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y a plusieurs ventes successives dont le prix soit dù en tout ou en partie, le premier vendeur est préféré au second, le deuxième au troisième, et ainsi de suite; 2o ceux qui ont fourni les deniers pour l'acquisition d'un immeuble, pourvu qu'il soit authentiquement constaté, par l'acte d'emprunt, que la somme était destinée à cet emploi, et par la quittance du vendeur, que ce payement a été fait des deniers empruntés; -3° Les cohéritiers, sur les immeubles de la succession, pour la garantie des partages faits entre eux, et des soulte ou retour des lots (1); 4o Les architectes, entrepreneurs, maçons et autres ouvriers employés pour édifier, reconstruire ou réparer des bâtiments, canaux, ou autres ouvrages quelconques, pourvu néanmoins que, par un expert nommé d'office par le tribunal de première instance dans le ressort duquel les bâtiments sont situés, il ait été dressé préalablement un procès-verbal, à l'effet de constater l'état des lieux relativement aux ouvrages que le propriétaire déclarera avoir dessein de faire, et que les ouvrages aient été, dans les six mois au plus de leur perfection, reçus par un expert Mais le montant également nommé d'office; du privilége ne peut excéder les valeurs constatées par le second procès-verbal, et il se réduit à la plus value existante à l'époque de l'aliénation de l'immeuble et résultant des travaux qui y ont été faits; - 5o Ceux qui ont prêté les deniers pour payer ou rembourser les ouvriers, jouissent du même privilége, pourvu que cet emploi soit authentiquement constaté par l'acte d'emprunt, et par la quittance des ouvriers, ainsi qu'il a été dit ci-dessus pour ceux qui ont prêté les deniers pour l'acquisition d'un immeuble.

Le vendeur. Ce privilége repose sur le principe que le vendeur n'a entendu se dessaisir de sa chose qu'autant que le prix lui en serait payé, et qu'il est censé la retenir comme son gage jusqu'à la libération de l'acquéreur.

Pour le payement du prix.— QUESTION. Le privilége s'étend-il aux intérêts? La cour de cassation a décidé l'affirmative, malgré le silence de la loi, en se fondant particulièrement sur le principe que l'accessoire suit toujours le sort du principal, sequitur principale accessorium. Elle a jugé aussi que le privilége pour les intérêts échus devait s'exercer, encore bien qu'aucune inscription séparée n'eût été prise pour ces intérêts. Voyez l'arrêt du 1er mai 1817, cité sous l'art. 2151.- QUESTION. Le vendeur qui aurait perdu, ou qui ne voudrait pas exercer son privilége, pourrait-il intenter l'action en résolution de la vente, et reprendre son immeuble, en quelques mains qu'il se trouvât? L'affirmative paraît aujourd'hui incontestable: elle est commandée, 10 par l'art. 1184, qui porte que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement; 2o par l'art. 1183, qui dit que l'accomplissement de cette condition résolutoire remet

(1) Il n'y a aucun délai de rigueur pour l'inscription du privilége, en ce qui concerne la garantie des partages; ce privilége une fois inscrit prime toutes les créances hypothe

les choses au même état que si l'obligation n'avait jamais existé. Il faut encore ajouter à l'argument victorieux que fournissent ces articles ceux qui résultent des art. 1654 et 2125. Ainsi le vendeur a le choix, comme le lui donne l'art. 1184, ou d'exiger l'exécution de la vente si elle lui paraît avantageuse, et alors il jouit de son privilége; ou bien de demander la résolution du contrat et de recouvrer son immeuble s'il l'aime mieux, ou s'il a perdu son privilége: cette solution affirmative de la question actuelle est de la plus grande importance pour les acquéreurs d'immeubles, puisque la loi donnant ce droit à tout vendeur qui n'a pas été payé, la dépossession peut avoir encore lieu après plusieurs ventes successives. (Cass., 24 août 1831.) On pense communément que cette action en résolution peut être exercée pendant trente ans, sauf toutefois la prescription par dix et vingt ans que les tiers acquéreurs pourraient opposer. (Art. 2265.)

Ceux qui ont fourni les deniers. Il s'opère alors en faveur des bailleurs de fonds une véritable subrogation au privilége du vendeur (art. 1250); et comme ce privilége est très-avantageux, c'est un moyen de placement trèsrecherché. Quant à la formalité de la double déclaration prescrite par notre article, les motifs sont les mêmes que ceux expliqués art. 1250. Tous les auteurs ont agité la question qui résulte de l'espèce suivante : J'achète une maison 20,000 fr.; j'emprunte aujourd'hui 10,000 fr. à Paul, qui est subrogé au privilége du vendeur pour cette somme; six mois après, j'emprunte les 10,000 fr. restants à Pierre, qui est également subrogé : lequel de ces deux créanciers sera préféré? Aucun; tous deux viendront en concurrence; car s'il est vrai que Paul a été subrogé avant Pierre, il ne faut pas oublier qu'en matière de privilége la date est indifférente, et que l'on a uniquement égard à la cause du privilége, non ex tempore sed ex causâ æstimantur: or, ici la cause est la même, c'est le droit du vendeur, qui appartient également aux deux bailleurs de fonds.

Pour la garantie. Cette garantie, qui a lieu en quelque forme que l'acte de partage ait été fait, authentiqus ou sous seing privé, est une suite nécessaire de l'égalité que nous avons vue être de l'essence des partages. — Mais des auteurs graves soutiennent qu'un privilége ne saurait exister pour la garantie dont il s'agit, parce que le montant n'en étant pas fixé, et l'action pouvant se perpétuer à raison de minorités, il en résulterait, d'un côté, qu'il faudrait recourir à une fixation arbitraire, conformément à l'art. 2148, no 4, et, d'un autre côté, que toutes les propriétés foncières pourraient se trouver grevées d'inscriptions pour des droits éventuels. Ils invoquent en outre, à l'appui de cette opinion, l'art. 2109, qui ne parle que de soulte et retour de lots, dont le moutant est toujours fixé cette observation paraît, en effet conforme à l'esprit général du législateur sur la liberté des propriétés, mais elle semble tout à fait contraire au texte du no3 de l'article que nous expliquons.

A la plus value. Ainsi, propriétaire d'une maison valant 100.000 fr., j'y fais faire des réparations qui s'élèvent à 20,000 fr.; ma maison cependant n'est dans la réalité augmentée de valeur que de 10,000 fr.: les ouvriers n'auront privilége que pour cette somme, et si cette augmentation ne provenait pas de leurs travaux, mais de quelque cause particulière, par exemple, d'une rue nouvelle ouverte près de ma maison, ils n'auraient aucun privilége, et viendraient comme simples créanciers chirographaires : la loi est formelle, elle n'a pas voulu que les autres créanciers privilégiés, avant les architectes, maçons, etc., perdissent leurs droits par des constructions et des réparations auxquelles ils ne pouvaient s'attendre. Pour arriver à déterminer le privilége des ouvriers, il faut faire une ventilation pour,

caires simples qui sont à la charge du copartageant. Le délai fixé par l'art. 2109 ne s'applique qu'aux soultes et retours des lots et au prix de la licitation. (Liège, 9 mars 1818.)

du prix total de la maison, former deux prix, dont le premier représentera la valeur de l'immeuble avant la confection des ouvrages, et l'autre, la valeur desdites réparations. (Bordeaux, 2 mai 1826.)

Ou rembourser les ouvriers. L'article 20 de la loi du 21 avril 1810 accorde le même privilége à ceux qui ont fourni les fonds pour les recherches d'une mine, etc.

SECTION III. Des Priviléges qui s'étendent sur les Meubles et les Immeubles.

2104. Les priviléges qui s'étendent sur les meubles et immeubles sont ceux énoncés en l'art. 2101.

Énoncés en l'article 2101. C'est-à-dire les frais de justice, les frais funéraires, etc. Il faut y ajouter le privilége du trésor public sur les meubles et les immeubles des comptables. (Art. 2 et 4, loi du 5 sept. 1807.)

2105. Lorsqu'à défaut de mobilier, les privilégiés énoncés en l'article précédent se présentent pour être payés sur le prix d'un immeuble, en concurrence avec les créanciers privilégiés sur l'immeuble, les payements se font dans l'ordre qui suit : 1o Les frais de justice et autres énoncés en l'article 2101; 2o Les créances désignées en l'article 2103.

SECTION IV.

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· Comment se conservent les
Priviléges.

2106. Entre les créanciers, les priviléges ne produisent d'effet à l'égard des immeubles qu'autant qu'ils sont rendus publics par inscription sur les registres du conservateur des hypothèques, de la manière déterminée par la loi, et à compter de la date de cette inscription, sous les seules exceptions qui suivent.

Ne produisent d'effet. C'est-à-dire qu'ils n'existent, du moins quant aux priviléges sur les immeubles, qu'autant qu'ils sont inscrits. Cette inscription, qui rend public le privilége, était commandée par le système actuel, dont la publicité forme un des éléments.

Et à compter de la date de cette inscription. On se tromperait beaucoup si on concluait de là qu'ils n'ont rang que du jour de cette inscription: il faut entendre ces mots en ce sens, que les priviléges reçoivent l'existence, leur effet, au moyen et à compter de l'inscription; mais cet effet rétroagit au jour où la nature de la créance leur donne rang. Un exemple fera seul bien sentir la vérité et l'importance de cette observation : Je partage avec mon frère la succession paternelle l'art. 2109 me donne un privilége sur la part échue mon frère pour la soulte qu'il peut me devoir, pourvu que je le fasse inscrire dans les soixante jours, à partir du partage: le lendemain du partage, mon frère consent une hypothèque sur les immeubles à lui échus, en faveur de Paul, qui prend inscription le jour même : moi, je ne fais inscrire mon privilége qu'un mois après; à dater du jour de l'inscription mon privilége existe, il

(1) Voyez dans ce sens arrêts de Brux., 3 mai 1826; Brux., cass., 17 mai 1833; Liége, 10 janv. 1816.

Le privilège du vendeur doit, pour produire effet, être rendu public sur le registre des hypothèques. (Brux., cass., 26 juin 1824.)

(2) La transcription ne produit pas, en faveur du vendeur les effets d'une inscription perpétuelle. (Brux., 15 oct. 1822.) Lorsqu'un immeuble est vendu à la charge par l'acquéreur de servir une rente à un tiers, celui-ci ne peut invoquer le privilége établi par cet article en faveur du vendeur. (Br., 14 janv. 1817.)

a effet; mais quoique cette inscription soit d'un mois postérieure à celle de Paul, je le primerai cependant; car mon privilége, auquel j'ai donné effet par l'inscription, a rang du jour du partage or l'hypothèque de Paul n'est que du lendemain; et son inscription lui donne rang seulement du jour où elle est prise, aux termes de l'art. 2134 (1).

2107. Sont exceptées de la formalité de l'inscription les créances énoncées en l'artice 2101.

2108. Le vendeur privilégié conserve son privilége par la transcription du titre qui a transféré la propriété à l'acquéreur, et qui constate que la totalité ou partie du prix lui est due; à l'effet de quoi la transcription du contrat faite par l'acquéreur vaudra inscription pour le vendeur et pour le prêteur qui lui aura fourni les deniers payés, et qui sera subrogé aux droits du vendeur par le même contrat : sera néanmoins le conservateur des hypothèques tenu, sous peine de tous dommages et intérêts envers les tiers, de faire d'office l'inscription sur son registre, des créances résultant de l'acte translatif de propriéte, tant en faveur du vendeur qu'en faveur des prèteurs, qui pourront aussi faire faire, si elle ne l'a été, la transcription du contrat de vente, à l'effet d'acquérir l'inscription de ce qui leur est dù sur le prix (2).

Par la transcription. L'art. 2181 obligeant l'aequéreur qui veut purger les priviléges et hypothèques dont pourraient être grevés les immeubles par lui acquis, à faire transcrire son contrat, la loi a vu dans cette transcription une formalité qui équivaut, au moins pour conserver les droits du vendeur, à une inscription; et en conséquence elle l'a dispensé, dans ce cas, de faire inscrire son privilége. Mais aussi, comme cette transcription pourrait être ignorée des tiers, qui, pour traiter avec un propriétaire, consultent surtout le registre des inscriptions, l'article actuel exige que le conservateur inscrive d'office sur son registre les créances résultant de l'acte translatif de propriété, en remplissant à cet effet les formalités prescrites par l'art. 2148. Cette inscrip tion: doit être faite immédiatement après la transcrip tion autrement le but que s'est proposé la loi, c'est-àdire d'avertir des tiers, serait manqué si le conservateur pouvait toujours faire cette inscription: mais le vendeur n'en conserverait pas moins son privilége, quoique le conservateur eût omis de faire l'inscription; elle est pres crite seulement en faveur des tiers. — QUESTION. L'ac quéreur doit-il faire transcrire les contrats des vendeurs précédents, ou simplement son contrat? La cour suprême a décidé qu'il ne devait faire transcrire que son propre contrat : « Attendu, 30 que Danglemen! n'a pas non plus conservé son privilége et son hypothèqu par les transcriptions de l'an XIII et de 1812; qu'il est de règle, d'après l'art. 2108 du Code, que le privilege du vendeur, non inscrit, ne se conserve que par la trans cription du contrat dont il résulte, et non par celle des

Le privilége accordé à celui qui a prêté à l'acheteur les deniers pour le payement du prix, n'est pas applicable au prèteur qui a fourni les deniers au vendeur à pacte de racha à l'effet d'exercer la faculté de réméré. (Br.. 16 avril 1923 La transcription d'un acte de vente constatant que la tota lité ou partie du prix est due au vendeur suffit seule et ind pendamment de l'inscription pour conserver le privilege vendeur sur l'immeuble vendu. (Br., 28 mai 1826.)

La transcription faite après la faillite de l'acheteur, nec serve pas le privilége du vendeur au préjudice des créanciers inscrits antérieurement. (Br., cass., 26 juin 1824.)

contrats postérieurs; qu'on ne peut prétendre le contraire, sous prétexte que, suivant les art. 2181, 2182 et 2183, le tiers détenteur ne peut purger l'immeuble par lui acquis des priviléges non inscrits des vendeurs précédents, sans transcrire leurs contrats et sans leur faire la notification requise, puisque des expressions de ces articles il résulte, au contraire, qu'il n'est tenu de transcrire que son contrat, ni de faire des notifications qu'aux créanciers inscrits.» (Arrêt du 14 janv. 1818.)

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De ce que l'article a décidé que la transcription du titre suffit pour conserver le privilége du vendeur, on a conclu avec raison que les contrats sous seing privé sont également susceptibles d'être transcrits, bien que l'inscription des créances hypothécaires ne puisse être faite que sur le vu d'une expédition authentique. (Art. 2148.) -QUESTION. Le vendeur peut lui-même faire faire la transcription, si l'acheteur ne remplit pas cette formalité; mais pourrait-il la remplacer par une simple inscription? Oui; si le conservateur est tenu d'office de faire l'inscription pour avertir les tiers, pourquoi le vendeur ne pourrait-il pas le faire faire lui-même, et par là conserver son privilége? Notre article ne fixant aucun délai au vendeur pour la transcription afin de conserver son privilége, il s'ensuit qu'il peut toujours faire transcrire, à moins pourtant que l'acheteur ne revendit l'immeuble à une autre personne qui ferait transcrire; car alors, aux termes de l'art. 834 du C. de proc., le premier vendeur qui ne ferait pas transcrire dans la quinzaine de cette inscription perdrait son privilége. Remarquez, au reste, que quelle que soit l'époque de la transcription, elle conserve le privilége du vendeur à partir de la vente; de telle sorte qu'aucun délai n'étant fixé pour la transcription, on n'est jamais sûr de ne pas être primé par ce privilége. La cour de Paris a conclu de ces principes, que la péremption de l'inscription prise d'office pour le vendeur par le conservateur, n'éteint pas le privilége, et que le vendeur peut toujours le conserver par une nouvelle inscription prise dans le délai de l'art. 834, C. de proc. (Arrêt du 20 fév. 1834.)-QUESTION. L'inscription d'office doit-elle être renouvelée comme l'exige d'une manière générale l'art. 2154? La cour de Toulouse a admis l'affirmative: « Attendu qu'en règle générale les priviléges sur les immeubles et les hypothèques ne se conservent que par l'inscription, et que l'effet de cette inscription ne dure que dix ans, que les exceptions que le législateur a voulu faire à cette règle générale sont exprimées par des textes formels, et que le privilége du vendeur n'y est pas compris ; qu'à la vérité, l'art. 2108 du C. civ. a dispensé le vendeur des formalités ordinaires de l'inscription, et a décidé que, dans son intérêt particulier, il suffirait de la transcription de l'acte de vente; mais que ce n'est là qu'un mode particulier d'inscription, dont les formes peuvent être différentes, mais dont les effets et la durée sont les mêmes que ceux des inscriptions ordinaires; qu'en effet, la loi se borne à assimiler, dans ce cas, la transcription à l'inscription, en disant, tantôt que la transcription vaudra inscription, tantót que le vendeur pourra lui-même faire transcrire l'acte de vente, à l'effet d'acquérir inscription; et qu'ainsi tout ce que le vendeur peut acquérir, c'est une inscription ou l'équivalent d'une inscription, c'est-à-dire des avantages égaux, mais non supérieurs à ceux d'une inscription ordinaire; que dispenser le vendeur du renouvellement décennal, ce serait juger qu'à son égard la transcription vaudra plus que l'inscription; qu'au surplus, c'est ainsi que la loi a été interprétée par un avis du conseil d'État, approuvé par le chef du gouvernement et inséré au Bulletin des lois, c'est-à-dire par l'autorité qui alors avait la mission d'interpréter les lois. (Arrêt du 23 mars 1829.)

Et qui constate que la totalité ou partie du prix lui est due. C'est l'acte de vente lui-même qui doit constater que le prix est dû si cette preuve résultat d'un acte séparé, elle n'aurait aucun effet; car on considère

rait cet acte comme une espèce de contre-lettre, qui, aux termes de l'art. 1321, ne saurait être opposée à des tiers.

2109. Le cohéritier ou copartageant conserve son privilége sur les biens de chaque lot ou sur le bien licité, pour les soulle et retour de lots, ou pour le prix de la licitation, par l'inscription faite à sa diligence, dans soixante jours, à dater de l'acte de partage ou de l'adjudication par licitation; durant lequel temps aucune hypothèque ne peut avoir lieu sur le bien chargé de soulte ou adjugé par licitation, au préjudice du créancier de la soulte ou du prix.

Pour les soulte, etc. Du mot solvere, solutum, payé. Voir l'art. 833. Comme nous l'avons observé sous l'art. 2103, la loi ne parle pas ici de l'inscription du privilége pour la garantie des partages; d'où l'on conclut que, malgré le texte de l'art. 2103, no 5, ce privilége n'existe pas.

Pour le prix de la licitation. Si toutefois l'immeuble a été adjugé à un des copartageants; car si c'était à un étranger, il serait acquéreur ordinaire, et les cohéritiers auraient le privilége du vendeur, qui se conserve par la transcription. (Art. 2108.) QUESTION. Le copartageant dont la créance n'est pas définitivement fixée, doit-il néanmoins prendre inscription pour conserver son privilége sur le prix de l'immeuble licité? La cour de Bordeaux a consacré l'affirmative : « Attendu que, pour conserver le privilége accordé par l'art. 2109 du C. civ., le cohéritier ou copartageant doit prendre inscription, soit pour la soulte du partage, soit pour le prix de la licitation, dans le délai de soixante jours, à dater de l'acte de partage ou de l'adjudication; que les termes de la loi sont clairs; que l'inscription doit être prise pour la soulte lorsqu'il y a eu partage, et pour le prix de la licitation, lorsque l'immeuble à partager a été adjugé par licitation; que si, par suite de la licitation, les opérations du partage ne sont pas terminées, le prix de l'adjudication n'en est pas moins dû par l'adjudicataire, qui devient ainsi propriétaire de l'immeuble; que le copartageant, qui perd tout droit à la propriété, peut et doit dès lors s'inscrire pour conserver le privilége de sa créance; qu'il importe peu que sa créance ne soit pas définitivement fixée et qu'elle soit sujette à règlement; car la loi disant qu'il peut prendre inscription pour le prix de la licitation, il peut s'inscrire pour le prix en entier dont l'adjudicataire est censé débiteur jusqu'au règlement définitif des droits des colicitants. » (Arrêt du 15 juin 1831.)

Au préjudice du créancier. Mais elle aurait tout son effet à l'égard des autres créanciers hypothécaires.

2110. Les architectes, entrepreneurs, maçons et autres ouvriers employés pour édifier, reconstruire ou réparer des bâtiments, canaux ou autres ouvrages, et ceux qui ont, pour les payer et rembourser, prêté les deniers dont l'emploi a été constaté, conservent, par la double inscription faite, 1o du procès-verbal qui constate l'état des lieux; 2o du procès-verbal de réception, leur privilége à la date de l'inscription du premier procès-verbal.

= Par la double inscription. Ainsi l'inscription d'un seul procès-verbal ne conserverait pas le privilége; mais l'article ne dit pas dans quel délai le premier procès-verbal doit être inscrit : c'est évidemment au commencement des travaux; car autrement des tiers pourraient être facilement trompés en contractant dans

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l'ignorance que le débiteur eût fait faire des réparations. Quant à l'inscription du second procès-verbal, on a jugé qu'il n'y avait pas de délai rigoureusement prescrit ; on s'est fondé sur ce que l'art. 2110 ne fixe pas l'époque à laquelle les inscriptions doivent être prises; qu'à la vérité, lorsqu'il s'agit d'une vente volontaire, l'art. 834 du C. de proc. prescrit de prendre inscription pour la conservation des priviléges et hypothèques dans la quinzaine à dater de la transcription du contrat de vente; qu'en admettant qu'une adjudication faite aux enchères, après toutes les formalités exigées par la loi, produise le même effet que la transcription d'une vente volontaire, il paraîtrait bien que l'inscription devait être prise dans la quinzaine de l'adjudication, mais que ce délai ne peut être relatif qu'à l'inscription du procès-verbal constatant l'état des lieux, qui seule, d'après l'art. 2110, détermine le rang du privilége de l'ouvrier, et nullement à l'inscription du procès-verbal de réception des ouvrages, inscription qui, n'ayant lieu que pour faire connaître à l'acquéreur la quotité de la somme pour laquelle l'ouvrier a un privilége, ne saurait être assujettie à aucun délai, puisqu'elle ne peut être requise que lorsque les ouvrages plus ou moins longs sont parachevés, reconnus et évalués; que, s'il en était autrement, un propriétaire peu délicat pourrait priver l'ouvrier de son privilége en vendant l'immeuble, à la perfection duquel ce dernier travaille, et en s'entendant avec l'acquéreur pour faire transcrire le contrat de vente à une époque où il serait impossible que l'ouvrier pût terminer ses travaux, faire procéder au procès-verbal de leur reconnaissance et de leur estimation, et le faire inscrire dans la quinzaine de la transcription du contrat de vente.» (Lyon,13 mars 1830.) -QUESTION. Des constructions importantes donnentelles à l'entrepreneur quelque droit de copropriété sur le fonds? La cour suprême a consacré la négative : Attendu que des constructions par un entrepreneur sur un terrain, quelle qu'en soit la valeur, et quelque accroissement de prix qui en résulte pour ce terrain, ne donnent au constructeur aucun droit de copropriété dans l'immeuble, qui n'appartient toujours qu'au propriétaire du sol, sauf l'action en payement de l'entrep eneur et même le privilége que la loi lui accorde lorsqu'il a rempli les conditions qu'elle exige; attendu que Davin et Gadie n'avaient rempli aucune des conditions prescrites par l'art. 2110.» (Árrêt du 6 janv. 1829.)

2111. Les créanciers et légataires qui demandent la séparation du patrimoine du défunt, conformément à l'article 878, au titre des Successions, conservent, à l'égard des créanciers des héritiers ou représentants du défunt, leur privilége sur les immeubles de la succession, par les inscriptions faites sur chacun de ces biens, dans les six mois à compter de l'ouverture de la succession. Avant l'expiration de ce délai, aucune hypothèque ne peut être établie avec effet sur ces biens par les héritiers ou représentants, au préjudice de ces créanciers ou légataires.

Qui demandent la séparation du patrimoine. J'ai 100,000 fr. de biens et 100,000 fr. de dettes; je meurs, et ma succession est dévolue à mon fils, qui a 100,000 fr. de dettes et pas de biens: si mes créanciers demandent la séparation du patrimoine, ils empêcheront la confusion de ma succession avec les dettes de mon fils et seront payés de leurs créances. Si, au contraire, cette confusion s'opère, ils ne pourront se faire payer sur les biens que j'avais laissés que concurremment avec les créanciers de mon fils, et conséquemment ils ne seront payés que de la moitié de leurs créances: c'est ce privilége d'être payés seuls sur les biens composant ma succession, que l'article leur permet de conserver par une

inscription dans les six mois de mon décès. La loi exige cette inscription pour que des tiers, qui pourraient contracter avec mon héritier, ne soient pas trompés en pensant que ma succession lui appartient réellement. L'art. 880 dit que la demande des créanciers peut être exercée sur les immeubles, tant qu'ils existent dans les mains de l'héritier; mais il faut entendre cette disposition relativement à l'héritier, et non pas relativement aux tiers, à l'égard desquels, aux termes de notre art. 2111, le privilége résultant du droit de demander la séparation des patrimoines doit être inscrit dans les six mois. QUESTION. La séparation des patrimoines a-t-elle besoin d'être demandée, lorsque la succession est acceptée sous bénéfice d'inventaire? La cour suprême a embrassé la négative : « Vu les art 802, 803, 807, 2146, 877, 878, 880 et 2111 du C. civ.; considérant qu'il faut distinguer la séparation des patrimoines qui a lieu sur la demande des créanciers d'un défunt dans le cas où sa succession est acceptée purement et simplement, et la séparation de patrimoines qui a lieu par l'effet de la loi, quand la succession n'est acceptée que par bénéfice d'inventaire; que, dans le premier cas, l'héritier étant saisi, sans condition, de tous les biens du défunt, il s'opère dans la main de l'héritier une confusion de ces biens avec ceux de son auteur; que c'est pour établir une séparation entre ces deux patrimoines, que la loi a donné aux créanciers du défunt, sous certaines conditions, la faculté de demander que la confusion n'ait pas lieu par rapport à eux ; que, dans le deuxième cas, ce n'est pas sur leur demande que la sépa ration des deux patrimoines s'établit; que l'inventaire des biens du défunt, pose, entre les deux masses de biens, une barrière qui exclut les créanciers du défunt de tous droits sur les biens de l'héritier, mais qui, en même temps, leur assure un gage exclusif dans le patrimoine du défunt, meubles et immeubles; que, dans ce cas, l'héritier bénéficiaire n'est véritablement qu'un administrateur comptable; et que, dans une telle situation, les créanciers n'ont point à demander une séparation de patrimoines, qui existe si évidemment; que la faculté d'exercer l'action en séparation de patrimoines n'a été introduite que pour le cas d'acceptation pure et simple et de la confusion qui en dérive; qu'ainsi, la condition imposée par l'art. 2111 du Code, aux créanciers du défunt, et qui limite à six mois l'exercice de leur demande et qui leur impose l'obligation de prendre inscription dans ce délai, ne s'applique qu'à l'art. 878, anquel l'art. 2111 renvoie positivement; considérant que la séparation de patrimoines opérée par l'acceptation sous bénéfice d'inventaire par l'acte authentique passé au greffe, et par l'inventaire qui en est la condition essentielle, ne peut, par rapport aux créanciers de la succession, disparaître et cesser d'avoir effet par la suite, et moins encore plusieurs années après, par le fait de l'héritier; considé rant que la peine d'être, en ce cas, considéré comme héritier pur et simple, est établie en faveur des créanciers du défunt, et ne peut, par conséquent, tourner contre eux et les priver de leur gage exclusif; qu'eux seuls pourraient invoquer cette déchéance, puisqu'elle n'existe que pour eux; que ni l'héritier bénéficiaire ni ses créanciers ne peuvent se créer un droit par un fait personnel de cet héritier administrateur comptable; considérant qu'une doctrine contraire ouvrirait carrière à des fraudes qu'il serait impossible de constater, puisque l'héritier pourrait, par un fait même secret, et à l'insu des créan ciers de la succession, leur enlever leur gage, et l'attribuer à ses propres créanciers; que l'héritier pourrait aussi, en faisant acte d'héritier, postérieurement aux six mois de délai de rigueur prescrit par l'art. 2111, enlever aux créanciers de la succession le droit de pren dre la voie de la demande en séparation de patrimoines; casse, etc. (Arrêt du 18 juin 1833.) Mais si la succession, d'abord acceptée sous bénéfice d'inventaire, a été ensuite acceptée purement et simplement, on retombe

dans le droit commun, et les créanciers doivent exécuter l'art. 2111 pour conserver leur privilége. (Bordeaux, 24 juill. 1830.)

2112. Les cessionnaires de ces diverses créances privilégiées exercent tous les mêmes droits que les cédants, en leur lieu et place.

2113. Toutes ces créances privilégiées soumises à la formalité de l'inscription, à l'égard desquelles les conditions ci-dessus prescrites pour conserver le privilége n'ont pas été accomplies, ne cessent pas néanmoins d'être hypothécaires; mais l'hyothèque ne date, à l'égard des tiers, que de l'époque des inscriptions qui auront dû être faites ainsi qu'il sera ci-après expliqué.

= D'être hypothécaires. Ainsi cet article change en véritables hypothèques légales les priviléges non conservés par l'inscription; et même les créances qui n'étaient dans le principe que chirographaires (telles que celles des créanciers du défunt auxquels il n'avait pas consenti hypothèque, mais qui ont le droit de demander la séparation des patrimoines) deviennent hypothécaires, non à l'égard des créanciers du défunt, mais à l'égard de ceux de l'héritier.

Ne date. C'est en cela que les priviléges, devenus hypothèques légales, diffèrent des priviléges; ils ne datent plus que de l'inscription, et se trouveraient ainsi primés par des créances hypothécaires inscrites avant eux : sous ce rapport, cet article sert encore expliquer la distinction que nous avons faite entre le rang et l'effet du privilége. (Art. 2106.)

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Droit réel: Jus in re. Mais, à la différence des servitudes, il n'est pas un démembrement de la propriété, dont il ne restreint pas la jouissance dans les mains du propriétaire. C'est un droit réel, en ce sens que le fonds est affecté à l'acquittement de la créance qui le suit, en quelques mains qu'il passe (art. 2166), comme une chose qui lui est inhérente.

Indivisible. Cette partie de l'article est une traduction du principe, est tota in toto et tota in qualibet parte. Ainsi, je meurs laissant un immeuble affecté à une hypothèque pour 100,000 fr.; un de mes héritiers paye sa part: l'immeuble reste affecté en totalité, comme s'il n'avait rien été payé.

2115. L'hypothèque n'a lieu que dans les cas et suivant les formes autorisées par la loi.

Et suivant les formes. Ainsi l'hypothèque conventionnelle ne peut être consentie que par acte authentique. (Art. 2127.)

(1) L'hypothèque consentie par l'emphytéote en faveur du bailleur, tant sur les bâtiments par lui construits que sur le

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Ou actes judiciaires. Par exemple, les reconnaissances d'écritures, faites en jugement; l'ordonnance d'exécution des décisions arbitrales. (Art. 2123.)

Forme extérieure des actes. C'est-à-dire qu'ils doivent être revêtus des formes qui constituent l'acte authentique; en d'autres termes, passés devant notaires. (Art. 1317.)

2118. Sont seuls susceptibles d'hypothèques, 1o Les biens immobiliers qui sont dans le commerce, et leurs accessoires réputés immeubles; ·2° L'usufruit des mèmes biens et accessoires pendant le temps de sa durée (1).

Dans le commerce. Ainsi les rues, les ports, etc., du moins tant qu'ils n'ont pas changé de nature, ne sont pas susceptibles d'hypothèque. (Art. 538, 540, 541.) Les biens d'un majorat étant également placés hors du commerce, ils ne sont pas susceptibles d'hypothèque. (Art. 40, décr. 1er mars 1800.)

Et leurs accessoires. Par exemple, les animaux attachés à la culture, les ustensiles aratoires, les chaudières, cuves, etc. (Art. 524): mais ces objets ne peuvent être hypothéqués qu'avec l'immeuble auquel ils sont attachés; car c'est comme accessoires seulement qu'ils sont susceptibles d'hypothèques; une fois détachés des fonds, le créancier hypothécaire ne pourrait les suivre dans les mains des tiers; car ils deviennent meubles, et les meubles n'ont pas de suite par hypothèque. (Article 2119.) QUESTION. Si les ustensiles et accessoires réputés immeubles au moment de l'inscription, ont été remplacés depuis par d'autres pour cause de vétusté, l'hypothèque frappe-t-elle sur ces nouveaux objets? La cour de Rouen a établi l'affirmative : « Attendu que, quand un immeuble est hypothéqué, l'hypothèque frappe de plein droit sur les accessoires légalement réputés immeubles, comme sur le fonds même; que, dans l'espèce, la raffinerie de sucre a été hypothéquée à la créance de Sénécal avec les chaudières, cuves, pompes et autres ustensiles y tenant nature d'immeubles par destination, et que l'inscription de ladite créance a été en conséquence prise sur le tout; attendu que tout ce qui accroît au fonds hypothéqué, soit naturellement, soit par le fait de l'homme, accroît à l'hypothèque; que c'est par une conséquence de ce principe que l'édifice construit sur un fonds nu profite à l'hypothèque inscrite sur le même fonds; de même, si une maison neuve est substituée à une maison tombant en ruines, l'hypothèque s'établit sur la nouvelle maison comme elle l'était sur l'ancienne; attendu qu'il faut en dire autant de l'hypothèque assise sur une usine et ses accessoires devenus immeubles par destination; qu'ainsi, il importe peu que la veuve Lemercier et fils, ou leurs préposés ayants cause, aient remplacé, pour cause de vétusté, les ustensiles de la raffinerie hypothéquée à la créance de Sénécal, par des ustensiles nouveaux : du moment qu'ils ont été incorporés à l'établissement, ils sont devenus le gage du créancier inscrit ; et comme ils tenaient nature d'immeubles par destination à l'époque de la saisie réelle, il est incontestable qu'ils y ont été légale

droit de bail, n'est pas recevable. (Brux., 5 juill. 1826; arrêt contraire 1824.)

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