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503. Par une conséquence manifeste des principes ci-dessus, on ne peut poursuivre un nouveau prévenu, quand le délit qu'on Jui impute a pour élément nécessaire un délit antérieur qui a été jugé, avec un autre prévenu, n'avoir pas existé. Ainsi, par exemple, un individu ne saurait être condamné comme recéleur d'un déserteur, lorsqu'il a été antérieurement jugé que l'individu prétendu recélé n'était point en état de désertion (Crim. cass., 7 mars 1806) (1).

504. Enfin, de même que la situation du prévenu se trouve fixée par le jugement correctionnel dont il a seul appelé, et qu'elle ne peut être aggravée sur les réquisitions du ministère public, sans atteinte à la chose jugée (V. Appel crim., nos 355 et suiv.); de même, le bénéfice d'un jugement rendu sur l'appel de quelques-unes des parties condamnées ne peut profiter aux autres condamnés qui n'en ont pas appelé, encore bien que le tribunal d'appel ait ordonné la mise en cause de ceux-ci et qu'ils soient même intervenus dans le débat : il y aurait atteinte à la chose jugée (Crim. cass., 9 fév. 1837, aff. Bouvier, V. Appel crim., n° 100).

505. De même, lorsque la condamnation correctionnelle est divisible entre les parties condamnées, l'annulation du jugement au profit de l'une des parties ne peut profiter aux autres qui n'ont point appelé dans les délais (Crim. rej., 28 therm. an 6) (2). SECT. 4. Des effets de la chose jugée en matière criminelle. 506. L'objet de cette section a la plus grande analogie avec celui de la section où il a été traité des effets de la chose jugée en matière civile (V. no 293). On doit donc se reporter à cette dernière. Nous nous bornerons à recueillir ici les décisions rendues dans les matières criminelles. Quant à l'effet le plus re

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déclarer ensuite Jean Carizet convaincu d'avoir recélé ces mêmes effets, sachant qu'ils étaient volés, méchamment et dans le dessein du crime; que la déclaration en faveur de la fille Julie Levêque étant inattaquable et devant irrévocablement subsister, celle contre Jean Carizet doit être, par cela même, considérée comme non avenue; et que si, pour la régularité des formes, le tribunal est obligé de la casser et annuler, il n'y a pas lieu à provoquer une nouvelle déclaration sur une accusation qui n'a plus d'objet; Considérant qu'en prenant pour base de son jugement la déclaration erronée contre Carizet, le tribunal criminel de l'Aisne a fait une fausse application de l'art. 3, tit. 3, 2 part., c. pén., Jean Carizet ne pouvant être puni comme complice d'un vol que les jurés ont déclaré n'avoir pas existé ; Considérant enfin que la déclaration des jurés sur le deuxième chef d'accusation contre Carizet, subsiste seule dans son entier, et qu'il ne reste plus qu'à lui appliquer la peine dont est susceptible le délit dont il 'est déclaré convaincu; Par ces motifs, casse et annule la déclaration des jurés de jugement, relative au chef de complicité contenu dans la première série; casse pareillement et annule, pour fausse application de l'art. 3, tit. 3, 2 part., c. pén., le jugement rendu, le 16 mess. an 6, qui condamne Jean Carizet à buit années de fers.

Du 7 vend. an 7.-C. C., sect. crim.-MM. Barris, pr.-Gohier, rap.

(1) Espèce: - - (Barré C. min. pub.) — Barré avait été prévenu d'avoir recélé sciemment un déserteur; mais le nommé Cartaux, qui était "'individu arrêté chez lui comme déserteur, fut acquitté de ce prétendu délit par jugement d'un conseil de guerre du 4 brum. an 14. Malgré la représentation de ce jugement, qui déclarait qu'il n'y avait pas eu de délit, la cour de justice criminelle du département de Maine-et-Loire déclara Barré complice, et le punit comme tel. Pourvoi. Arrêt. LA COUR; Vu l'art. 4 de la loi du 24 brum. an 6 et l'art. 456 c. des dél. et des pein.; Attendu qu'ayant été décidé par le jugement rendu par le conseil de guerre spécial, séant à Grenoble, le 4 brum. an 14, que François Cartaux, canonnier au 4 régiment d'artillerie à pied, n'était pas coupable du crime de désertion, la cour de justice criminelle du département de Maine-et-Loire n'a pas pu, sans commettre un excès de pouvoir, déclarer, comme elle l'a fait par son arrêt du 18 frimaire suivant, Pierre Barré coupable d'avoir recélé sciemment Cartaux, déserteur, ni lui appliquer, comme complice d'un crime de désertion, qui n'a pas existé, la peine portée en l'art. 4 de la loi du 24 brum. an 6;- Casse.

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Du 7 mars 1806.-C. C., sect. crim.-MM. Viellart, pr.-Lombard, rap. (2)(Communes de Saint-Sorlin et autres. )- LE TRIBUNAL; Attendu que les demandeurs en cassation n'ont point interjeté appel dans le délai de la loi, du jugement du tribunal de police correctionnelle de Belley, rendu le 1er fruct. an 5; qu'ils sont conséquemment réputés légalement avoir acquiescé; -Que la condamnation prononcée contre eux et la commune d'Ordonnaz est divisible, et que la diligence de cette commune ne peut les relever de la déchéance qu'ils ont encourue en vertu de l'art. 194 e des dél. et des pein. précité; que conséquemment l'annulation en faveur

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marquable de la chose jugée, il se trouve traité dans le chap. 5, intitulé de l'Influence du criminel sur le civil, et réciproquement. C'était un principe déjà consacré par les lois romaines qu'une fois la sentence prononcée, la peine ne pouvait être ni augmentée ni diminuée sans la permission du prince : « De amplianda vel minuendâ pœnâ damnatorum post sententiam dictam, sinè principali auctoritate nihil est statuendum » (L. 45, § 1, D., De re judic.). C'était là la conséquence de l'irrévocabilité des jugements.

507. En matière criminelle, les peines afflictives et infamantes ne peuvent être cumulées; un individu, par la condamnation à la peine la plus forte de celles par lui encourues pour des crimes qu'il a commis antérieurement à sa première condamnation, expie tous ses crimes; mais cela ne s'entend que de la nature et non de la durée des peines, et de manière à ce que jamais les peines prononcées par les divers arrêts de condamnation réunis, ne puissent dépasser le maximum de la peine déterminé par la loi (Crim. rej., 28 avril 1831) (3); de sorte que rien n'empêche qu'un individu déjà puni à raison d'un crime, ne soit ultérieurement frappé de la même peine à raison d'un crime de même nature antérieur à la première condamnation, lorsque la réunion des deux condamnations ne dépasse pas le maximum de la peine établie pour le crime dont il s'agit.

Il n'y a pas non plus cumulation de peines lorsqu'une cour d'assises a prononcé la peine de la flétrissure contre un individu condamné une première fois pour faits de même nature, pour le cas seulement où la flétrissure n'aurait pas été prononcée la première fois (même arrêt). Mais il en est autrement, lorsqu'une cour d'assises prononce la seconde fois la condamnation à l'exposition, alors que l'accusé avait subi la première fois la condamnation à cette peine (même arrêt). — V. Peine.

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de la commune d'Ordonnaz du jugement du tribunal de police correctionnelle de Belley ne peut profiter aux demandeurs à l'égard desquels il a passé en force de chose jugée; - Rejette.

Du 28 therm. an 6.-C. C., sect. crim.-MM. Gohier, pr.-Ritter, rap. (3) (Cary C. min. pub.) — La cour; - Sur la première branche da sixième moyen, le troisième de Cary, dit Pepin, tiré de la violation des art. 365 et 379 c. inst. crim., en ce que le faux pour lequel Pepin, dit Cary, a été condamné, le 21 février dernier, à cinq ans de travaux forcés, étant antérieur à sa première condamnation pour fait semblable, du 30 avril 1823, et le nouveau fait n'entraînant pas une peine plus grave, il n'y avait lieu de le traduire en justice à cet égard, et de prononcer contre lui aucune peine: Attendu que, s'il est de principe certain, en matière criminelle, que les peines afflictives et infamantes ne peuvent être cumulées, et qu'un individu, par la condamnation à la peine la plus forte de celles par lui encourues pour des crimes par lui commis antérieurement à sa premiére condamnation, expie tous ses crimes, cela ne s'entend que de la nature et non de la durée des peines, et de manière à ce que jamais, et dans aucun cas, les peines prononcées par les divers arrêts de condamnation réunis, ne puissent dépasser le maximum de la peine déterminé par la loi; Attendu que, dans l'espèce, Cary, dit Pepin, par l'arrêt du 30 avril 1823, a été condamné à six ans de travaux forcés pour faux en écriture de commerce, et que, par autre arrêt du 21 fév. 1831, Il a été encore condamné, pour autre fait semblable, à cinq ans de la même peine; que ces deux condamnations réunies ne forment qu'un total de onze ans, et qu'elles n'atteignent donc pas le maximun de la peine des travaux forcés à temps, qui a été fixé à vingt ans par l'art. 19 c. pén.; Sur la deuxième branche de ce moyen, tirée de la condamnation à la flétrissure: Attendu qu'en subordonnant la condamnation à la flétrissure prononcée, le 21 fév. dernier, contre Cary, dit Pepin, au cas où cela n'aurait pas été fait ensuite du premier arrêt de condamnation, la cour d'assises de la Seine n'a violé ni l'art. 365 c. inst. crim., ni aucune autre disposition de la loi; - Par ces motifs, rejette ces divers moyens.

Mais, sur la troisième branche de ce sixième moyen, tirée de la double condamnation de Cary, dit Pepin, à l'exposition: Attendu que, pai l'arrêt de la cour d'assises de la Seine, du 30 avril 1823, Cary, dit Pepin, avait été condamné, pour faux en écriture de commerce, à six ans de travaux forcés et à l'exposition publique, ordonnée par l'art. 22 c. pén. ; que, par le nouvel arrêt de la même cour d'assises, du 21 fév. 1831, Cary, dit Pepin, a été encore condamné pour fait de même nature à cinq ans de travaux forcés et à l'exposition publique à laquelle il avait déjà été condamné et qu'il avait subie; que, sous ce rapport, il y a, dans cette condamnation l'exposition, en ce qui le concerne, cumulation évidente de peines, et, par conséquent, violation des art. 365 et 379 c. inst. crim., et fausse application de la loi; - Par ces motifs, casse en ce point; et vu l'art. 429, § 5, c. Inst. crim.; Attendu qu'il n'échet de prononcer aucune peine, el qu'il n'y a pas de partie civile, déclare qu'il n'y a lieu à renvoi.

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Du 28 avril 1831.-C. C., ch. crim.-MM. Ollivier, pr.-Meyrornet, rap.

508. Un autre principe que la loi criminelle avait pro- | clamé voulait qu'il ne fût pas permis de remettre en jugement pour le même fait les individus qui avaient été acquittés ou déjà condamnés: c'est ce qu'on exprimait par la célèbre maxime non bis in idem, qui a passé dans nos législations modernes.

La convention avait appliqué un principe semblable même à une déclaration du jury d'accusation portant acquittement de l'accusé, et décidé qu'elle ne permettait pas de le renvoyer devant le tribunal de police correctionnelle à raison du même fait (décr.❘ 21 prair. an 2) (1).

509. Les effets de la chose jugée ont paru si respectables, et la crainte de remettre en question des points qui avaient été jugés, si légitime, qu'en matière de diffamation on ne poursuit des faits qui ont été produits pendant le débat, quoiqu'ils n'aient donné lieu à aucun jugement, qu'autant que ces faits ont été déclarés étrangers à la cause ou que l'action a été expressément réservée (L. 17 mai 1819, art. 23), ce qui, bien entendu, ne saurait s'appliquer aux tiers non parties au procès, et ce qui a été jugé inapplicable en matière de dénonciation calomnieuse portée devant un tribunal incompétent (Crim. rej., 16 fév. 1839, aff. Laurent, V. Presse-outrage).

510. Si, après qu'un procès civil a été jugé conformément au serment décisóire déféré à l'une des parties, la preuve de la fausseté de ce serment vient à être acquise par la voie criminelle, cette circonstance peut-elle exercer quelque influence sur le jugement civil précédemment rendu ? Non; l'art. 1363 c. civ. interdit expressément à celui qui a déféré le serment décisoire, d'en prouver la fausseté; d'où il suit que, l'action civile une fois écartée par suite du serment, quel que soit le sort des poursuites du ministère public sur l'accusation de parjure, le demandeur | ne peut jamais, et sous aucun prétexte, s'en prévaloir pour faire revivre une action irrévocablement éteinte; la poursuite du parjure ne peut plus avoir pour objet que l'intérêt de la société : l'événement du proces criminel ne saurait autoriser la partie lésée par ce parjure à revenir contre le jugement civil ni lui donner le droit d'obtenir des dommages-intérêts quelconques devant la juridiction criminelle (Crim. rej., 21 août 1834, aff. Hélitas, V. Serment).

511. En général, c'est au dispositif qu'il faut s'attacher dans l'appréciation des effets de la chose jugée (V. n° 21). On doit le prendre dans son acception naturelle, en restreindre les termes lorsqu'ils sont à charge, plutôt que les étendre. Lorsqu'il y a obscurité, l'interprétation est admise; mais ce ne doit être ici que dans un sens favorable plutôt que dans un sens rigoureux in melius non in durius. C'est d'après ce principe qu'un arrêt a interprété les mots corrélation directe renfermés dans un précédent arrêt, par ceux-ci corrélation morale (Crim. rej., 16 fév. 1839, aff. Laurent, V. Presse).

512. Il résulte, en effet, du principe consacré par l'art. 360 c. inst. crim. qu'un accusé ne peut être poursuivi de nouveau parce (1) 21 prair. an 2 (9 juin 1794). Décret sur la question de savoir si un accusé, acquitté par la déclaration du jury d'accusation, peut être renvoyé devant un tribunal de police correctionnelle, à raison du même fait.

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qu'il n'a été condamné qu'à une peine trop légère. «Si un délinquant a été une fois condamné, dit Papon, là où plus gravement il le pouvait être, selon l'exigence du fait, il ne doit plus être recherché pour même fait, afin d'être puni selon ce qu'il mérite. » -Conf. Rousseaud-Lacombe, 3° part., ch. 1, sect. 3, no 2; Jousse, Just. crim., t. 3, 3e part., liv. 3, tit. 1, art. 25, p. 12; Legraverend, t. 1, p. 57; Mangin, no 371, Le Sellyer, no 2441. Pareillement, les juges qui ont omis d'infliger à l'accusé toutes les peines par lui encourues (parce qu'ils n'ont été instruits qu'après le jugement de l'état de récidive où se trouvait l'accusé) ne peuvent réparer cette omission par un second jugement (Crim. cass., 18 flor. an 7 et 18 fruct. an 13).

513. De ce qu'un même individu ne peut être jugé pour le même fait qu'une seule fois, il suit que s'il s'est d'abord fait connaître sous un faux nom, et a été jugé sous celui-ci, cette circonstance ne doit pas entraîner la nécessité d'instruire de nouveau l'affaire contre le même individu, sous un autre nom; dans un tel cas il ne peut y avoir lieu qu'à établir l'identité de cet individu, connu sous deux noms différents. Telle est la marche tracée par l'art. 518 c. inst. crim., pour le cas qu'il détermine, et cette marche, la seule en rapport avec les principes de la matière, doit être suivie dans tous les cas analogues à celui dont il s'agit (C. de Gand, ch. corr., 6 nov. 1833, aff. Vereyken C. min. pub.). 514. S'il arrivait que par erreur une cour, une chambre d'accusation ordonnât la restitution, par suite de l'annulation d'une saisie pour vice de forme, d'objets au nombre desquels il s'en trouve dont la suppression a été ordonnée par arrêt passé en force de chose jugée, la décision nouvelle doit être annulée dans sa disposition relative à ces objets (Crim. cass., 11 oct. 1832, aff. Chevesaille, V. Presse).

515. Une ordonnance d'acquittement n'a point pour effet d'empêcher que, dans un autre procès criminel ultérieurement intenté contre le même individu, la cour d'assises ne puisse, pour éclairer le jury sur la moralité de l'accusé, permettre que les témoins soient entendus même sur les faits qui ont été l'objet de la première accusation. Ce n'est point là violer la chose jugée, car en autorisant l'audition des témoins sur tout ce qu'ils savent relativement à l'accusé, la cour n'a pas en vue de remettre en question l'acquittement prononcé dans le premier procès, mais d'obtenir des renseignements sur la vie et la conduite de l'accusé (Crim. rej., 20 janv. 1832; 7 janv. 1836) (2).

516. Lorsqu'une dénonciation contre un fonctionnaire a été suivie d'une ordonnance de non-lieu, l'auteur de la dénonciation, poursuivi comme calomniateur, n'a pas le droit de discuter de nouveau les faits exposés dans sa dénonciation; il ne peut que se défendre sur la question intentionnelle; et si, en laissant aux témoins apppelés par le prévenu toute latitude sur ce point, le tribunal se borne à interdire à leur égard les interpellations sur les faits qui ne peuvent plus être débattus, il ne viole aucune loi (Crim. rej., 2 mai 1834, aff. Coudray, V. Témoin).

ner sur la vie et la conduite des accusés d'utiles renseignements, il n'y a eu violation d'aucun article de la loi, puisqu'il ne s'agissait nullement de rejuger les demandeurs sur les faits dont ils avaient été acquittés ; qu'ainsi il n'y a eu violation ni des art. 1350 et 1351 c. civ., ni de l'art. 360 c. inst. crim.; Attendu sur le deuxième moyen, que quelque irrégulière que fût la délégation du juge d'instruction d'Yvetot, elle n'a point vicié l'audition orale des témoins entendus aux débats, audition à laquelle les demandeurs ne se sont point opposés; - Rejette. Du 20 janv. 1832.-C. C. ch. crim.-MM. de Bastard, pr.-Ollivier, rap. 2 Espèce (Lefrançois C. min. pub.)- LA COUR; Sur le premier moyen, tiré de la prétendue violation de la chose jugée, en ce que la cour d'assises, nonobstant l'opposition du défenseur de l'accusé, à co que les témoins Petit, femme Petit et fille Halbout, fussent entendus sur les faits relatifs au procès criminel intenté contre Lefrançois en 1821, et sur lequel il a été acquitté, a néanmoins ordonné que lesdits témoins seraient entendus: Attendu que les témoins dont il s'agit avaient été cités ré

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La convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de législation sur la question proposée par le jugement du tribunal du district de Chaumont, département de la Haute-Marne, en date du 5 de ce mois, et tendant à savoir si, après une déclaration du jury d'accusation portant qu'il n'y a pas lieu à accusation, le tribunal de district peut renvoyer le prévenu devant le tribunal de police correctionnelle, avec les pièces de la procédure instruite contre lui; Considérant qu'aux termes de l'art. 28 du tit. 1 de la 2o part. de la loi des 16-29 sept. 1791, lorsque les jurés prononcent qu'il n'y a pas lieu à accusation, le prévenu doit être mis en liberté, et ne peut plus être poursuivi à raison du même fait, à moins qu'il ne survienne contre lui de nouvelles charges; que le tribunal de district ne peut pas se rendre juge de la déclaration du jury, ni par consequent décider qu'elle n'a pas été motivée, soit sur ce que le fait n'était pas constant, soit sur ce que le prévenu a paru absolument irrépro-gulièrement et notifiés à l'accusé, et qu'aucune disposition de la loi n'oblichable; qu'ainsi on ne peut pas, sans violer essentiellement l'institution des jurés, assimiler ce cas a celui où, le tribunal de district jugeant que l'accusation n'est pas de nature à être présentée au jury, l'art. 56 du titre cité lui enjoint de renvoyer, s'il y a lieu, à la police correctionnelle; Déclare qu'il n'y a pas lieu à délibérer.

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(2) 1 Espèce: (Jouen C. min. pub.) — LA COUR; Attendu... Sur le premier moyen.... Qu'en entendant des témoins qui pouvaient donTOME VIII.

geait la cour d'assises à restreindre leur audition aux fails spéciaux de l'accusation dont le jugement se poursuivait devant elle, et qu'elle a pu, sans violer l'autorité de la chose jugée, les entendre sur tout ce qu'ils savaient relativement à l'accusé, parce qu'en procédant ainsi, elle a évidemment eu pour but, non de emettre en question l'acquittement prononcé dans le procès de 1821, en faveur de l'accusé, mais bien d'éclairer le jury sur la moralité antérieure de cet accusé; - Rejette.

Du 7 janvier 1836.-C. C., ch. crim.-MM. de Bastard, pr.-Dehaussy, rap. 56

517. Les effets de la chose jugée sont détruits par la cassation, à moins qu'elle n'ait eu lieu dans l'intérêt de la loi, cas auquel le jugement ne cesse pas d'être exécutoire entre les parties (V. Cassation, no 1033 et suiv.).

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518. La chose jugée produit cet effet: 1° qu'après un arrêt de renvoi d'un ensemble de délits contre divers individus devant une cour d'assises, cette cour ne peut restreindre à un seul de ces délits l'effet de l'arrêt de renvoi et se déclarer incompétente pour connaître des autres (Crim. cass., 19 oct. 1820, aff. Terrier, V. Compét. crim.); et qu'ainsi elle doit juger des individus qui en raison de leur qualité auraient du être traduits devant une autre juridiction criminelle. Sur ce point qui est constant, V. Compét. crim.; V. aussi D. G., eod., no 350 s.;-2° Que de même si une décision n'a été attaquée et cassée que sur un point, les juges saisis sur renvoi ne peuvent statuer à l'égard des autres points non attaqués (Crim. cass., 28 janv. 1832, aff. Mauger, V. Cassation, no 2214);-3° Qu'en conséquence, si la déclaration du jury et le jugement n'ont été cassés que pour omission de réponse sur la question de yol, la question d'homicide résolue en faveur de l'accusé ne peut plus être agitée devant le tribunal de renvoi, toute nouvelle déclaration de jury à cet égard est nulle (Crim. cass., 22 pluv. an 5, M. Dutocq, rap., aff. Queret); 4° Que, lorsque le jugement correctionnel qui renvoie le prévenu de la plainte n'a pas été attaqué par le ministère public, mais seulement par la partie civile, le tribunal doit se borner à statuer sur l'action civile (Crim. rej., 16 flor. an 10) (1); 5° Que saisis sur l'appel de la partie civile seule, les juges ne peuvent réformer à son préjudice le jugement attaqué quant aux dommages-intérêts accordés à celle-ci (V. Appel crim., no 370); 6o Que le tribunal de simple police saisi d'une contravention pour vol de récolte, réprimée par l'art. 475, 15° c. pén., sur citation délivrée en vertu de jugements passés en force de chose jugée, qui ont écarté toutes les circonstances aggravantes, ne peut se déclarer incompétent, sur le motif que la citation énonce par erreur la circonstance de la nuit; il doit, en cas pareil, rectifier l'erreur et non se dessaisir (Crim. cass., 13 juill. 1833) (2); — 7° Que de ce qu'un interlocutoire a ordonné une preuve, la partie n'est plus recevable à se plaindre de ce qu'il a ordonné une preuve testimoniale dans un des cas où elle n'était pas permise (Crim. rej., 31 juill. 1812, aff. Bourgeay, V. Dépôt);– 8° Que le tribunal de police statuant sur l'action en injures et diffamations verbales d'un individu acquitté par un tribunal correctionnel, peut prendre pour base de sa décision le jugement d'acquittement du tribunal correctionnel s'il est passé en force de chose jugée (Crim. rej., 20 déc. 1810) (3); 9° Qu'enfin, lorsque trois délits sont imputés à un prévenu; que le ministère public requiert sa mise en prévention pour l'un de ces délits et son renvoi des poursuites pour les deux autres; qu'une ordonnance de non-lieu intervient sur les trois chefs;

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(1) (Raffeneau.) - LE TRIBUNAL; Considérant que le commissaire du gouvernement ne s'était point rendu appelant du jugement du tribunal de police correctionnelle qui avait renvoyé Raffeneau de la plainte portée contre lui; qu'à ce moyen, l'action publique se trouvait anéantie, et qu'ainsi le tribunal criminel a agi régulièrement en se bornant à statuer sur l'action privée; Rejette.

Du 16 flor. an 10.-C. C., sect. crim.-MM. Viellart, pr.-Rataud, rap.

(2) (Min. pub. C. Hélis.)—La cour ;—Relativement au jugement du tribunal de police du canton de Pons;-Vu l'art. 1350 c. civ.,-Attendu que les jugements correctionnels de Saintes et de Niort, sur l'appel, avaient reconnu et déclaré que le vol imputé à Hélis, dit Merlet, était dégagé, par le débat, de toutes circonstances aggravantes, et ne présentait que les caractères du simple vol, réprimé par le n° 15, art. 475 c. pén. ; que le ministère publie près le tribunal de simple police n'avait pu faire citer le prévenu qu'en conformité des errements fixés par lesdits jugements; que, si la circonstance de la nuit était insérée par erreur dans la citation, le ministère public pouvait et devait, comme il l'a fait, la rectifier à l'audience; d'où il suit que le juge de paix tenant le tribunal de police, en rejetant cette rectification et en se déclarant incompétent sans aucun débat préalable, a violé, par le jugement dénoncé, l'autorité de la chose jugée, l'art. 1350 c. civ., et les règles de procéder admises et suivies dans tous les tribunaux, tant en matière civile que criminelle; En conséquence, statuant sur le réquisitoire du procureur général, Casse et annule, dans l'intérêt de la loi seulement, etc.

Du 13 juill. 1833.-C. C. ch. crim.-M. Brière, rap.

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si le ministère public forme opposition, mais seulement en ce qui touche le chef à l'égard duquel ses réquisitions n'ont pas été suivies, la chambre d'accusation n'est saisie que de ce seul chef; elle ne peut s'occuper des deux autres, à l'égard desquels il y a chose jugée, par l'absence d'opposition de la part du procureur du roi (Nancy, 23 août 1845, ch. d'acc., aff. min. pub. C. Ca. ton, etc.). y, ce qui est dit sur ces points divers, vis Appel crim. et Peine.

519. Toutefois

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individu ne peut renoncer, vis-à-vis de la partie publique, à l'exception de chose jugée en sa faveur, et par suite il peut faire casser l'arrêt qui le condamne nonobstant une décision par laquelle il avait été absous et dont il n'a pas excipé (Crim. cass., 12 juill. 1806, aff. Riva, V. no 396). 520. La chose jugée nous semble présenter un moyen d'or dre public que le juge criminel doit suppléer (V. Cassation, n° 1524. Conf. MM. Mangin, no 372; Le Sellyer, no 2451; même arrêt, aff. Riva). Mais dans les procès entre parties, la cour de cassation n'admet l'exception à laquelle elle donne lieu, qu'autant qu'elle a été proposée devant les premiers juges (Crim. rej., 12 avril 1817, aff. Noël, V. Cassation, no 1952). Au surplus, c'est la règle qui est admise en matière civile. V. no 332. CHAP. 4. · DE LA CHOSE JUGÉE EN MATIÈRE DISCIPLINAIRE. 521. Tout magistrat, officier ministériel, et en général tout citoyen qui exerce une fonction publique, relève cumulativement, quant aux délits qu'il peut commettre, d'une double juridiction, savoir, la justice ordinaire à laquelle il est soumis comme citoyen, et la justice disciplinaire qui lui est imposée comme fonctionnaire de l'État. La peine infligée par l'une de ces juridictions, ne saurait donc empêcher l'autre de sévir pour le même fait (Conf. MM. Mangin, no 442; Rauter, no 2; Duyergier sur Legrayerend, t. 2, p. 15, note 2; Le Sellyer, t. 6, no 2447. — V. cependant no 526).-C'est ainsi qu'il a été jugé que la condam nation disciplinaire encourue par un juge à raison d'un certain fait ne forme pas obstacle à l'exercice de l'action publique en répression du même fait soit contre un magistrat (Crim. cass., 12 mai 1827, aff. Marcadier, V. Discipl.; Rej., 22 déc. 1827, aff. Beuret, V. eod.; Ch. réun., 30 mai 1832, aff. Fouquet, V. eod.), soit contre un avocat déjà puni par mesure de discipline (Crim. rej., 21 fév. 1824 (4), V. aussi vo Avocat, no 445), soit contre un notaire (Nancy, 30 mai 1834, aff. T. V. Notaire; Pau, 10 janv. 1835, V. eod.; Conf. M. Albert du Boys, Hist. droit crim., p. 448). —En un mot, la punition disciplinaire infligée à l'auteur d'une dénonciation calomnieuse pour son corps, n'empêche ni l'action de la partie lésée ni celle du ministère public (Rej., 12 mars 1819, aff. Mourrie, V. Presse).

Réciproquement, la condamnation prononcée contre un juge par les tribunaux criminels ne s'oppose point à ce que le condamné soit ultérieurement frappé, à raison du même fait, d'une

(3) (Vaultier.) — LA COUR; Considérant que le jugement du tribunal de police correctionnelle du 4 sept. 1810 a pleinement et entièrement acquitté ladite fille Poctois, et que ce jugement étant passé en force de chose jugée, le tribunal de police a pu le prendre pour une des bases de son jugement; -Rejette le pourvoi formé contre le jugement du tribunal de police de Gosselier.

Du 20 déc. 1810.-C. G., ch. crim.-MM. Barris, pr.-Busschop, rap.

(4) (Garrigues C. min. pub.)— La cour ; Attendu, sur.la première fin de non-recevoir proposée par le demandeur, que la délibération du conseil de discipline du tribunal d'Alby, du 22 mai 1819, par laquelle le demandeur a été définitivement exclu de l'ordre des avocats, à seulement eu pour objet d'examiner et de juger si cet avocat avait manqué à ses devoirs, à la probité et à l'honneur qui sont l'apanage de cette profession, et que c'est pour y avoir manqué que le conseil de discipline lui a infligé la peine de l'exclusion; Mais que cette peine de discipline n'a pu former un obstacle à la poursuite du crime de faux qui est imputé au demandeur, de la connaissance duquel le conseil de discipline n'a été ní n'aurait pu être saisi; — Qu'il est impossible d'induire de la décision dudit conseil et de l'autorité de la chose jugée qu'elle a acquise, une fin do non-recevoir contre la poursuite du crime de faux, puisque la cause et l'objet des deux poursuites ne sont pas les mêmes; - Rejette le pourvoi contre l'arrêt de la cour royale d'Alby, chambre d'accusation, du 3 déc. 1823.

Du 21 fév. 1824.-C. C., sect. crim.-MM. Bailly, pr.-Chasle, rap.

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peine disciplinaire (Cass., sect. réun., 8 déc. 1809; 27 juill. 1810) (1). Les motifs de cette double décision se trouvent parfaitement résumés dans le premier des arrêts que nous venons de citer: « Attendu, y est-il dit, qué la lof, en soumettant les magistrats de l'ordre judiciaire à une discipline spéciale, a eu pour objet, non de les soustraire à l'empire du droit commun, a raison des délits dont ils se rendraient coupables, mais de réprimer les infractions qu'ils pourraient se permettre aux devoirs de leur état, et certaines fautes dont elle ne demande pas compte aux autres citoyens; - Que l'action en discipline pouvant s'exercer pour des faits qui ne sont pas qualifiés par le code pénal, et étant d'ailleurs assujettie à des formes spéciales, les punitions qui en sont la suite ne sont point de véritables peines, et les décisions qui les prononcent ne sont pas de véritables jugements; – Que l'action en discipline, instituée pour maintenir, dans l'in

(1) 1 Espèce — (Min. pub. C. Courcelles.)- Un arrêt du 18 fév. 1809 déclare C..., juge de paix, convaincu d'avoir, conjointement avec l'un de ses justiciables, fait une fausse déclaration, dans un certificat, pour favoriser la soustraction d'un individu à la conscription; en conséquence, condamne C... à un emprisonnement d'un an, à une amende de 500 fr., par application des art. 4 et 7 de la loi du 24 brum. an 6, et des art. 13 et 14 de la loi du 17 vent. an 8, et à l'impression et affiche de l'arrêt. Le pourvoi formé par C... contre cet arrêt est rejeté le 31 mars suivant. Dans ces circonstances, le procureur général près la cour de cassation a requis, en vertu du pouvoir censorial, conféré à la cour suprême par le sénatus-consulte du 16 therm. an 10, art. 82, la suspension du juge de paix C... jusqu'à ce qu'il en fût autrement ordonné.

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M. Merlin a d'abord fait observer que ce serait un scandale, une calamité publique, et un avilissement pour la magistrature de voir un jugede paix, condamné à une peine correctionnelle, rentrer en fonctions après avoir subi sa peine, un juge de paix surtout qui a commis le délit, de concert avec un de ses justiciables, qui a trahi la vérité pour dégager un individu de la conscription, et en faire retomber le poids sur un autre qui en était exempl, et dont la condamnation enfin a été publiée par des affiches dans toute l'étendue de son canton. Pour parer à cet inconvénient, la voie de la destitution n'est point ouverte aux tribunaux, car le souverain seul a le droit de prononcer celle d'un juge; mais l'art. 82 du sénatus-consulte du 16 therm. an 10, en permettant à la cour de cassation de suspendre les juges pour cause grave, offre un remède salutaire pour le cas actuel. On objectera peut-être, ajoute M. Merlin, que la suspension serait pour C... une seconde peine, et que déja puni par la cour de justice criminelle, en vertu de la loi du 24 brum. an 6, il ne peut pas l'être de nouveau par la cour, en vertu du sénatus-consulte du 16 therm. an 10. - Mais la suspension d'un fonctionnaire public n'est pas une peine proprement dite; c'est une mesure de haute police, dont l'objet est bien moins de punir le fonctionnaire public qu'elle frappe que de préserver la société d'un dommage qu'elle peut avoir à craindre de sa part. Tout fonctionnaire public, tout citoyen qui est mis en état d'accusation, est par cela seul suspendu, non-seulement de ses fonctions, mais même de ses droits politiques; et cependant il n'est pas encore jugé coupable. La suspension de ses fonctions, de ses droits politiques, n'est donc pas considérée comme une peine; car, si elle était rangée dans la classe des peines, elle ne pourrait que précéder le jugement de conviction, elle ne pourrait pas le suivre ou plutôt en faire partie (V. Quest. de droit, v° Non bis in idem, § 2).

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LA COUR; Vu l'arrêt rendu par la cour de justice criminelle du département de....., en date du 18 fév. 1809, et l'art. 82 du sénatus-consulte du 16 therm. an 10; - Et considérant que l'arrêt d'une cour de justice criminelle qui déclare un juge convaincu d'avoir donné un faux certificat, qui le condamne à une amende et à une année d'emprisonnement, et qui a été rendu public par l'impression et l'affiche, est une des causes graves dont parle l'art. 82 du sénatus-consulte du 16 therm. an 10; Que rien ne serait plus scandaleux que de voir ce juge monter sur son tribunal, presque au même instant où il aurait fini d'expier la peine de son délit; - Que la suspension à prononcer contre lui n'est point une nouvelle peine du délit, mais qu'elle est la conséquence nécessaire, tant de la condamnation qui a établi contre ce juge une grave cause de suspicion sous tous les rapports, que de l'impression et de l'affiche de cette condamnation qui lui ont enlevé la considération, sans laquelle un juge ne peut utilement remplir ses fonctions; - Ordonne que Jean-Baptiste C... est et demeure suspendu de ses fonctions de juge de paix du canton de..., département de...., et qu'à la diligence du procureur général, le présent arrêt lui sera notifié.

Du 8 déc. 1809.-C. C., sect. réun.-MM. le duc de Massa, min. de la just., pr.-Gandon, rap.

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térêt public, cette sévérité de délicatesse, cette dignité de caractère, cette intégrité de mœurs qui doivent toujours distinguer la magistrature, est indépendante de la vindicte publique, en matière criminelle, correctionnelle et de simple police, comme celle-ci est indépendante de l'action en discipline;-Qu'en jugeant que l'une éteignait l'autre, l'arrêt attaqué a méconnu leur nature réciproque et formellement violé l'art. 59 de la loi du 20 avr. 1810 » (Crim. cass., 12 mai 1827, aff. Marcadier, V. Discipline).

522. Un notaire peut aussi, par mesure de discipline, être suspendu et même destitué de ses fonctions par le tribunal civil, pour les mêmes faits qui ont précédemment motivé contre lui une condamnation correctionnelle (Req., 13 mai 1807, aff. Champeau, V. Notaire; 6 avr. 1808, aff. R.. V. eod.; Bruxelles, 19 juill.1809; Req., 31 oct. 1811 (2); 20 nov. 1811, V. Notaire; Toulouse, 22 mai 1826, V. eod.; Douai, 8 janv. 1840, V. eod.).

nement de trois mois; — Faisant droit sur le réquisitoire du procureur général, suspend P... de ses fonctions de juge de paix du canton de Couiza. Du 27 juill. 1810.-C. C., sect. réun. MM. le duc de Massa, min. de la just., pr.-Zangiacomi, rap.

(2) 1 Espèce :-(N... C. min. pub.)-N..., notaire, prévenu d'un délit d'escroquerie en matière de conscription, fut condamné par le tribunal correctionnel à un an d'emprisonnement et à 300 fr. d'amende. — Il subit sa peine. Trois ans après, il fut poursuivi devant le tribunal civil par le ministère public, qui demanda sa destitution pour les mêmes fails. Il opposa la chose jugée."

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LA COUR; Attendu que l'intimé a été jugé correctionnellement, en vertu des lois répressives du délit dont il était prévenu, et que la demande en destitution est formée au civil, en vertu de la loi du 25 ventôse an 11, contenant organisation du notariat: en sorte que l'action diffère, par så nature, de celle qui a été poursuivie contre l'intimé, et sur laquelle est intervenu l'arrêt du 5 fruct. an 12: d'où il suit qu'il n'y a pas lieu d'admettre l'exception de la chose jugée; - Attendu, en ce qui concerne la demande en destitution, que la loi du 25 ventôse an 11, spécifiant les diverses peines établies contre les notaires dans l'exercice de leurs fonctions, l'art. 53 de cette loi ne peut strictement s'entendre que de ces peines telles qu'elles sont prévues; Attendu que la tentative d'escroquerie qui a donné lieu à l'arrêt du 5 fruct. an 12, n'est pas un délit classé dans le nombre des contraventions notariales que la loi du 25 ventôse an 11 punit del la destitution; que c'est un délit qui provoque une même peine contre tous ceux qui s'en rendraient coupables, indépendamment de leurs qualités et des fonctions dont ils sont revêtus; - Qu'il suit de là que la loi du 25 ventôse an 14 n'a pas une stricte application au cas dont il s'agit; Que s'il est vrai qu'un notaire doit être investi de la confiance publique, et que sa moralité puisse influer sur sa destitution, lorsque déjà il a subi une peine correctionnelle, cette condamnation ne peut militer içi contre l'intimé; qu'il résulte, au contraire, 1o des attestations délivrées par les maire et adjoints du canton dans lequel l'intimé exerce ses fonctions; 2o de l'attestation de l'administration municipale de la commune de sa résidence; 3° de celle du juge de paix de son canton; 4° du choix qui a été fait de sa personne, le 27 sept. 1808, par le président du tribunal civil de Mons, pour être dépositaire des actes épars dans son canton, et de l'adhésion à même fin par le secrétaire général de la préfecture de Jemmapes; 5° de l'état des actes retenus par l'intimé comme notaire, et qui surpassent de beaucoup en nombre ceux qui ont été retenus par ses confrères; que, depuis l'expiration de la peine prononcée contre l'intimé et la reprise de ses fonctions, il a joui de l'estime, de la confiance de l'autorité et du public, et a exercé son état, à la satisfaction de tous, pendant deux ou trois ans ; de manière qu'il a effacé sa faute par une bonne conduite, et qu'il s'agit moins aujourd'hui de l'arrêt du 5 fruct. an 12, dont l'impression s'est évanouie, que de le déposséder d'une place qu'il a reconquise sur l'estime de ses concitoyens; Dit, en ce qui touche l'exception de la chose jugée, qu'il a été mal jugé; émendant, déclare l'intimé non recevable dans cette exception; au principal, confirme. Du 19 juill. 1809.-C. de Bruxelles, 1re ch.

2 Espèce (Tarricchi C. min. pub.).-En déc. 1810, le ministère public près le tribunal d'Alba fit assigner Tarricchi, notaire, pour se voir destituer de ses fonctions, sur le fondement qu'il avait été déclaré, par un jugement correctionnel du 9 janvier précédent, convaincu d'escroquerie en matière de conscription. Tarricchi a prétendu qu'aucune loi ne déclare un notaire dans le cas d'ètre destitué, par cela seul qu'il aurait été déclaré coupable d'un délit correctionnel; que, d'ailleurs, il y aurait violation de la règle non bis in idem. Adoptant ces motifs, le tribunal d'Alba a rejeté l'action du ministère public.- Mais, sur l'appel, ce jugement a été infirmé, et la destitution de Tarricchi prononcée par arrêt de la cour de Turin, du 11 mars 1811, « attendu que l'art. 53 de la loi du 25 vent. an 11 donne aux tribunaux le pouvoir discrétionnaire de prononcer toutes les suspensions, destitutions ou condamnations à des amendes qui peuvent avoir été encourues par des notaires; que cet article a été ainsi interprété par le chef suprême de la magistrature, dans des lettres des 23 fév. et 16

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De même, un notaire, condamné pour usure, et qui s'est attiré des reproches de la part des magistrats, à l'occasion de deux procédures en faux dirigées contre des actes qu'il a reçus, a pu être ensuite destitué pour ces faits, par le tribunal civil, sans qu'il résulte de là une violation de la maxime non bis in idem (Req., 24 juin 1828, aff. Dejarnac; V. Notaire).

Une jurisprudence semblable a été admise à l'égard de l'avocat qui a encouru une peine devant la juridiction ordinaire (V. Avocat, no 446 et suiv.), même une simple peine d'audience (V. eod., nos 486 et 446).

523. Il ne faut pas cependant conclure de ce qui précède que la justice ordinaire et la justice disciplinaire soient absolument indépendantes l'une de l'autre. On conçoit très-bien que les décisions rendues par voie de discipline, n'exercent aucune Influence légale sur celles de la juridiction ordinaire, qui ne peut être représentée par la justice disciplinaire. Mais, telles sont les garanties que présente la justice ordinaire pour la manifestation de la vérité, qu'il n'y a aucun danger à accorder à ses décisions force de chose jugée, à l'égard des poursuites pour discipline. Ainsi, par exemple, qu'un notaire subisse une condamnation qui le prive de ses droits civiques, par cela même il devra être destitué de ses fonctions par voie de discipline, sans qu'il soit permis de remettre en question le fait dont il a été déclaré coupable; car, aux termes de l'art. 35 de la loi du 25 vent. an 11, la première condition requise pour exercer les fonctions de notaire, est la jouissance des droits de citoyen. Sila condamnation prononcée n'emporte pas la privation de ces droits, alors la juridiction disciplinaire a, nous le pensons, le pouvoir d'apprécier, dans ses rapports avec la discipline, le fait qui a donné lieu à cette condamnation, mais en tenant toutefois le fait pour constant.

524. Par la même raison que la condamnation prononcée par les tribunaux ordinaires entraîne virtuellement la peine de discipline dans certains cas graves et déterminés, et, dans tous

novembre 1810, et par la cour de cassation, dans son arrêt du 13 déc. de la même année; que la destitution du notaire Tarricchi n'est point une peine nouvelle pour le délit dont il a été déclaré convaincu, mais une simple suite, une conséquence naturelle du jugement du tribunal correctionnel, qui l'a déclaré escroc; que c'est par mesure de discipline, et non comme nouvelle peine pour l'escroquerie, qu'il devait être déclaré incapable de continuer de remplir des fonctions aussi pures, aussi importantes que celles de notaire. ))- Pourvoi 1° pour fausse application de l'art. 53 de la loi du 25 vent. an 11, qu'on a prétendu ne conférer aux tribunaux le pouvoir de destituer un notaire que dans les cas déterminés par les art. 6,16 et 26 de la même loi, 2° pour violation de la maxime non bis in idem. -Árrêt.

LA COUR; Attendu, 1° que l'art. 53 de la loi du 25 vent. an 11 autorise les tribunaux civils à prononcer toutes suspensions et destitutions des notaires à la poursuite du ministère public; 2° que les art. 6, 16 et 26 de la susdite loi ne limitent point, aux seuls cas y exprimés, le pouvoir que l'art. 53 accorde aux tribunaux ; 3° que l'arrêt dénoncé, en prononcant, comme mesure de discipline, la destitution d'un notaire déclaré coupable d'escroquerie, par un jugement du tribunal correctionnel, n'a point violé la règle non bis in idem; Rejette.

Du 31 oct. 1811.-C. C., sect. req.-MM. Lasaudade, pr.-Botton, rap. (1) Espèce: Sur ce fait, ainsi précisé par (Ryex C. min. pub.) l'arrêt disciplinaire de la cour de Bruxelles, il a été statué en ces termes :

Arrêt.

LA COUR; Attendu qu'aux termes de l'art. 53, sect. 3, loi du 25 vent. an 11 (V. ce texte, vo Notaire), le ministère public, poursuivant d'office la destitution d'un notaire, n'est pas tenu de le citer préalablement à la chambre de discipline; - Attendu que du renvoi hors d'accusation, prononcé en faveur du demandeur par la cour spéciale de Bruges, il ne résulte rien autre chose, sinon qu'il n'a pas été jugé coupable du erime de faux; qu'il peut, sans avoir commis un tel crime, avoir encouru la peine de la destitution; et que, d'après les faits déclarés constants par l'arrêt attaqué, cette peine a été prononcée contre lui, sans qu'aucune loi ait été violée; Rejette, etc. Du 13 déc. 1810.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Aumont, rap. (2) Espèce (Silvestre C. min. pub.) Sur ce fait, ainsi précisé dans l'arrêt de condamnation disciplinaire de la cour de Nimes, du 4 août 1823, il a été statué dans les termes que voici. - Arrêt.

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LA COUR; Attendu que l'arrêt dénoncé n'a pas méconnu la maxime non bis in idem, ni violé l'art. 360 c. inst. crim., puisqu'il reconnaît que, dans le procès actuel, il ne s'agit que d'une mesure de discipline nécessitée par une série de négligences graves qui, d'après l'arrêt de la cour, chambre d'accusation, sont dépouillées du caractère de criminalité qu'on

les cas, la reconnaissance du fait matériel, il semblerait que, par réciprocité, l'acquittement devrait emporter l'absolution de la peine disciplinaire, à moins, cependant, que cet acquittement ne fût motivé de manière à écarter seulement la criminalité, en laissant subsister le fait matériel; cas auquel le pouvoir disciplinaire conserverait le droit d'apprécier ce fait et d'y appliquer la répression qu'il juge convenable. Mais la jurisprudence ne paraît pas admettre cette doctrine, qui, en effet, semble être en opposition avec l'essence et les nécessités du pouvoir disciplinaire.

525. D'abord, il a été jugé: 1° que l'acquittement prononcé par la justice criminelle ou correctionnelle n'exclut point l'action disciplinaire, quand celle-ci n'est pas exclusivement basée sur les faits qui ont donné lieu au procès criminel, et qu'ainsi, un notaire, quoique acquitté d'une accusation de faux, peut ensuite être destitué, si, à cette circonstance qu'il a été poursuivi pour crime de faux, se joignent des faits d'inconduite et d'indélicatesse (Req., 13 déc. 1810) (1); - 2° Que l'action disciplinaire n'est point éteinte, lorsque le jugement d'acquittement qui l'a précédée a formellement reconnu l'existence du fait incriminé, tout en le dépouillant du caractère de criminalité, ou lorsque ce jugement s'est fondé pour repousser l'action criminelle sur une simple fin de non-recevoir, sans statuer en aucune manière sur l'existence ou la non-existence du fait; et c'est ainsi qu'il a été jugé qu'un notaire peut être destitué pour un fait de faux, nonobstant un arrêt de non-lieu prononcé par la chambre d'accusation et motivé seulement sur ce que le notaire n'a pas frauduleusement ni même sciemment participé au faux (Req., 3 mars 1824) (2); 3° Qu'un huissier peut être poursuivi disciplinairement pour avoir faussement déclaré dans un exploit en avoir lui-même remis copie, quoique ce fait ait été antérieurement déclaré par la chambre du conseil ne constituer ni crime ni délit, comme n'ayant pas été accompagné de fraude (Crim. cass., 1er mai 1829) (3); -4° Qu'il peut y avoir lieu à la

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leur attribuait originairement, mais ne sont point soustraites à la surveillance des tribunaux exerçant des actes de police et de discipline; que co sont deux choses distinctes; d'où suit que le tribunal n'a nullement violé la maxime non bis in idem, ni l'art. 560 c. inst. crim. ;-Rejette. Du 3 mars 1824.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Ménerville, rap. LA COUR; (3) (Min. pub. C. Daussin.) Statuant sur le pourvoi du procureur général à la cour royale d'Amiens; Vu le décret du 14 juin 1813, portant règlement sur l'organisation et le service des huissiers, (art. 45); - Attendu que, de cet art. 45, il résulte que le fait qu'il prévoit peut former l'objet de deux sortes de préventions essentiellement diverses par leur nature comme par le caractère de leur gravité ;-Qu'il peut donner lieu à une poursuite criminelle s'il est accompagné de fraude, ou seulement à la répression d'une infraction des règles de discipline, si aucune circonstance de fraude n'a existé; Que, par conséquent, lorsque ce fait est reconnu constant, rien ne doit empêcher qu'après avoir arrêté la poursuite criminelle, à cause de l'inexistence de la fraude, on ne puisse poursuivre, dans le fait dégagé de cette circonstance, une infraction disciplinaire; Que, par cette nouvelle poursuite, on ne viole ni l'art. 360 c. inst. crim. ni la règle non bis in idem; Qu'en effet, l'acquittement d'un accusé sur un fait, ne forme point obstacle à ce que cet accusé ne puisse, à raison du même fait, présenté sous un caractère EL de criminalité entièrement différent, être de nouveau poursuivi; attendu que, dans l'espèce, Daussin, huissier, était prévenu de faux pour avoir frauduleusement omis de remettre au clerc de Me Danicourt, notaire, la copie d'un exploit, dans lequel il déclarait l'avoir remise; Qu'en reconnaissant ce fait constant, la chambre du conseil du tribunal de Péronne ne se fonda, pour déclarer qu'il ne constituait ni crime ni délit, que sur ce qu'il n'était pas accompagné de fraude; que cette décla ration négative, uniquement sur le caractère frauduleux et criminel, était expressément affirmative sur l'existence du fait matériel; Que, d'ailleurs, elle était nécessairement restreinte à une prévention de faux, sur laquelle la chambre du conseil avait à statuer;-Que, dès lors, elle no pouvait empêcher que le fait imputé, dégagé de la circonstance de la fraude, ne constituât une infraction à la règle de discipline établie par l'art. 45 du décret du 14 juin 1813, et ne fût poursuivi comme tel; Que, néanmoins, l'arrêt attaqué a rejeté cette poursuite, comme violant la règle non bis in idem, et qu'en conséquence, il a relaxé Daussin des condamnations prononcées contre lui par le tribunal correctionnel de Péronne; En quoi cet arrêt a faussement appliqué l'art. 360 c. inst. crim., et la règle non bis in idem, et violé l'art. 45 du décret du 14 juin 1813; Par ces motifs, chambre Casse l'arrêt de la cour royale d'Amiens, des appels de police correctionnelle, du 1er avril dernier. Du 1er mai 1829.-C. C., ch. crim.-MM. Bailly, pr -Ollivier, rap.

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