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apparaît avec le même sens l'expression droit ecclésiastique. (f)

82.B) Diversité d'après les confessions de foi.

L'Église du Christ était primitivement, comme la foi chrétienne elle-même, une et indivisée. Dans la suite des temps quelques parties se détachèrent de cette unité pour se faire une existence individuelle. C'est ainsi que d'assez bonne heure l'Église d'Orient s'est, du moins quant à la constitution, séparée de celle d'Occident; plus tard elle vit elle-même dans son sein l'Église russe et maintenant aussi celle du nouveau royaume de Grèce se créer indépendantes. Dans l'Occident, lors du grand schisme du seizième siècle, les protestans se détachèrent de l'Église catholique romaine, et se divisèrent selon la différence des pays et des confessions en une foule d'Eglises et de communes particulières. Bien que de toutes les doctrines chrétiennes en présence une seule soit dans le vrai, et qu'ainsi une seule Eglise puisse être la véritable, tous ces partis religieux ont acquis de fait et politiquement une consistance extérieure, et jouissent plus ou moins d'une existence légale. Le droit ecclésiastique se divise dès lors en autant de branches qu'il y a de communions chrétiennes légalement reconnues.

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La discipline ecclésiastique subsista fort longtemps sans donner lieu à des écrits ou enseignements scientifiques. Cet état de choses changea quand la multiplicité des droits écrits, les controverses, la complication des rapports eurent éveillé la réflexion et fixé l'attention de l'Église sur cette partie de sa vie intérieure. Alors le droit canonique se formula en une discipline scientifique qu'on appelle jurisprudence ecclésiastique; elle agit dans une triple direction. D'abord elle réunit les dispositions qui dans l'Église ont réellement force de loi; ensuite elle expose comment le droit régnant a pris naissance; enfin elle prouve que ce droit est rationnel, c'est à dire qu'il répond à l'idée et au but de l'Eglise. Ces trois modes d'action font distinguer trois modes de traiter scientifiquement le droit ecclésiastique, les méthodes pratique, historique et philosophique. Bien que distinctes, toutes trois doivent être employées concurremment : la dégénération et le mauvais goût de l'ancienne méthode purement pratique ne sont pas moins à fuir

(f) Jus ecclesiasticum se trouve dans une ancienne somme du décret. V. Savigny hist. du dr. rom. au moyen âge. III. Part. §. 190.

que l'abus de l'histoire (g) et de la philosophie (h) que les derniers temps se sont permis dans cette science.

$ 4.B) Sciences auxiliaires.

Le droit canonique est si varié qu'on ne peut le traiter à fond sans y joindre beaucoup d'autres sciences. De ce nombre sont parmi les sciences ecclésiastiques la dogmatique et l'exégèse, source de maints statuts, l'histoire (i), les antiquités (k), la géogra

(g) Ce fut entre autres un abus de l'histoire, d'isoler une certaine période de la vie de l'Église, notamment les trois premiers siècles, et de présenter les formes qui se sont développées alors, comme l'idéal et la règle d'après lesquels doivent être jugées les dispo sitions du temps présent. Une telle méthode, malgré l'apparente érudition dont on l'appuie, est contraire aux princ pes historiques; elle se réduit en effet à nier le progrès organique dans le développement altérieur, comme si la raison de l'Église s'était épuisée dans cette période, et à considérer ce développement comme une dégénération ou une série d'accidents. Par une contradiction étrange, ce sont précisément ceux qui d'ailleurs affectent tant d'indifférence à l'égard des formes, qui veulent ici lier inflexiblement aux formes la vie de l'Eglise. Le vrai historien au contraire, suivant son sujet de siècle en siècle, reconnaîtra à l'enchaînement des faits et an caractère propre de chaque époque la nécessité intérieure qui a déterminé sa forme, et c'est sur cette mesure, non sur un faux idéal historique, qu'il réglera son jugement.

(h) L'élément essentiel de l'Église chrétienne est la révélation; par conséquent, quelque chose de positif; le philosophisme doit donc être exclu du droit ecclésiastique. Néanmoins, dans les derniers temps, on ne s'est pas fait faute de philosopher sur ce terrain. Faisant abstraction totale da christianisme, on a tenté de formuler par les seules conceptions de la raison, sous le nom de droit ecclésiastique naturel, un système sur l'Eglise et l'autorité ecclésiastique. Un tel système est d'une part inadmissible dans le droit de l'Eglise chrétienne, parcequ'il adopte un point de départ contre lequel celui-ci doit protester à l'avance, d'autre part pern cieux, en ce qu'il détourne du droit chemin le regard et l'intérêt. Quelques-uns ont prétendu appliquer leur droit ecclésiastique naturel à l'Eglise chrétienne, au moins comme règle de ses rapports extérieurs vis-à-vis de l'Etat et des autres partis religieux; mais ici encore, c'est à l'Eglise même qu'il appartient de se tracer les règles d'après sa nature et sa destination positive, et les principes régulateurs de l'Etat dans ce te matière doivent, s'il veut être chrétien, se modeler sur ce point de vue positif; sinon ils rentrent dans la théorie de la législation civile.

(i) Parmi les ouvrages sur l'histoire de l'Eglise les annales du cardinal Cæsar Baronius († 1607) avec ses continuateurs Odoricus Raynaldus, Jac. Laderchius, Abraham Bzovius, Henr. Spondanus, et les rectifications du savant frère mineur Pagy († 1699) sont toujours indispensables à raison du grand nombre de documents qu'on y trouve. Il existe en outre des ouvrages de Natalis Alexander, Sébast. le Nain de Tillemond, Claude Fleury avec la continuation de Claude Fabre, Bérault-Bercastel, Ducreux, Aug. Orsi continué par P. A. Bechetti, Saccarelli, Léop. comte de Stolberg continué par Kerz, J. N. Hortig dans la nouvelle et excellente publication de Döllinger, Katercamp, Ign. Ritter, Othmar von Rauscher, Ruttenstock.

Les luthériens ont les centuriateurs de Magdebourg et les écrits d'Arnold, Baumgarten, Pfaff, Walch, Semler, Mosheim, Schröckh, Schmidt, Spittler, Henke, Planck, Stäudlin, Gieseler, Neander, Engelhardt, Guerike. Les réformés possèdent les ouvrages d'Henri Hottinger, Fréd. Spanheim, Samuel Basnage, Herinann Venema.

(A) Il existe sur les antiquités chrétiennes des ouvrages de Schelstrate, Martene, Ma

phie (1), la statistique (m), la chronologie (n) et la diplomatique (o) de l'Église. Parmi les sciences profanes la connaissance exacte de l'état civil des peuples où s'est développé le droit canon est indispensable pour le traiter historiquement on doit dès lors être versé dans le droit romain et plus encore dans le droit germanique. Le droit mosaïque même contient le germe de plusieurs institutions ecclésiastiques (p). Pour l'interprétation des sources du droit et des diplômes, il y a grand avantage à consulter les glossaires des langues grecque (q) et latine (r) au temps de leur décadence. Enfin a numismatique même offre de l'utilité à certains égards. (s)

$5.C) Classification de la matière. 1) Anciennes méthodes.

Dès le sixième siècle se révèlent des essais de classification du droit canonique; alors on commença à en réunir les sources dans un ordre systématique. Mais cette division, bornée aux matières du

machi, Selvagio, Pelliccia, Binterim. Les protestants ont ceux de Bingham, J. H. Böhmer, Augusti, Schöne, Rheinwald.

(7) Les ouvrages sont indiqués par Doujat Prænotion. canonic. Lib. V. c. 16., Glück Præcogn. uberior. cap. III. Sect. III.

(m) Kirchliche Geographie und Statistik von L. Fr. Stäudlin. Tübing. 1804. 2 Th. 8. Cet ouvrage renferme aussi la bibliographie pour l'étude de la statistiqne ecclésiastique des divers pays. Un ouvrage uniquement destiné pour l'Allemagne était : Fr. Xav. Holl Statistica ecclesiæ Germanicæ. T. I. Heidelb. 1779. 8. Plusieurs évêchés de l'Allemagne ont en outre en ce qui les concerne des écrits ordinairement très détaillés. On trouve aussi sur cette matière des documents dans Glück Præcogn. uberiora Cap. III. Sect. I. Tit. I. §. 89. L'ouvrage le plus moderne en ce genre est : Die alte und neue Erzdiöcese Köln in Dekanate eingetheilt - von A. J. Bitterim und J. H. Mooren. Mainz 1828. 3 Th. 8.

(n) Le principal ouvrage sur cette matière est : l'Art de vérifier les dates (par Dom. Clément), quatr. édit. Paris 1819-30. 35 vol. 8. Les documens généraux sur la chronologie chrétienne se trouvent dans le second volume d'Idelers Handbuch der mathematischen und technischen chronologie. Berlin 1825. 2 Th. 8.

(0) La Bibliographie er est indiquée dans l'ouvrage inachevé de Schönemann, Versuch eines vollständigen Systems der allgemeinen besonders älteren Diplomatik. Hamb. 1801. Leipz. 1818. 2 Th. 8.

(p) J. D. Michaelis Mosaisches Recht. Frankfurt 1777. 6 Th. 8.

(q) Glossarium ad scriptores mediæ græcitatis, auctore Carolo Dufresne Domino Du Cange. († 1668) Lugdun. 1€88. II Tom. fol.

(r) Glossarium ad scriptores mediæ et infimæ latinitatis, auctore Carolo Dufresne Domino Du Cange-editio nova locupletior et auctior opera et studio monachorum ordinis S. Benedic'i è congregatione S. Mauri. Paris. 1733-1736. VI. Tom. fol., Glossarium novum ad scriptores medii ævi tum latinos cum gallicos seu supplementum ad auctiorem Glossarii Cangiani editionem collegit et digessit D. P. Carpentier O. S. B. Præpositus S. Onesymi Dancheriensis. Paris. 1766 IV. Tom. fol.

(s) La bibliographie en est mentionnée dans Glück Præcognita uberiora Cap. III. Sect. V.-J. Appel a récemment publié un ouvrage sur cette matière: Repertorium der Münzkunde des Mittelalters. Pesth 1820. 4 Tb. 4.

droit écrit, offrait de grandes lacunes parcequ'une foule de rapports n'étaient pas encore fixés par écrit. Les collections systématiques du moyen âge étaient plus riches, mais la classification n'en était encore ni exacte ni complète. Toutefois elle prévalut longtemps, parceque dans les commentaires verbaux ou écrits on se tenait directement à ces collections. Le sujet n'était du reste traité que sous le côté pratique, et le point de vue historique était entièrement négligé. Un progrès se fit sentir au seizième siècle. Le droit canonique fut soumis à une classification nouvelle. Seulement on adopta à cet effet la division des Institutes de Justinien en personnes, choses et actions, et cette division, admissible dans le droit privé des Romains, ne s'adaptait que forcément au droit canonique. Alors aussi s'introduisirent peu à peu dans les traités des recherches historiques sur les sources. Les bornes s'élargirent encore lorsque après le grand schisme il se forma un droit ecclésiastique protestant, et plus tard lorsqu'on essaya de ramener à des bases scientifiques les rapports entre l'Église et la puissance temporelle. Les traités scientifiques présentèrent alors séparément le droit ecclesiastique catholique, celui des protestants et les principes concernant les rapports entre l'Eglise et l'état, ou bien après l'exposé de chaque doctrine ils tracèrent la dissidence du droit ecclésiastique protestant et les rapports avec l'état. A l'égard du droit des protestants on n'envisageait que celui de l'Allemagne, et le droit des Eglises d'Orient fut presque entièrement négligé.

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Le présent ouvrage est divisé d'après les points de vue suivants. Le premier livre renferme comme une sorte d'introduction; les doctrines générales qui font la base du sujet; le second les sources du droit canonique. Les quatre suivants comprennent le droit public de l'Église, ou les dispositions qui concernent l'Église prise en corps. Le troisième livre traite donc de la constitution de l'Église ou des personnes qui gouvernent; le quatrième des branches diverses de l'administration; le cinquième du clergé et des bénéfices (t); et le sixième des biens de l'Église comme moyens de subvenir à ses besoins extérieurs. Le septième livre a pour objet la vie dans le sein de l'Église et les rapports des individus. Le huitième enfin offre le tableau de l'influence que l'esprit et la vie de l'Église ont exercée (u) sur le droit profane et les changements qui en sont

(t) Ce qui concerne chaque office en particulier fait l'objet du troisième livre; mais l'Eglise a en outre émis sur les offices et l'état ecclésiastique en général beaucoup de dispositions qui pour plus de clarté demandent à être classées dans un livre à part. (u) Avant la quatrième édition du présent Manuel ce tableau n'avait pas encore été esquissé. Il fournit l'occasion de classer convenablement certaines matières qui autrement ne rentreraient que difficilement dans la division du système, ou n'y trouveraient qu'une place secondaire, par exemple la Théorie du Droit Canonique sur les Contrats,

résultés. Les rapports de l'Église avec l'état sont esquissés quant aux points généraux dans le premier livre, et quant aux points particuliers sous l'exposé de chaque doctrine. Le droit des Églises grecque et protestante est réuni à celui de l'Eglise catholique, et tous trois sont rapprochés ou séparés les uns des autres en raison de la communauté ou de la divergence de principes dans chaque sujet.

$7.D) Bibliographie.

Indépendamment des sources on trouve d'abondantes richesses dans les nombreux travaux scientifiques publiés sur cette matière sous les formes et les points de vue les plus variés. Nous ne citerons qu'à l'occasion ceux qui se réfèrent uniquement à des collections de droit ou des doctrines particulières. Les écrits plus généraux rentrent dans l'une des classes suivantes: I. Ouvrages bibliographiques indiquant les travaux édités sur le droit canonique (v). II. Écrits servant d'introduction à la science, où il est traité des notions générales préliminaires, des sources et de l'histoire littéraire de ce droit. Parmi les nombreux ouvrages de cette sorte se distinguent ceux de Doujat et de Glück (w). III. Travaux historiques. La carrière a été ouverte par le savant évêque Antoine Augustin (x); mais il n'y a pas encore d'ouvrage qui embrasse toute l'histoire du droit canonique : celle de la constitution de l'Eglise est traitée par Thomassin avec une érudition profonde, et le véritable esprit de l'histoire (y). D'autres ouvrages de l'École française sur cette matière sont à consulter avec quelque précaution (z). En Allemagne Plank a puisé la plupart de ses matériaux

les Rentes et les Testaments; il fait aussi ressortir la puissante influence de l'Eglise sur nos institutions civiles.

() J. A. a Riegger Bibliotheca juris canonici. Vind. 1761 II. vol. 8. Nous devons aussi mentionner les catalogues généraux de Lipenius, Fontana, Camus et Ersch. (w) J. Doviat Prænotionum canonicarum libri quinque. Paris, 1687. 4. Mitav. et Lips. 1776-79. II. vol. 8., A. Plettenberg introductio in jus canonicum. Hildesh. 1692., I. E. Flörke Prænotiones jurisprud, ecclesiast. Jenæ 1723. Hala 1756. 8, F. X. Zech Præcognita jur. can. ad Germaniæ catholicæ principia et usum accommodata. İngolst. 1749. 1766. 8. J. A. a Riegger Prolegomena ad jus ecclesiast. Vindd. 1764. 8, J. Mulzer Introductionis in jurisprud. ecclesiast. positivam Germanorum Pars I. sive Præcognita. Bamb. 1770. 8, G. S. Lakies Præ cognita jur. ecclesiast. universi. Viennæ 1775. 8, C. F Glück Præcognita uberiora universæ jurisprudentiæ ecclesiasticæ Germanorum. Halæ 1786. 8. C. Gärtner Einleit. in das gemeine deutsche Kirchenrecht. Augsb. 1817. 8.

(x) Ant. Augustin. Epitome juris pontificii veteris. Tarrac. 1586. fol. Rom. 1614. Paris. 1641. II. vol. fol.

(r) L. Thomassin Ancienne et nouvelle discipline de l'Eglise. Lyon 1678, Paris 1725, 3. vol. fol. Vetus et nova Ecclesiæ disciplina circa beneficia. Paris. 1688. III. vol. fol. Magont. 1787. IX. vol. 4.

(3) P. de Marca de concordia sacerdotii et imperii. Paris. 1641. 4. ed. Baluz. Paris. 1663. fol. ed. Böhmer. Francof. 1708. fol. Bamberg. 1788. VI. vol. 4. L. E. du Pin de antiquà Ecclesiæ disciplina dissertationes historicæ. Paris. 1686. Colon. 1691.

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