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teur en droit. Enfin, nul ne pourra être auditeur durant plus de six ans.

Le service extraordinaire se compose des membres du service ordinaire qui quittent le Conseil pour remplir d'autres fonctions publiques, et auxquels le titre de conseiller d'État ou de maître des requêtes en service extraordinaire sera conféré par le roi, et de ceux qui seront appelés par le roi à en faire partie comme conseillers d'État ou maîtres des requêtes. Ils ne pourront prendre part aux travaux et aux délibérations du Conseil que sur une ordonnance royale, et cette autorisation ne pourra être conférée qu'aux sous secrétaires d'État, aux membres de la Cour de cassation, aux premiers présidents ou procureurs généraux des cours royales, aux membres des conseils administratifs placés auprès des ministères; aux chefs préposés à la direction d'une branche de service dans les départements ministériels, au préfet de la Seine et au préfet de police. Le nombre des conseillers auxquels cette autorisation est accordée ne pourra dépasser les deux tiers des conseillers en service ordinaire, et le nombre des maîtres des requêtes ne pourra excéder celui des maîtres des requêtes en service ordinaire."' Telle devait être la composition du Conseil d'État, d'après les dispositions principales du titre premier du projet de loi. Il y était laissé, comme on le voit, une large part au pouvoir, surtout en ce qui touche aux nominations à faire comme à l'avancement à donner, et au droit d'étendre le personnel du service extraordinaire. Quant à la limitation du nombre des membres du service extraordinaire, appelés à prendre part aux travaux du Conseil, l'expérience en avait montré la nécessité. La réforme était déjà opérée par ordonnance depuis 1839 pour les conseillers, et il était aussi de l'intérêt de l'administration, comme on l'avait constaté, que de jeunes auditeurs ou maîtres des requêtes en service ordinaire ne fussent pas exemptés d'une trop grande part de leur travail, par la participation des maîtres des requêtes en service ex

traordinaire. L'administration en souffrait, puisqu'on leur eût enlevé ainsi les moyens de s'instruire promptement dans la connaissance et la pratique des affaires; c'eût été d'ailleurs compromettre aussi leur avenir personnel.

Le second titre du projet décrit les fonctions du Conseil d'État, fonctions étendues et variées, mais, dans tous les cas, purement consultatives. Quel que soit l'avis qu'il exprime, les ministres sous leur responsabilité demeurent toujours libres d'accorder ou de refuser leur approbation. Il est appelé à donner son avis sur les ordonnances royales portant règlement d'administration publique, comme sur celles qui doivent être rendues dans la forme des règlements d'administration publique, sur la validité des prises maritimes, et en général sur toutes les affaires dont l'examen lui est déféré par des dispositions législative sou réglementaires. De même, lorsque le renvoi lui en est fait par les ministres, pour les projets de loi, d'ordonnance de toute nature et toutes les questions administratives. Enfin, il est chargé de l'instruction des conflits d'attributions entre l'autorité administrative et l'autorité judiciaire, et il propose les ordonnances qui statuent sur ces conflits; sur les questions decompétence qui s'élèvent entre les autorités administratives en matière contentieuse; sur les recours dirigés pour incompétence ou excès de pouvoir contre toutes les décisions administratives; sur les recours dirigés pour violation des formes et de la loi contre les arrêts de la Cour des Comptes, et autres décisions administratives rendues en dernier ressort en matière contentieuse; sur les recours dirigés contre les décisions administratives en matière contentieuse qui ne sont pas rendues en dernier ressort; sur les oppositions formées à des ordonnances royales, et sur les demandes en interprétation de ces ordonnances; enfin, sur les affaires administratives contentieuses qui, en vertu de dispositions législatives ou réglementaires, doivent être directement soumises à son examen.

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Ces dispositions reposent sur le principe de la séparation des pouvoirs, d'où il résulte que l'administration peut seule juger les actes de l'administration, et il n'est pas difficile de comprendre, disait à ce sujet l'exposé des motifs, que le jour où les tribunaux seraient investis du droit d'interpréter ou de réformer ces actes, l'administration tout entière, par une pente inévitable et fatale, passerait entre les mains de l'autorité judiciaire. D'ailleurs, le garde des sceaux établissait, pour détruire toute espèce de doute à cet égard, que cette intervention du conseil d'État dans le règlement des affaires du contentieux administratif, n'est en définitive pas autre chose que de l'administration. M. Martin du Nord ter minait en combattant tout mode de recours de l'adminis tration, lequel aurait pour effet de troubler l'harmonie qui doit exister entre la jurisprudence contentieuse et la jurisprudence administrative du conseil d'État, et toute opinion qui demanderait la création d'un tribunal administratif supérieur.

Le titre troisième du projet détermine les formes de procédure, divisées en deux sections, l'une relative aux matières administratives non contentieuses, et l'autre aux matières administratives contentieuses. Dans le premier cas, le Conseil est divisé en comités qui correspondent aux divers départements ministériels; dans le second, indépendamment de ces comités, un comité spécial est chargé de diriger l'instruction écrite et de préparer le rapport de toutes les affaires. Les maîtres des requêtes n'y doivent avoir que voix consultative dans les affaires dont ils ne seront pas les rapporteurs.

Telles étaient les dispositions principales de la loi proposée par le gouvernement.

La commission chargée de l'examen n'y fit que de légères modifications dont la Chambre eut connaissance (17 mars) par l'organe de M. Persil, rapporteur. La discussion qui s'ouvrit le 6 avril donna raison au gouvernement sur beau

coup de points, excepté sur ce qui touche la position des auditeurs de première classe qui, suivant le projet, doivent, de même que ceux de seconde classe, cesser de faire partie du Conseil, comme auditeurs, après un noviciat de six ans, Le garde des sceaux persista dans sa première pensée; mais il adhéra à une autre modification, qui consistait à donner voix délibérative aux maîtres des requêtes destinés au nombre de cinq, à faire partie du comité du contentieux avec les cinq conseillers.

Le projet de loi fut voté le 7 avril, et, le 26, le ministre le présenta à la Chambre des députés; mais la discussion en fut différée à une prochaine session.

Loi de recrutement. Nous avons rapporté, dans l'Annuaire de 1841, les débats qui eurent lieu à cette époque sur un projet de loi pour le recrutement. La Chambre des députés avait consacré le projet par son vote, avec de légères modifications; mais un amendement de peu d'importance, adopté par la Chambre des pairs, détermina le ministre de la guerre å le retirer.

A la session suivante, il fut présenté de nouveau et discuté au Palais-Bourbon. Une commission l'examina et en approuva les principales dispositions au Luxembourg; mais le ministre ne se contenta pas de ces suffrages; il voulut encore l'éclairer des lumières d'une commission mixte tirée du sein des deux Chambres, et c'est après avoir ainsi pris conseil de tous les hommes spéciaux du parlement, qu'il vint de nouveau soumettre son projet à l'appréciation de la Chambre des pairs (10 janvier).

L'exposé des motifs déclare que le projet a pour but de perfectionner la loi du 21 mars 1832 dans un certain nombre de dispositions secondaires, d'améliorer le remplacement dans l'intérêt de l'État, de la famille et du remplaçant luimême; enfin d'établir les moyens de recrutement de telle manière que l'armée puisse se prêter à tous les développements de force, dans les circonstances extraordinaires, sans

être une charge trop onéreuse pour le trésor en temps de paix. Au reste le projet ne satisfait, ni l'opinion qui regarde l'élévation du contingent comme un détriment pour la production de la richesse nationale, ni celle qui demande une modification de l'esprit même de l'armée par la priorité don– née au principe de l'engagement volontaire sur le principe de l'appel.

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Les articles 3, 30 et 31 sont les plus importants du projet. L'article 3 stipule que l'armée se compose dans les proportions qui résultent des lois annuelles de finances et du contingent, 1o de l'effectif entretenu sous les drapeaux, 2o des hommes qui sont en congé illimité dans leurs foyers. La teneur de l'article 30, c'est que les jeunes gens définitivement compris dans le contingent ou ceux qui ont été admis à les remplacer, seront immédiatement répartis entre les corps de l'armée, et aussi que ces jeunes soldats seront mis en activité en vertu d'une ordonnance royale. Par l'article 31, il est dit que la durée du service des jeunes soldats appelés sera de huit ans, qui compteront du 1er juillet de l'année dans laquelle ils auront été inscrits sur les contrôles de l'armée. Il y est également établi que, lorsqu'il y aura lieu d'accorder descongés illimités aux militaires sous les drapeaux, ces congés seront délivrés selon les nécessités du service, dans chaque corps ou fraction de corps et dans chaque grade; que les hommes en congé illimité constitueront la réserve et qu'ils pourront être soumis à des revues et à des exercices périodiques qui seront déterminés par le ministre de la guerre.

La commission, dont le rapporteur fut M. de Préval, approuva l'ensemble du projet de loi (3 avril); cependant elle proposa d'y introduire une modification importante qui consistait à reconnaître en réserve les jeunes soldats non encore appelés sous les drapeaux, et elle amenda en ce sens les articles 3, 30 et 31 du projet du gouvernement. C'était, suivant

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