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quer d'être heureux dans votre navigation; je vous conseille de vous rembarquer ».

On dit que Polibôtès suivit ce conseil, en trouvant l'épigramme un peu forte.

Aristée, ne se fiant pas assez à la protection des dieux, alla implorer celle des magistrats, qui fournirent à Alcimédon et à Nisa les moyens d'achever leur voyage.

Le père d'Alcimédon puise la santé, et retrouve une nouvelle vie dans leurs embrassemens. Heureux père, heureux époux, ils sacrifient à la Joie1, aux Grâces 2, au dieu (i) Rire 3.

1 Hilaria. Fête publique dans les succès; jeux, spectacles, festins, etc. - Fête particulière à la naissance d'un fils, au bonheur, etc. Georg. Pachymerius. — Fête théogonique ou rurale, célébrée aux calendes d'avril. Macrob. saturn. 1. 1. On les célèbre en l'honneur de la mère des dieux (Cybèle ). Jeux apollinaires. Saturnales. Festins en l'honneur de Jupiter. pridius in Alex. Sever.

Lam

2 Charisia. Eusthat. ad odyss.- Charmosuna. Hésych. Plut. de Isid.

3 Geloti theô. Apul. 1. 111. Métam. Gyrald. synt. 1. Pausan. Plutarq.

La fête du Rire est annuelle à Lacédémone; on y voit sa statue. De-là cet encomion par Calcagninus Moeror abi, subeat risus, mihi pectora risus Impleat, et læto saliant præcordia risu.

Ils se couronnent du myrte détesté de Diane, mais cher à Vénus 1.

Risus enim divûm atque hominum est æterna voluptas,
Nam si quid fidei magno præbemus Homero,
Asbestos darkoóto guelôs makaressi theôicin.
Quin etiam fuerat sancitum lege Lycurgi,
Ut Lacedæmonii post bella exhausta, litarent
Lætitiæ, atque bono facerent solemnia risui.
Illius et lapide è pario substruxerat aras.
Hic, ubi post Mavortis opus, gens aspera bello
Ponebat vigiles curas, suetosque labores,
Cùm faciem attritam galeâ, cùm pulvere foedos
Porrigeret vultus, et frontem nube levaret,
Ipsa comes risûs aderat sine casside Cypris,
Et largos hilari fundebat pectore risus.

Vos quoque, Romulidæ, quondam vos inclyta rerum
Imperio soboles, genitabilis aura Favôni,
Cùm primùm duro concretas frigore terras
Laxabat, vernis innectens floribus arva,
Ardua magnarum solvistis pondera rerum
Risibus, et grandes mirata est Roma cachinnos:
Scilicet hæc populos, hæc magnum continet orbem
Temperies, gravitas simul et lascivia vitæ,

Et risus curis, et nexa modestia luxu.

Hæc quoque me procul à patriâ aspectuque meorum Per maria et terras tot tempestatibus actum

Soletur, dirique levet dispendia fati,

Donet et optatos, post longa incommoda, risus.

a Aristophane.

CHAPITRE XI I I.

FÊTE DU BOUT LABOUREUR *.

<< N'égorgez pas le bœuf nourricier attelé à la charrue, le compagnon des travaux rustiques, l'associé du laboureur, le ministre de Cérès ».

TELLES étaient les expressions d'une loi d'Athènes; et cette loi se retrouve dans le code hébreu, en Egypte et aux Indes.

Il était beau de ramener ainsi l'homme à l'humanité, à la nature et à la reconnaissance. Que ces plaintes de la vache et du boeuf sont touchantes!

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Je le nourris depuis longues années;

Il n'a, sans mes bienfaits, passé nulles journées :
Tout n'est que pour lui seul; mon lait et mes enfans
Le font à la maison revenir les mains pleines;
Même j'ai rétabli sa santé que les ans

Avaient altérée; et mes peines

Ont pour but son plaisir, ainsi que son besoin.
Enfin me voilà vieille, il me laisse en un coin
Sans herbe : s'il voulait encor me laisser paître!
Mais je suis attachée! et si j'eusse eu pour maître

*Bouphonia. Diipolia. Diasia. Ælian. var. hist. l. v, c. xv. Varr. de re rust. 1. 11, c. y. Loix d'Athènes, par Samuel Petit.

Un serpent, eût-il su jamais pousser si loin

L'ingratitude....1

Le bœuf vint à pas lents:

Quand il eut ruminé tout le cas dans sa tête,

Il dit que du labeur des ans,

Pour nous seuls il portait les soins les plus pesans,
Parcourant, sans cesser, ce long cercle de peines
Qui, revenant sur soi, ramenait dans nos plaines
Ce
que Cérès nous donne et vend aux animaux;
Que cette suite de travaux,

Pour récompense, avait de tous tant que nous sommes,
Force coups, peu de gré: puis, quand il était vieux,
On croyait l'honorer chaque fois que les hommes
Achetaient de son sang l'indulgence des dieux 2 !

Lorsque l'esprit, flétri par tant de superstitions absurdes, rencontre quelques traits de cette religion du sentiment, qui fut celle des premiers hommes, avec quel plaisir il les embrasse, et combien il préfère l'explication que le coeur donne, à celle que croit trouver la science!

Sans doute, il est aisé d'expliquer cet usage par la vénération que l'on dut avoir pour le signe céleste 3 qui ouvrait l'année; mais j'aime

La Fontaine.

2 Idem.

3 Le signe équinoxial du printemps, le taureau

mieux rapporter cette fête aux premières loix rurales et politiques. Le législateur ou le philosophe qui poliça les Indiens, leur interdit de verser le sang des animaux, et de se nourrir de leur chair. Il se proposa, sans doute, par ce régime diététique, d'obtenir une génération exempte des passions violentes et cruelles; mais il ne songea pas à la mettre à l'abri de celles des autres peuples; il créa une nation douce, mais faible, et qui est devenue le jouet du plus fort.

Ecoutons l'historiette grecque.

Charmans conteurs, avides de romans comme les Arabes du désert, les Grecs ont toujours une fable prête; et vous retrouvez ces mœurs, cette disposition de l'esprit, chez les Grecs modernes.

« Un boeuf, pendant une dipolie1, dévora le gâteau sacré posé sur l'autel. On n'offrait alors aux dieux que les fruits de la terre. Le prêtre frappa le boeuf de la hache, et s'enfuit. La hache fut traduite en jugement. De-là vint l'usage de traîner au tribunal du prytanée les choses inanimées, la statue, le glaive qui avait donné la mort 2 ».

1 Fête de Jupiter, protecteur des villes.

2 Élien. Plutarq. Hésych. scol. com, Suidas. Pausan, Attic. Loix d'Athènes,

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