où il devait se porter le lendemain.

1807

II

Marche de l'armée russe sur Friedland, le 13 juin. — Bataille de Friedland (14 juin 1807). -Victoire de Napoléon.- Opérations de Murat du côté de Königsberg. — La brigade Pajol débouche sur le flanc gauche des Prussiens. Le corps de Lestocq rentre dans Königsberg. Position des corps de Soult, de Davout, de la cavalerie de Murat et de Pajol devant Königsberg, le 14 juin à midi. — Murat reçoit de Napoléon l'ordre de marcher, avec le corps de Davout et toute sa cavalerie, sur Friedland. — La brigade Pajol revient à Weissenstein. — Pajol marche sur Wehlau. · Poursuite de l'armée russe.. La cavalerie de Lasalle s'empare de Taplacken, le 16. Nombreux combats d'avant-gardes jusqu'à Tilsit. La brigade Pajol entre à

Tilsit, le 19 juin, à huit heures du matin. Armistice. Position de l'armée française sur le Niemen. Paix de Tilsit, le 8 juillet. La brigade Pajol attachée au corps de Davout. Elle va, avec la division Morand, à Gumbinnen, le 14 juillet. Toutes les troupes de Davout arrivent sur la frontière de Pologne, à la fin de juillet. Occupation du duché de Varsovie. La brigade Pajol portée sur la Pilica. Organisation du gouvernement de la Pologne.

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Mouve

ment rétrograde de l'armée d'Allemagne, vers la fin de novembre 1807. — La brigade Pajol portée dans la province de Kustrin. Itinéraires suivis par les quatre régiments qui composent cette brigade.

Le 13 juin, Benningsen, ayant connu la présence d'un corps français aux environs de Domnau, s'était décidé à évacuer les positions de Schippenbeil et à porter toute son armée à Friedland, où il lui importait d'arriver avant nous. Il avait, en conséquence, dirigé sur ce point, à midi, le prince Gallitzin, avec quinze escadrons et quatre pièces d'artillerie légère, lui prescrivant d'occuper la ville, si les Français n'y étaient pas, et de se porter ensuite, après avoir franchi l'Alle, sur la route de Königsberg. Cette reconnaissance fut suivie par le prince Kollogribow, à lá tête de dix-huit escadrons et avec huit pièces d'artillerie légère.

Les deux colonnes russes parvinrent à Friedland dans la soirée. Elles en chassèrent facilement un régiment de hussards, que

Lannes y avait envoyé, le poursuivirent jusqu'à Georgenau et s'établirent ensuite en face des villages de Sortlack, Postehnen et Heinrichsdorf. De là, le prince Gallitzin envoya trois escadrons et trois pièces de canon à Wehlau, pour s'assurer de ce passage de l'Alle et pour brûler tous les autres ponts.

Peu après le départ de sa cavalerie, Benningsen avait mis toute son armée en marche, et une grande partie prenait position, vers le milieu de la nuit, sur la rive gauche de l'Alle et en avant de Friedland. A la pointe du jour, sa ligne de bataille se trouvait complétement formée. Son aile droite s'étendait de la rive gauche du Ruisseau-du-Moulin (Mühlen-Flüss) à l'Alle, traversant le bois de Dommerauer et la briqueterie; l'aile gauche occupait l'intervalle entre la rive droite du Ruisseau-duMoulin et l'Alle, passant par le bois de Sortlack et coupant les routes d'Eylau, de Bartenstein et de Schippenbeil à leur point d'intersection. Quatre ponts volants jetés sur le Mühlen-Flüss établissaient une communication facile entre les deux ailes.

Ses troupes étant ainsi placées, Benningsen se disposait à les porter en avant par l'aile droite, lorsque le maréchal Lannes déboucha, le 14 juin, vers trois heures du matin, avec les grenadiers d'Oudinot. Bien que le reste de son corps d'armée fût encore à quelque distance, et que les autres corps français ne fussent pas à portée de le soutenir avant quatre ou cinq heures, Lannes fit avancer son artillerie et engagea les grenadiers d'Oudinot. Il appela en toute hâte auprès de lui ses autres divisions et la cavalerie de Nansouty et de Grouchy, afin de manœuvrer, conformément aux instructions de l'Empereur, de manière à retenir l'ennemi devant lui et à l'empêcher de commencer son mouvement sur Königsberg. Grâce à son habileté et à la valeur de ses troupes, il y réussit, et permit aux autres corps et à Napoléon d'arriver à temps sur le champ de bataille.

Dès que l'Empereur eut reconnu la position de l'armée russe, il arrêta son plan d'attaque. Ney, prenant la droite, de Postehnen à Sortlack, marcherait contre la gauche de l'ennemi, la refoulerait dans Friedland pour la rejeter ensuite sur la rive droite de l'Alle et la couper de l'aile droite; Lannes avec les grenadiers d'Oudinot et ses autres divisions, formant le centre, soutiendrait ce mouvement; Mortier, à l'aile gauche, occuperait Heinrichs

dorf et la route de Königsberg, et contiendrait la droite des Russes, sans avancer. Toute la ligne française devait pivoter sur l'aile gauche, où furent placées encore les divisions de cavalerie des généraux Espagne et Grouchy. Enfin la garde impériale et le corps de Victor, qui constituaient la réserve, devaient s'établir à Postehnen.

A cinq heures du soir, l'Empereur donna le signal de l'attaque. Aussitôt le corps de Ney, appuyé par celui de Victor, s'ébranla et refoula promptement la gauche de l'ennemi jusqu'à l'entrée de Friedland. La garde impériale russe, se jetant sur la gauche de Ney, ne put arrêter l'élan de ses troupes, que la division Dupont était venue soutenir, et nos soldats entrèrent dans la ville pêle-mêle avec les Russes, dont ils firent un horrible carnage.

Pendant ce temps, Lannes et Mortier (centre et aile gauche) attaquaient la droite de l'ennemi, commandée par Gortschakow; ils la pressaient assez pour l'empêcher de secourir la gauche, sans cependant l'obliger à se replier. Mais bientôt l'incendie de Friedland et des ponts avertit Gortschakow du danger de sa situation; il se hâte d'ordonner la retraite sur Friedland; le maréchal Ney s'oppose à son passage. A ce moment, Mortier, Lannes, les grenadiers d'Oudinot, et les fusiliers de la garde conduits par Savary, s'élancent au pas de charge, et jettent dans l'Alle, où plusieurs milliers d'hommes périssent, les troupes de Gortschakow, dont la retraite est coupée. Quelques détachements parviennent à s'échapper par la route de Königsberg.

L'armée victorieuse coucha sur le champ de bataille : le corps de Lannes, entre Heinrichsdorf et Friedland; celui de Mortier, près de Friedland, presque en entier sur la rive gauche de l'Alle, une faible portion ayant pu gagner la rive droite, en traversant la rivière à un gué dont les Russes avaient eux-mêmes profité pour se sauver; celui de Victor, à Postehnen; celui de Ney, dans Friedland et en arrière de cette ville, sur la rive gauche; la garde impériale et la réserve de cavalerie bivouaquèrent en arrière.

Le lendemain, 15 juin, le pont de Friedland ayant été promptement réparé, l'Empereur fit poursuivre l'ennemi par plusieurs corps de cavalerie sur la route de Wehlau par Allenburg, tandis que le gros de l'armée française descendait l'Alle en suivant la rive

gauche. Benningsen précipitait sa retraite et parvenait à passer la Pregel à Wehlau, d'où il comptait se porter derrière le Niemen.

Tandis que Napoléon remportait ce brillant succès avec les corps restés sous ses ordres, Murat remplissait avec bonheur la mission dont il avait été chargé : Soult, qui était arrivé, le 13 au soir, à Mahnsfeld, déboucha, le 14 de très-grand matin, par Lichtenhagen, sur les positions du général Lestocq, dont l'avant-garde occupait Gollau; au même moment, la brigade Pajol, marchant en tête de la cavalerie de Murat, apparaissait sur le chemin de Wittenberg à Altenberg. Les Prussiens, craignant alors d'être tournés par leur flanc gauche en même temps qu'ils auraient à supporter les attaques de Soult sur la droite et de front, se retirèrent précipitamment vers Königsberg, et prirent position à la tête du bois de Karschau, en avant des villages de Ponarth et de Nieder-Krug. Soult les suivit vivement, enleva un bataillon qui avait voulu défendre le village de Karschau et vint se déployer devant eux. Pajol s'était aussi avancé rapidement et, passant entre les bois et les lacs, il s'était porté sur les derrières de Ponarth. De là il s'élança, à la tête du 3° chasseurs, contre les lignes prussiennes, qui furent partout enfoncées. Lestocq fit alors rentrer ses troupes dans Königsberg, dont il renonça à défendre les approches. A ce moment, Davout débouchait et prenait position de Rathshoff à Jerusalem, et il se préparait à porter la division Friant sur la rive droite de la Pregel, pour compléter l'investissement de Königsberg. Soult, qui avait dépassé le village de Nieder-Krug, attaqua le faubourg de Brandenburg, dont il s'empara. La cavalerie de Murat s'était établie en avant de Ponarth, reliant la droite de Soult à la gauche de Davout; la brigade Pajol avait été déployée en première ligne, au pied des fortifications de la ville. Elle fit plusieurs charges tout autour de la place, sous le feu même des batteries prussiennes. Pajol, à la tête de chacun de ses régiments, parcourut, pendant plusieurs heures, le front des lignes françaises, qu'il dégagea ainsi complétement, refoulant dans Königsberg les détachements qui étaient encore à l'extérieur, et ramassant de nombreux prisonniers (1).

(') Voir Pièces justificatives, n° 28.

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