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du côté de l'évangile, lès grands officiers civils derrière S: M: le grand-maitre et les maîtres des cérémonies à droite et à gauche de l'autel, les officiers civils dans le chœur.

Après les prières et les interrogations usitées, les grands officiers d'Italie ont été déposer sur l'autel les ornemens royaux que leur avait remis successivement S. M. Le cardinal les à bénis. L'empereur est venu ensuite au pied de l'autel rece voir, des mains de l'archevêque, l'anneau, le manteau, l'épée qu'il a remise à S. A. S. le prince Eugène, le sceptre et la main de justice, enfin il est monté et a pris sur l'autel la cou ronne de fer: en la posant avec fierté sur sa tête, il a prononcé à haute voix ces paroles remarquables, Dieu me la donne, garė à qui la touche. Ayant ensuite posé sur l'autel cette couronne, il a pris celle d'Italie et l'a placée sur sa tête au bruit des ap plaudissemens unanimes de la foule de spectateurs qui remé plissait cette vaste enceinte. Après cette cérémonie l'empereur, précédé par le même cortége qui l'avait conduit au chœur, a de nouveau traversé l'église, recevant à chaque pas, par de nombreuses et vives acclamations, des preuves évidentes de l'amour et du respect qu'il inspirait.

S. M. est allée s'asseoir au fond de la nef sur un trône élevé et magnifique. Les honneurs d'Italie se sont placés derrière le trône; à la droite de l'empereur S. A. S. le prince Eugène était assis sur une chaise; plus bas et à droite les honneur de Charlemagne, et à la gauche du trône les honneurs de l'empire; au dessous d'eux à droite et à gauche, les ministres, les grands officiers militaires, les membres de la consulte et les conseillers d'état sur des gradius. Devant le trône et trois degrés plus bas, le grand chambellan, le grand écuyer de France, le grand maître des cérémonies et le grand écuyer d'Italie sur des tabourets; les aides-de-camp bordoient la haie de tout sur les dégrés du trône; les pages etaient assis sur les marches; au bas de l'escalier, les sept dames portant les offrandes etaient assises sur des chaises; à droite et à gauche en avant d'elles, les maîtres, les aides des cérémonies, et plus loin les hérauts d'armes et les huissiers; les deux côtés de la nef étaient garnis de banquettes occupées par les trois colléges électoraux, le corps-législatif, les tribunaux de cassation et de révision, la comptabilité nationale, les généraux, les colonels, les inspecteurs, les commissaires, les préfets, les tribunaux d'appel, les présidens de départemens, les conseils municipaux, l'institut et les députations de l'université. Les députations militaires occupaient la croisée du chœur et de la nef; au-dessus de ces bancs, étaient élevées des galleries et des tribunes occupées par les personnes les plus distinguées da royaume; dans la première de ces tribunes à droite du trône, dans la tribune impériale, étaient le doge, deux membres de la légation ligurienne et quarante dames richement parées; vis-à-vis était la tribune du corps diplomatique; à côté d'elle,

celle des généraux français; plus loin celle des étrangers; l'impératrice et la princesse Elisa occupaient une autre tribune dans le chœur.

Les voutes, les murs, les colonnes de la cathédrale étaient couverts d'étoffes de soie, de crêpe et ornés de frange d'or. Rien n'égalait la noblesse et la magnificence de ce superbe tableau qui commandait l'admiration et le respect.

Le grand-aumônier est venu porter l'évangile au roi après le credo. S. M. a traversé de nouveau l'église précédée par les dames qui portaient les offrandes qu'accompagnaient les aides de camp de l'empereur; elle a présenté les offrandes à l'autel et est venue se replacer sur le grand trône. Après la messe, le grand aumônier est venu apporter l'évangile; le grand chancelier du royaume, averti par le grand-maître, a dit au président de la consulte d'apporter le serment, et a appelé près du trône les trois présidens des colléges électoraux, celui du corps législatif et celui du conseil : S. M. a lu à haute voix le serment, alors le chef des héraults a dit; Napoléon, empereur des Français et roi d'Italie, est couronné et intronisé. Vive l'empereur et roi! Ces derniers mots ont été répétés par tous les assistans et accompagnés par les acclamations les plus vives et les plus prolongées.

On a entonné le Te Deum, pendant lequel le secrétaire d'état a dressé le procès-verbal de la prestation du serment; le clergé s'est rendu avec le dais au pied du trône, et S. M. est revenue dans son palais avec le même cortége, et au bruit des acclamations d'un peuple immense qui se pressait sur son passage. La sainteté du lieu, la beauté des décorations, l'ordre de la marche, la pompe des cérémonies, la régularité des évolutions, la symétrie noble des groupes, la richesse des costumes, la marche gracieuse et élégante des dames qui portaient les offrandes, la magnificence du trône, la majesté de l'empereur, et plus encore le souvenir de tant d'exploits et tant de gloire, rendaient cette solemnité si auguste et faisaient une si vive et si profonde impression, qu'il est plus facile de la concevoir que de la peindre.

Le même jour à quatre heures leurs majestés se sont rendues en grand cortége en voiture à l'église de Saint-Ambroise pour y entendre un Te Deum, et pour rendre grâce à l'Eternel dans l'un des plus saints et des plus antiques édifices qui Jui aient été consacrés: toutes les rues étaient ornées de riches tentures et remplies par un peuple innombrable qui faisait retentir les airs de ses vœux pour la durée et la prospérité du règne de l'heureux guerrier qui nous a rendu la gloire, et qui nous promet le bonheur.

Voici le discours prononcé par M. le prévôt de la Basilique de Saint-Ambroise, à S. M. impériale et royale lorsqu'elle est descendue de voiture.

Paris, le 14 Prairial.

Le roi de Suède, instruit que S. M. le roi de Prusse avait envoyé l'ordre de l'Aigle-Noir à l'empereur des Français, s'est empressé de renvoyer les marques de cet ordre, que le père du roi de Prusse actuel lui avait accordées lorsqu'il était encore enfant, et afin de donner une preuve d'amitié à son père. Le roi de Suède, en renvoyant cet ordre au roi de Prusse, lui a déclaré qu'y ayant sur tous les points une telle distance de lui à l'empereur Napoléon, il était impossible qu'ils se trouvassent dans le même ordre.

Le roi de Prusse, d'abord indigné d'un pareil procédé, a dit en riant: "J'en suis fâché pour mon cousin le roi de Suède: il ne sait pas qu'aux yeux de l'Europe et de la postérité, c'est la plus piquante épigramme qu'il puisse faire contre luimême." Il a cru cependant devoir rappeler sa légation jusqu'à ce que l'interdiction du roi de Suède ait lieu; elle ne tardera pas à être amenée par les progrès de sa maladie,

10 Juin, 1805. RÉPUBLIQUE Ligurienne.

Gênes, le 2 Juin (13 Prairial.)

Les préparatifs pour l'arrivée de l'empereur et roi ont exalté toutes les têtes. Depuis long-tems, le misérable état de la république était l'objet des discours de tous les citoyens. Que faire, disaient-ils, d'une indépendence, qui ne peut protéger notre navigation, qui laisse notre pavillon sans force, exposé tous les jours aux outrages des Barbaresques, qui contraignent nos navires à ne faire autre chose que cotoyer pénis blement nos rivages? précaution encore inutile, puisqu'un grand nombre de nos matelots n'en sont pas moins esclaves dans les prisons d'Alger et de Tunis.

D'un autre côté, les Anglais nous font un guerre opiniâtre. Au commencement de la guerre, ils avaient massacré dans no tre propre port les équipages de deux frégates françaises auxquelles nous ne pûmes porter secours, et nous fùmes exposés ainsi à éprouver la haine d'une nation puissante. A la paix d'Amiens, ils ont refusé de reconnaître notre république, et nous sommes démeurés dans un état d'hostilités constant. Sans l'intervention de la France, nous serions le plus malheureux des peuples. Dans notre intérieur, son influence a contenu tous les partis; et que somines-nous sous les rapports géographiques? une côte de France, une lisière maritime dont le Continent est encore la France depuis la réunion du Piémont. Puisqu'il n'y a plus d'indépendance des mers, que l'Europe est forcée de supporter la tyrannie britannique, que quand même l'Angleterre nous reconnaîtrait, un décret d'un

amiral anglais qui viendrait à déclarer en état de blocus les côtes de France, suffirait pour ruiner notre commerce; notre intérêt, notre gloire veulent que nous fassions partie du grand peuple.

A peine le sénat eut-il émis le vœu de la réunion; à peine la nouvelle en fut-elle parvenue dans les communes, qu'on se porta en foule pour adhérer à son décret. Aussi notre députation est-elle partie avec quatre-vingt mille signatures, avec celles de l'universalité des citoyens qui sont inscrits sur nos registres civiques. 11 ne faut en excepter que 36 votes négatifs qui ne sont encore que ceux de quelques hommes singuliers constamment soigneux de se faire remarqner en émettaut des opinions contraires à l'opinion publique. Les prêtres, les nobles, les commerçaus, les agriculteurs, les citoyens de tous les états enfin ont été unanimes. Nous sommes la marine du Piémout, disait-on partout, soyons réunis au Piémont; nous sommes la marine du Piémont et une continuation de la côte de France: soyons réunis au grand peuple.

Nous ne doutons pas que l'empereur Napoléon n'accède à nos vœux; il a, dans tous les tems, témoigné à notre nation une affection particulière, et nous lui offrons avec notre dévouement sur lequel il peut compter, un beau port où il a déjà fait construire des vaisseaux de ligne et des frégates, et en même tems vingt mille matelots.

L'Angleterre seule pourra se plaindre; mais elle ne nous a point reconnus; et elle nous fait la guerre. Les autres états seront au moins indifférens au changement qui arrive dans notre existence; car nous n'augmenterons en rien la puissance militaire de la France.

- Décret du sénat de la république Ligurienne, du 25 Mai,

1805.

Art. 1. La réunion de la république Ligurienne à l'empire françois sera demandée à sa majesté l'empereur, sous les conditions suivantes.

1. Que toute la Ligurie, sans exception fera partie intégrante de l'empire françois.

2°. Que la dette publique de la Ligurie sera liquidée sur les mêmes bases que celle de la nation françoise.

3°. Que Gènes conservera son port franc avec tous les priviléges qui y sont annexés.

4°. Que dans la répartition de la contribution foncière, on aura égard à la stérilité du territoire ligurien et la nature de sa culture.

5°. Qu'il n'existera ni douanes, ni barrières entre la France ét la Ligurie.

6°. Que la conscription sera restreinte aux seuls gens de

mer.·

7°. Que les droits tant sur les importations que sur les ex

portations, seront réglés de la manière la plus favorable au commerce des productions, et des manufactures de la Ligurie. 8°. Que les procès tant civils que criminels se jugeront en dernier ressort à Gènes ou dans un des départemens de l'empire le plus voisin,

9°. Que les acquéreurs de biens nationaux seront garantis dans la possession de ceux qu'ils ont acquis.

10. Le présent décret sera soumis à la sanction du peuple, (Signé)

Paris, 12 Juin, 1805.

LAZOTTI.

Rapport à S. M. l'empereur et roi, par S. E, le ministre du trésor public

Sire,

Le paiement des créances américaines sur le fouds de 20 millions est en pleine activité. Parmi les créanciers américains qu'on paye, il y en a plusieurs qui reçoivent par l'intermédiaire de fondés de procurations.

Il m'est revenu de toutes parts, que quelques-uns de ces agens se plaignaient d'avoir été obligés de faire des sacrifices pour parvenir à être payés. Il est beacoup plus probable qu'ils se préparent ainsi des moyens de faire, sous un faux prétexte, supporter ces déductions par leurs commettans. C'est pour déconcerter ces manoeuvres que j'ai écrit la lettre ci-jointe à M. Armstrong, ministre des Etats-Unis. On a prétendu de puis, que quelques créanciers avaient été forcés, pour obtenir leur liquidation, de donuer des billets à ordre, en blanc, paya bles en même tems que le trésor ferait ses paiemens. Bien persuadé d'avance que rien de semblable n'a eu bien à la liquidation générale, je n'en ai pas moins jugé nécessaire de faire cesser ces bruits calomnieux. J'ai donc pris le parti de voir tous les créanciers tête-à-tête au moment du paiement; je leur ai dit, que je prenais des mesures pour qu'il ne leur fut alloué aucune déduction par leurs commettans d'Amérique, que s'ils avaient fait de semblables billets, le paiement demeurerait à leur charge, et qu'au surplus je leur donnerais les moyens de forcer à restitution ceux qui les leur auraient extorqués.

Il me paraît que ces bruits ont moins de consistance depuis que j'ai pris ce parti, et s'ils cessent entièrement, j'aurai la certitude que ces rapports étaient des impostures de gens cupides, que voulaient tromper leurs commettans.

Je vous prie, sire, d'agréer l'hommage de mon profond respect pour votre Majesté.

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BARBÉ MARBOIS, D

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