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Du futur époux. Majeur ou mineur, la loi ne distingue pas, et lors même, s'il est mineur, que le conseil de famille aurait consenti au mariage; car ce droit de former opposition, que leur accorde ici notre article, est tout à fait indépendant du conseil de famille.

Main levée pure et simple. C'est-à-dire sans ordonner aucune instruction: si, par exemple, le tribunal, après avoir fait comparaître devant lui d'office le prévenu de démence, comme il en a le droit, s'aperçoit que l'opposition fondée sur cette cause n'est qu'un vain prétexte pour retarder et empêcher le mariage.

De provoquer l'interdiction. C'est, en effet, le meilleur moyen de prouver la démence et de prévenir d'autres actes funestes à l'intérêt de celui au mariage duquel on s'oppose. QUESTION. Le ministère public pourrait-il former opposition au mariage? Il semble qu'ayant droit de demander la nullité, il doit avoir celui de prévenir le mal qu'il est ensuite obligé de réprimer, d'après le principe, majus involvil minus, bien qu'aucune disposition législative ne lui attribue cette faculté. Cependant la cour de Paris a consacré la négative, par le motif que le Code a formellement désigné, art. 172 et suiv., les personnes auxquelles le droit d'opposition est accordé, et les cas où il peut s'exercer; qu'il ne résulte d'aucun de ces articles qu'il ait été réservé au ministère public. » (Arr. du 26 av. 1833.) Au reste, il n'est pas douteux qu'il peut, dans tous les cas, avertir l'officier de l'état civil, qui devrait refuser de célébrer le mariage, jusqu'à ce que les tribunaux eussent prononcé sur l'action que les futurs intenteraient contre lui pour qu'il y procédât.

175. Dans les deux cas prévus par le précédent article, le tuteur ou curateur ne pourra, pendant la durée de la tutelle ou curatelle, former opposition qu'autant qu'il y aura été autorisé par un conseil de famille, qu'il pourra convoquer.

Dans les deux cas prévus par le précédent article. Malgré ces expressions, des auteurs graves prétendent que l'article actuel ne se réfère pas aux deux cas prévus par l'article précédent, mais seulement au cas où le consentement du conseil de famille n'a pas été obtenu. Comment, en effet, notre article pourrait-il se référer au second cas, c'est-à-dire à celui où l'opposition est fondée sur l'état de démence du futur époux? De deux choses l'une ou le futur époux est mineur, ou il est majeur. S'il est mineur, le conseil de famille n'a pas besoin, pour empêcher le mariage, de se fonder sur la démence du pupille; il lui suffit d'opposer qu'il n'a pas obtenu le consentement de son conseil de famille; s'il est majeur, il n'a pas de conseil de famille, puisque la loi suppose qu'il n'est pas encore interdit: si donc il s'agissait d'un majeur interdit qui voulut contracter mariage, et que le conseil de famille gardât le silence, le tuteur pourrait s'y opposer sans consulter le conseil de famille, car l'article actuel ne s'appliquerait pas à ce cas, où il n'y a aucun consentement à demander au conseil de famille, puisqu'un interdit ne peut contracter mariage.

Ne pourra. Ce n'est pas du tuteur, mais du conseil de famille que le pupille doit requérir le consentement pour son mariage; le tuteur ne doit donc pouvoir y mettre obstacle que de l'autorisation du conseil de famille. Au reste, il faut bien saisir la différence qui existe entre cet article et le précédent : par l'art. 174, chacune des personnes qui s'y trouvent dénommées a le droit individuel, comme nous l'avons déjà observé, de former opposition au mariage, sans demander l'autorisation du conseil de famille à cet effet; ici c'est le conseil de famille, composé ou non des personnes désignées dans l'article précédent, qui veut former opposition.

Qu'il pourra convoquer. Rédaction inexacte, car il résulte de l'art. 406 que le tuteur pourra seulement de

mander au juge de paix de convoquer le conseil de famille c'est, en effet, au juge de paix que ce droit appartient exclusivement.

176. Tout acte d'opposition énoncera la qualité qui donne à l'opposant le droit de la former; il contiendra élection de domicile dans le lieu où le mariage devra être célébré; il devra également, à moins qu'il ne soit fait à la requête d'un ascendant, contenir les motifs de l'opposition: le tout à peine de nullité, et de l'interdiction de l'officier ministériel qui aurait signé l'acte contenant opposition.

= La qualité. Pour que les futurs époux connaissent à l'instant même si l'opposant ne s'attribue pas un droit que la loi lui refuse; par exemple, si c'était un neveu.

Election de domicile. Pour que le futur époux ne soit pas obligé d'aller chercher au loin l'opposant, ce qui retarderait encore le mariage; d'ailleurs c'est l'opposant qui réellement est demandeur, et le futur époux défendeur. C'est donc à son domicile que tous les actes doivent avoir lieu. (Art. 59, C. de pr. civ.)

Devra être célébré. Si les futurs époux demeurent au même lieu, il n'y aura pas de difficulté; mais si le domicile est différent, comme le mariage peut être célébré à l'un ou à l'autre domicile, il devient plus difficile de savoir où l'élection doit être faite : il paraît clair que c'est au domicile de celui des futurs époux dont on prétend empêcher le mariage; car c'est lui réellement qui est attaqué, et c'est lui qui a intérêt de discuter l'opposition.

D'un ascendant. La loi présume toujours que les ascendants ont de bonnes raisons pour former opposition: mais, de ce qu'ils ne sont pas obligés d'indiquer leurs motifs dans l'acte d'opposition, il ne suit pas qu'ils ne doivent pas les déduire devant le tribunal; ils ne peuvent, au contraire, s'en dispenser, puisqu'il faut que les tribunaux jugent l'opposition.

Les motifs. Pour que les parties puissent se préparer à les combattre.

A peine de nullité. Ainsi l'opposition est comme non avenue, et le mariage pourrait être célébré. Mais une nouvelle opposition pourrait-elle être formée? Aucune loi ne le défend.

De l'officier ministériel. C'est-à-dire l'huissier.

177. Le tribunal de première instance prononcera dans les dix jours sur la demande en main levée.

Dans les dix jours. Un délai plus long pourrait faire manquer le mariage. Mais il ne faut pas conclure de ces expressions que le tribunal doit toujours prononcer définitivement dans ce délai; cela peut souvent être impossible en raison de l'importance des questions qui se présentent ; mais il doit du moins statuer préparatoirement dans ce délai.

178. S'il y a appel, il y sera statué dans les dix jours de la citation

= = S'il y a appel. L'appel est suspensif, c'est-à-dire que la célébration du mariage sera suspendue jusqu'à l'arrêt de la cour royale.-Le pourvoi en cassation n'étant pas suspensif, le mariage pourrait toujours être célébré nonobstant le pourvoi.

Citation. C'est l'acte par lequel on est appelé à comparaître devant la justice.

179. Si l'opposition est rejetée, les opposants, autres néanmoins que les ascendants, pourront être condamnés à des dommages-intérêts.

= Autres néanmoins que les ascendants. On respeete toujours les motifs qui font agir les ascendants, n'eussent-ils même formé opposition qu'afin de retarder le mariage de quelques jours, et donner à leurs enfants le temps de réfléchir.

A des dommages-intérêts. Si, par exemple, une opposition mal fondée avait fait manquer un mariage, et que des dépenses considérables eussent déjà été faites par les futurs époux.

CHAPITRE IV.

Des Demandes en nullité de mariage.

= Il ne suffisait pas d'avoir posé des règles sur les conditions et les formes du mariage; il fallait les sanctionner, et c'est ce qu'a fait le législateur, quelquefois en infligeant seulement une peine à ceux qui les ont violées, d'autres fois en prononçant la nullité du mariage. On nomme empêchement au mariage, la défense de contracter mariage, faite par la loi, à ceux qui ne réunissent pas toutes les qualités, ou qui n'accomplissent pas toutes les conditions prescrites. Les empêchements sont prohibitifs, ou dirimants. Les empêchements prohibitifs (de prohibere, défendre), sont ceux qui forment obstacle à la célébration du mariage, mais qui ne sont pas une cause de nullité du mariage, lorsqu'il a été contracté au mépris de ces empêchements. Ils sont, en général, sanctionnés par des emprisonnements ou des amendes. On compte au nombre de ces empéchements ceux qui défendent: 10 à tout le monde de se marier sans publication (art. 192); 2o à la femme Veuve de se marier avant l'expiration des dix mois qui suivent la dissolution de son premier mariage. (Art. 228.) Les empêchements dirimants (de dirimere, détruire), sont ceux dont la violation entraîne la nullité du mariage. Tels sont les empêchements qui résultent de la parenté, du défaut de consentement libre des parties. Au reste, il est à remarquer que quelquefois un empêchement dirimant peut se résoudre en empêchement simplement prohibitif, et un empêchement prohibitif devenir dirimant par les circonstances qui l'accompagnent. Les empêchements dirimants se divisent encore en relatifs et absolus : les premiers sont ceux qui mettent obstacle au mariage de certaines personnes entre elles seulement par exemple, l'empêchement qui résulte de la parenté; les empêchements absolus sont ceux qui s'opposent au mariage d'une personne avec toute autre; par exemple, l'existence d'un premier mariage. -C'est des empêchements dirimants que découlent les nullités, et, par suite, les actions pour faire annuler les mariages. Elles se divisent aussi à leur tour en absolues et relatives. Absolues, lorsqu'elles résultent de l'infraction à une règle créée pour l'ordre public et l'intérêt commun de la société, comme la prohibition des mariages incestueux. Toute la société peut les invoquer par l'organe du ministère public. Relatives, lorsqu'elles proviennent de l'infraction à une règle établie pour un intérêt particulier par exemple, l'obligation de demander le consentement des père et mère. Elles ne sont relatives qu'à ceux dans l'intérêt desquels la règle violée était prescrite, et ne peuvent être invoquées que par eux. Ainsi, la nullité qui résulte du défaut de consentement du père ne peut être invoquée que par lui, ou par l'enfant qui en avait besoin. Toutes les fois que les formalités essentielles à la validité du mariage n'ont pas été observées, le mariage n'est pas nul de plein droit, si ce n'est celui du mort civilement : il y a un titre public dont il faut apprécier la valeur, et les tribunaux seuls peuvent prononcer si ce titre doit être annulé, ou si le vice qu'on lui reproche est réel ou couvert, soit par le silence, soit par la ratification des parties.

180. Le mariage qui a été contracté sans le

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Dans tous ces cas, la nullité est relative, car c'est uniquement dans l'intérêt de chaque époux que la loi exige un consentement libre et exempt d'erreur : seul il peut bien juger si son consentement a été ou non dicté par la violence ou l'erreur, et seul conséquemment il pourra réclamer.

Le consentement libre. C'est au tribunal à juger la violence: elle doit être « de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et à lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent. » (Art. 1112.) Ainsi, la seule crainte de déplaire ses parents et d'exciter leur colère ne vicierait pas le consentement. (Art. 1114.) « Au reste, on a égard, en cette matière, à l'âge, au sexe, et à la condition des personnes.» (Art. 1112.) La violence est encore une cause de nullité, lorsqu'elle a été exercée sur les descendants ou ascendants de la partie contractante. (Art. 1113.)

Que par les époux. Ainsi, en supposant que l'époux violenté ou induit en erreur vint à mourir lorsque la violence ou l'erreur dure encore, les héritiers ne pourraient faire déclarer le mariage nul, car la loi n'attribue ce droit qu'aux époux. La jurisprudence paraît constante sur ce point.

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Erreur dans la personne. Il s'agit ici de la personne physique, de l'individu, si, croyant s'unir à une femme, on en épouse une autre substituée à sa place : cette erreur ne peut arriver que bien rarement. Quant à l'erreur sur la personne civile, c'est-à-dire sur l'état qu'elle a dans la société, sur son nom, sur sa famille, elle n'annule pas le mariage. Un homme épouse une fille naturelle qu'il croit légitime; une femme prend pour époux un étranger qu'elle croit Français leur erreur ne détruit pas le consentement. Il existe cependant plusieurs décisions de cours royales qui ont consacré l'opinion contraire, relativement à un prêtre qui s'était marié comme laïque, et à un faussaire qui s'était fait passer pour un étranger noble. (Colmar, 6 déc. 1811, et Bourges, 6 août 1827.) Mais il est permis de croire que ces arrêts s'il eussent été dénoncés à la cour suprême, auraient été cassés. - L'erreur sur les qualités n'a jamais présenté le moindre doute. Un homme épouse une femme qu'il croit riche, elle est pauvre; vertueuse, c'est une prostituée; son mariage ne peut être attaqué, il devait prendre de plus amples informations. QUESTION. L'impuissance est-elle une cause de nullité du mariage? Des jurisconsultes pensent que l'impuissance occasionnée par quelque accident avant le mariage, étant un motif de désaveu des enfants issus de l'autre époux, constitue une véritable erreur sur la personne physique, puisqu'il est impossible de penser que l'autre époux eût consenti au mariage, s'il eût connu cette circonstance; mais les mêmes jurisconsultes reconnaissent que l'impuissance accidentelle, arrivée depuis le mariage, et l'impuissance naturelle, ne peuvent fournir aucun moyen de nullité du mariage : la première impuissance, parce que le mariage a été valable dans son principe, puisqu'aucune erreur ne le viciait; la seconde, parce qu'elle entraîne avec elle des épreuves toujours très-peu certaines, et qui, dans tous les cas, répugnent aux bonnes mœurs. Quant à nous, nous pensons que l'impuissance, même accidentelle, existant avant le mariage, n'est pas une cause de nullité du mariage; il est, en effet, dans l'esprit de la nouvelle loi de tarir la source de ces demandes scandaleuses qui blessaient l'honnêteté publique. Si le législateur eût voulu faire une exception pour l'im

puissance accidentelle, il eût pris soin de le dire, et ce n'est qu'en abusant des mots qu'on peut voir dans cette circonstance une erreur sur la personne physique; cette argumentation comprendrait d'ailleurs l'impuissance même naturelle or les partisans de l'opinion contraire n'ont pu aller jusque-là. Quant à l'induction que l'on tire de l'article qui autorise le désaveu pour cause d'impuissance accidentelle, elle milite, au contraire, en faveur de notre système; car, si le législateur a cru devoir s'expliquer formellement dans ce cas, comment croire que ce n'est pas à dessein qu'il a gardé ici le silence? Cette opinion, au reste, a été consacrée par un arrêt parfaitement motivé de la cour de Riom, 30 juin 1828. Le Code ne parle pas, comme annulant le consentement dans le mariage, des manoeuvres frauduleuses pratiquées pour tromper l'un des époux, manœuvre qu'on nomme dol. (Art. 1116.) Il n'est, en effet, une cause de nullité que lorsqu'il traîne à sa suite l'erreur sur la personne, ou plutôt c'est l'erreur produite par lui, qui vicie le consentement.

181. Dans le cas de l'article précédent, la demande en nullité n'est plus recevable, toutes les fois qu'il y a eu cohabitation continuée pendant six mois, depuis que l'époux a acquis sa pleine liberté, ou que l'erreur a été par lui re

connue.

N'est plus recevable. On dit alors, en droit, que la nullité est couverte. Le premier consentement, vicié par la violence ou l'erreur, se trouve tacitement ratifié par cette cohabitation de six mois, libre et continue. Il pourrait l'être avant ce terme, expressément, c'est-à-dire par un acte formel.

:

Pendant six mois. On conclut de ces expressions que le législateur a entendu autoriser les demandes en nullité pour une autre erreur qu'une erreur sur la personne physique, puisque cette erreur, qui ne peut arriver qu'au moyen d'une substitution de personne au moment de la célébration du mariage, se découvrirait quelques instants après or la loi, en faisant courir le délai de six mois non pas du jour du mariage, mais du jour où l'erreur a élé reconnue, suppose qu'un délai peut être nécessaire pour reconnaître l'erreur : la plupart des auteurs, afin de ne pas restreindre l'art. 180 à un cas qui n'arrivera peut être jamais, et de donner un sens à l'article actuel, prévoient un genre de fraude qui peut arriver quelquefois et qui entraîne une sorte d'erreur sur la personne. C'est, par exemple, le cas où un prince, croyant épouser la fille aînée d'un autre prince, qu'il n'a jamais vue, on lui fait épouser la cadette qu'on fait passer pour l'aînée, et cette erreur peut avoir beaucoup de gravité, si on suppose que la fille aînée était héritière de la principauté.

182. Le mariage contracté sans le consentement des père et mère, des ascendants, ou du conseil de famille, dans les cas où ce consentement était nécessaire, ne peut être attaqué que par ceux dont le consentement était requis, ou par celui des deux époux qui avait besoin de

ce consentement.

Par ceux dont le consentement était requis. Autre nullité relative car ce consentement n'est exigé que dans l'intérêt 10 des parents auxquels on devait le demander, et dont l'autorité ne doit pas être méconnue; 20 dans l'intérêt de l'enfant, qui en avait besoin pour échapper aux dangers de l'inexpérience, et à l'entrainement des passions: ces personnes pourront donc seules invoquer la nullité du mariage. Si c'est un conseil de famille dont le consentement n'a pas été demandé, chaque membre n'aura pas le droit d'attaquer le mariage,

mais le conseil réuni pourra nommer un de ses membres pour poursuivre la nullité.

183. L'action en nullité ne peut plus être intentée, ni par les époux, ni par les parents dont le consentement était requis, toutes les fois que le mariage a été approuvé expressément ou tacitement par ceux dont le consentement était nécessaire, ou lorsqu'il s'est écoulé une année sans réclamation de leur part, depuis qu'ils ont eu connaissance du mariage. Elle ne peut être intentée non plus par l'époux, lorsqu'il s'est écoulé une année sans réclamation de sa part, depuis qu'il a atteint l'âge compétent pour consentir par lui-même au mariage.

Ni par les époux, ni par les parents. L'approbation expresse ou tacite des parents peut-être opposée aux époux, parce qu'elle a détruit entièrement le vice qui existait dans le mariage.

Expressément. Par un acte formel.

Tacitement. Par des actions qui supposent nécessairement cette approbation, comme si le père qui n'avait pas donné son consentement a reçu chez lui les deux époux.

Par l'époux. L'approbation d'un époux ne saurait l'enchaîner que quand il a atteint l'âge compétent; mais il faut bien remarquer que, dans ce même cas, elle ne peut être opposée qu'à lui seul, et les parents dont le consentement était requis pourront toujours demander la nullité, si d'ailleurs ils sont encore dans les délais.

L'âge compétent. Si l'on expliquait rigoureusement cette expression ambiguë de la loi, l'âge compétent serait, pour les filles, toujours vingt et un ans (art. 148), et pour les fils, tantôt vingt-cinq, tantôt vingt et un ans (art. 148 et 160.) Des auteurs veulent qu'on s'arrête à une règle uniforme, et qu'on entende par ces mots la majorité ordinaire, c'est-à-dire l'âge de vingt et un ans. Mais d'autres jurisconsultes, non moins recommandables, observent que le texte de la loi répugne à cette opinion; car l'âge compétent pour consentir par lui-même au mariage est, pour le fils, celui de vingt-cinq ans, puisque jusqu'à cette époque, aux termes de l'art. 148, il est obligé de demander le consentement de ses ascendants.

184. Tout mariage contracté en contravention aux dispositions contenues aux articles 144, 147, 161, 162 et 163, peut être attaqué, soit par les époux eux-mêmes, soit par tous ceux qui y ont intérêt, soit par le ministère public.

= Soit par le ministère public. Toutes les nullités que prononce cet article sont absolues; car l'article 144, qui fixe l'âge requis, l'article 147, qui prohibe la bigamie, les articles 161, 162, 163, qui défendent l'inceste, ont été portés dans l'intérêt de la société. Aussi la société en général pourra-t-elle attaquer, par l'organe du ministère public, les mariages contractés en contravention à ces articles, et non à d'autres dispositions (voyez l'arrêt du 1er août 1820, cité au titre IV du Code de procédure, intitulé, de la Communication au ministère public), et tous les intéressés en particulier auront le même droit. Mais quels seront les intéressés? 10 Les deux époux ; 2o leurs ascendants, même lorsqu'ils n'ont qu'un intérêt d'affection. Les autres personnes doivent avoir un intérêt pécuniaire (art. 187), et ils ne peuvent attaquer le mariage hors des cas où une disposition formelle leur donne ce droit. (Cass., 9 janvier 1821. ) Quant au mariage contracté par le mort civilement, l'article actuel ne s'en

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occupe pas, par la raison qu'il est nul de plein droit. (Art. 25.)

185. Néanmoins le mariage contracté par des époux qui n'avaient point encore l'âge requis, ou dont l'un des deux n'avait point atteint cet âge, ne peut plus être attaqué, 1o lorsqu'il s'est écoulé six mois depuis que cet époux ou les époux ont atteint l'âge compétent; 2o lorsque la femme qui n'avait point cet âge a conçu avant l'échéance de six mois.

Il s'est écoulé six mois. Le mal que peut amener une union précipitée est déjà produit: pourquoi donner alors le scandale inutile de la rupture du mariage?

Avant l'échéance. La nature prouve que la femme n'était pas impubère; la prohibition doit dès lors cesser avec le motif qui l'avait dictée. Cette exception ne s'applique pas au cas où une femme pubère, ayant épousé un homme âgé de moins de dix-huit ans, a conçu avant que son mari ait atteint cet âge de puberté : c'eût été fournir à la femme le moyen de valider, par l'adultère, un mariage illégal.

De six mois. Tant que six mois ne sont pas encore écoulés depuis que la femme a atteint l'âge compétent, c'est-à-dire quinze ans révolus (art. 144), on peut attaquer le mariage qu'elle a contracté avant cet âge; mais elle, de son côté, peut opposer son état, si elle a déjà conçu. Les mots de six mois entendus autrement n'offriraient aucun sens raisonnable.

186. Le père, la mère, les ascendants et la famille qui ont consenti au mariage contracté dans le cas de l'article précédent, ne sont point recevables à en demander la nullité.

=Le père, la mère, etc. De l'époux impubère, car ceux de l'époux qui est pubère ne doivent pas être recevables, puisque le mariage n'est pas anticipé quant à leur enfant.

Qui ont consenti. S'ils n'ont pas consenti, ils peuvent attaquer le mariage, et pour défaut de consentement, et pour défaut d'âge.

Ne sont point recevables. La faute qu'ils ont commise en contrevenant à la loi doit leur enlever le droit d'intenter l'action en nullité: Nemo ex suo proprio delicto actionem consequi potest.

187. Dans tous les cas où, conformément à l'article 184, l'action en nullité peut être intentée par tous ceux qui y ont un intérêt, elle ne peut l'être par les parents collatéraux ou par les enfants nés d'un autre mariage, du vivant des deux époux, mais seulement lorsqu'ils y ont un intérêt né et actuel.

Né et actuel. Les collatéraux ou les enfants d'un autre mariage ne peuvent pas invoquer, comme les ascendants, un simple intérêt d'affection pour demander la nullité; il faut qu'ils aient un intérêt actuel et pécuniaire : cet intérêt naîtra à la dissolution du mariage, parce qu'alors les enfants issus d'une autre union, et les collatéraux, devront prouver la nullité du mariage, pour disputer aux enfants qui en sont issus les droits de succession.

188. L'époux au préjudice duquel a été contracté un second mariage, peut en demander la nullité, du vivant même de l'époux qui était engagé avec lui.

Car il a un intérêt né et actuel à le faire rompre.

189. Si les nouveaux époux opposent la nullité du premier mariage, la validité ou la nullité de ce mariage doit être jugée préalablement.

=Préalablement. Car si le premier mariage est nul, le second est valable, et réciproquement. Il ne faut pas conclure de là que, lorsqu'on a contracté un premier mariage entaché de nullité, on puisse en contracter un deuxième sans faire prononcer la nullité du premier. L'officier civil devrait se refuser à le célébrer. L'art. 189 parle du cas où il aura été trompé ou complice.

190. Le procureur du roi, dans tous les cas auxquels s'applique l'art. 184, et sous les modifications portées en l'art. 185, peut et doit demander la nullité du mariage, du vivant des deux époux, et les faire condamner à se séparer.

= Dans tous les cas. Excepté celui d'un deuxième mariage contracté malgré l'existence du premier, pendant l'absence du conjoint. (Art. 139.)

Peut et doit. Son ministère lui en impose l'obligation; car l'ordre public est troublé par ces mariages.

Du vivant des deux époux. La société qu'il défend a un intérêt actuel à faire cesser le scandale. Après la mort de l'un des époux, le procureur du roi n'a plus le droit de faire annuler le mariage, car il n'y a plus de scandale.

191. Tout mariage qui n'a point été contracté publiquement, et qui n'a point été célébré devant l'officier public compétent, peut être attaqué par les époux eux-mêmes, par les père et mère, par les ascendants, et par tous ceux qui y ont un intérêt né et actuel, ainsi que par le ministère public.

Cet article renferme eucore une nullité absolue, car la publicité est exigée dans l'intérêt de la société, qui doit connaître l'état de tous ses membres; si cette publicité n'a pas eu lieu, on dit que le mariage est clandestin.

Publiquement. La publicité parfaite du mariage consiste dans l'exacte observation de toutes les formalités voulues pour sa célébration: publications qui le précèdent, maison commune, quatre témoins, etc. Si toutes n'ont pas été fidèlement observées, la publicité n'est pas entière, et le mariage peut être attaqué; il est cependant des omissions qui ne l'annuleraient pas. Aussi la loi n'oblige-t-elle pas, comme dans l'article précédent, le procureur du roi à demander la nullité, elle lui en laisse la faculté. Il est même des cas où le mariage, quoique privé de quelques-unes de ces formalités, n'en est pas moins valable. Ainsi il n'est pas douteux que le mariage contracté au lit de mort, et qu'on nomme, pour cette raison, mariage in extremis, est valable, bien qu'il ne soit pas célébré dans la maison commune. Ces principes sont consacrés par plusieurs arrêts, et notamment de cassation, du 21 juin 1814. (Voy. C. de Riom, 10 juillet 1829.)

Devant l'officier public compétent. Ainsi l'officier public qui ne serait pas celui de l'une des parties, ou qui célébrerait le mariage hors de la commune, serait incompétent: il semblerait que, dans ce cas, le mariage devrait nécessairement être annulé, puisqu'un officier public incompétent n'est plus qu'un simple particulier. Cependant la cour suprême a jugé que la validité du mariage était encore alors abandonnée à la sagesse des juges, qui pouvaient dans cette circonstance, usant du pouvoir que leur confère l'art. 193, décider que la contravention alléguée n'est pas suffisante pour entrainer la nullité du mariage: mais il est clair aussi qu'ils pourraient l'annuler. (Arr. du 51 août 1824.)

192. Si le mariage n'a point été précédé des deux publications requises, ou s'il n'a pas été obtenu des dispenses permises par la loi, ou si les intervalles prescrits dans les publications et célébrations n'ont point été observés, le procureur du roi fera prononcer contre l'officier public une amende qui ne pourra excéder trois cents francs, et contre les parties contractantes, ou ceux sous la puissance desquels elles ont agi, une amende proportionnée à leur fortune.

193. Les peines prononcées par l'article précédent seront encourues par les personnes qui y sont désignées, pour toute contravention aux règles prescrites par l'art. 165, lors même que ces contraventions ne seraient pas jugées suffisantes pour faire prononcer la nullité du mariage.

Par l'art. 165. Lequel porte: «Le mariage sera célébré publiquement devant l'officier civil du domicile de l'une des parties. » Il peut donc y avoir des contraventions à cet article qui ne soient pas suffisantes pour annuler le mariage; ce qui s'explique par le détail que nous avons donné des éléments qui composent la publicité. (Art. 191.) Il est laissé aux tribunaux, comme la cour de cass. l'a plusieurs fois jugé, de décider si le défaut de publicité ou l'incompétence de l'officier civil, sont tels qu'ils doivent seulement être punis d'une amende. C'est ce que la cour suprême a parfaitement exposé dans l'arrêt du 31 août 1824, cité sous l'art. 191: «Attendu que le mariage dont il s'agit a été attaqué pour contravention aux art. 165, 191 du C. civ., et autres qui s'y réfèrent; que si l'art. 191 autorise les époux eux-mêmes à demander la nullité du mariage en cas de contravention à l'article 165, dans les mêmes termes qu'ils sont autorisés par l'art. 184 à demander la nullité de tout mariage contracté en contravention aux dispositions contenues aux articles 144, 147, 161, 162 et 163 du C. civ., il y a cependant cette différence entre ces dernières contraventions, qui résultent d'une désobéissance formelle aux prohibitions expresses de la loi, et celles qui résultent de l'infraction aux préceptes de l'art. 165, que, quand les premières sont constatées, il ne reste plus aux juges qu'à prononcer l'annulation d'une union contractée au mépris des défenses absolues de la loi; tandis que, lors même que les autres sont prouvées, d'après les dispositions de l'art. 193, les tribunaux ont encore à examiner, dans l'intérêt de la morale publique et de la paix des familles, si ces contraventions ont été de nature à priver absolument la célébration du mariage de cette publicité et de cette authenticité qui en sont les conditions nécessaires, et sont dès lors suffisantes pour faire prononcer l'an

ulation du mariage ainsi clandestinement ou incompétemment célébré; rejette, etc. » (Arrêt du 31 août 1824.)

194. Nul ne peut réclamer le titre d'époux et les effets civils du mariage, s'il ne représente un acle de célébration inscrit sur le registre de l'état civil; sauf les cas prévus par l'art. 46, au titre des Actes de l'état civil.

Un acte de célébration. Quand on réclame les droits produits par un mariage, il faut en prouver l'existence la preuve que la loi réclame surtout est une copie de l'acte de célébration. Les époux sont particulièrement dans l'obligation de rapporter cette preuve, car ils doivent savoir où ils se sont unis, où se trouve l'acte de célébration,

Inscrit sur le registre. Ainsi, un acte inscrit sur une feuille volante ne prouverait pas le mariage; car la condition de la loi ne serait pas remplie.

Sauf les cas. S'il n'a pas existé de registres, ou si les registres ont été perdus, ils peuvent prouver leur mariage par titres et par témoins. (Art. 46.) Ils pourraient même être admis à cette preuve, si une seule feuille des registres avait été soustraite. (Voir ledit article 46.)

195. La possession d'état ne pourra dispenser les prétendus époux qui l'invoqueront respectivement de représenter l'acte de célébration du mariage devant l'officier de l'état civil.

La possession d'état. C'est une réunion de circonstances qui prouve l'état des époux. On exprime ces circonstances par ces trois mots: nomen, tractatus, fama. La femme a porté le nom de l'homme avec lequel elle vivait, elle a été traitée comme son épouse, elle a passé pour telle dans la société. Quelque longue que soit la possession d'état, elle n'est qu'un concubinage, s'il n'y a pas eu de célébration de mariage, puisque ce n'est que cette célébration qui le constitue.

196. Lorsqu'il y a possession d'état, et que l'acte de célébration du mariage devant l'officier de l'état civil est représenté, les époux sont respectivement non recevables à demander la nullité de cet acte.

De cet acte. Quelque vicieux que soit cet acte de célébration; par exemple, si les formalités suivant lesquelles il devait être rédigé n'ont pas été observées, etc., les époux ne seront jamais admis à en demander la nullité, parce que la possession d'état a couvert tous ces vices ainsi, il sera constant que le mariage a été célébré.

QUESTION. Ces dispositions s'appliquent-elles au cas où l'acte représenté n'a été inscrit que sur une feuille volante? Plusieurs auteurs admettent l'affirmative, parce que cette irrégularité se trouve, comme toute autre, couverte par la possession d'état; mais, pour la négative, on remarque que la loi n'admettant, comme preuve du mariage, que l'acte inscrit sur le registre, il est impossible de donner un effet quelconque à l'acte écrit sur une feuille volante, et, par conséquent, la possession d'état est sans force pour donner effet à un tel acte. Mais, du reste, il ne faut pas croire que les époux auront perdu le droit de demander la nullité du mariage lui-même dans les cas où la loi la prononce; par exemple, s'il est incestueux ou entaché de bigamie; car on peut demander la nullité d'un mariage, quoique son acte de célébration soit incontestable.

197. Si néanmoins, dans le cas des art. 194 et 195, il existe des enfants issus de deux individus qui ont vécu publiquement comme mari et femme, et qui soient tous deux décédés, la légitimité des enfants ne peut être contestée sous le seul prétexte du défaut de représentation de l'acte de célébration, toutes les fois que cette légitimité est prouvée par une possession d'état qui n'est point contredite par l'acte de naissance.

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La légitimité. On ne peut prétendre que ces enfants sont illégitimes, c'est-à-dire nés hors mariage, par cela seul qu'ils ne rapportent pas l'acte de célébration de leurs père et mère décédés. Il peut fort bien se faire qu'ils ignorent le lieu où cet acte a été passé, et leurs père et mère étant morts, qu'ils n'aient aucun moyen de le connaître. On est généralement d'accord que si le survivant des père et mère était en état de démence, fureur, imbécillité, ou d'absence déclarée, l'esprit qui a dicté la disposition actuelle devrait la faire étendre à ces divers cas; mais le mort civilement, pouvant toujours douner des renseignements nécessaires pour que l'enfant sache

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