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de l'an X subsistera de fait, sinon de droit; c'est-à-dire tant que la liberté religieuse, proclamée par l'article 5 de la charte, ne sera pas pour nous une réalité; tant que les principes ne seront pas convertis en fait, et qu'il nous sera défendu d'en tirer les conséquences. C'est le devoir des catholiques, et en particulier des évêques, de demander que cette législation soit modifiée. L'organisation ancienne a déjà produit des maux incalculables; il est temps que l'état anormal de l'Eglise de France finisse, et qu'elle sorte de l'espèce de servitude où elle se trouve depuis bientôt cinquante ans.

Un savant publiciste, M. de Carné, a demandé à la chambre des députés, dans la séance du 19 mars 1844, l'affranchissement de l'Eglise, la réconciliation de la religion et de la liberté. Le meilleur gage de celle réconciliation se trouvera dans l'abrogation formelle des anciennes lois organiques du culte, et dans une constitution de l'Eglise de France, d'un côté conforme en tout aux canons, et de l'autre en harmonic avec nos lois fondamentales. « Pour nous, dit encore monseigneur de Digne, nous le demandons aussi au nom de la religion, dont nous sommes les ministres; au nom du pouvoir, dont nous sommes les serviteurs fidèles; au nom de la civilisation, dont nous sommes les amis. »

La religion a droit à l'affranchissement que nous demandons pour elle, et jamais elle n'eut plus besoin qu'en ce moment de ne pas voir ce droit méconnu.

Les principes qui ont dicté les lois organiques du culte en France (voyez ci-après - ces principes dans les rapports de Portalis et de Siméon), les conséquences qu'à tort ou à raison on en peut tirer, détruisent l'indépendance essentielle de l'Eglise et donnent à I'Etat une sorte de suprématie qui ne différerait pas beaucoup de la suprématie protestante, si jamais il se rencontrait des hommes qui eussent la volonté et le pouvoir de les appliquer jusqu'au bout. Or, de tels principes sont subversifs de l'Eglise; on ne saurait l'asservir sans la détruire : l'air et la vie pour elle, c'est la liberté. En vain dirait-on que l'Eglise est dans l'Etat : l'Eglise, il est vrai, est dans l'Etat pour obéir dans tout ce qui est temporel; elle ne prétend alors à aucune indépendance à aucun privilége; mais quoiqu'elle se trouve dans l'Etat, dit Fénelon, elle n'en dépend jamais pour aucune fonction spirituelle. (Discours pour le sacre de l'électeur de Cologne.)

Viendraient naturellement ici les articles organiques du concordat, mais nous en avons fait, dans ce cours, un article spécial. Is sont suivis des réclamations du saint-siége adressées, par le cardinal Caprara, à M. de Talleyrand, ministre des affaires extérieures. Nous y parlons des deux pièces ci-dessus.

Les articles organiques qui ont causé tant de chagrin à l'immortel Pie VII et qui adportent encore actuellement tant d'entraves à la liberté de l'Eglise de France, ne peuvent être bien connus que par le rapport et le

discours lus par M. de Portalis, au conseil d'Etat el au corps législatif. Nous allons rapporter ces deux pièces in extenso. On y verra combien la doctrine qu'on a voulu consacrer dans les articles organiques est contraire aux saints canons, et l'on ne sera plus étonné des incessantes réclamations du saint siége apostolique et des évêques de France. Les précautions qu'il fallut prendre alors pour faire adopter le concordat par le corps législatif, peuvent peut-être excuser la rédaction des articles organiques, mais aujourd'hui, sous la charte de 1830, il ne saurait en être de même. Il est évident qu'ils lui sont opposés en plusieurs points

RAPPORT sur les ARTICLES ORGANIQUES de la convention passée à Paris, le 26 messidor, an ix (15 juillet 1801), entre le gouvernement français et le pape, fait par M. Portalis, conseiller d'Etat, chargé de toutes les affaires concernant les cultes.

« Toutes nos assemblées nationales ont décrété la liberté des cultes.

« Le devoir du gouvernement est de diriger l'exécution de cette importante loi vers la plus grande utilité publique.

a Tout gouvernement exerce deux sortes de pouvoirs en matière religieuse ; celui qui compèle essentiellement au magistrat polilique en tout ce qui intéresse la société, et celui de protecteur de la religion elle-même.

«Par le premier de ces pouvoirs, le gouvernement est en droit de réprimer toule entreprise sur la temporalité, et d'empêcher que sous des prétextes religieux on ne puisse troubler la police et la tranquillité de l'Etat; par le second, il est chargé de faire jouir les citoyens des biens spirituels qui leur sont garantis par la loi, portant l'autorisation du culte qu'ils professent.

« De là, chez toutes les nations policées. les gouvernements se sont conservés dans la possession constante de veiller sur l'administration des cultes, et d'accueillir, sous des dénominations qui ont varié selon les lieux et les temps, le recours exercé les personnes intéressées contre les abus des ministres de la religion, et qui se rapporte aux deux espèces de pouvoirs dont nous venons de parler.

par

« On n'a plus à craindre aujourd'hui les systèmes ultramontains et les excès qui ont pu en être la suite; nous devons être rassurés contre des désordres auxquels les lumières, la philosophie et l'état présent de toutes choses opposent des obstacles insurmontables.

« Dans aucun temps les théologiens sages et instruits n'ont confondu les fausses prétentions de la cour de Rome avec les prérogatives religieuses du pontife romain.

a Il est même juste de rendre aux ecclé siastiques français le témoignage qu'ils ont été les premiers à combattre les opinions ultramontaines : nous citons en preuve la déclaration solennelle du clergé en 1682; par cette déclaration, il rendit un hommage écla

tant à l'indépendance de la puissance et au droit universel des nations.

a Les ministres catholiques reconnaissent un chef visible, qu'ils regardent comme un centre d'unité dans les matières de foi; mais ils enseignent en même temps que ce chef n'a aucun pouvoir direct ni indirect sur le temporel des Etats, et qu'il n'a, dans les choses mêmes purement spirituelles qu'une autorité subordonnée et réglée par les anciens canons.

«Ceux d'entre les ecclésiastiques qui seraient assez aveugles pour croire que le pontife romain ou tout autre pontife peut se mêler, en quelque manière que ce soit, du gouvernement des peuples, inspireraient de justes alarmes et offenseraient l'ordre social.

« On ne doit jamais confondre la religion avec l'Etat la religion est la société de l'homme avec Dieu; l'Etat est la société des hommes entre eux.

« Or, pour s'unir entre eux, les hommes n'ont besoin ni de révélation, ni de secours surnaturels ; il leur suffit de consulter leurs intérêts, leurs affections, leurs forces, leurs divers rapports avec leurs semblables; ils n'ont besoin que d'eux-mêmes.

« La question de savoir si le chef d'une société religieuse ou tout autre ministre du culte a un pouvoir sur les Etats, se réduit aux termes les plus simples; chaque homme, par la seule impulsion de la loi naturelle, n'est il pas chargé du soin de sa propre conservation? Ce que chaque homme peut pour son salut individuel, pourquoi le corps politique, qui est une vaste réunion d'une multitude d'hommes, ne le pourrait-il pas pour leur salut commun? La souveraineté est-elle autre chose que le résultat des droits de la nature combinés avec les besoins de la societé ?

« Ces questions n'ont jamais appartenu à la théologie; elles sont purement civiles; elles doivent être décidées par les maximes générales de la société du genre humain; car c'est sur le droit universel des gens, qui ne reçoit point d'exception, parce qu'il est fondé sur le droit naturel, qu'est appuyé le grand principe de l'indépendance des gouvernements nier cette indépendance, ce serait affaiblir, ce serait corrompre les liens qui unissent les citoyens à la cité, ce serait se rendre criminel d'Etat.

« Les articles organiques consacrent toutes ces grandes vérités, qui sont le fondement de tout ordre public, et indiquent toutes les précautions que la sagesse de nos pères avait prises pour en conserver le précieux dépôt.

L'unité de la puissance publique et son universalité sont une conséquence nécessaire de son indépendance: la puissance publique doit se suffire à elle-même; elle n'est rien si elle n'est tout; les ministres de la religion ne doivent point avoir la prétention de la partager ni de la limiter.

Si l'on a vu ces ministres exercer autrefois dans les officialités une autorité extérieure el coactive sur certaines personnes et

sur certains objets, il ne faut point perdre de vue que cette autorité n'était que de concession et de privilége; ils la tenaient des souverains; ils ne l'exerçaient que sous leur surveillance, et ils pouvaient en être dépouillés s'ils en abusaient (Observations de M. Talon). (Voy. OFFICIALITÉS.)

« On doit donc tenir pour incontestable que le pouvoir des clefs est limité aux choses purement spirituelles; que ce pouvoir est plutôt un simple ministère qu'une juridiction proprement dite; et que si le mot juridiction, inconnu dans les premiers siècles, a été consacré par l'usage, c'est sous la condition qu'on ne veuille pas convertir le devoir d'employer les moyens de persuasion en faculté de contraindre, et le ministère en domination. (Voy. JURIDICTION.)

<< Suivant la remarque d'un écrivain trèsprofond, on ne refuse à l'Eglise le pouvoir coactif ou proprement dit, que parce qu'il est impossible qu'elle l'ait, attendu l'objet et la fin du sacerdoce et la nature de l'homme, qui n'est soumis aux préceptes de la religion qu'en tant qu'il est parfaitement libre et capable de mériter et de démériter. Ceux d'entre les ecclésiastiques qui réclameraient ce pouvoir, ne sauraient où le placer, et ne pourraient en faire usage sans détruire l'essence même de la religion.

<< Lorsqu'en examinant les bornes naturelles du ministère ecclésiastique, on attribue exclusivement à la puissance publique la disposition des choses temporelles, en réservant aux pasteurs les matières spirituelles, on n'entend pas sans doute laisser comme vacant, entre ces limites, le vaste territoire des matières qui ont à la fois des rapports et avec la religion et avec la police de l'Etat, et qui sont appelées mixtes par les jurisconsultes; ni permettre indifféremment aux ministres du culte, d'y faire des incursions arbitraires, et d'ouvrir des conflits journa liers avec le magistrat politique. Un tel état de choses entrafuerait une confusion dange reuse, et rendrait souvent le devoir de l'obéissance incertain

Il faut nécessairement qu'il y ait une puissance supérieure qui ait droit, dans cette espèce de territoire, de lever tous les doutes et de franchir toutes les difficultés; cette puissance est celle à qui il est donné de peser tous les intérêts; celle de qui dépend l'ordre public en général, et à qui seul il ap partient de prendre le nom de puissance dans le sens propre.

« C'est un principe certain que l'intérêt public, dont le gouvernement tient la balance, doit prévaloir dans tout ce qui n'est pas de l'essence de la religion; aussi le magistrat politique peut et doit intervenir dans tout ce qui concerne l'administration exterieure des choses sacrées

Il est, par exemple, de l'essence de la religion que sa doctrine soit annoncée : mais il n'est pas de l'essence de la religion qu'elle le soit par tel prédicateur ou tel autre, et il est nécessaire à la tranquillité publique qu'elle le soit par des hommes qui aient la

confiance de la patrie; il est quelquefois même nécessaire à la tranquillité publique que les matières de l'instruction et de la prédication solennelle soient circonscrites par le magistral; nous en avons plusieurs exemples dans les capitulaires de Charlemagne.

a

« L'Eglise est juge des erreurs contraires à sa morale et à ses dogmes; mais l'Etat a intérêt d'examiner la forme des décisions dogmatiques, d'en suspendre la publication quand quelques raisons d'Etat l'exigent, de commander le silence sur des points dont la discussion pourrait agiter trop violemment. les esprits, et d'empêcher même, dans cerlaines occurrences, que les consciences ne soient arbitrairement alarmées.

«La prière est un devoir religieux; mais le choix de l'heure et du lieu que l'on destine à ce devoir est un objet de police.

« L'institution des fêtes, dans leur rapport avec la piété, appartient au ministre du culte; mais l'Etat est intéressé à ce que les citoyens ne soient pas trop fréquemment distraits des travaux les plus nécessaires à la société, et que dans l'institution des fêtes on ait plus d'égard aux besoins des hommes qu'à la grandeur de l'Etre qu'on se propose d'honorer.

« Les articles organiques fixent sur ces objets el sur d'autres qu'il serait inutile d'énumérer, la part que doit y prendre la puissance publique.

« La matière des mariages demandait une attention particulière. Anciennement ils étaient célébrés devant le propre curé des contraclants, qui était à la fois ministre du contrat au nom de l'Etat, et ministre du sacrement au nom de l'Eglise. Cette confusion dans les pouvoirs différents que l'on confiit à la même personne, en a produit une dans les idées et dans les principes. Quelques théologiens ont cru et croient encore qu'il n'y a de véritables mariages que ceux qui sont faits en face de l'Eglise. Cette erreur a des conséquences funestes il arrive en effet que des époux, abusés ou peu instruits, négligent d'observer les lois de la république, se marient devant le prêtre sans se présenter à l'officier civil, et compromettent ainsi, par des unions que les lois n'avouent pas, l'état de leurs enfants el la solidité de leurs propres contrats. Il est nécessaire d'arrêter ce désordre et d'éclairer les citoyens sur un objet duquel dépend la tranquillité des familles.

En général, c'est à la société à régler les mariages; nous en attestons l'usage de tous les gouvernements, de tous les peuples, de loutes les nations.

« Le droit de régler les mariages est même pour la société d'une nécessité absolue et indispensable; c'est un droit essentiel et inhérent à tout gouvernement bien ordonné, qui ne peut abandonner aux passions et à la lience les conditions d'un contrat, le plus nécessaire de tous les contrats, et qui est a base et le fondement du genre humain.

« Nous savons que le mariage n'est pas étranger à la religion, qui le dirige par sa DROIT CANON. 1.

morale et qui le bénit par un sacrement.

<«< Mais les lumières que nous recevons de la morale chrétienne ne sont certainement pas un principe de juridiction pour l'Eglise, sinon il faudrait dire que l'Eglise a droit de tout gouverner, puisqu'elle a une morale universelle qui s'étend à tout et qui ne laisse rien d'indifférent dans les actes humains. Ce serait renouveler les anciennes erreurs, qui, sur le fondement que toutes les actions avaient du rapport avec la conscience, faisaient de cette relation un principe d'attention universelle pour tout transporter à l'Eglise.

« Le rapport du mariage au sacrement n'est pas non plus une cause pour rendre l'Eglise maîtresse du mariage.

« Aujourd'hui même on reconnaît des mariages légitimes qui ne sont pas sanctifiés par le sacrement; tels sont les mariages des infidèles et de tous ceux qui ont une foi contraire à la foi catholique; tels étaient les mariages présumés, qui étaient si communs avant l'ordonnance de Blois. L'usage de l'Eglise est même de ne pas remarier les infidèles qui se convertissent.

« Le mariage est un contrat qui, comme tous les autres, est du ressort de la puissanco séculière, à laquelle seule il appartient de régler les contrats.

« Les principes que j'invoque furent attestés par le chancelier de Pontchartrain, dans une lettre écrite, le 3 septembre 1712, au premier président du parlement de Besançon. Dans cette 1 ttre, le chancelier de Pontchartrain, après avoir distingué e mariage d'avec le sacrement de mariage, établit que le mariage en soi est uniquement du ressort de la puissance civile, que le sacrement ne peut être appliqué qu'à un mariage contracté selon les lois, que la bénédiction nuptiale appliquée à un mariage qui n'existerait point encore, serait un accident sans sujet, et qu'un tel abus des choses religieuses serait intolérable.

« Il est donc évident qu'il doit être défendu aux ministres du culte d'administrer le sacrcment de mariage toutes les fois qu'on ne leur justifiera pas d'un mariage civilement contracté. Voyez MARIAGE, et l'article organique 54.)

« Après avoir déterminé les rapports essentiels qui existent entre le gouvernement de l'Etat et l'exercice du culte, les articles organiques entrent dans quelques détails sur la discipline ecclésiastique, considérée en elle-même et dans ses rapports avec la religion.

«La majestueuse simplicité des premiers âges avait été altérée par une multitude d'institutions arbitraires; le véritable gouvernement de l'Eglise était devenu méconnaissable au milieu de toutes ces institutions. Depuis longtemps on s'était proposé de réformer l'Eglise dans le chef et dans les membres; mais ces réformes salutaires rencontraient sans cesse de nouveaux obstacles ; la voix des prélats vertueux et éclairés était (Vingt et une.)

étouffée, et le mal continuait sous les apparences et le prétexte du bien.

« Les circonstances actuelles sollicitent et favorisent le retour aux antiques maximes de la hiérarchie chrétienne.

Tel est l'ordre fondamental de cette hiérarchie tous ceux qui professent la religion catholique sont sous la conduite des évêques, qui les gouvernent dans les choses purement spirituelles, avec le secours des prêtres et des

autres cleres.

« Les évêques sont tous égaux entre eux quant à ce qui est de l'essence du sacerdoce; il n'y en a qu'un qui soit regardé comme établi de droit divin au-dessus des autres, pour conserver l'unité de l'Eglise et lui donner un chef visible, successeur de celui que le fondateur même du christianisme plaça le premier entre ses apôtres.

«Toutes les autres distinctions sont réputées de droit humain et de police ecclésiastique (Fleury, Inst. au droit ecclésiast., part. 1, chap. 14); aussi ne sont-elles pas uniformes elles varient selon les temps et les lieux.

:

«Dans les premières années de l'établissement du christianisme, les apôtres el leurs disciples résidèrent d'abord dans les grandes villes; ils envoyèrent des évêques et des prêtres pour gouverner les églises situées dans les villes moins considérables; ecs églises regardèrent comme leurs mères les églises des grandes villes, que l'on appelait déjà métropoles dans le gouvernement politique.

«Lorsqu'une religion naît et se forme dans un Etat, elle suit ordinairement le plan du gouvernement où elle s'établit; car les hom. ines qui la reçoivent et ceux qui la font recevoir n'ont guère d'autre idée de police que celles de l'Etat dans lequel ils vivent.

«En conséquence, à l'imitation de ce qui se passait dans le gouvernement politique, les évêques des grandes villes, tels que ceux d'Alexandrie, Antioche et autres, obtinrent de grandes distinctions; et il faut convenir que ces distinctions furent utiles à la discipline. On reconnut des églises métropoliiaines. Les pasteurs qui étaient à la tête de ces églises furent appelés archevêques; dans la suite on donna à quelques-uns d'entre eux les noms de patriarche, exarque ou primat; quelquefois un grand pouvoir était attaché à ces titres, quelquefois ces titres étaient donnés sans nouvelle attribution de pouvoir (Voy. ARCHEVÊQUE, PROVINCES ECCLÉSIASTIQUES.)

« Les noms de patriarche, exarque et autres semblables, furent surtout en usage chez les Grecs. En Occident, le titre d'archeveque fut uniformément donné à tous les métropolitains; el si les diverses révolutions arrivées dans les Etats qui se formèrent des débris de l'empire romain donnèrent lieu à l'établissement de plusieurs primats, ce titre ne fut qu'honorifique pour tous ceux qui le portèrent, à l'exception du primat archevêque de Lyon, dont la supériorité était reconnue pir l'archevêque de Tours, par l'archevêque

de Sens et par celui de Paris, autrefois suffragant de Sens (Fleury, Inst. au droit ecet. I part., ch. 14).

« L'ancienneté des métropoles et leur évi dente utilité pour le maintien de la discipline, doivent en garantir la conservation mais le judicieux abbé Fleury a remarqué qu'elles avaient été trop multipliées, et qu'on ne les avait souvent érigées que pour honorer certaines villes il observe qu'elles étaient plus rares dans les premiers siècles, et que leur trop grand nombre est un abus préjudiciable. au bien de l'Eglise (Fleury, disc. IV, n. 4).

« Dans les premiers temps il y avait un évêque dans chaque ville; dans la suite, plusieurs villes ont été sous la direction du même évêque.

« L'étendue plus ou moins grande des diocèses a suivi les changements et les circonstances qui influaient plus ou moins sur leur circonscription on trouve des diocèses immenses en Allemagne et en Pologne; ils sont plus réduits en Italie; en France on les réunissait ou on les démembrait, selon que les motifs d'utilité publique paraissaient l'exiger. Aujourd'hui les changements survenus dan les circonscriptions politiques et civiles rendent indispensable une nouvelle circonscrip tion des métropoles et des diocèses dans l'ordre ecclésiastique, car la police extérieure de l'Eglise a toujours plus ou moins de rapport avec celle de l'empire.

« Pour en conserver l'unité, il ne faut qu'un évêque dans chaque diocèse.

« Les fonctions essentiellement attachées à l'épiscopat sont connues: les évêques ont exclusivement l'administration des sacrements de l'ordre et de la confirmation; ils ont la direction et la surveillance de l'instruction chrétienne, des prières et de toute qui concerne l'administration des chose spirituelles; ils doivent prévenir les abus et écarter toutes les superstitions. (Fleury, Inst. au droit ecclés., part. 1, chap. 12.)

« Dans les articles organiques, on rappelle aux évêques l'obligation qui leur a été imposée dans tous les temps de résider dans leur diocèse, et celle de visiter annuellement au moins une partie des églises confices à leur soin; cette résidence continue est la vraie garantie de l'accomplissement de teus leurs devoirs. (Voy. RESIDENCE.)

« Les prêtres et les autres clercs doivent reconnaitre les évêques pour supérieurs; car les évêques sont comptables à l'Eglise et à l'Etat de la conduite de tous ceux qui administrent les choses ecclésiastiques sous leur surveillance.

« La division de chaque diocèse en différentes paroisses a été ménagée pour la commodité des chrétiens, et pour assurer partout la distribution des bienfaits de la religio dins un ordre capable d'écarter tout arb traire, et de ne rien laisser d'incertain dass la police de l'Eglise.

La loi de la résidence est obligato pour les prêtres qui ont une destination determinée, comme pour les évéques. (Vege ABSENCE.)

« Un des plus grands abus de la discipline de nos temps modernes prenait sa source dans les ordinations vagues et sans titre, qui multipliaient les prêtres sans fonction, dont l'existence était une surcharge pour l'Etat et souvent un sujet de scandale pour l'Eglise. Les évêques sont invités à faire cesser cet abus ils seront tenus de faire connaître au gouvernement tous ceux qui se destineront à la cléricature, et ils ne pourront promouvoir aux ordres que des hommes qui puissent offrir, par une propriété personnelle, un gage de la bonne éducation qu'ils ont reçue et des biens qui les attacheni à la patrie. (Voy. l'article organique 26.)

«Onlaisseauxévêques la liberté d'établir des chapitres cathédraux et de choisir des coopérateurs connus sous le nom de vicaires généraux ; mais ils n'oublieront pas que ces coopérateurs naturels sont les prêtres attachés à la principale église du diocèse, pour l'administration de la parole et des sacrements, et que la plus sage antiquité a toujours regardés comme le véritable sénat de l'évêque. Ils peuvent choisir encore, parmi les curés qui desservent les paroisses, un premier prêtre chargé de correspondre avec eux sur tout ce qui est relatif aux besoins et à la discipline des églises. Le premier prêtre, quelquefois désigné sous le nom d'archiprêtre, quelquefois sous celui de doyen rural, ou sous toute autre dénomination, a été connu dans le gouvernement de l'Eglise dès les temps les plus reculés. (Voy. ARCHIPRÊTRE.)

« Pour avoir de bons prêtres et de bons évêques, il est nécessaire que ceux qui se destinent aux fonctions ecclésiastiques, reçoivent l'instruction et contractent les habiludes convenables à leur état de là l'établissement des séminaires, autorisé et souvent ordonné par les lois (ordonnance de Blois). Les séminaires sont comme des maisons de probation, où l'on examine la vocation des clercs, et où on les prépare à recevoir les ordres et à faire les fonctions qui y sont attachées ; T'enseignement des séminaires, comme celui de tous les autres établissements d'instruction publique, est sous l'inspection du magistrat politique. Les articles organiques rappellent les dispositions des ordonnances qui enjoignent à tous professeurs de séminaire d'enseigner les maximes qui ont été l'objet de la déclaration du clergé de France en 1682, et qui ne peuvent être méconnues par aucun bon citoyen. (Voyez l'article organique 24.)

«C'est aux archevêques ou métropolitains à veiller sur la discipline des diocèses, à écouter les réclamations et les plaintes qui peuvent leur être portées contre les évêques; à pourvoir, pendant la vacance des siéges, au gouvernement des diocèses dans les lieux où il n'y a point de chapitres cathédraux autorisés par le dernier état de la discipline; à pourvoir, par des vicaires généraux, au gouvernement des siéges vacants. Voyez article organique 36; il est rapporté.) Toute distinction entre le elergé séculier el régulier est effacée. Les conciles généraux

avaient depuis longtemps défendu d'établir de nouveaux ordres religieux, crainte que leur grande diversité n'apportât de la confusion dans l'Eglise, et ils avaient ordonné à toutes les personnes engagées dans les ordres ou congrégations déjà existantes, de rentrer dans leurs cloîtres et de s'abstenir de l'administration des cures, attendu que leur devoir était de s'occuper, dans le silence et dans la solitude, de leur propre perfection, et qu'ils n'avaient point reçu la mission de communiquer la perfection aux autres. Toutes ces prohibitions avaient été inutiles; il a été remarqué que la plupart des ordres religieux n'ont été établis que depuis les défenses qui ont été faites d'en former il est à remarquer encore que, nonobstant les prohibitions des conciles, le clergé régulier continuait à gouverner des cures importantes. Ce qui est certain, c'est que la ferveur dans chaque ordre religieux n'a guère duré plus d'un siècle, et qu'il fallait sans cesse établir des maisons de réforme, qui bientôt elles-mêmes avaient besoin de réforma

tion.

« Toutes les institutions monastiques ont disparu; elles avaient été minées par le temps. Il n'est pas nécessaire à la religion qu'il existe des institutions pareilles, et, quand elles existent, il est nécessaire qu'elles remplissent le but pieux de leur établissement. La politique, d'accord avec la piété, a donc sagement fait de ne s'occuper que de la régénération des clercs séculiers, c'est-àdire de ceux qui sont vraiment préposés, par leur origine et par leur caractère, à l'exercice du culte.

«La discipline ecclésiastique ne sera plus. défigurée par des exemptions et des privilé ges funestes et injustes, ou par des établissements arbitraires qui n'étaient point la religion. (Voy. l'article organique 10.)

Tous les pasteurs exerceront leurs fonctions conformément aux lois de l'Etat et aux canons de l'Eglise; ceux d'entre eux qui occupent le premier rang n'oublieront pas que toute domination leur est interdite sur les consciences, et qu'ils doivent respecter dans leurs inférieurs la liberté chrétienne, si fort recommandée par la loi évangélique, et qui ne comporte entre les différents ministres du culte qu'une autorité modérée et une obéissance raisonnable.

«Sous un gouvernement qui protége tous les cultes, il importe que tous les cultes se folèrent réciproquement: le devoir des ccclésiastiques est donc de s'abstenir, dans l'exercice de leur ministère, de toute déclamation indiscrète qui pourrait troubler le bon ordre. Le christianisme, ami de l'humanité, commande lui-même de ménager ceux qui ont une croyance différente, de souffrir tout ce que Dieu souffre, et de vivre en paix avec tous les hommes.

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