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dévastaient et gaspillaient les ressources qu'elles auraient pu fournir aux caisses municipales: le déboisement des montagnes poursuivait son cours. Le projet remédiait à ces abus. Désormais les gardes seraient nommés par le préfet : leur salaire, jusqu'alors irrégulier, variable et insuffisant (plusieurs ne touchaient que 150 et même 50 fr. par an), serait fixé à 500 fr., pour la surveillance de 500 hectares. Le nombre des triages et des gardes serait progressivement diminué ils seraient moins nombreux, mais meilleurs et mieux payés.

La discussion sur le projet de loi fut courte et sans grand intérêt.

M. le comte Pelet (de la Lozère) accusait la loi nouvelle de dépouiller les communes et les établissements publics du droit d'administrer, sous l'autorité du préfet, leurs bois ou autres propriétés. Ce droit serait désormais transmis à l'administration forestière. L'honorable orateur voyait là une dérogation au principe général de la législation qui régit les communes, et un retour à l'excessive centralisation que les auteurs du code de 1827 s'étaient attachés à détruire.

M. le marquis de Boissy attaqua également le projet, par cette raison qu'il porterait atteinte aux droits de propriété des communes.

M. Romiguières, se rangeant à l'avis de M. de Boissy, proposa une rédaction mixte entre le projet de la commission et celui du gouvernement, d'après laquelle les gardes ne pourraient être nommés par le préfet, qu'après que le maire ou les établissements publics auraient été en→ tendus.

M. le ministre des finances et M. le baron Nau de Champlouis, rapporteur, ayant ensuite défendu le projet par les raisons ci-dessus énoncées, l'ensemble en fut adopté par 84 boules blanches contre 11 boules noires.

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Tarif des commissaires-priseurs. Un projet de loi d'importance secondaire, dans l'ordre administratif, con

cernant le tarif des commissaires-priseurs, fut porté le 24 avril à la Chambre des députés. La corporation des commissaires-priseurs était restée depuis quarante ans dépourvue d'un tarif régulier, analogue à celui qui existe pour les autres classes d'officiers ministériels, et, dans l'absence de toute règle, l'arbitraire le plus criant avait pris la place du droit. Le projet dont la Chambre était saisie avait pour but de faire cesser ce désordre et de régler, suivant un principe uniforme, les émoluments des commissaires-priseurs. Il avait déjà été soumis à un double examen dans les deux Chambres: adopté l'année précédente par la Chambre des députés, il avait subi à la Chambre des pairs quel'ques modifications assez importantes (Voy. l'Annuaire de 1842).

La chambre passa immédiatement à la discussion des articles.

L'article 1er du projet modifié par la commission contenait, entre autres dispositions, celles-ci (Voy. pour l'ensem ble de la loi les documents historiques, partie officielle, France):

<< 3o Pour tous droits de vente, non compris les déboursés faits pour y parvenir et en acquitter les droits, non plus que la rédaction et l'application des placards, 6 p. 2% sur le produit des ventes, sans distinction de résidence. >>

D'après le tarif actuel, les commissaires-priseurs de Paris recevaient 8 p. 1% sur les ventes dont le produit ne dépassait pas 1,000 fr. ; 8 p. 1. depuis 1,000 fr. jusqu'à 4,000 fr., et 7 p. 2. au-dessus de 4,000 fr. Ainsi, comme le fit observer M. le garde des sceaux, le droit le plus fort tombait sur les vendeurs les plus pauvres, sur de misérables successions. En prenant la moyenne sur un grand nombre d'années, on avait reconnu que la taxe uniforme de 6 fr. assurerait aux commissaires-priseurs les mêmes bénéfices, en même temps qu'elle serait plus équitable.

C'est cette disposition que vint combattre M. Perrier (de

l'Ain), par un amendement dont le premier paragraphe allouait aux commissaires-priseurs, pour droit de prisée, par chaque vacation de trois heures, les deux tiers des droits alloués aux notaires par le tarif du 13 février 1807.

Le rapporteur, M. Dugabé, soutint avec force l'article de la commission. L'amélioration qui y était consacrée était désirée avec ardeur par l'opinion publique.

L'amendement de M. Perrier fut rejeté (25 avril). Les autres articles du projet ne donnèrent lieu à aucun débat, excepté l'article 10, ainsi conçu :

« Les articles 1, 2, 3 et 4 sont déclarés communs aux officiers publics qui, dans les localités où il n'existe pas de commissaires-priseurs, sont autorisés à faire les prisées et les ventes des meubles. >>

Cetarticle n'était pas originairement dans la loi, lorsqu'elle fut présentée par le gouvernement, en 1841. Il y fut introduit par la Chambre des pairs, comme mesure de justice et de nécessité. On avait pensé que, puisque les notaires, les huissiers et les greffiers avaient le droit de faire, dans certains cas, les actes que la loi attribue aux commissaires-priseurs, ils devaient être soumis aux mêmes tarifs. Il n'avait pas semblé juste que, lorsque les droits des commissairespriseurs étaient limités, ceux des autres officiers ministériels remplissant les mêmes fonctions, faisant les mêmes actes, ne le fussent pas. Cette pensée, développée par le rapporteur de la commission, avait frappé également la Chambre des députés, et la commission s'était rangée à l'avis du gouvernement qui, lui-même, avait adopté la proposition de la Chambre des pairs.

M. Delacroix, cependant, réclamait la suppression de l'article, comme le seul moyen de faire cesser tous les inconvénients de l'arbitraire.

L'article 10, abandonné par M. le garde des sceaux, fut rejeté.

Le scrutin sur l'ensemble du projet de loi donna pour Ann. hist. pour 1843.

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résultat, sur 233 votants, (majorité absolue, 117), 145 boules blanches contre 88 boules noires.

La loi était adoptée (26 avril).

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Chemins de fer. Nous ne nous arrêterons pas sur quelques projets de lois spéciaux pour des chemins de fer, projets relatifs à des conditions nouvelles à établir dans les rapports de l'État et des compagnies. Ces matières ont été traitées dans un chapitre spécial (Voy. chronique des travaux publics). Constatons seulement ici que le projet de loi sur le chemin de fer d'Avignon à Marseille fut adopté par la Chambre des députés, dans sa séance du 5 juillet, et celui relatif au chemin de fer d'Orléans à Tours également adopté, dans la séance suivante (Le premier de ces projets fut adopté par la Chambre des pairs, dans sa séance du 20 juillet, et le second renvoyé à la session prochaine).

Propositions Mauguin.-Deux propositions furent présentées à la Chambre des députés, le 8 avril, par MM. Mauguin, Lassalle et Tesnière, l'une donnant une sanction pénale à l'autorité contre les boissons falsifiées, l'autre tendant à affranchir de tous droits les eaux-de- vie et esprits rendus impropres à la consommation (1).

(1) Voici le texte de ces deux propositions:

Première proposition.

« Article 1er. Toute personne faisant le commerce des vins, qui aura dans ses caves, celliers et autres parties de son domicile ou magasin, dés cidres, bières, poires, sirops, mélasses, bois de teinture, vins de pressée, eaux colorées et préparées, et autres matières quelconqués propres à fabriquer, falsifier ou mixtionner les vins, sera punie d'une amende de 200 fr.; lesdites matières seront saisies et détruites.

Art. 2. Quiconque aura vendu des boissons falsifiées, ou falsifié des boissons dans l'intention de les vendre, sera puni, si ces boissons contiennent des substances nuisibles à la santé, de deux mois à deux ans de prison, et d'une amende de 300 fr. à 3,000 fr.

Si les boissons ne contiennent aucune substance nuisible à la santé, la peine sera de six jours à six mois de prison, et d'une amende de 50 f. à 1,500 fr.

Les tribunaux seront autorisés à appliquer l'une des deux peines cidessus établies, suivant les circonstances, sans pouvoir toutefois faire usage des dispositions de l'art. 463 du Code pénal.

Les boissons falsifiées seront, dans tous les cas, saisies et répandues. Le fugement qui interviendra sera affiché et inséré dans l'un des journaux du département désigné par le tribunal.

Art. 3. En cas de récidive dans l'espace de deux ans, la peine sera portée

Le 22 avril, M. Mauguin développa ces deux propositions à la Chambre. Pendant plus de deux heures, l'honorable député excita l'intérêt le plus marqué, en traçant le tableau du système économique et financier qui régit chez nous la propriété foncière. Ce discours restera comme un document sérieux, intéressant à consulter sur un grand nombre de questions qui, si elles ne sont pas mûres encore, ne peuvent manquer d'avoir bientôt leur jour.

L'adhésion du gouvernement était acquise à l'avance à ces deux réformes. Toutefois, M. le ministre des finances, en déclarant qu'il adoptait le principe, réserva sa liberté complète en ce qui touchait aux moyens d'exécution. De leur côté, les auteurs des deux propositions n'avaient pas entendu renfermer le gouvernement ni la Chambre dans le système qu'ils avaient présenté. Ces explications coupèrent court à tout débat sur la prise en considération qui fut votée à l'unanimité. Les deux propositions furent renvoyées à l'examen des bureaux.

La première seulement fut comprise dans l'ordre du jour de cette année, et fut adoptée par la Chambre des dẻputés et par la Chambre des pairs ( 17 juillet), à une grande majorité.

Pétitions.-Parini les pétitions présentées à la Chambre

au maximum, et si le maximum a déjà été appliqué, elle sera portée au double.

Art. 4. Les employés des contributions indirectes seront autorisés, même dans les établissements soumis à l'abonnement, à rechercher soit les substances spécifiées dans l'article 1er, soit la fabrication ou le débit de boissons falsifiées.

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roi.

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Leurs procès-verbaux seront immédiatement transmis au procureur du

Art. 5. Toutes dispositions contraires à la présente loi sont et demeurent abrogées.

Deuxième proposition.

Art. 1er. A l'avenir, seront affranchis de tous droits, quel que soit le destinataire, les eaux-de-vie et esprits dénaturés de manière à être rendus impropres à la consommation.

Art. 2. Les formalités à remplir pour opérer et constater la dénaturation seront établies par un règlement d'administration publique.

» DE LASALLE, Mauguin et Tesnière, »

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