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sera, dans la paix, le centre d'un grand commerce; dans la guerre, un centre militaire imposant, un entrepôt pour l'ap provisiounement de notre marine. La Vendée applaudit à la naissance de sa nouvelle capitale; la ville de Napoléon a vu poser les bases de tous les grands établissemens qui conviennent à sa destinée, et qui peuvent vivifier le département dont elle est le centre; sortant d'une forêt jadis déserte, elle appetlera par les routes qui viennent se croiser dans ses murs, le mouvement du commerce; elle verra son heureuse sitnation recherchée par une population fidèle, et dévouée au prince qui lui a rendu son culte, la tranquillité et l'abondance. L'empereur a permis que son nom fût imprimé à ces deux magnifiques ouvrages, comme sur deux médailles impérissables; elles rappelleront de grands malheurs complètement réparés.

Je n'ai fait, Messieurs, que retracer à chacun de vous ce qu'il a vu dans les départemens qu'il vient de quitter. Vos regards, à votre retour dans la capitale, ont été frappés de la trouver plus embellie dans le cours d'une année de guerre, qu'elle ne le fut jadis en un demi-siècle de paix ; de nouveaux quais se prolongent sur les rives de la Seine, deux ponts avaient été exécutés les années précédentes; le troisième, le plus im portant de tous par son étendue, sa construction et l'utilité de la communication qu'il établit, est sur le point de s'achever; il sert déjà au passage des hommes à pied et des chevaux. Dans son voisinage est tracé un nouveau quartier destiné à en compléter la décoration. Les rues de ce quartier portent les noms des guerriers qui ont trouvé une mort honorable dans le cours de la campagne; digne récompense décernée par l'em pereur à leurs mâues, à leurs familles, à l'armée ! Le pont lui-même prend le nom d'Austerlitz. Ainsi, la Seine, en entrant à Paris, rencontrera d'abord un monument de la gloire de nos guerriers, comme en sortant elle embellit la magnifique retraite destinée à leurs vieux jours, et les bosquets où ils viennent s'entretenir de leurs faits d'armes et de celui dont le génie prépara la gloire. On projette de débarrasser le cours de cette riviére des entraves de tout genre qui en flétrissent l'aspect, et en rendent, dans son passage à Paris, la navigation presqu'impraticable.

En s'éloignant de ses bords, un arc de triomphe, placé à l'entrée des boulevards, deviendra un nouveau monument de ces événemens, dont le souvenir doit être plas durable que Qu'au tout ce que nous pourrons faire pour le perpétuer. moins ces ouvrages attestent à la postérité que nous avons été aussi justes qu'elle le sera, et que notre réconnaissance a égalé notre admiration.

De l'autre côté de cet arc de triomphe, le boulevard sera prolongé jusqu'à la Seine, servant de quai à une vaste gare alimentée par les eaux de l'Ourcq, dernier service qui rendra Sess

cette rivière, destinée à la fois à donner à Paris une abondante provision d'eau excellente, à l'embellir par son cours et par ses fontaines, à entretenir dans ses rues une propreté inconnue, et à l'approvisionner par un canal, qui, remontant jusqu'à l'Oise. apportera dans tous les tems les denrées que la Marneet l'O.se ne transportent que pendant quelques mois de l'année.

Les Capucines, la Magdeleine vont changer de face; le Louvre s'achève avec rapidité, et les travaux de François lef. et de Louis XIV. touchent à leur fin; ces rois n'avaient fait que la moitié de ce bel ouvrage. Le Panthéon, prêt à être terminé, rendu à une destination religieuse, s'ouvrant pour recevoir les mausolées que le malheur des tems déplaça acquiert aussi un grand et nouveau caractère, et deviendra envers les premiers magistrats de l'empire, envers ceux qui auront renda des services éclatans à l'état, le témoin de la reconnaissance du souverain et des hommages de la postérité. Saint-Denis, déjà réparé et mis à l'abri des intempéries des saisons, va retrouver ses tombeaux et s'ouvrir de nouveau aux plus augustes funérailles.

Depuis son retour, l'empereur a consacré tous ses jours, et je dirai presque toutes ses nuits, à revoir dans le plus grand détail, toutes les branches de l'administration. H n'y en a aucune qui n'ait été l'objet de plusieurs conseils extraordi→ naires, ont été appelés tous ceux qui la dirigeut.. Ha imprimé à toutes un mouvement plus rapide, en les ramenant de plus en plus vers le but qu'elles doivent atteindre. Ce qu'elles ont été, ce qu'elles sont, ce qu'elles peuvent devenir, a été examiné, conçu, exécuté. Vous serez, Messieurs, appelés à sanctionner le résultat de ces profondes délibérations. Les infatigables soins donnés à ces travaux de cabinet ne sont peut-être pas moins étonnans que ces prodigieux travaux de la guerre auxquels ils succèdent, et avec lesquels ils forment un si admirable contraste.

La comptabilité de la ville de Paris a été éclairée par un examen auquel l'empereur a voulu présider lui-même, et qui promet à la capitale de nouvelles ressources, de précieuses économies, et avec elles les moyens de multiplier les entreprises utiles à sa prospérité et à sa splendeur.

Les hospices de cette capitale ont continué d'être régis par une administration qui économise les fouds en multipliant les secours, et qui, en faisant le bien du moment, le prépare pour l'avenir par des réparations solides et d'utiles constructions; ils ont acquis une nouvelle ressource par le bénéfice résultant du privilége exclusif donné au Mont-de-Piété, dont tous les produits leur sont accordés. Le pauvre est garanti d'une usure dévorante, et la modique rétribution qui lui est demandée, est toute entière consacrée au-soulagement de ses maux ou de son indigence.

Des boîtes de médicamens envoyés dans toute la France pour Busage des pauvres, sont encore une institution de cette année qui, comme tout ce qui est utile, sera continuée les années suivantes.

La comptabilité de tous les hospices de l'empire a été regu Jarisée et soumise à une forme plus lumineuse et plus simple. Pendant qu'une sage économie préside à l'emploi de leurs re venus, la masse en a été de nouveau accrue par l'émulation de la bienfaisance privée. Les legs et donations qui s'étaient élevés pendant les quatre années du gouvernement consulaire, à 8 millions 300 mille francs, ont atteint 4 millions, 500 mille francs pendant le courant de l'an 18 et les 100 premiers jours de l'au 14, sans compter un grand nombre de valeurs qui ne sont point encore suffisamment appréciées; progression frappanté qui atteste, avec le développement de la confiance publique, celui des nobles sentimens de l'humanité. La mendicité a été affaiblie ou éteinte dans quelques départemens; les dépôts placés dans quelques villes centrales offriront des remèdes plas efficaces encore pour la détruire.

le

L'état des prisons s'améliore, encombrées un instant par les prisonniers de guerre, dont le nombre excédait les ressources, dont l'arrivée était presqu'inattendue, dont la situation était déplorable, elles ont vu naître sur quelques points, des maladies qui en étaient la suite presqu'inévitable; mais de prompts secours ont été apportés, des médecins ont été envoyés par gouvernement, des mesures ont été prises, la bienfaisance individuelle les avaient secondées; quelques êtres généreux victimes de leur zèle, ou succombant sous le poids de l'âge, qui rend toutes les maladies plus dangereuses, ont laissé d'honerables regrets, en donnant de sublimes exemples; mais la population de nos cités a été exempte de la contagion qui, dans Le ce moment, est à-peu-près dissipée, même à sa source. fléau qui a désolé l'Espagne pendant deux ans, a excité toute Pattention du gouvernement, quoiqu'il reste aux yeux des hommes éclaires beaucoup de doutes sur le caractère conta gieux dont on le suppose accompagné. Avant le retour de l'époque à laquelle il a continué de se réveiller, une commiss sion médicale était sur les lieux, pour examiner sa naissance, la manière dont il se propage, rechercher, soit les remèdes qui de combattent, soit les précautions qui peuvent le prévenit. Des dispositions seront faites, si nos voisins devaient encore en être affligés, pour le tenir, dans tous les cas, éloigné des frontières de cet empire.

Le calendrier a changé. L'inutile régularité de celui que la révolution avait vu naître et dont le but n'avait pas été atteint, a été sacrifiée aux besoins des relations commerciales et politiques, qui appellent un langage commun; trop de variétés encore séparent les peuples de cette belle Europe, qui ne des vraient faire qu'une grande famille,

Une autre institution de la révolution, dont l'utilité est évidemment sentie par ceux mêmes qui ont plus de peine à l'adopter, celle des poids et mesures, cette production de la science, dont elle annonce l'empire sur un peuple éclairé, cette institution, dis-je, sera maintenue avec constance, et le gouvernement s'occupera de plus eu plus, de généraliser l'usage des nouvelles mesures; il opposera aux habitudes et aux préjugés cette invariable fermeté d'une volonté sage et éclairée, et non ces efforts violents, mais de courte durée de l'esprit d'innovation. Aidé du tems, il triomphera de tous les obstacles, il ne cessera d'agir que lorsqu'il aura vaincu.

Pendant que le gouvernement prévenait ou réparait les maux, en conservant les institutions utiles, relevait ou multipliait les monumens publics, destinés à attester la prospérité de l'état, il ne négligeait pas de féconder les sources premières qui l'alimentent.

L'agriculture, la plus importante de toutes, a reçu de pré cieux encouragemens. Les dessèchemens des marais de Rochefort, du Cotentin, les travaux des polders de la Belgique ont été ou commencés ou continués avec un redoublement d'efforts; des dispositions ont été faites qui préparent les dessèchemens des marais de Bourgoing et de Dol.

Les plantations se multiplient, elles sont commencées dans les dunes du Pas-de-Calais; on exécute la loi que vous avez Teudue l'année dernière sur la plantation des routes; des pépinières sont placées dans les départemens; une instruction déjà préparée réglera la police, et assurera la conservation des unes et des autres. Trois nouvelles bergeries nationales de brebis espagnoles out été formées cette année au midi, à l'est et à l'ouest de l'empire, et féconderont la propagation d'une race précieuse et l'amélioration croissante de nos laines. Le vaste établissement de la Mandria au pied des Alpes a été consolidé par la munificence du gouvernement, les écoles vé térinaires ont été améliorées; le code rural touche à son

terme.

La réinstallation des haras de l'empire datera de l'année qui vient de s'écouler, et avec elle la régéneration des chevaux pour le service de l'agriculture, des transports et de nos armées. Le besoin d'une amélioration aussi essentielle et devenue si urgente, ne pouvait échapper à la vigilance de l'empereur; mais presque tous les établissemens étaient languissans ou détraits; les ressources dissipées par une imprévoyance de dix années. Des hommes de l'art ont parcouru ia surface de la France, l'Espagne, et le nord l'Europe; ils ont recueilli encore un nombré considérable d'étalons choisis dans les races étrangères, ou restes de nos plus belles races. Les haras et dépôts existans retrouveront par la rétrocession de leurs biens les ressources qui leur sont nécessaires; cinq nouveaux dépôts sont formés. 50,000 fr. ont été distribués en primes, et ces primes, ont déjà constaté quelques progrès; elles en pro-

mettent d'autres; des réglemens se rédigent pour garantir un sage emploi, une reproduction avantageuse.

L'industrie Française a été affranchie du plus fort des tributs qu'elle payait à l'industrie étrangère; le bénéfice de la consommation intérieure est réservé à nos filatures, à nos métiers, sans que l'appui donné à la fabrication des tissus de coton, puisse nuire à celle des draps et soieries. Une école des arts et métiers a été promise à Saint-Maximim, celle de Beaupréau se prépare; le conservatoire des arts et métiers, confié à des hommes qui l'ont eux-mêmes enrichi de leurs découvertes, offre à l'industrie un musée classé avec l'ordre, rempli des productions de tous les arts, et traçant l'histoire de leurs progrès. Une exposition des produits de l'industrie, liée aux solennités qui accompagneront le retour triomphant des ormées, mettra sous les yeux de la capitale le dénombrement de tous les ateliers de l'empire, déterminera une consommation abondante de leurs ouvrages, et donnera une impulsion toute nouvelle à leurs efforts. Nos manufacturiers, certains de la protection du souverain, se rappelant que leur ruine fut le véritable but de la guerre, continueront de tromper cette cruelle espérance de l'ennemi, et se prépareront à obtenir, au retour de la paix, le triomphe que doit un jour remporter notre industrie.

Les belles-lettres et les beaux arts se disposent à prendre l'essor qui convient à un siècle témoin de si grands ennemis. Leur règne aapproche; il est dans la nature des choses que les grandes actions précèdent les tableaux destinés à les reretracer, et les plus beaux ouvrages des arts d'imitation. Celui qui fait est suivi de celui qui peint et qui raconte. Ce sont les faits marveilleux qui ont partout donné naissance aux plus brilliantes conceptions de l'imagination des hommes.... Et ne sommes-nous pas dans le siècle des merveilles?

Le feu sacré est entretenu par nos corps littéraires, dignes de leur réputation et de la réputation de ceux qui les composent; ils conservent la tradition du goût en épurant le langage, le rendant à sa dignité première, ils préparent le succès du génie. Le dictionnaire de l'académie française refait sur un plan plus vaste et mieux ordonné, deviendra un monument du siècle de Napoléon. Le gouvernement protége cette grande entreprise, et ce code litteraire sera, comme le code civil, un des bienfaits pour la France et pour l'Europe, dont la langue française devient de plus en plus le language. Nos corps scientifiques s'occupent plus que jamais de rendre utile la science qu'ils ont su rendre familière. La révolu tion, loin de suspendre leurs travaux, les a fait servir au bien de l'état, et l'état a payé par de justes honneurs les services qui lui ont été rendus, et les talens dont il a recueilli les fruits.

L'école polytechnique, fille de la science, et créée pour la

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