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et des galets, dont le diamètre va de celui des grains de sable jusqu'à 0m 20 et plus. Leur nature n'est pas moins variable que leur grosseur : elle dépend du point d'où ils sont partis; et ils offrent la reproduction de toute la série des roches qui forment les cimes de la vallée principale ou des vallées affluentes.

Ces galets, aux formes arrondies, sont généralement aplatis, les faces de moindre résistance s'étant usées plus que les autres dans leur cheminement. Lorsqu'ils se déposent, c'est sur la face plate, en se superposant les uns sur les autres. Sur une plage, on les voit plus ou moins nettement imbriqués en écailles de poisson; et leur résistance à l'affouillement ne dépend pas seulement de leur grosseur et de leur poids, mais aussi de l'orientation qu'ils ont prise en se déposant, et de l'obliquité des courants qui les attaquent.

Ces caractères généraux se constatent dans toute l'étendue du cours du Rhône; et partout on rencontre des galets de provenances les plus diverses, mélangés suivant le hasard des incidents de leur descente vers la Mer. Toutefois, au-dessous des derniers affluents, la Durance et le Gardon, les apports de galets cessent le fleuve triture peu à peu ceux qu'il roule; leur dimension moyenne diminue progressivement à mesure qu'on descend; et à 4 kilomètres en amont d'Arles, on ne trouve plus, dans le lit, que du sable très fin, mêlé d'une assez forte proportion d'argile.

Le rocher ne se montre, soit sur les rives, soit dans le lit, sous forme de pointes ou de barres, que sur un très petit nombre de points.

Sous l'action des affluents principaux, la pente du fleuve se distribue très inégalement. Lorsque, au moment d'une crue, un affluent amène au Rhône des eaux plus saturées que celles du fleuve, il y a dépôt le cône de déjection de l'affluent s'avance dans le fleuve et y provoque une brisure de la pente par augmentation de la pente d'aval et diminution de la pente d'amont. Lorsqu'au contraire, les eaux de l'affluent sont moins saturées que celles du fleuve, il se produit un dragage du lit et une brisure de la pente, mais en sens inverse, par augmentation de la pente d'amont et diminution de la pente d'aval.

Cet effet est particulièrement sensible pour les affluents impor

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Les eaux descendent au-dessous de l'étiage conventionnel pendant trois ou quatre jours en année moyenne : le débit minimum constaté varie, suivant les sections, entre les deux tiers et les trois quarts environ du débit d'étiage.

Les eaux moyennes, c'est-à-dire le débit au-dessus duquel le fleuve se tient pendant six mois en année moyenne, représentent, environ, deux fois et demie le débit d'étiage.

Enfin, dans les grandes crues, le débit du Rhône s'élève jusqu'à vingt-cinq et vingt-huit fois le débit d'étiage.

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Caractéristique du fleuve. Par la forte pente de son lit, par la nature des matériaux qui le constituent, et par l'énorme variation du débit de ses eaux, le Rhône se classe nettement dans les rivières à fond mobile.

Les mouvements de graviers y sont considérables; les déplacements du lit principal et du chenal étaient autrefois très fréquents; et le fleuve a, dans le cours des siècles, occupé successivement toutes les places dans la vallée, souvent assez large, où il coule. C'est seulement pendant le XIXe siècle que, lentement d'abord, plus rapidement ensuite, des travaux ont été entrepris pour fixer son cours ; et l'on doit considérer comme définitif l'emplacement aujourd'hui occupé par son lit.

CHAPITRE II

Historique des programmes et des travaux
antérieurs.

Antiquité et moyen-âge.

L'importance commerciale de la vallée du Rhône était déjà considérable au commencement de l'ère chrétienne, ainsi qu'on peut le voir d'après les dires de Diodore de Sicile et de Strabon, mais il est probable que ce mouvement commercial remontait à une époque beaucoup plus ancienne, et peut-être à l'époque même où la civilisation, se déplaçant de l'Orient vers l'Occident sur les rivages de la Mer Méditerranée, a atteint les embouchures du fleuve.

Cette importance est due presque exclusivement à la situation

géographique de la vallée. « La ligne presque droite formée par le » cours du Rhône et de son grand tributaire, la Saône, a forcé > l'Histoire, pour ainsi dire, à faire en cet endroit un brusque » détour vers le nord, afin de gagner par le chemin le plus facile le » versant océanique du continent.

>> Dans la stricte acception du mot, l'étroite vallée du Rhône est » devenue un grand chemin des nations: Arles, Vienne, Lyon, » Chalon, Dijon en sont les étapes » (1).

En raison des difficultés et des dangers que la navigation maritime rencontrait au détroit de Gibraltar et dans le golfe de Gascogne, cette vallée donnait une communication relativement courte et facile entre la Méditerranée d'un côté, la Loire, la Seine et le Rhin de l'autre; les Grecs et les Phéniciens pouvaient par là échanger leurs produits avec les marins Britanniques ou Armoricains.

A l'époque romaine, les corporations de bateliers étaient nombreuses et importantes; on peut citer notamment celles des Marins d'Arles et des Utriculaires, et, à Lyon, celles des Nautes du Rhône et de la Saône.

Les renseignements font défaut sur les conditions de navigabilité du fleuve à cette époque; mais, il y a lieu de croire qu'elles étaient relativement satisfaisantes, au moins pendant une grande partie de l'année, car Ammien Marcellin qualifie les bateaux qui naviguaient sur le Rhône de "grandissimæ naves ".

Cette navigation dut se poursuivre pendant le moyen-âge, malgrẻ les difficultés résultant des divisions politiques de la vallée; elle alimentait entre autres les ports de Lyon, Avignon, Beaucaire, el, notamment, la foire célèbre de cette ville, dont la création remonte aux premières années du treizième siècle. Mais les documents précis manquent totalement pendant cette longue période, soit sur la navigabilité, soit sur l'importance du mouvement commercial. Ce n'est qu'avec le dix-neuvième siècle que l'on entre dans ce que l'on peut appeler la période historique du fleuve et des travaux.

(1) E. RECLUS, Géographie Universelle, Tome II, Chapitre III.

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