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» pour indiquer aux jurés que plusieurs ac» cusés ont été trompés, ont été précipités » dans l'abîme par les noms d'hommes puis» sans, parce que cette considération peut » les déterminer à quelque indulgence pour >> eux; mais ce que nous avons dit, nous l'a»vons dit à la face de la France.

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Que deviennent donc les accusations >> dont on a osé nous rendre l'objet ?

» Ils ont dit que nous les frappions par » derrière, que nous étions des lâches. Ils >> savent bien que la main judiciaire qui s'est >> appesantie sur eux ne fut point la main >> d'un lâche.

» Les lâches et les perfides sont ceux qui précipitent dans l'abîme des conspirateurs » des hommes simples et crédules, qui les » trompent et les désavouent ensuite.

» Les lâches et les perfides sont ceux qui >> recèlent les trésors d'un usurpateur, d'un » souverain détrôné, et qui s'en servent pour soudoyer des conspirateurs.

>>

>> Voilà ces hommes qui voudraient renou» veler les temps malheureux de la révolu» tion, voilà les véritables pourvoyeurs de

» bourreaux.

» Les lâches et les perfides sont ceux qui >> organisent des sociétés secrètes et excitent

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>> des conspirations qui doivent s'accomplir » avec des poignards..... >>

Cette plaidoirie envenimée contre des hommes qui n'étaient point appelés au procès, ce glaive qu'il semblait tenir levé par ces mots : Si je l'étais!..... cette figure de suspension si insolite, si répréhensible dans la bouche d'un magistrat accusateur, pour qui tout doit être positif, la passion que M. Mangin laissa régner dans les débats, l'ardeur avec laquelle il paraissait multiplier le nombre des coupables ou aggraver leur délit, l'insulte qu'il n'épargna point au malheur, en reprochant de la lâcheté à un militaire français qui avait conquis tous ses grades sur le champ de bataille, appelèrent contre lui des préventions dont il a porté depuis, tout le poids. Quant au général Berton, réduit à se défendre lui-même, parce qu'on lui avait refusé le ministère d'un avocat de Paris, il parla moins pour défendre ses jours que sa mémoire et ses coaccusés. Il y en eut six de condamnés à mort avec lui, sans compter onze contumaces, du nombre desquels était ce mystérieux Grandménil. D'autres furent condamnés à plusieurs années de détention. L'un de ceux qui devaient subir la peine de mort, le chirurgien Caffé, se donna la mort

en s'ouvrant l'artère crurale. Berton s'avança vers le supplice, en criant d'une voix ferme à plusieurs reprises: Vive la France! vive la liberté !

Ici ne s'arrêtent point les tristes procès du carbonarisme. Plusieurs militaires qui étaient entrés dans une association de ce genre furent acquittés à Nantes, d'autres à Strasbourg, à Béfort. Les faits parurent plus graves et la conspiration plus caractérisée dans l'entre-prise d'un nommé Vallée qui fut condamné à mort à Toulon.

Paris vit juger dans ses murs, et par une cour d'assises une conspiration dite de la Rochelle; elle avait été formée par plusieur sous-officiers d'un régiment de ligne qui, après avoir séjourné à Paris, s'était rendu à la Rochelle. Ils étaient accusés d'avoir voulu attenter aux jours de leurs officiers pour commencer un mouvement révolutionnaire.

M. Marchangi, avocat général qui dans ses ouvrages littéraires avait montré une imagination vive et ingénieuse, entreprit de prouver dans un réquisitoire, écrit avec plus de chaleur que de justesse, que tous les complots militaires ou civils formés depuis 1815 partaient d'un même centre. Il rappelait et voulait lier entre eux celui de Plai

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Conspiration la Bochelle.

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gner à Paris, ceux de Grenoble, de Lyon, de Thouars, de Saumur, de Béfort, de Colmar et beaucoup d'autres pour lesquels les cours d'assises et les conseils de guerre n'avaient reconnu ni crime, ni coupables. Les complots, suivant le réquisitoire, avaient pris plus de violence et d'unité depuis l'introduction du carbonarisme en France. Les préfets, dès l'année 1821, dénonçaient trente-sept sociétés de ce genre. Le comité directeur déployait les ressources d'une puissance qui a des trésors, des ambassadeurs, des sujets et même des armées. Il alimentait la révolution espagnole, et la conduisait à des attentats calqués sur ceux de la révolution. L'insurrection de la Grèce était son ouvrage ou du moins celui du carbonarisme européen. A l'appui de ces assertions l'avocat général citait quelques pièces, quelques ordres du jour qu'il disait émanés du comité directeur. L'un de ces ordres créait sous le nom de bataillon sacré un corps de cinq cents jeunes carbonari d'élite, mais nul fait n'en avait révélé l'existence. On ne pourrait dire où siégeait ce corps. Un autre ordre du jour était, suivant le réquisitoire, daté du 16 mars 1822 est conçu en ces termes :

« Nous défendons à nos chers cousins

>> d'exciter aucun attroupement et de résis»ter à la force armée. Une ordonnance de

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police, devant prescrire le dépôt des armes de guerre, nous enjoignons de les ca>>cher soigneusement. »>

Cette pièce n'était ni bien authentique, ni fort criminelle. Du reste, quant au nom des membres du comité directeur, l'avocat général de la cour royale de Paris semblait moins avancé ou moins affirmatif que le procureur général de la cour de Poitiers; il con fessait même l'impuissance où l'on était encore de les atteindre. Les défenscurs des accusés, MM. Mérilhou, Berville, Mocquart, Chaix d'Estange et Barthe, s'attachèrent à réfuter l'avocat général jusque dans les vastes excursions auxquelles il s'était livré.

<< Fallait-il, disait M. Mérilhou, citer à >> votre barre des peuples voisins, 'insul>> ter à leurs lois, accuser leur caractère et » leur avenir par de sinistres prophéties ? » Que nous importent Naples et Lisbonne, » que nous importent Turin et les deux Amériques? Par quelle série de raisonne» mens, pour attaquer la vie de quelques >> soldats français, a-t-on cru nécessaire de >> blâmer avec amertume cette nation de » héros martyrs qui sur la tombe de Socrate

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