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cas de refus de délivrer expédition ou copie aux parties intéressées en nom direct, héritiers ou ayants droit (1).

30 Pour dommages - intérêts, restitutions et frais, lorsqu'ils sont le résultat de faits prévus par la loi pénale et dans tous les cas de dol, de frande ou de violence (2);

40 Pour reliquat de comptes de tutelle, de curatelle ou de toute administration confiée par justice et pour toute restitution à faire par suite desdits comptes (3).

meubles ou de rentes constituées sur particuliers pour le payement de la différence de son prix avec celui de la revente ;

6o Dans les cas de surenchère prévus par les art. 115 de la loi du 16 décembre 1851 et 565 du Code de commerce, conformément à l'art. 101 de la loi du 15 août 1854;

7o Contre le comptable qui, après l'expiration du délai fixé par le jugement, sera en défaut de présenter et d'affirmer son comple;

8. Contre ceux qui auront de mauvaise foi dé

3o Contre le fol enchérisseur, après saisie d'im- nié en justice leur écriture ou leur signature;

effet appliquera-t-on la contrainte par corps au détenteur ? Jusqu'à ce qu'il ait satisfait à son engagement; or, il aura satisfait dès que, appréhendé au corps, il aura quitté le fonds; il n'y aura donc pas lieu à l'emprisonnement qui est de l'essence de la contrainte par corps.

<< Quant aux objets que le détenteur pourrait avoir sur ce fonds, ils seront mis dehors à ses frais. Le projet de loi, tout en modifiant et en simplifiant les deux dispositions des art. 2060 et 2061 2°, ne nous paraît pas suffisamment dissiper une erreur commise du reste par la plupart des jurisconsultes, notamment Dalloz et Troplong. Celui-ci tombe même dans une étrange contradiction, en disant, au commencement de son commentaire, no 36 et aussi no 332, que le délaissement ordonné par justice d'un fonds dont le propriétaire a été dépossédé par la violence, doit se faire par l'emploi de la force publique, manu militari, tout en présentant plus loin ce délaissement comme sanctionné par la contrainte par corps. La mesure, en cette matière, ne pourrait garantir que le payement des sommes auxquelles le détenteur serait condamné pour inexécution de son obligation.

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Dans son nouveau rapport, présenté à la séance du 18 novembre 1859, M. De Boe disait :

s'en rapporter à la prudence du juge pour l'application de la contrainte par corps. Cette voie d'exécuLion est donc facultative. » (Exposé des motifs.)

(2) « Les cas dans lesquels des dommages-intérêts peuvent être dus sont extrêmement variés. Il y a tantôt dol et fraude, tantôt faute grave, tantôt faute légère. Tantôt les dommages-intérêts sont stipulés d'avance par une convention; tantôt ils sont fixés par jugement; dans certains cas, ils forment une dette principale ; dans d'autres, ils sont l'accessoire d'une autre dette qui souvent ne donne pas lieu ellemême à l'exécution par corps. Aussi, la loi du 15 germinal avait-elle supprimé cette voie d'exécution en cette matière. La faculté de prononcer la contrainte par corps toutes les fois qu'il y a obligation aux dommages-intérêts, ouvre un vaste champ à l'arbitraire. Les rédacteurs du Code civil, ne voulant pas confier aux juges un pouvoir discrétionnaire exorbitant, préférérent maintenir la loi de germinal. L'art. 126 du Code de procédure a remis en vigueur le principe de l'ordonnance de 1667.

Il paraît nécessaire de restreindre dans de justes limites l'exécution par corps pour dommages-intérêts. Le Code de procédure des Pays-Bas ne l'autorise qu'en cas de délit pour dommages-intérêts adju«Des difficultés s'étaient présentées sur l'inter-gés soit par le juge civil, soit par la justice répressive. prétation de cet article, difficultés d'autant plus plausibles, que la disposition qu'il renferme avait donné lieu à des controverses de la part des hommes qui se sont le plus spécialement occupés de la contrainte par corps, MM. Dalloz, Troplong et Laurent.

«Dalloz n'admettait pas que pour le délaissement d'immeubles on pût agir par la contrainte par corps; il prétendait que dans ce cas le délaissement devait être opéré par la force militaire, manu militari.

«M. le ministre a fait observer qu'il était des cas où la contrainte par corps pouvait être utile, par exemple dans le cas où le détenteur refuserait de quitter l'immeuble. Dans ce cas, la contrainte par corps serait exercée jusqu'à ce que le détenteur indû ait déguerpi, c'est-à-dire ait laissé l'immeuble en tel état que le vrai propriétaire y puisse librement en

trer. >>

"

(1) Les officiers publics qui refusent la production de leurs minutes quand elle est ordonnée par le juge, et les particuliers dépositaires de pièces de comparaison ou de pièces arguées de faux, qui désobéissent à la justice, entravent la marche des procédures. C'est pour faire cesser ces entraves que la loi autorise un moyen coercitif prompt et rigoureux.. Les notaires et autres dépositaires qui, en refusant de délivrer expédition ou copie aux parties intéressées, les empêchent de faire valoir leurs droits, doivent y être également contraints. Toutefois, comme le dépositaire peut avoir eu des doutes sur le point de savoir si celui qui demande l'expédition est au nombre des personnes qui ont le droit de l'exiger, le projet a dû

Le projet l'autorise lorsque le fait dommageable est prévu par la loi pénale, et toutes les fois qu'il y a dol, fraude ou violence. » (Exposé des motifs.)

« La disposition par laquelle le projet de loi déclare que le juge pourra prononcer la contrainte par corps pour dommages-intérêts, lorsqu'ils sont le résultat de faits prévus par la loi pénale, et, dans tous les cas, de dol, de fraude ou de violence, constitue un adoucissement extrême dans l'application de cette voie d'exécution. L'art. 126 1o du Code de procédure laissait à la prudence des juges la faculté de prononcer la contrainte par corps pour dommagesintérêts, en matière civile, au-dessus de la somme de 300 francs. Les cas dans lesquels ils pouvaient être alloués étaient extrêmement variés; il s'en trouva beaucoup où l'intérêt général n'était nullement en jeu. Aussi la loi n'a-t-elle pas reproduit cette disposition.

« On s'est demandé si l'article sera applicable, lorsque la partie lesée, au lieu d'agir au criminel, intente une action en dommages-intérêts devant les tribunaux civils et lorsque ces dommages sont alloués par la justice pénale, nonobstant acquittement de l'inculpé. Nous avons résolu affirmativement ces questions.» (Rapport à la chambre.)

(3) « La loi de germinal et le Code civil, au titre de la contrainte par corps, ne font pas mention des tuteurs et des curateurs. Le législateur a craint de rendre trop onéreuse une administration qu'ils sont souvent forcés d'accepter. Le Code de procédure a rétabli à leur égard la contrainte par corps. Depuis

9o Contre le détenteur, non fonctionnaire public, d'une pièce de comparaison nécessaire dans une instance en vérification d'écriture, ou d'une pièce arguće de faux, pour l'apport de ces pièces ordonné par le juge;

100 Contre les experts, en cas de retard ou de refus de déposer leur rapport.

Art. 5. La contrainte par corps en matière civile ne peut être prononcée que pour une somme excédant trois cents francs, excepté dans les cas prévus par l'art. 20 (1).

la mise en vigueur de la loi du 16 décembre 1851, les mineurs et les interdits sont souvent privés de toute garantie légale, et dans cet état de choses, il serait dangereux de supprimer l'exécution par corps en celte matière. Les tribunaux ayant la faculté de ne pas autoriser l'emprisonnement, tiendront compte, dans chaque cas particulier, des circonstances qui militent en faveur de l'administrateur, et il n'est pas à craindre qu'ils se montrent trop sévères.

a La disposition de l'art. 126 du Code de procédure comprend les comptables des corps, communautés et établissements publics. Le projet ne parle pas de ces comptables au titre qui nous occupe, parce que le titre suivant contient une disposition spéciale à cet égard.» (Exposé des motifs.)

«Lestuleurs et curateurs, les administrateurs nommés par justice, gèrent la fortune des personnes incapables d'administrer par elles-mêmes. Ils sont, quant à leurs fonctions, de véritables personnes publiques. La loi garantit, par la contrainte par corps, l'exécution de leurs obligations, quand elles ont pour objet le reliquat de leurs comptes et les restitutions à faire par suite desdits comples. Cependant, comme ces fonctions leur sont imposées par la loi, qu'ils ne les ont, en général, pas librement acceptées, elle s'est montrée, à leur égard, moins sévère qu'envers les autres personnes publiques; elle permet aux juges, suivant les circonstances plus ou moins favorables dans lesquelles se trouveront ces débiteurs, de prononcer ou de ne pas prononcer la contrainte par corps. Le n° 4 ne comprend les comptables des corps, communautés et autres établissements publics. Il en est fait mention sous le titre suivant. >> (Rapport à la chambre.)

pas

(1) «L'art. 5 reproduit à peu près les dispositions de l'art. 2065 du Code civil. D'après le projet, la contrainte par corps ne pourra être prononcée que quand la somme excédera 300 fr. D'après le Code en vigueur, elle peut l'ètre dès que la somme atteint ce chiffre.» (Exposé des motifs.)

«En matière civile, la somme pour laquelle le débiteur est contraignable, est un peu plus élevée qu'en matière commerciale. Le gouvernement a cru pouvoir, sans danger, la porter à 300 fr., et maintenir ainsi une disposition déjà existante dans nos lois (art. 2065 du Code civil). Nous avons vu que, pour qu'une dette commerciale puisse donner lieu à la contrainte par corps, il faut qu'elle s'élève en principal, à 200 fr., mais qu'il suffit qu'elle atteigne ce chiffre; une dette civile, au contraire, devra excéder 300 fr.; mais cette somme pourra être formée par le cumul du principal avec les intérêts et les accessoires. Que décider, lorsque la contrainte par corps garantit une obligation de faire qui n'est pas évaluée en argent, par exemple, s'il s'agit d'un refus de représentation de titres, de reddition de comptes? Dans ces cas, la mesure est édictée pour forcer le débiteur à satisfaire à ses devoirs ou à la justice. La loi a pensé que

TITRE III.

DE LA CONTRAINTE PAR CORPS EN MATIÈRE DE DENIERS ET D'EFFETS PUBLICS.

Art. 6. Sont soumis à la contrainte par corps (2):

Tous ceux qui, à titre de comptables ou autrement, ont perçu des deniers publics ou reçu des effets mobiliers appartenant à l'État, aux provinces, aux communes, aux établissements de

la condamnation à un payement pécuniaire pourrait n'être pas une garantie suffisante. Elle veut l'exécution directe de l'obligation. Peu importe la valeur pécuniaire du dommage que cause la résistance de l'obligé.» (Rapport à la chambre.)

« Il y a une différence de rédaction pour ces deux hypotheses, différence qui semble signifier que les 200 fr. en matière commerciale ne comprennent que le fond même de la dette sans les intérêts ni les accessoires, tandis qu'en matière civile, ces derniers éléments seraient compris dans les 300 fr. Telle est l'opinion non contredite, exprimée dans le rapport de la section centrale.

« Cette interprétation rétablissant à peu près l'égalité entre les deux chiffres, votre commission ne voit pas d'inconvénient à adopter l'article; mais il lui eût paru préférable d'employer dans les deux cas une même expression, afin de ne donner naissance à aucun doute, aucune difficulté. » (Rapport au sénat.)

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(2) « La rentrée exacte des créances de l'État, des provinces, des communes et des établissements publics, est une des conditions essentielles d'une bonne administration financière. Ces rentrées sont garanties par de nombreuses dispositions de nos lois; elles le sont aussi par la contrainte par corps. Des doutes ont été soulevés par quelques rapporteurs de sections, sur le sens un peu vague des mots : établissements de bienfaisance et autres établissements publics. Ces doutes se fondent sur le texte de l'Exposé des motifs, p. 16. Il dit : « La disposition de l'art. 126 du « Code de procédure comprend les comptables des « corps, communautés, établissements publics. Le << projet ne parle pas de ces comptables, au titre qui « nous occupe (c'est-à-dire le titre II), parce que le titre suivant (c'est-à-dire le titre III) contient une disposition spéciale à cet égard. >> il semble résulter de cette disposition que les mots établissements publics comprennent les corps et communautés, dont l'acception est extrêmement large, d'autant plus que, dans l'art. 126 du Code de procédure, ils étaient opposés aux mots établissements publics. Nous pensons qu'il s'agit, dans notre article, d'établissements ayant un caractère de personne publique, et c'est en y attachant ce terme que nous l'avons adopté. La section centrale, considérant que la contrainte par corps autorisée contre les cautions, est une dérogation à ce principe fondamental : que nul ne peut directement se soumettre à la contrainte par corps, et que cette mesure d'exécution a été abolie contre les cautions judiciaires, vous propose de rayer les mots : ainsi que leurs cautions. L'État, les établissements publics, ont pu librement discuter les cautions qui leur ont été présentées; par cela même qu'elles ont été acceptées, elles ont été reconnues solvables, et cette solvabilité constitue, pour les uns et les autres, une garantie suffisante. La statistique nous apprend que depuis le commencement de 1845 jusqu'à la fin

bienfaisance et autres établissements publics, pour représentation ou justification d'emploi desdits effets mobiliers, et pour reliquat de comptes, déficit ou débet constatés à leur charge.

Art. 7. Sont également soumis à la contrainte par corps tous entrepreneurs, soumissionnaires

de 1856, il n'y a pas eu une seule contrainte exercée contre un comptable public; nous ne croyons donc pas, par notre décision, compromettre les intérêts du trésor de l'Etat, des provinces, des communes ou des établissements publics.» (Rapport à la chambre.)

« L'art. 6 comprend les établissements de bienfaisance et les autres établissements publics. Ces expressions ne doivent s'entendre que des établissements qui ont reçu le caractère de personne civile, soit par la loi elle-même, soit en vertu de la loi, et auxquels ce caractère a été donné à cause de leur utilité reconnue. >> (Rapport au sénat.)

les

(1) « Nous n'avons qu'une seule observation à faire sur la disposition de l'art. 7 du projet pour ce qui concerne les agents qui ont personnellement géré l'entreprise. Cette disposition ne comprend pas agents et commis qui ne sont responsables qu'envers l'entrepreneur; elle a pour but d'atteindre les personnes véritablement intéressées dans les entreprises et fournitures, telles que les sous-traitants qui dissimulent leur sous-traité et qui n'en gèrent pas moins personnellement l'entreprise.

« Dans cette matière, la contrainte par corps est impérative; le juge n'a pas la faculté d'en dispenser le débiteur. D'après la disposition de l'art. 126 du Code de procédure civile, la contrainte est facultative à l'égard des comptables des corps, communautés et établissements, mais cette disposition est en contradiction avec l'art. 2060 du Code civil, d'après lequel ce moyen d'exécution est obligatoire à l'égard du dépositaire nécessaire. Le projet applique à ces débiteurs le principe de l'art. 2060, et cela est d'autant plus nécessaire que, sous notre régime communal, les intérêts des communes et des établissements publics, en ce qui concerne la gestion de leurs finances, ne sont pas garantis par une surveillance et un contrôle aussi sévères et aussi exacts que ceux de l'État. La crainte de l'emprisonnement peut jusqu'à un certain point remédier à cet inconvénient; mais pour que ce moyen comminatoire soit efficace, il faut que le débiteur sache bien qu'il ne peut échapper à l'emprisonnement, s'il ne remplit pas exactement ses obligations.

<< Le projet soumet les cautions à la contrainte par corps, parce que dans le cas où l'administration se contente d'une caution personnelle, cette caution est ordinairement intéressée dans la gestion ou l'entreprise du débiteur principal. » (Exposé des motifs.)

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L'art. 7, tout en soumettant à la contrainte par corps les entrepreneurs, soumissionnaires et traitants, qui ont passé des marchés ou des traités intéressant l'Etat, les provinces, les communes et tous établissements publics (mots auxquels nous donnons le sens qu'ils ont dans l'art. 6), pour le payement des sommes reconnues en débet à leur charge par suite de leurs entreprises, déclare cette voie de coaction applicable à leurs cautions, leurs agents, qui ont personnement géré l'entreprise, et toutes personnes déclarées responsables des mêmes services. Cette dernière disposition a été l'objet des remarques de deux sections; l'une a demandé que l'on précisât le sens du mot agent, l'autre a exprimé le désir que la section centrale votat sa suppression. Nous avons accédé à ce vœu, el nous vous proposons aussi de ne pas maintenir la contrainte par corps contre les

et traitants qui ont passé des marchés ou traités intéressant l'État, les provinces, les communes, les établissements de bienfaisance et autres établissements publics, pour le payement des sommes reconnues en débet à leur charge par suite de leurs entreprises (1).

cautions. Ces dispositions sont anciennes et remontent à une époque où la sévérité qui préside aujourd'hui au choix des entrepreneurs publics, n'existait pas, où les véritables soumissionnaires se cachaient sous des prête-noms, dont le désordre qui régnait dans les administrations publiques ne permettait pas de constater l'honorabilité et la solvabilité. Nous avons en conséquence voté la suppression des trois dernières lignes de l'article, depuis et y compris les mots : ainsi que leurs cautions.» (Rapp. à la chambre.) M. Moncheur avait demandé, à la séance du 19 novembre, le rétablissement de la disposition qui concernait les agents des entrepreneurs, soumissionnaires ou traitants M. de Boe, rapporteur, lui répondit : « Cette question a été soulevée dans la section centrale par l'honorable M. Moreau. Je dois faire observer que la section centrale, pour tous les amendements, a été guidée par un principe, c'est que la contrainte par corps ne doit être accordée que lorsqu'elle est strictement nécessaire. Or, la disposition supprimée de l'art. 7, si je ne me trompe, était tout à fait nouvelle; elle était empruntée à la loi française de 1832; il n'en est pas question dans l'art. 126 du Code de procédure. Nous avons pensé qu'il n'y avait pas urgence d'étendre ici la contrainte par corps

à ce cas nouveau.

«Il y a une autre raison, messieurs; c'est que l'État traitant librement, choisissant les personnes avec lesquelles il traite, peut prendre des garanties suffisantes et n'a rien à voir dans les contrats secondaires passés par ceux-ci avec des tiers.

«La statistique nous prouve que de 1841 à 1856, il n'y a pas eu de contrainte par corps exercée contre des comptables de deniers publics ni contre des individus qui ont traité directement avec l'État. Or, si aucune contrainte par corps n'a été exercée contre ces derniers, il me semble qu'il n'y a aucun danger pour l'État, les communes et les établissements publics à ce que nous ne l'accordions pas contre des sous-traitants, puisqu'elle a été à peu près inutile dans l'application contre les traitants principaux et que les agents ne seraient responsables qu'à défaut des premiers.

M. LE MINISTRE DE LA JUSTICE:

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« Je maintiens donc, messieurs, l'amendement qui tend à supprimer le paragraphe; il ne me semble présenter aucune espèce d'inconvénient. » Voici, messieurs, la raison qui m'a déterminé à me rallier à la rédaction de la section centrale. Lorsqu'un individu touche des deniers appartenant à autrui ou lorsqu'il gère les affaires d'une autre personne, il s'établit un lien, un contrat de gestion d'affaires ; il devient un negotiorum gestor, el l'on peut admettre qu'il soit contraignable par corps; il y a là un lien direct entre cet homme et celui dont il a touché les deniers, dont il a géré les affaires.

« Il n'en est pas de même dans le cas prévu par l'art. 7; là il ne s'agit plus d'un lien entre le délégué, le gérant et l'État, la province, la commune ou l'établissement public qui a adjugé l'entreprise; il n'y a qu'une convention entre l'entrepreneur et son délégué.

« Cette différence dans les positions respectives doit entraîner des dispositions différentes dans la loi.» (Séance du 19 novembre 1858.)

Art. 8. Les contribuables ne peuvent être contraints par corps au payement des impôts (1).

Sont toutefois maintenues les dispositions des lois spéciales qui, dans des cas particuliers, autorisent l'exécution par corps en cette matière.

Art. 9. La disposition de l'art. 5 de la présente loi est applicable aux cas de contrainte prévus par les trois articles qui précèdent.

TITRE IV.

DE LA CONTRAINTE PAR CORPS CONTRE LES ÉTRANGERS (2).

Art. 10. Tout jugement qui interviendra, au

(1) « L'art. 8 du projet sanctionne les règles de la législation actuelle, d'après laquelle les contribuables ne peuvent être contraints par corps au payement des impôts. Les lois fiscales admettent quelques exceptions à cette règle; telles sont les dispositions des art. 285 et 290 de la loi du 26 août 1822. Dans les cas prévus par ces articles, le débiteur est contraignable par corps, parce qu'il a abusé de la confiance de l'administration. Le projet se réfère aux lois spéciales, en ce qui concerne les exceptions de cette espèce.» (Exposé des motifs.)

« Les contribuables ne peuvent être contraints par corps au payement des impôts. Il est cependant des cas où le contribuable a en quelque sorte disparu, pour faire place à un comptable maniant des fonds que l'Etat, les communes, etc., ont provisoirement laissés dans ses mains. Ainsi, l'administration des douanes accorde des crédits pour le payement des droits sur les marchandises, elle ouvre des comptes courants à certaines personnes. Le trésor pouvait percevoir les droits, alors qu'il avait les marchandises, c'est-à-dire la meilleure garantie possible d'une dette, sous la main. Dans l'intérêt du commerce, du crédit, il s'est dessaisi de son gage, il a consenti à donner un délai de payement; il est juste qu'il puisse user de la mesure la plus énergique du droit civil, si le débiteur manque à ses engagements. Un membre a demandé que les lois spéciales fussent du moins, quant à leurs dispositions relatives à la contrainte par corps, inscrites dans le projet de loi. Nous avons pensé que la recherche de ces dispositions serait trop laborieuse, que, du reste, cette nomenclature est inutile, puisqu'elle peut à chaque instant être modifiée par le vote de lois nouvelles sur l'administration des finances. » (Rapport à la chambre.)

la

(2)« La contrainte par corps contre les étrangers était de droit en France sous l'empire de l'ordonnance de 1667. Après que la contrainte par corps, abolie en 1792 et rétablie par la loi du 24 ventose an v, eut été réglée pour les matières civiles et commerciales par la loi du 15 germinal an vi, intervint la loi du 4 floréal de la même année, relative contrainte par corps, pour engagements de commerce entre les Français et les étrangers. Cette loi restreignit l'exécution par corps aux engagements contractés dans l'étendue de la république (art. 1er). Elle admettait le principe de la réciprocité dans le cas où le débiteur possédait en France des immeubles ou un établissement de commerce. Quant aux engagements contractés en pays étranger, elle autorisait la contrainte par corps si l'exécution, réclamée en France, emportait la contrainte par corps dans le lieu où ils avaient été formés (art. 3). Les dispositions de la loi du 4 floréal, n'ayant pas été rappelées dans le Code civil, ont été abrogées par l'art. 7 de la loi

profit d'un Belge ou d'un étranger domicilié en Belgique, contre un étranger non domicilié dans le royaume, prononcera la contrainte par corps, si la dette excède en principal deux cents francs, et si le débiteur s'est obligé directement envers un Belge ou un étranger ayant son domicile dans ce pays (3).

Art. 11. Avant le jugement de condamnation, le président du tribunal de première instance, dans l'arrondissement duquel se trouvera l'étranger non domicilié, pourra, s'il y a des motifs suffisants, ordonner son arrestation provisoire moyennant ou sans caution, sur la requête du

du 30 ventose an xn, et par l'art. 2065 dudit Code. Mais la contrainte contre les étrangers a été rétablie par la loi du 10 septembre 1807, d'après laquelle tout jugement de condamnation intervenu au profit d'un Français contre un étranger non domicilié en France, emporte l'exécution par corps. Cette loi ne distingue pas si l'obligation a été contractée en France ou à l'étranger, ni si le débiteur possède ou ne possède pas en France des immeubles ou un établissement de commerce. La loi française du 17 avril 1832 a adopté la disposition de la loi de 1807; toutefois elle ne permet pas l'exécution par corps pour une dette inférieure à 150 francs.

«La loi de 1807 est encore en vigueur en Belgique. Elle y est d'une application assez fréquente, puisque depuis 1841 jusqu'en 1850, le nombre des étrangers arrêtés en vertu de cette loi a été de cent quatre-vingt-onze, ce qui fait une moyenne de 19.10 par an. Ces chiffres prouvent que la situation de la Belgique, et le grand nombre d'étrangers de toute espèce qui affluent dans ce pays exigent le maintien du principe de la loi de 1807. » (Exposé des motifs.)

(3) « Le projet, tout en adoptant le principe de la loi actuelle, y apporte plusieurs modifications:

«10 Il n'admet l'exécution par corps que lorsqu'elle est expressément ordonnée par le jugement;

«< 20 Il étend le bénéfice de la contrainte par corps aux créanciers étrangers domiciliés en Belgique en vertu d'une autorisation du Roi. Pardessus est d'avis que tel est le sens de la loi actuelle, parce que l'étranger domicilié en Belgique jouit de la plénitude des droits civils, ce qui comprend, selon lui, le droit d'exercer contre son débiteur les voies de contrainte autorisées par la loi. Mais d'après les termes de la loi de 1807, cela doit paraître fort douteux; le contraire a été jugé plusieurs fois. La question étant controversée, il paraît nécessaire de lever le doute par une disposition formelle de la loi. La loi française, du 17 avril 1832, n'autorise la contrainte par corps qu'au profit des Français. La loi de procédure de Genève, au contraire, l'autorise au profit de tout individu domicilié dans le canton (art. 685). Le commentateur de cette loi justifie cette disposition en ces termes : «Il y aurait quelque injustice à refu«ser au créancier domicilié, contre les débiteurs

"

étrangers non domiciliés, les mêmes voies de con«trainte que celles accordées aux rationaux. En <«<les autorisant à s'établir dans ce pays, en leur ac«cordant la faculté d'y exercer leur industrie, le

législateur leur devait la même protection. » Au reste, comme le dit fort bien le même auteur, celle disposition change le caractère de la contrainte par corps, contre les étrangers; ce moyen d'exécution n'est plus un privilège en faveur des nationaux, une

mesure hostile contre les étrangers, mais un mode de protection accordé à tous ceux qui, étant établis sur notre territoire, sont soumis à nos lois, contribuent à notre commerce et participent aux charges de l'État sans distinction de nationalité.

« Le domicile dont parle le projet est celui acquis par l'étranger en vertu d'une autorisation royale, conformément à l'art. 13 du Code civil. Le projet n'a aucun égard au domicile de fait soit du créancier, soit du débiteur, c'est-à-dire à l'habitation réelle jointe à l'intention de fixer son principal établissement dans le pays. Il est des établissements qui ont peu de stabilité, qui sont fondés sur des capitaux réalisables en peu de temps et qui, par conséquent, n'offrent qu'une faible garantie. D'ailleurs, les circonstances qui constituent le domicile de fait, peuvent varier à l'infini; la loi ne peut avoir égard à ce domicile sans subordonner la contrainte par corps à l'arbitraire du juge, sans rendre cette voie d'exécution en quelque sorte facultative. Le tribunal de commerce d'Anvers est cependant d'avis que le bénéfice de la contrainte par corps devrait être accordé même à l'étranger n'ayant en Belgique qu'un domicile de fait. Le Code de procédure des Pays-Bas va plus loin encore; il soumet le débiteur étranger à la contrainte par corps, sans distinguer si le créancier est indigène ou étranger. Nous n'avons pas admis ces principes. Si l'étranger résidant en Belgique n'a pas acquis un domicile dans ce pays, c'est parce qu'il ne l'a pas voulu, ou parce que le Roi ne l'en a pas jugé digne. Dans le premier cas, il n'est pas à plaindre, il subit les conséquences de son propre fail. Dans le second cas, il ne l'est pas davantage; le rejet de sa demande ne peut être fondé que sur l'absence de garanties que le gouvernement est en droit d'exiger de l'étranger en compensation de l'avantage qu'il lui accorde. Au reste, la loi, en refusant l'exécution par corps aux étrangers qui n'ont dans le pays qu'un domicile de fait, ne diminue en rien la protection due au commerce et à l'industrie, car le créancier étranger peut, aussi bien que le créancier indigène, exercer la contrainte par corps lorsqu'il s'agit d'une dette commerciale.

«La loi de 1807 ne distingue pas si l'engagement a été contracté originairement envers le créancier le belge ou envers un étranger. Il arrive souvent que débiteur étranger est emprisonné dans ce pays par un créancier belge, porteur du titre, en vertu d'une cession réelle ou fictive qui lui a été faite par un créancier étranger. La question de savoir si le cessionnaire belge peut, dans ce cas, demander la condamnation par corps du débiteur étranger a été décidée diversement. Quand il s'agit d'une cession ordinaire, la plupart des auteurs et des arrêts se prononcent pour la négative. L'opinion contraire a prévalu, lorsque la créance résulte d'un titre négociable transmis au Belge par voie d'endossement, parce que, , dans ce cas, le signataire du titre est censé s'être obligé non-seulement envers le bénéficiaire, mais aussi envers son ordre, c'est-à-dire envers tous ceux au profit de qui l'effet sera endossé. Dans l'un et l'autre cas, la question est controversée, et il importe de la résoudre par une disposition expresse. Le projet, en exigeant un engagement direct envers une personne domiciliée en Belgique, exclut la contrainte par corps pour toute créance transportée à un habitant de ce pays par un étranger, soit par voie de cession ordinaire, soit par voie d'endossement. Cette disposition, qui ne permet pas à l'étranger de profiter d'une mesure de protection réservée aux créanciers domiciliés en Belgique, n'empêche cependant pas l'exécution par corps des obligations com

merciales contractées en pays étranger, au moyen d'effets de commerce négociables, car les obligations de cette espèce rentrent dans la disposition de l'article 1er du projet. » (Exposé des motifs.)

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Le débiteur devra s'ètre obligé directement envers une personne ayant son domicile dans ce pays, à moins que la contrainte par corps ne résulte de la nature même du titre. Il semble résulter des termes impératifs de l'article, que le juge devra prononcer la contrainte par corps même en l'absence de conclusions formelles du créancier. Nous considérons ces conclusions comme indispensables, elles ont pour but d'avertir le débiteur du danger qu'il court, et de lui faire rechercher si son créancier se trouve bien dans les conditions voulues par l'article. » (Rapport à la chambre.)

M. VERVOORT: « Messieurs, le texte de l'article est général, et je me suis demandé si nous pouvons y comprendre les Belges qui perdent leur qualité de Belge et qui ont contracté des dettes antérieurement à la perte de cette qualité. Je crois qu'il serait injuste d'attacher le mode d'exécution dont nous nous occupons à une convention conclue entre deux Belges dont l'un n'a pas entendu en contractant se soumettre à la contrainte par corps, et dont l'autre n'a pas compté sur ce mode d'exécution.

<< Il faut remonter à l'origine de la dette. Lorsque nous accordons l'emploi de la contrainte par corps contre un étranger, c'est à raison de la qualité qu'il possédait au moment de contracter la dette.

<< Mais cette voie d'exécution ne peut être le résultat d'un fait qui entraîne la perte de la qualité de Belge.

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Voyez les graves inconvénients qui peuvent résulter de la généralité du texte. Lorsqu'une femme belge épouse un étranger, elle suit la condition de son mari, et devient étrangère; les époux adoptant le régime de la communauté des biens, le mari devient débiteur de toutes les dettes ayant date certaine que la femme a contractées avant le mariage.

« Voici ce qui est arrivé à Bruxelles : Un étranger fort connu de beaucoup de membres de la chambre, épousa, sans faire de contrat de mariage, une femme belge qui avait garanti par acte authentique des dettes de son premier mari. Après le voyage de noces, le mari et la femme furent assignés en payement d'une de ces dettes qui s'élevait à 20,000 fr. et l'on demanda contre eux la contrainte par corps.

« Le tribunal a dû s'incliner devant la généralité du texte de la loi, et l'un et l'autre ont dû être condamnés par corps à payer cette somme considérable. Nous devons, pour éviter à l'avenir une pareille anomalie, déclarer que l'art. 10 de la nouvelle loi n'est pas applicable aux deltes contractées par un Belge antérieurement à la perte de sa qualité de citoyen, si elles n'entraînaient pas la contrainte par corps.

<< Si la chambre trouve que l'exception appliquée à tout Belge qui perd sa nationalité est trop générale, elle devra tout au mois décider que la femme belge qui épouse un étranger n'est pas contraignable par corps pour les dettes contractées avant son mariage lorsqu'elles ne pouvaient être poursuivies que par les voies ordinaires. Il est à remarquer que mari peut forcer sa femme à s'expatrier, et ce serait faire payer trop cher à celle-ci son mariage avec un étranger que d'y attacher la peine éventuelle d'une incarcération. >>

le

M. DE BOE, rapporteur : « L'amendement de l'honorable M, Vervoort ne peut pas être admis. Je suppose qu'un Belge ayant contracté des dettes civiles ordinaires, non garanties à leur origine par la contrainte par corps, perde sa qualité, mais conserve son

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