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sa faveur tu montras la force de tes flèches. Python, monstre épouvantable, Python, serpent terrible, s'élançait contre toi; mais bientôt tes coups redoublés et rapides l'étendirent à tes pieds. Le peuple s'écria: Io! io Pœan! Frappe! Tu as frappé, il expire. Io! io Paan!

CHŒUR DES VIERGE S.

Chantons Diane 1 !... Chantons la déesse qui se plaît à lancer des traits, à poursuivre les daims, à former des danses et des jeux sur la cime des montagnes. Rappelons ce jour où Diane, encore dans l'enfance, assise sur les genoux de Jupiter, lui adressa ces prières :

« Accorde, ô mon père ! accorde à ta fille de rester toujours vierge, et de porter autant de noms divers que Phébus même. Donne-moi, comme à Phébus, un arc et des flèches.

>> Que dis-je? Non, mon père, ce n'est point à toi d'armer ta fille; les cyclopes s'empresseront bientôt de me fabriquer des traits, de me forger un carquois.

>> Donne-moi l'attribut distinctif de porter des flambeaux, et de revêtir une tunique légère et relevée au-dessus des genoux.

>> Attache à ma suite soixante filles de l'océan, • Callimaq, hymn. trad, de Dutheil,

qui soient toutes à l'âge où l'on ne porte point encore de ceinture1. Que vingt autres nymphes, filles de l'Amnisus 2, destinées à me servir aux heures où je cesserai de percer les lynx et les cerfs, prennent soin de mes brodequins et de mes chiens fidèles.

>> Cède-moi les montagnes; je ne demande qu'une ville à ton choix. Diane (b) rarement descendra dans les villes; j'habiterai les monts, et n'approcherai des cités qu'aux momens où les femmes, travaillées des douleurs aiguës de l'enfantement, m'appelleront à leur aide.

>> Tu sais qu'au jour de ma naissance, les parques m'ont imposé la loi de les secourir, parce que le sein qui m'a porté n'a point connu la douleur, et, sans travail, a déposé son fardeau ».

En parlant ainsi, l'enfant divin voulut toucher le menton de son père; mais elle étendit en vain ses petits bras pour l'atteindre. Jupiter en sourit; et lui rendant une tendre caresse: « Déesse, s'écria-t-il, donnez-moi toujours de semblables enfans, et je brave la fureur jalouse de Junon.

Les jeunes filles ne portaient la ceinture qu'à l'âge nubile.

2 Fleuve de Crète.

› Va,

>> Va, ma fille, tes désirs seront satisfaits, et ton père veut te faire encore d'autres dons bien plus magnifiques. Une ville est trop peu ; je t'en donnerai trente 1; trente qui n'auront d'autre dieu que toi seule, ne porteront d'autre nom que le tien, tandis que tu partageras, avec les autres immortels, des cités sans nombre dans le continent et dans les îles.

>> Par-tout Diane aura des bois sacrés et des autels; c'est elle qui sera la protectrice des chemins et des ports ». Il dit, et, d'un signe de tête, il confirma ses promesses.

Aussitôt l'enfant vole en Crète, sur la cime om bragée du Leucus 2, descend ensuite vers l'océan, et choisit une troupe nombreuse de nymphes, toutes à l'âge de neuf ans. Coeratus et Thé→ tis s'applaudirent en voyant l'un et l'autre leurs filles préférées par l'enfant de Latone.

Diane les quitte pour chercher les cyclopes. Ils étaient dans Lipare occupés à forger une masse ardente sur l'enclume de Vulcain. Les nymphes pâlirent à la vue de ces énormes géans, pareils à des montagnes, et dont l'oeil unique, sous leur épais sourcil, étincelait de regards menaçans.

1 Allusion aux trente jours du mois. Montagne de Crète.

Les uns faisaient mugir de vastes soufflets; les autres, levant, tour-à-tour, avec effort leurs lourds marteaux, frappaient à grands coups le fer ou l'airain étincelans. L'enclume en gémit, l'Etna et la Sicile en sont ébranlés, l'Italie en retențit, la Corse même en résonne.

A ce terrible aspect, à ce bruit effroyable, les filles de l'Océan s'épouvantent.... Frayeur pardonnable : les filles mêmes des dieux, dans leur enfance, n'envisagent ces fiers géans qu'avec crainte; et lorsqu'elles refusent d'obéir, leurs mères feignent d'appeler Argès ou Stéropès.

Mercure accourt, sous les traits de l'un de ces cyclopes, le visage couvert de cendre et de fumée soudain l'enfant effrayé couvre ses yeux de ses mains, et se jette en tremblant dans le sein maternel.

Pour toi, fille de Jupiter, plus jeune encore et dès l'âge de trois ans, lorsque Latone t'avait portée dans ses bras à Vulcain, pour recevoir ses premiers présens, et que Brontès t'avait mise sur ses genoux, intrépide, tu avais arraché les poils hérissés de sa large poitrine, et, depuis, ils n'ont point été reproduits.

D'une voix ferme, tu adressas ce discours aux cyclopes: «Hâtez-vous, leur dis-tu, il

faut à Diane un arc, des flèches, un carquois. Diane, ainsi que Phébus, est fille de Latone; et si quelque sanglier, ou quelque monstre des bois, vient à tomber sous mes coups, c'est à votre table qu'il sera destiné ».

Tu dis: ils obéirent, et tu fus armée.... O Diane! ô déesse toujours vierge! déesse qui immolas Tityus, ton armure, ta ceinture et ton char étaient d'or; tu donnais aussi des freins d'or à tes biches. Mais en quels lieux menas-tu d'abord ce char triomphant? en Thrace, sur le mont Emus, d'où l'orageux Borée nous envoie les tristes frimats.

Où coupas-tu des branches de pin? sur l'Olimpe de Mysie. A quels feux allumas-tu ces nouveaux flambeaux? aux feux inextinguibles, dont la foudre de ton père étincelle.

Combien de fois éprouvas-tu tes flèches? Tu les essayas d'abord sur un orme, ensuite sur un chêne, puis sur un monstre des forêts, enfin, non plus sur un arbre, mais sur une ville coupable, où l'on avait cent fois outragé la nature et l'hospitalité. Malheur à ceux que pcursuit ton courroux!

Cependant les filles de l'Amnisus détellent et lavent tes biches, leur apportent de l'eau dans des vases d'or, pour se désaltérer à leur

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