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tive de concours des créanciers de la succession et des créanciers de l'héritier, sur le patrimoine de celui-ci, ou de la priorité des créanciers de l'héritier sur ceux de la succession. Ulpien, en la loi 7,

étaient bien allés jusqu'à soutenir que les créanciers du défunt ne pouvaient prétendre le retour sur les biens de l'héritier, parce qu'ils doivent s'imputer, si les biens de l'héritier étaient suffisans, d'avoir mieux aimé obtenir la séparation, qui était une fin de non-recevoir contre eux: mais Papinien, dans la loi 3, S2, eod., estimait que les créanciers du défunt qui avaient obtenu la séparation, ne laissaient pas de venir sur les biens de l'héritier, après que ses propres créanciers avaient été satisfaits. Cette décision avait été approuvée par Lebrun, ibid., n° 26; par Domat, n° 9, et par Pothier, loco citato.

que par fiction, et vis-à-vis des cohéritiers du donataire qui leur en doit le rapport. Les créanciers de la succession ne peuvent se prévaloir de cette fiction, qui n'a pas été faite pour eux. » L'article 857 du Code porte expressé-S 17, et Paul, en la loi 5, ff. de séparat., ment que le rapport n'est dû que par le cohéritier à son cohéritier, et qu'il n'est pas dû au légataire ni aux créanciers de la succession. Les créanciers de la succession ne peuvent donc, par la voie de la séparation, ni autrement, profiter de biens qui n'étaient plus dans le patrimoine de leur débiteur, et qui ne figure dans le partage de la succession que par le rapport qui en est fait par un des cohéritiers. Ces créanciers ne doivent pas profiter davantage des fruits naturels et civils produits par les biens de la succession avant la demande en séparation. Ces fruits ont été la propriété exclusive de l'héritier, et se sont, dès l'instant même qu'ils ont été perçus, confondus dans ses biens personnels: ces fruits, d'ailleurs, n'ont jamais fait partie du patrimoine du défunt, n'étant échus que depuis l'ouverture de la succession. C'est ainsi que ce point de difficulté a été résolu par un arrêt du parlement de Paris, du 16 février 1694, qu'on trouve dans le dictionnaire de Brillon, au mot Séparation, no 4.

437. Enfin, il est hors de doute que si, après le paiement des créanciers de la succession et des légataires, il reste quelque chose des biens de cette succession, cet excédant peut être pris par les créanciers de l'héritier, parce que c'est du bien qui appartient à leur débiteur, dit Lebrun, ibid., n° 27. Telle est la disposition de la loi 1, § 17, et de la loi 3, § dernier, ff. de séparat.

Mais une question beaucoup plus importante est de savoir si, après avoir épuisé les biens de la succession, les créanciers du défunt doivent, pour ce qui leur reste dû, concourir avec les créanciers de l'héritier, sur les biens propres de celui-ci, ou ne venir sur ces biens qu'après le paiement de tous les créanciers personnels de l'héritier.

Je n'établis, à cet égard, que l'alterna

TOME II.

En s'en tenant à cette dernière opinion, qui était la plus générale, toujours étaitil vrai, sous l'empire du droit romain et sous l'ancienne législation française, que les créanciers de la succession, qui avaient pris tous les biens dont elle se composait, n'avaient de recours, pour se remplir de ce qui leur restait dû sur les biens de l'héritier, qu'après le paiement intégral des créanciers de ce dernier. Doit-il en être de même sous la législation actuelle ?

Pour décider cette question, il faut se fixer sur deux principes qui sont incontestables.

Le premier est que l'héritier représente le défunt d'une manière absolue et universelle; de sorte que par l'acceptation qu'il a faite de la succession, il est tenu de toutes les dettes et charges dont cette succession était grevée, personnellement pour la part et portion qu'il amende, et hypothécairement pour le tout. Si le défunt n'a laissé qu'un seul héritier, l'obligation de celui-ci s'étend à la totalité des dettes et charges, et ultra vires; de même que quand il y a plusieurs héritiers, chacun est obligé personnellement jusqu'à concurrence, non pas de ce qu'il a recueilli dans la succession, mais de la même quotité de la totalité des dettes et charges,

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pour laquelle il est appelé à la succession. ainsi la faveur de la loi? Cette faveur pourUne fois l'hérédité acceptée, les créanciers rait même, dans certains cas, être fort de la succession deviennent créanciers de préjudiciable; car s'il arrivait que dans l'héritier, qui est tenu envers eux de la l'ignorance où il serait des véritables même manière qu'envers ses propres forces de la succession dont il est créancréanciers. Les biens de l'héritier de- cier, un individu formât une demande viennent le gage des uns et des autres, en séparation de patrimoines, cet indiet ce gage est pour tous de la même na- vidu se trouverait exposé, par une fin de ture. Aucune disposition de la loi n'accorde non-recevoir qu'il aurait élevée contre de préférence sur ce gage ni aux créan- lui-même, à perdre sa créance, n'ayant ciers de l'héritier, ni aux créanciers de la des droits contre l'héritier qu'après tous succession, si, d'ailleurs, les uns ou les les créanciers de cet héritier. Mais si la autres n'ont pas quelque cause particu- loi l'eût voulu ainsi, ne l'aurait-elle pas lière de préférence, indépendante de la ordonné expressément, surtout dès qu'elle qualité de créanciers de la successsion ou ne laisse que six mois aux créanciers de de l'héritier. la succession pour prendre un parti, du moins relativement aux immeubles à l'égard desquels le privilége n'est sonservé que par une demande et une inscription qui doivent avoir lieu dans les six mois à compter de l'ouverture de la succession?

Un second principe est que le bénéfice accordé par la loi ne peut jamais être rétorqué contre ceux en faveur de qui il a été introduit; et en rattachant ce principe aux priviléges en général, on voit que la loi n'a imposé aucune condition à la faveur qu'elle accordait, et n'a pas dit qu'après avoir exercé le privilége sur les biens qui en étaient affectés, on perdrait tout recours sur les autres biens, ou du moins que le recours sur ces biens n'aurait lieu qu'après le paiement des créanciers non privilégiés. Au contraire, il est hors de doute que les créanciers qui ont des priviléges sur les meubles, sont, après l'exercice de ces priviléges, et pour l'excédant de leurs créances, assimilés aux créanciers ordinaires, avec lesquels ils viennent par contribution; et à l'égard des priviléges sur les immeubles, si l'immeuble sur lequel le privilége a lieu est insuffisant, le créancier privilégié peut venir sur les autres biens, suivant le rang qu'il peut avoir conservé par une inscription ou

autrement.

Cela posé, il semble que toute difficulté disparaît. La séparation des patrimoines est un privilége qui doit être régi par les règles générales sur les priviléges, quant aux objets pour lesquels la loi n'a pas de disposition particulière. Ce privilége a été admis sans condition, au moins, sous le point de vue sous lequel nous le considérons en ce moment. Peut-on arbitrairement lui en imposer une, et restreindre

D'un autre côté, le code dit, dans l'article 2093, que les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers, et que le prix s'en distribue entre eux par contribution, à moins qu'il n'y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence. L'art. 2094 ajoute que les causes légitimes de préférence sont les priviléges et les hypothèques ; et les art. 2101,2102 et 2103, apprennent d'une manière spéciale quels sont les priviléges existans sur les meubles et sur les immeubles. L'héritier est le débiteur commun des créanciers de la succession qu'il a acceptée, et de ses propres créanciers. Où voit-on qu'il doit payer les uns plutôt que les autres sur ses biens personnels? Ses créanciers personnels peuvent-ils invoquer, en vertu de quelque disposition de la loi, une préfence sur les créanciers de la succession? S'ils ne le peuvent point, lorsque les créanciers de la succession, n'ayant point demandé la séparation, viennent exercer les mêmes droits que les créanciers de l'héritier, comment à leur tour les créanciers de l'héritier voudraient-ils obtenir sur les biens de celui-ci, la même préférence que les créanciers de la succession ont sur les biens qui en proviennent?

438.

439.

Je n'hésite point, dès lors, à adopter l'opinion que M. Chabot (de l'Allier) a émise sur l'art. 878 du Code, et à conclure, comme lui, que, dans l'hypothèse où les biens de la succession sont absorbés par les créances et les charges de cette succession, tous les créanciers doivent venir en concours sur les biens personnels de l'héritier; ceux de la succession pour ce qu'ils n'ont pas retrouvé dans les biens séparés, et ceux de l'héritier pour la totalité de leurs créances. Ainsi, si les créanciers de l'une et l'autre classe sont chirographaires, une contribution devra avoir lieu entre eux au marc le franc des 441. des créances respectives; et s'ils sont hypothécaires, ils devront être payés suivant le rang qu'ils auront acquis ou conservé comme tels.

SECTION IV.

440.

SOMMAIRE.

Des formalités que le tiers détenteur doit remplir après la transcription, pour parvenir à la purgation des hypothèques. Des formes de la notification aux créanciers. Importance de l'offre qui doit être faite d'acquitter les dettes et charges hypothécaires.

De l'effet du défaut de notification à quelques-uns des créanciers inscrits. Du cas où l'omission est du fait de l'acquéreur.

Du cas où l'omission est du fait du conservateur. Explication des articles 2196, 2197 et 2198 du Code civil.

442. De l'effet de l'omission, quant à l'hypothèque, du créancier dont l'inscription est omise.

443.

De ce qui doit être fait pour parvenir à la purgation des priviléges et hypothéques, lorsqu'il s'agit de vente volontaire. Des 444. formalités des notifications à faire aux créanciers inscrits. De ce qui concerne l'enchère et ses suites.

Je diviserai cette section en trois paragraphes.

445.

Effet de la même omission quant au
droit d'enchérir qu'on voudrait at-
tribuer aux créanciers inscrits.
De quel jour l'acquéreur doit-il aux
créanciers inscrits les intérêts du
prix de la vente?

Du cas où l'acquéreur pourrait se
dispenser d'offrir le prix entier de

la vente.

Dans le premier, j'expliquerai les formes 446. De l'enchère. De ses formes. Tout

de la notification que le nouveau propriétaire doit faire aux créanciers inscrits ; les formes de l'enchère et ses suites jusqu'à l'adjudication.

Dans le second, je déterminerai la nature et les effets de l'adjudication qui a lieu par suite de la mise aux enchères, lorsque c'est l'acquéreur qui se rend luimême adjudicataire.

Dans le troisième, j'exposerai les principes qui doivent être suivis, lorsque l'adjudication est faite à tout autre que l'acquéreur.

SIer.

Des formes de la notification, de celles de l'enchère, des suites de l'enchère jusqu'à l'adjudication.

447.

448.

créancier enchérisseur doit être inscrit. La réquisition d'enchère doit être faite par un huissier com

mis.

Des formes sous lesquelles la caution doit être offerte. Du résultat du déCe qui peut constituer un cautionnefaut de ces formes.

ment.

449. Du cas où le délai d'enchérir expire- -
450. La réquisition d'enchère doit-elle être
rait un jour férié.
notifiée au vendeur? Du cas où il y
a plusieurs vendeurs.
451. De l'effet d'un jugement qui annule
une enchère, à l'égard des créan-
ciers autres que celui dont l'enchère
est annulée.

452. Des objets sur lesquel l'enchère doit

porter. Des charges qui font par

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tie du prix, et des charges qui n'en font point partie. Le nouveau propriétaire doit-il des explications positives à ce sujet aux créanciers? 453. Un traité sur la rescision entre l'acquéreur et le vendeur, ou un acte portant désistement d'une faculté de réméré, doivent être notifiés comme la vente.

434. Du cas où l'acquéreur est chargé de l'acquittement d'une rente foncière ou constituée. De la charge d'un usufruit.

455. La notification doit, dans tous les cas, faire connaître un prix fixe, ou d'après le contrat, ou d'après une évaluation. Du cas où une rente viagère forme tout ou partie du prix.

456. Des suites de la nullité de la notification de la part du nouveau propriétaire. Du cas de la ventilation, d'après l'art. 2192.

457. Comment provoquer des enchères de la part de certains créanciers, à l'égard desquels l'acquéreur ne peut faire des notifications? 458. La notification aux créanciers, et l'offre de payer, peuvent-elles être

rétractées? 459. Des cas où une notification serait faite, ainsi qu'une enchère, par des personnes qui, dans la règle générale, ne peuvent s'obliger ni con

tracter.

460. Des créanciers présens à la vente, et délégués, peuvent-ils enchérir? De ceux qui auraient concouru à la

vente.

461. Le créancier subrogé à une créance

hypothécaire, peut-il enchérir? 462. Résultat du défaut d'enchère après les notifications. Observations importantes sur l'art. 2186. 463. Des moyens de parvenir régulière ment à la consignation du prix, lorsque l'acquéreur veut consigner. 464. Quelles sont les modifications que l'enchère apporte au contrat de

vente.

465. Sur la tête de qui réside la propriété

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438. La faculté de purger est de droit. Mais lorsqu'il y a négligence ou refus de purger ces hypothèques, de la part du tiers détenteur, alors la loi ouvre, en faveur des créanciers, une action tendante au recouvrement de leurs créanciers. Ce qui provoque la purgation des hypothèques, et la sommation faite au tiers détenteur, d'après l'art. 2169 du Code civil; et ce qui opère la déchéance de la faculté de purger, et donne ouverture à la saisie immobilière et à la vente judiciaire de l'immeuble, de la part des créanciers, est le refus que ferait le tiers détenteur, de satisfaire à cette sommation dans le délai déterminé par ce même article et par l'art. 2183. Je me suis expliqué, à cet égard, dans la 1re section du présent chapitre, no 340, 341 et 342. Je viens actuellement à ce que doit faire le tiers détenteur qui veut effectivement purger les hypothèques. Ses obligations sont écrites dans l'art. 2183.

« Si le nouveau propriétaire, y est-il dit, veut se garantir de l'effet des poursuites autorisées dans le chapitre 6 du présent titre (XVIII), il est tenu, soit avant les poursuites, soit dans le mois au plus tard, à compter de la première sommation qui lui est faite, de notifier aux créanciers, aux domiciles par eux élus dans leurs inscriptions;

1° Extrait de son titre, contenant seulement la date et la qualité de l'acte, le nom et la désignation précise du vendeur ou du donateur, la nature et la situation de la chose vendue ou donnée; et s'il s'agit d'un corps de biens, la dénomination générale seulement du domaine et des arrondissemens dans lesquels il est situé, le prix et les charges faisant partie du prix de la vente, ou l'évaluation de la chose, si elle a été donnée ;

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2o Extrait de la transcription de l'acte de vente;

« 3o Un tableau sur trois colonnes, dont la première contiendra la date des hypothèques et celle des inscriptions; la seconde le nom des créanciers; la troisième, le montant des créances inscrites. »

Les notifications aux créanciers inscrits doivent être faites par un huissier commis à cet effet, sur simple requête, par le président du tribunal de première instance de l'arrondissement où elles auront lieu; elles contiendront constitution d'avoué près le tribunal où la surenchère et l'ordre devront être portés. Cette addition de formalités est prescrite par l'art. 832 du Code de procédure civile. On avait douté si l'omission de cette formalité devait emporter la peine de nullité des notifications, cette peine n'étant pas prononcée par cet art. 832. Mais il était évident qu'il s'agissait là d'une forme substantielle, dont le but était d'assurer la remise des notifications aux créanciers, et que, sans cette forme, un huissier non commis n'aurait pas le caractère d'officier ministériel, propre à instrumenter dans ce cas particulier. Aussi la Cour d'appel de Turin s'est déterminée pour la nullité, par un arrêt du 1er juin 1811. Cet arrêt est parfaitement motivé. Il me suffit d'y renvoyer. Cette formalité a toujours été pratiquée, et elle est regardée comme étant de rigueur. D'après les art. 153 et 156 du Code de procédure, les jugemens rendus par défaut doivent être signifiés par un huissier commis: il n'y est pas dit à peine de nullité, et cependant plusieurs arrêts ont annulé la signification qui en avait été faite par un huissier non commis. Mais il ne faut pas conclure de là que la notification prescrite par l'art. 2194 du Code civil, à l'égard de la femme et du subrogé tuteur, dans la vue d'obtenir la purgation des hypothèques légales, doive être faite par un huissier commis. Cette addition de formalités, dans ce cas, n'est exigée par aucune loi : elle ne l'est ni par cet art. 2194, ni par aucun article du Code de procédure. L'art. 832 de ce Code n'impose cette obligation que relati

vement aux notifications et réquisitions prescrites par les art. 2183 et 2183 du Code civil. Enfin, l'avis du Conseil d'état, du 1er juin 1807, n'en fait point supposer la nécessité pour le cas de l'art. 2194. Or, on ne peut admettre d'autres nullités que celles qui sont le résultat de la loi. Ce qui, d'ailleurs, rend cette précaution inutile dans le cas dont il s'agit, c'est que, d'un côté, relativement aux hypothèques légales, l'affiche dans l'auditoire donne une publicité de l'intention de purger, qui n'existe pas par rapport aux créanciers ordinaires; que, d'un autre côté, la notification du dépôt et de l'affiche, respectivement à ces hypothèques légales, doit être faite au procureur du roi du tribunal de la situation des biens; et on ne peut douter de la remise faite de la copie de la notification à ce magistrat, puisqu'il est de formalité indispensable, d'après les art. 69 et 1039 du Code de procédure, que l'original de la notification soit visé par lui.

On vient de voir qu'il est dit dans l'article 2183, que le nouveau propriétaire doit faire faire ses notifications aux créanciers, aux domiciles par eux élus dans leurs inscriptions. Cependant il n'y aurait pas de nullité quand les notifications seraient faites au domicile réel de ces créanciers. La faculté de faire notifier aux domiciles élus dans l'inscription, est un avantage accordé au débiteur et aux tiers, dans l'intérêt de ces derniers ; et c'est une règle générale que chacun peut renoncer à tous droits et à tous priviléges introduits en sa faveur.

439. Un des points les plus essentiels pour l'acquéreur, est de satisfaire pleinement à la loi, lors de la notification faite aux créanciers. Il est dit dans l'art. 2184 : « L'acquéreur ou le donataire déclarera, par le même acte, qu'il est prêt à acquitter sur le champ des dettes et charges hypothécaires, jusqu'à concurrence seulement du prix, sans distinction des dettes exigibles ou non exigibles. » Cette déclaration est le fondement de la faculté de purger les hypothèques de la part de l'acquéreur; elle en est la condition, puisqu'il ne peut

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