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services éminens qué Votre Majesté lui a rendus, il a été aussi entraîné par un intérêt bien plus puissant, celui de sa conservation, de sa gloire, et de son bonheur.

Après une expérience funeste des diverses natures de gouvernement, il a voulu reprendre son'ancienne constitution, en Palliant à un systéme représentatif, sagement combiné, et tel que l'unité de pensée et d'action, ne pût jamais en être altérée dans son essence.

"Sire, nous nous féliciterons sans cesse d'avoir provoqué les premiers un vou, qui dès l'an 8, était dans nos coeurs, et qui s'est manifesté dans tous les départemens avec un enthousiasme dont les annales d'aucun peuple n'offrent point d'exemple.

"Puisse la dynastie nouvelle régner aussi long-tems que les trois qui l'ont précédée, et avec autant de gloire et de sagesse que votre Majesté l'a fait depuis que les rênes de l'état lui ont été confiées!

"Puissent les jours de Votre Majesté se prolonger au-delà des termes de la vie humaine; ce dernier vœu est commandé au tribunat par son attachement à votre personne sa→ crée, à son auguste famille, et à l'intérêt du peuple Français, dont le bonheur a été l'unique objet de vos nobles travaux, ets de votre constante sollicitude!

Le 9 Frimaire, une députation de vingt-cinq membres du sénat a été présentée à sa sainteté.

S. E. M. Français (de Neufchâteau) président, a adressé au Saint-Père le discours suivant:

Très-Saint Père,

Le tribunat vous regarde depuis long-tems comme l'un des alliés les plus fidèles de la France: il se rappelle avec les sentiments de la plus vive reconnaissance, les services que vous avez rendus à ce pays, avant même d'être élevé sur le trône pontifical; il n'oubliera jamais que dans votre dernier épiscopat d'Imola, vous sutes appaiser par une conduité éclairée et paternelle, les insurrections organisées contre l'armée Française, et prévenir celles qui la menaçaient.

sage,

"Mais ce n'est point sous ce seul rapport que Votre Sainteté a acquis des droits à la vénération et à l'amour des Français.

"Ils étaient agités par des troubles religieux, le concordat les a éteints: nous nous félicitons d'avoir concouru de tous nos moyens à seconder à cet égard votre sollicitude paternelle, et celle du chef suprême de cet empire.

"Si nous examinons la conduite de Votre Sainteté dans le gouvernement intérieur de ses états, quels nouveaux sujets d'éloges et d'admiration!

Votre Sainteté a réduit les dépenses de tous les palais

apostoliques; sa table, son entretien, ses dépenses personelles, ont été réglés comme ceux du plus simple particulier : elle a pensé avec raison que sa véritable grandeur consiste, moins dans le faste et la pompe de sa cour, que dans l'éclat de ses vertus et dans une administration économique et sage.

"L'agriculture, le commerce et les beaux arts, reprennent dans l'état romain leur ancienne splendeur.

"Les contributions qu'on y prélevait, étaient arbitraires, multipliées, mal réparties; votre Sainteté les a remplacées par un systême uniforme et modéré de contributions foncières et personelles, toujours suffisant dans un pays, auquel sa situation n'impose point la nécessité d'un grand état militaire, et où une sévère économie règne dans les dépenses.

"Les priviléges et les exemptions ont été abolis, depuis le prince jusqu'au dernier sujet, chacun paie en proportion de

son revenu.

"Le cadastre des provinces ecclésiastiques, commencé en 1775 et celui de l'Agro Ròmano, entrepris par Pie VI, votre auguste prédécesseur, sont terminés, et ont reçu la perfection dont ils étaient susceptibles.

"Un bureau des hypothèques a été organisé et la bourse des capitalistes est ouverte aux propriétaires mal aisés.

"Des primes ont été accordées à ceux qui formeront des établissemens d'agriculture et des plantations; la campagne de Rome, depuis long-tems inculte et stérile, sera bientôt couverte de bois, comme dans le tems de la splendeur romaine, une loi oblige les grands propriétaires à mettre leurs terres en culture ou à abandonner, pour une modique redevance, celles qu'ils ne pourront faire travailler; enfin le desséchement des Marais Pontins, en rendant à l'agriculture de vastes terreins, contribuera à la salubrité de l'air et à l'accroissement de la population de cette partie de l'état romain.

"Le commerce a besoin pour prospérer d'être dégagé de toutes les entraves, de la fiscalité et de ce systême destructeur de gênes et de prohibitions; il veut être libre comme l'air; Votre Sainteté a proclamé hautement la liberté du commerce. Les mounaies de faux et de bas aloy, sources de discrédit et d'immoralité, ont été remplacées par une monnaie réelle.

"Des manufactures de laine, des filatures de coton sont établies à Rome et à Civita-Vecchia pour les indigens des hospices caméraux.

"En poussant jusqu'à l'excès sa charité envers les pauvres, en ne réservant rien pour elle ni pour sa famille, Votre Sainteté veille cependant avec un soin particulier à ce que ces libé ralités ayent un emploi toujours utile.

"La ville de Rome, malgré ses pertes, continuera à être la patrie des beaux arts.

"Votre Sainteté a ordonné des fouilles à Ostie et sur le lac Trajan.

"Tous les chefs-d'œuvres dispersés et rachetables, sont rachetés par elle.

"L'arc de Septime-Sevère est décombré, et la voie Capitoline retrouvée.

"Tels sont les bienfaits qui ont distingué le règne paternel de votre Sainteté, jusqu'à ce jour mémorable où elle vient au milieu de nous (à l'invitation du héros que la Providence et nos Constitutions ont placé au rang suprême) tixer les bénédictions du ciel sur un trône devenu la plus ferme garantie de la paix de l'état, et consacrer les destinées qui doivent assurer à la France l'éclat de sa gloire; à nos armées, la victoire; à tous les Français, la paix et le bonheur.

"Quelle circonstance majestueuse! dix siècles à peine ont suffi pour la reproduire, et vos vertus personnelles, Très-Saint Père, méritaient bien cette récompense d'avoir été choisi par la Divinité pour consommer l'œuvre la plus utile à l'humanité et à la religion."

Le même jour, les membres du conseil d'état ont éte présentés, au Saint Père; M. Regnaud (de Saint Jean d'Angely) président de la section de l'intérieur, a porté la parole en

leur nom.

Paris, 3 Décembre, 1804.

Nous ne pouvons donner aujourd'hui à nos lecteurs, sur l'auguste cérémonie du sacre et du couronnement, les détails qu'ils attendent de nous, et que nous nous proposons de leur offrir. La grandeur de ces solemnités l'ordre, l'éclat et la pompe avec lesquels elles ont été célébrées, ont imprimé dans tous les cœurs une émotion profonde qui ne laisse pas à l'esprit la liberté nécessaire pour peindre, en si peu de momens, un si magnifique spectacle.

Il faudrait montrer en même tems l'astre du jour échappant, contre toute espérance, à l'empire d'une saison ténébreuse, pour éclairer une si belle journée, et ces mille et mille feux portant la clarté dans le sein d'une nuit joyeuse et plaisible; donner une juste idée du cortège le plus noble et le plus imposant, de cette cérémonie religieuse, de cet acte civil, qui ont à la fois réuni tout ce que les choses divines et humaines peuvent présenter de plus sublime et de plus célèbre; de ce concours immense de peuple accouru de toutes les parties de l'empire, et des contrées européennes les plus éloignées, pour admirer dans l'enceinte de la même cité les vertus apostoliques les plus vénérables, et le génie le plus étonnant couronné par les plus hautes destinées ; il faudrait enfin rendre sensible pour tous ceux des Français qui n'ont pas eu le bonheur d'en être les témoins, cet enthousiasme pieux et civique, cet amour, cette reconnaissance de tout un peuple dont les transports ont fait retentir, dans un même jour, la voûte du temple et toutes les

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parties de la capitale. Nous nous occupons du travail néces saire pour satisfaire, autant qu'il nous sera possible, la juste impatience de nos lecteurs.

Paris, 4 Décembre, 1804.

La seconde journée des fêtes du couronnement ne pouvait avoir le caractère de celle à jamais mémorable qui l'avait précédée; mais elle a eu celui qui lui était propre; celui d'une réjouissance publique.

Le mouvement d'un peuple qui courait de plaisirs en plaisirs, avait succédé à la pompe des solemnités, l'habit de ville à l'é, clat des costumes, les jeux populaires aux cérémonies, et à la place des brillans cortèges de la veille, on avait le spectacle d'une immense population répandue sur les quais, les places publiques, les promenades et les boulevards de la ville, où toutes sortes de divertissemens avaient été disposés.

Le tems le plus serein, le ciel le plus pur, et le plus beau soleil éclairaient cette rénniou qui s'étendait sur les principaux points de cette grande cité, depuis le palais impérial jusqu'à l'extrémité du boulevard Saint Autoine; l'affluence était partout, il n'y avait de foule nulle part. La multitude était ats tirée dans le même moment sur des points divers, et l'immense étendue des boulevards n'offrait, quelque fût le nombre des spectateurs, d'autre coup-d'œil que celui d'une longue promenade animée, riante et variée.

Dans la matinée, des héraults d'armes avaient parcouru les places principales de la ville, et avaient distribué sur leur passage, une quantité énorme de médailles de diverses grandeurs, destinées à commémorer l'époque du couronnement. Voici qu'elle est la composition de ces médailles. D'un côté on voit la figure de l'empereur portant la couronne des Césars, avec cette légende: Napoléon, empereur; sur le revers, on lit: le -senat et le peuple; ces mots expliquent le sens du dessin allégorique grave sur ce revers où l'on voit une figure revêtue des ornemens de la magistrature, et celle d'un guerrier élevant sur un bouclier un hé os revêtu des attributs impériaux. L'em press ment à rechercher ces médailles était extrême.

Sur la place de la Concorde s'élevaient quatre salles formant des quariés longs d'architecture antique, destinées à la danse et aux w. ises; de cette place jusqu'à l'extrémité du boulevard, réguait un long et brillant cordon d'illumination en guirlandes, en feux de conleurs; les portes Saint-Denis et Saint Martin, derrière lesquelles des illuminations brillantes terminaient le point de vue, offraient un très-beau coup-d'œil: lą place de la Concorde, l'hôtel de la marine et les bâtimens parallèles, les palais du corps legislatif, et de la légion d'honneur étincelaient de feux.

Pendant toute la journée, des jeux de tonte espèce, distribués sur toute la longueur du boulevard avaient singulièrement amusé les spectateurs. Ici l'ou rencontrait un nombreux corps de musiciens exécutant des fanfares et des marches militaires; là, des groupes de chanteurs se faisaient entendre; ailleurs, des réunions grotesques attiraient autour d'elles une foule nombreuse; plus loin des mats de cocagne exerçaient de jeunes hommes souples et vigoureux; plus loin encore, des théâtres placés de distance en distance fixaient un moment les regards par des pantomimes et des lazzi bouffons. Ainsi l'attention et la joie étaient partout excitées à la fois. Le soir, le concours s'est insensiblement replié sur la place, aux Champs Elysées, aux Thuileries, sur tous les ponts et les quais, d'où on a vu aisément et sans confusion un beau feu d'artifice tiré sur le pont de la Concorde.

Aucun accident n'a troublé cette agréable journée, l'ordre et la plus parfaite tranquillité ont régné partout où le joyeux concours s'est porté, et partout il a montré cette gaieté franche et paisible, cette innocente liberté qui caractérise un peuple heureux.

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Paris, 6 Décembre, 1804.

Le troisième jour des fêtes du couronnement était consacré aux armes, à la valeur, à la fidélité. L'empereur a distribué à l'armée et aux gardes nationales de l'empire, les Aigles qu'elles doivent toujours trouver sur le chemin de L'honneur.

Cette imposante et auguste cérémonie a eu lieu au Champs de Mars; nul autre lieu n'étoit préférable; ce vaste champ, couvert de députations qui représentaient la France et l'armée, offrait le spectacle d'une valeureuse famille réunie sous les yeux de son chef.

La façade principale de l'école militaire était décorée d'une grande tribune, représentant plusieurs tentes à la hauteur des appartemens du premier étage du palais. Celle du milieu fixée sur quatre colonnes qui portaient des figures de victoires exécutées en relief et dorées, couvrait le trône de l'empereur et celui de l'impératrice. Les princes, les dignitaires, les ministres, les maréchaux de l'empire, les grands officiers de la couronne, les officiers civils, les princesses, les daine de la cour et le conseil d'état étaient placés à la droite

du trône.

Les galeries qui occupaient la façade principale de l'édifice, étaient décorées en huit parties de chaque côté; elles étaient divisées en huit parties de chaque côté; elles étaient décorées d'enseignes militaires, couronnées par des aigles. Elles représentaient les seize cohortes de la légion d'honneur.

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