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la bonne tenue d'un massif. Il conviendrait, en ce cas, d'y pratiquer des redans, surtout sur les pentes fuyant vers la périphérie ; l'oubli de cette précaution fut cause sans doute de bien des accidents (Basse Rouge des Glénans, 83, etc...).

Si, inversement, la roche est trop irrégulière, on pourra écrêter quelques saillants (Nividic, 56), mais avec beaucoup de ménagements, car on se priverait de liaisons utiles et de refuges élevés propices à l'allongement des séances de travail.

Même si la roche ne demande pas à être façonnée en profondeur, il est bon de la quadriller de rainures et de détruire ainsi la rotondité des surfaces polies par la mer, afin d'améliorer l'adhérence de la première assise. On y pratique souvent un encastrement circulaire, avec ou sans gradins, comme un parafouille [Ar-Men (71), Grand-Charpentier (112), o m. 30 à 0 m. 40 de profondeur].

Si la reconnaissance de la roche y a révélé des fissures inévitables, on s'efforcera d'y enfouir du béton coulé sous l'eau, s'il ne disparaît pas ; sinon, on les voûtera, ou on les limitera avec des sacs de béton (voir § IX).

Les précautions qui ont été recommandées pour la préparation d'une roche doivent être observées, toutes proportions gardées, pour une reprise de maçonnerie ou de bétonnage; même nettoyage du varech, même repiquage de la surface (1), maintien ou création préalable de redans, d'arrachements, évitant des plans de séparation trop continue; puis, c'est l'application d'une bouillie de ciment pur, d'une couche de mortier riche, etc.

L'emploi des acides à ces niveaux supérieurs ne s'imposera en général qu'après une longue interruption; on devra prendre alors quelques précautions pour défendre les coffrages métalliques de leur action. Mais ces agents ne paraissent pas nuire à la maçonnerie déjà fabriquée (opinion de M. Bourdelles).

Il arrivera parfois, et précisément par le fait que de tels tra

(1) Avec dégagement soigneux du ciment prompt, s'il y en a eu, et lavage des laitances à grande eau. Aux Birvideaux (97), on constate des dépôts de coquillage sur le ciment, où ils forment une couche calcaire très dure à enlever au marteau ou au poinçon.

vaux ne peuvent, moins que d'autres, être jamais considérés comme définitifs, l'histoire de leurs avatars se confondant avec celle des procédés et des efforts dont nous essayons de synthétiser ici les progrès, il arrivera donc qu'on aura à reconstruire sur les débris d'une tourelle antérieurement démolie. La partie adhérente à la roche résiste souvent mieux, en effet, que la superstructure; celle-ci est exposée à l'effort maximum des lames qui s'exerce entre la cote moyenne de la marée et les pleines mers de morte eau.

Si elles sont convenablement attachées à la roche (à moins qu'elles n'emportent avec elles le noyau même de leur fondement, comme à la Jument de Penmarc'h, 77), ces fondations survivent longtemps à la ruine du fût, de même qu'on retrouve sensiblement intact, après de longues périodes d'abandon, un socle neuf, non encore surmonté d'une superstructure, même s'il a été élevé dans des conditions précaires, pourvu qu'il ne dépasse pas un certain niveau.

Aussi sera-t-on tenté de profiter des maçonneries respectées par la mer pour les incorporer dans la nouvelle construction, en observant les précautions énumérées ci-dessus.

Mais on n'hésitera pas à les sacrifier si l'on trouve notamment (comme à la Petite Barge, 118) des traces de laitances, indices de décomposition, ou des lits de ciment prompt dans les surfaces séparant les différentes mises de béton.

Quelle que soit l'alternative adoptée, on devra, en tous cas, au moins temporairement, utiliser, pour la reprise du chantier environnant, le point d'appui qu'offrent ces anciens massifs à une cote d'où le travail est plus facile et plus fréquent. On bénéficiera surtout de cette plateforme surélevée pour disposer des perforatrices et percer les trous appelés à intéresser, par des armatures scellées, la partie de roche sous-jacente, même si ce massif, ainsi inutilement traversé, doit être ensuite sacrifié au moment où les maçonneries voisines seront sur le point de l'englober; tant est grand l'intérêt de gagner quelques décimètres en altitude pour ces lents travaux préliminaires.

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Après avoir effectué les diverses opérations ci-dessus décrites, qui sont, en quelque sorte, communes à tous les procédés de fondation, on s'attaque à la base de la construction proprement dite, et l'on fait choix, d'après les circonstances, de l'une ou l'autre des méthodes ci-après qu'offre l'expérience acquise :

On est amené à distinguer tout d'abord les procédés applicables aux roches émergentes (1) et les solutions imaginées pour un niveau de fondation entièrement sous-marin, comme ce fut souvent le cas en Méditerranée; les espèces intermédiaires des roches à fleur d'eau sont les plus désagréables dans les parages quelque peu agités, à cause de la difficulté, soit d'y faire tenir le personnel, soit d'y faire résister, au moins momentanément, un premier massif destiné à gagner de la hauteur.

Les procédés correspondant au premier cas diffèrent surtout entre eux par la constitution de l'enceinte ou du batardeau destiné à permettre l'exécution des assises basses de la maçonnerie ; ils se distinguent également par la constitution de ces assises. Ces types de batardeaux, comme la composition des matériaux, ont évolué d'ailleurs avec le progrès industriel et avec les idées sur l'équilibre des ouvrages isolés en mer.

Jouant d'abord un simple rôle d'abri à l'époque où s'employaient presque exclusivement la maçonnerie de pierre de taille, ou la maçonnerie de blocage avec ou sans parements de moellons smillés, le batardeau sert également et surtout de coffrage depuis la substitution si large du béton de ciment Portland à ces anciens matériaux. D'autre part, pour les fondations sous-marines, on aura le choix, selon les circonstances locales (qui laisseront ici moins de latitude), entre les casiers remplis de ciment pur, les caissons perdus, simplement coulés ou, exception

(1) Nous supposons que toutes les fondations trouvent place sur un sol inaffouillable; le recours à des pieux, comme en 1861-1863, pour la tour Richelieu (124, à l'entrée de la Rochelle, en eaux déjà abritées) est tout à fait exceptionnel sur nos côtes.

nellement, foncés, dont l'emploi paraît remonter aux plus anciennes constructions de tourelles en Méditerranée.

A. Divers types de batardeaux ou de coffrage pour le travail à la marée. Le batardeau sera généralement accolé à la fondation du soubassement, selon la forme déterminée par nos considérations antérieures ; si on l'en écarte et si l'on accroît ainsi son développement, on s'expose à multiplier les difficultés inhérentes à son assiette et à sa résistance, en retardant l'appui qui doit lui venir de la construction même (1).

Contrairement à ce principe, on est cependant amené parfois, pour constituer rapidement ou améliorer une base de chantier, à réaliser, sans enceinte ni batardeau jointif, un premier massif en béton, de formes ou talus irréguliers; cette petite plateforme, mieux respectée par le délavage des lames, facilitera la construction du batardeau même, l'extension de la fondation, ou le forage des armatures.

Le batardeau devra, si ses dimensions extérieures, réglées sur celles de l'ouvrage, sont trop considérables pour qu'une tranche d'épaisseur minimum puisse être normalement bétonnée en une seule marée, être divisé en secteurs par des fractions de batardeau; on démontera ensuite celles-ci lors des extensions successives du travail (Les Plâtresses, 52, chenal du Four, Finistère).

Car on ne doit pas, en principe, incorporer dans le massif définitif, dont on souhaite qu'il résiste au temps, des ouvrages aussi hétérogènes et aussi incorrectement constitués que les batardeaux, où tout est sacrifié à la rapidité de la prise du liant et à la réalisation d'une tenue provisoire. Seules les briques de ciment Portland spécialement composées à cet effet ont été parfois incorporées aux tourelles avec la précaution d'y mêler des boutisses d'ancrage [dans le même ordre d'idées, les moellons d'appareils constituent un coffrage stable pour le béton, comme à Roh-Béniguet (110), en 1913, à la Parquette (69) depuis la guerre, etc...].

(1) Nous rappelons cependant qu'un phare anglais fut construit, à Eddystone dans une enceinte non accolée à sa base et dans laquelle on parvint à épuiser l'eau pour chaque séance de travail, à l'aide de pompes portées par un bateau.

Au point de vue des matériaux constitutifs du batardeau, il est probable que le bois, disposé en chevalements, a devancé les autres combinaisons, de même qu'il a devancé les substructures métalliques dans les eaux sans marée. Il subsiste encore aujourd'hui dans un système de coffrage comportant des montants d'angles ou intermédiaires en bois (fig. 6), scellés par des colliers

Bille de pitchpin

de 13,00 x 0,30x0,30

planches

de 30

(8,00)

madriers tire fonnes
sur les montants

Fig. 6. Type de coffrage en bois pour section octogonale « Men Corn » (53).

dans la maçonnerie inférieure, ou mieux, serrés contre elle par des ligatures souples (car un coffrage doit être, autant que possible, entièrement démontable sans dommage pour la maçonnerie); un des inconvénients de ce système, utilisable seulement dans les parties déjà hautes, c'est d'obliger à des retraites successives de o m. 03 tous les mètres, correspondant à l'épaisseur des madriers [comme à Men-Corn (53) dont la forme octogonale se prêtait à l'emploi de 4 gros montants de o m. 30 × 0 m. 30 dans les angles du carré circonscrit]. (Voir fig. 6.)

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