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N° 4

ETUDE

SUR

LA PRÉVISION DES CRUES DE L'YONNE A AUXERRE

D'APRÈS LES PLUIES TOMBÉES DANS LE MORVAN

par M. P. BREUILLÉ, Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées.

Nous avons donné dans les Annales des Ponts et Chaussées de 1896 la formule suivante qui permet de calculer la hauteur d'eau d'une crue au pont Paul Bert à Auxerre, en fonctions des hauteurs observées à Saint-Père sur la Cure, Avallon sur le Cousin et Clamecy sur l'Yonne :

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dans laquelle H représente la hauteur de l'eau à Auxerre, hp, ha, he les hauteurs prises au même moment à Saint-Père, Avallon et Clamecy. Elle a permis de prévoir à 010 près le maximum du 21 Janvier 1910 et à 005 près celui du 8 Février. Mais, pendant la montée, la durée de propagation de Saint-Père, Avallon et Clamecy à Auxerre n'est que de 12 heures, le service d'annonces a donc à peine le temps nécessaire pour recevoir les dépêches, faire les prévisions, transmettre les avis et prendre les mesures urgentes avant que le maximum n'arrive à Auxerre, et il est matériellement impossible de prévenir assez tôt un certain nombre de localités situées immédiatement à l'aval des stations d'observation.

On ne peut songer d'ailleurs à reporter plus en amont, ces stations

d'observations situées à la limite des terrains imperméables, car le maximum de la crue, comme nous l'avons montré, se forme en un point assez éloigné des sources.

Aussi, il nous a semblé intéressant de chercher à prévoir les crues non plus d'après les hauteurs d'eau observées, mais d'après les pluies tombées. A la quantité de pluie tombée dans une journée, nous ajouterons, s'il y a lieu, la quantité d'eau provenant de fonte de neige, cette fonte est rapidement provoquée par la pluie et il est nécessaire d'en tenir compte. Il est bon aussi de savoir quelle hauteur de neige recouvre le sol, et depuis plusieurs années les observateurs du Morvan nous donnent chaque jour ces renseignements par dépêche.

Lorsque nous parlerons de pluie, il doit donc être bien entendu qu'il s'agit de la pluie et de l'eau provenant de neige fondue dans les 24 heures.

Le problème à résoudre est très complexe. La hauteur de pluie n'intervient pas seule. Il est évident à priori que

l'effet d'une pluie siccité du sol sur

dépend absolument de l'état de saturation ou de lequel elle tombe. L'expérience montre qué telle hauteur de pluie qui, tombée sur un terrain très sec, ne donne pas de crue, détermine au contraire des submersions graves si elle tombe sur un sol déja saturé. Nous n'en citerons qu'un exemple typique :

m

En Janvier 1892, il est tombé 80 / aux Settons et à ChâteauChinon (total des 2 pluviomètres aux dates n et n-1, comme il sera exposé plus loin) et l'Yonne n'a pas dépassé 2 m, 10 à Auxerre. Par contre, pour une pluie totale de 76 "/m, nous avons eu à Auxerre, une crue de 2,70 le 18 Octobre 1896 (les submersions graves commençant à 2,60.) Nous avons pu constater que la pluie tombée sur un sol profondément gelé, ruisselait complètement, et que le résultat était le même que pour le sol saturé.

L'état du sol est donc un facteur de grande importance, et dont nous aurons à tenir compte dans la suite.

Les stations d'observations dont les hauteurs de pluie serviront aux prévisions doivent être convenablement choisies, de manière que les crues paraissent bien correspondre aux pluies abondantes qui y sont constatées. Leurs emplacements semblent devoir être

dans les vallées principales, bien exposés aux vents qui amènent généralement les pluies.

Comme le maximum des crues se forme bien à l'aval des sources, les stations doivent être un peu à l'aval.

On ne doit pas oublier, d'ailleurs, que la prévision par les pluies n'est intéressante, au point de vue pratique, pour notre région, qu'à la condition de devancer les prévisions d'après les hauteurs d'eau, et que par conséquent les formules doivent comprendre seulement les pluies recueillies dans la partie haute du bassin, avant que des mouvements d'eau ne puissent être constatés sur les rivières.

Quoique les pluies locales tombées à l'aval quand la crue y parvient puissent avoir une certaine influence, elles seront laissées de côté dans notre étude.

Nous nous limiterons aussi à la recherche des prévisions pour les premières montées, car le phénomène devient ensuite plus complexe. On observe en effet après la crue proprement dite un apport quelquefois très important par les couches de jurassique, apport qui provient de l'eau de pluie qui a pénétré dans le sol et qui s'écoule jusqu'à la vallée de l'Yonne sur une couche imperméable. En Janvier 1910, par exemple,¡ la partie haute du village de Champs a été inondée par les eaux venant de Saint-Bris, plusieurs jours après le passage du maximum à Auxerre; le terrain dans ce cas pourrait être considéré comme sursaturé.

Nous n'étudierons en somme que l'effet immédiat de pluies générales tombées dans la partie haute du bassin, lorsqu'elles sont assez importantes pour produire à Auxerre une crue atteignant sensiblement la cote des submersions graves.

Il a été dressé tout d'abord un tableau des crues observées depuis 1890, les seules pour lesquelles nous possédons des renseignements complets; deux d'entre elles pour lesquelles nous n'avions pas de renseignements complets sur les pluies tombées à Château-Chinon ont été laissées de côté, ce sont celles des 20 novembre 1905 et 30 novembre 1896.

10 crues restaient à étudier.

Il nous a apparu nettement, à l'examen des graphiques dressés pour chaque crue et sur lesquels sont reportées les hauteurs d'eau

observées et les hauteurs de pluie recueillies aux Settons, à ChâteauChinon, Clamecy et Avallon, qu'il y avait une relation entre les chutes de pluie aux stations d'amont, les Settons et ChâteauChinon, et les crues relevées à l'aval.

Nous avons choisi les Settons et Château-Chinon comme stations d'observations.

Si on suit sur les graphiques (voir mémoire de 1896) les crues de la Cure se propageant de Saint-Père à Vermenton et à Auxerre, et celles de l'Yonne passant par Marigny, Clamecy, Mailly-la-Ville et Auxerre, on constate que pour une pluie tombée dans la même journée aux Settons et à Château-Chinon, le maximum de la Cure passe à Auxerre 24 heures avant le maximum de l'Yonne. Dès lors, pour avoir les pluies qui produisent un maximum à Auxerre, il faut prendre les pluies recueillies aux Settons de 7 heures du matin le (n - 1)o jour à 7 heures du matin le no jour et les pluies recueillies à Château-Chinon de 7 heures du matin le (n − 2) jour à 7 heures du matin le (n − 1)o jour; c'est-à-dire les pluies portées sur les états le ne jour pour les Settons et le (n-1) jour pour ChâteauChinon. Le maximum se produit le (n + 1)o jour à Auxerre.

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Nous avons adopté pour première règle de prendre pour notre étude les pluies qui donnent des flots passant en même temps à la station de prévision.

Les relevés faits ne donnent les pluies que par intervalles de 21 heures; c'est certainement insuffisant, car une forte chute d'eau peut se trouver divisée en deux par l'observation de 7 heures du matin, sans qu'on sache comment elle se répartit. Est-elle tombée en 48 heures ou en 24 heures? On l'ignore; nous n'avons pas eu à tenir compte de pluies ainsi réparties.

Graphique. Les 10 crues étudiées ont des maxima-variant de 2,25 à 3,80; la cote normale est de 1,50 au pont d'Auxerre, les débordements commencent à 2,20 et les submersions graves à 2,60.

Pour chaque crue, nous avons porté sur l'axe des o le total des pluies recueillies aux Settons et à Château-Chinon aux dates n et 1; c'est la pluie tombée aux Settons à la date n qui donne le

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GRAPHIQUE DES HAUTEURS D'EAU A AUXERRE EN FONCTION DES HAUTEURS DE PLUIES. (Voir le tableau, p. 102). P, représente la hauteur de pluie tombée aux Settons en 24 heures le jour n.

Pc

id.

à Château-Chinon en 24 heures le jour n-1.

La cote obtenue pour la hauteur de l'Yonne à Auxerre doit être diminuée de 0,30 lorsque le débit de l'Yonne accusé aux Dumonts (station aval de jaugeage des débits) est inférieur à 40m3 à la seconde la veille et l'avant-veille.

Le signe représente les hauteurs d'eau maintenues sans modification.

Le signe Le signe

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représente les hauteurs d'eau à modifier suivant la correction indiquée ci-dessus. représente les hauteurs d'eau modifiées suivant la correction indiquée ci-dessus.

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