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NOTES

ET

PIÈCES JUSTIFICATIVES.

No Ier.

Extrait d'un Mémoire sur les Inoendies et les Bombardemens.

.... POURQUOI assiége-t-on les places? est-ce pour les détruire, ou pour les enlever à l'ennemi? Si c'est pour les détruire, il faut avoir de bien grands motifs, car on enveloppe dans cette affreuse mesure tous les êtres innocens qu'elles renferment! si c'est pour les enlever à l'ennemi, que fera sur l'esprit d'un commandant ferme, tout le mal que l'on causera aux habitans? Son devoir, sa réputation, l'intérêt de l'état, lui imposent l'obligation de se défendre à outrance: ce ne sont pas les maisons qu'on l'a chargé de conserver, mais les remparts, et par eux la position. Cet officier sera donc, malgré son amour pour l'humanité, sourd aux larmes et au désespoir des citoyens : et les moyens violens n'auront d'effet que contre eux!

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L'usage des mines, dira-t-on aussi, n'est pas moins infernal que celui de la bombe; sans contredit: mais comme il n'est applicable qu'à des points purement militaires, je ne le blâmerai ni pour l'attaque, ni pour

la défense; dans l'attaque il a pour but d'ouvrir les défenses de la place, et ne s'étend point au-delà ; dans la résistance son rôle est plus grand, il tend à retarder la marche de l'assiégeant, à le rebuter, à présenter à chaque pas un gouffre près d'engloutir les hommes et les machines.

L'effet ordinaire des bombes est d'enfoncer les voûtes, d'écraser, renverser et brûler les maisons, de blesser beaucoup de monde par leurs éclats : les dispositions du gouverneur doivent donc tendre toutes, dès qu'il prévoit un bombardement à préserver la place des dégats que les bombes y causent. (*).

Il y a pour cela des mesures générales do précaution qui doivent être prises dans toutes les forteresses, avant même qu'on soit menacé du bombardement; et des mesures de circonstance qui ne doivent être employées que lorsqu'il a lieu.

Ces mesures générales sont les blindages, le nettoiement des souterrains, l'approvisionnement en pompes, échelles, seaux de cuir, crocs, pinces, etc. L'organisation et l'instruction des compagnies de pompiers; les amas de terre, de sable, de fumier de cheval, partout où il y a peu d'eau ; le bon placement des gardes-feux sur des points élevés, d'où ils puissent aisément découvrir les quartiers de la ville, qui se trouvent sous leur surveillance, etc.

(*) On prétend, dit M. Leblond (Élément de fortification, page 274.), qu'au siége de Tournay, en 1745, on a jeté près de 45,000 bombes dans la citadelle.

Les mesures de circonstance sont, à l'extérieur, les opérations souterraines et celles de vive force, contre les batteries incendiaires; dans l'intérieur, le dépavement des rues dans toutes les parties que la bombe peut atteindre, le blindage des caves reconnues propres à réfugier les habitans, ou à servir de dépôt, celui des puits et des citernes si l'a place n'a pas dans ses murs des eaux abondantes que l'ennemi ne puisse pas détourner; le placement dans les cours et jardins, de tous les vieux meubles, de la paille et autres matières faciles à enflammer, (le bois de stère et les fagots peuvent être placés par couches croisées sous les toitures, lorsque la charpente des étages est bonne, afin d'amortir l'effet des gros projectiles verticaux); le dépouillement de toute espèce de rideaux et de tentures dans les appartemens, etc.

En règle générale, l'eau, la terre, le fumier mouillé et les coupures sont les meilleurs moyens à employer contre le feu : l'eau pénètre partout à l'aide des pompes et des seaux, et plus le volume qu'on en lance à la fois est considérable et ramassé, moins il s'en évapore et mieux il éteint. La terre et le fumier mouillé s'em ployent par pelletées pour étouffer les tisons ardens ; mais la terre sert de préférence contre l'artifice : on fait bien de la tremper, après l'avoir jetée sur le feu. Dans les places on doit :

MESURES GÉNÉRALES.

1o Charger les magasins à poudre dont les voûtes sont faibles, ainsi que celles des souterrains et autres

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casemates destinées au casernement, si elles ne sont pas reconnues à l'épreuve.

2° Mettre sous des blindages, les magasins de subsistances, les dépôts d'artifices, les hôpitaux et les petits magasins des batteries.

3° Préserver les archives du gouvernement et celles du notariat, en les abritant dans un lieu sûr, sec, voûté ou blindé.

4° Former des compagnies de pompiers, en nombre porportionné à l'étendue et à la population de la ville; les composer de tous les ouvriers, en bois, en fer, en cuir, ainsi que des maçons, couvreurs, manœuvres et autres individus accoutumés aux travaux les plus fatigans; leur donner des maîtres ouvriers, des architectes et des entrepreneurs de bâtimens pour officiers.

5° Former l'approvisionnement en pompes (*), échelles, seaux de cuir et généralement en ustensiles indispensables contre les incendies.

6o Exercer les compagnies de pompiers à bien diriger l'eau ; et leurs sous-officiers à former sans bruit et sans confusion, les habitans en chaîne double, un côté, composé des individus les plus forts pour passer les seaux pleins; l'autre, composé des individus les plus faibles;, pour reporter les seaux vides aux réservoirs. Lorsque les escaliers de l'édifice qu'on secourt

(*) Les tuyaux de pompes crèvent souvent parce que les pistons sont disproportionnés avec leurs volumes: plus ils sont petits mieux ils chassent; mais aussi plus ils sont larges plus ils jettent d'eau à la fois.

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sont étroits, on n'y forme qu'une chaîne simple et l'on jette les seaux de cuir par une fenêtre dans la rue, où le sous-officier de pompiers les fait ramasser et répartir.

7° Apprendre aux pompiers que dans les incendies, les pompes, quoique abondamment pourvues d'eau, produiront peu d'effet, si l'on promène la colonne de ce liquide sur les parties enflammées; que plus on la promènera légèrement, plus l'embrasement prendra de forces; mais qu'on se rendra maître du feu, si l'on s'attache fortement à ses extrémités, si on les inonde en quelque sorte, pour ne gagner que peu à peu vers le centre; que malgré cela, pendant que plusieurs pompes suivront ce procédé, d'autres pour prévenir les ravages, doivent mouiller les parties voisines du foyer et verser par fois des torrens sur sa partie la plus appa

rente.

8° Leur faire savoir que, quand l'ennemi jette beaucoup de boulets rouges, il faut en inonder les trous tant qu'on en voit sortir de la fumée, parce qu'elle est la preuve qu'on est parvenu au projectile, et parce que tant que celui-ci donne de la fumée, il conserve une chaleur dangereuse (*).

9° Partout où l'eau sera très rare, on disposera des petits monceaux de terre, de sable et de fumier dans

(*) Un boulet chaud peut, quoiqu'il ne répande plus de lumière, contenir encore assez de parties incendiaires pour enflaminer les corps combustibles qui l'environnent.

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