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[29 nivòse an XIII.]

EMPIRE FRANÇAIS.

Cette invasion générale de la part des communes, l'injustice évidente d'un grand nombre de jugements et de décisions arbitrales, l'impossibilité dans laquelle les agents du Gouvernement avaient été de recouvrer et de rassembler les titres nécessaires à la défense des propriétés nationales, firent sentir la nécessité de mettre un frein à d'aussi grands abus. L'exploitation des bois, dont les communes s'étaient mises en possession en vertu des décisions arbitrales, fut d'abord suspendue le 7 brumaire an Ill; et bientôt après le décret du 29 floréal suivant étendit, par les mêmes motifs, cette suspension aux cas où les communes avaient obtenu des arrêtés des corps administratifs et des jugements des tribu

naux.

Une loi du 28 brumaire an VII enjoignit aux communes qui avaient obtenu des décisions arbitrales de les produire, dans un délai d'un mois, à l'administration de leur département qui était chargé, ou de se pourvoir par appel contre ces décisions, ou d'en faire l'envoi au ministre des finances.

On ne devait pas s'attendre à voir les communes dociles dans l'exécution de cette loi : elles craignirent les résultats de l'examen des décisions qu'elles avaient obtenues. Ces décisions ne furent pas produites. Un nouveau délai de six mois leur fut donné par la loi du 11 frimaire an IX.

Il était surprenant que dans ces deux dernières lois on eût omis de statuer sur la suspension qui, le 29 floréal an III, avait été prononcée à l'égard de l'exécution des jugements obtenus par les communes. Les mêmes motifs avaient déterminé la suspension dans tous les cas; et puisque ces motifs avaient fait regarder comme indispensable de soumettre à une révision les décisions arbitrales, une conséquence nécessaire était de prendre la même mesure à l'égard de jugements rendus par les tribunaux.

qui

C'est ce qui a été fait par la loi du 19 germinal an XI. Elle ordonne aux communes de produire, dans le délai de six mois, les jugements ont adjugé des droits de propriété ou d'usage, leur soit dans les forêts nationales, soit dans celles où la République a quelque intérêt, afin qu'il soit procédé à leur révision, conformément à la loi du 28 brumaire an VII.

Celle du 19 germinal an XI a fixé pour cette révision le délai d'un an, à compter de la remise de jugements non encore produits, et à compter de la publication de la loi à l'égard des jugements produits.

C'est la prolongation de ce délai d'un an, dans Fun et l'autre cas, qui est proposée à l'égard des bois et forêts situés dans les départements qui avoisinent le Rhin. Des causes particulières ont rendu, dans ces contrées, le premier délai insuffisant; la France a été subrogée, par l'effet du traité de Lunéville, dans les droits d'anciens possesseurs dont les uns avaient leur domicile et leurs titres de propriété au delà du Rhin, et les autres avaient des titres qui avaient été détruits ou soustraits.

Une autre partie des biens qui ont ainsi été réunis au domaine de France dépendait de corporations et d'établissements existant sur la rive droite du Rhin.

On ne saurait parvenir à remplacer ou à recouvrer les titres de propriété de tous ces domaines, que par des recherches et des démarches qui entraînent des lenteurs inévitables.

Dans les deux départements du Haut et du BasRhin, le voisinage des frontières a donné aux

[19 janvier 1805.]

émigrés la facilité d'emporter leurs titres. Aussi a-t-on vu, dans ces deux départements, plus qu'en aucuns autres, les communes profiter avec empressement du dénûment de tous les moyens de défense dans lequel se trouvaient les agents du Gouvernement; mais cet excès d'abus est un motif de plus pour que la mesure adoptée par la loi du 19 germinal an XI doive être exécutée; et cette mesure serait illusoire, si le nouveau délai n'était accordé.

Une loi du 28 ventôse an XI enjoint aux communes et aux particuliers qui prétendent des droits d'usage dans les forêts nationales, de déposer, dans le délai de six mois, leurs titres au secrétariat des préfectures ou sous-préfectures.

Un nouveau délai a été accordé par la loi du 14 ventôse an XII; et on y observe que ce second délai est d'un an pour les quatre départements de la Roër, de Rhin-et-Moselle, du Mont-Tonnerre et de la Sarre, tandis qu'il n'est que de six mois pour tous les autres départements. Cette exception a été fondée sur ce qu'il est beaucoup plus difficile, dans un pays qui a été si longtemps le théâtre de la guerre, de recouvrer les titres de propriété, et sur ce que la plupart de ces titres ont été transportés sur la rive droite du Rhin. Si on a trouvé juste d'accorder dans ces départements un délai plus long, dans lequel les communes pourront justifier leurs droits d'usage dans les forêts, cette justice ne saurait être refusée au Gouvernement pour la défense du domaine public. C'est un moyen impartial de découvrir les vrais propriétaires, quels qu'ils soient, pour consacrer leurs droits.

Tels sont, Messieurs, les motifs de la loi que j'ai l'honneur de vous présenter.

Projet de loi.

Le délai d'un an accordé par la loi du 19 germinal an XI, pour procéder à l'examen et à la révision des jugements des tribunaux qui ont adjugé à des communes situées dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, du Mont-Tonnerre, de la Sarre, de Rhin-etMoselle et de la Roër, des droits de propriété ou d'usage dans les forêts nationales, ou dans celles où le domaine a quelque intérêt, est prorogé d'un an, à dater de la publication de la présente loi.

Le Corps législatif arrête que ce projet de loi sera transmis au Tribunat par un message.

Des orateurs du Gouvernement et du Tribunat
sont introduits.

jet de loi relatif à l'éducation, aux frais de l'État,
L'ordre du jour appelle la discussion d'un pro-
d'un enfant dans chaque famille qui en aura sept
vivants.

M. Pictet, rapporteur de la section de l'inté-
rieur. Messieurs, la fonction toujours honorable
qui nous rappelle à cette tribune, n'est pas tou-
jours également douce à remplir.

Lorsque la loi que nous vous rapportons impose des sacrifices, lorsqu'elle menace, lorsqu'elle punit, c'est toujours avec un sentiment plus ou moins pénible, qu'en l'offrant à vos suffrages nous venons réclamer de vous le tribut nécessaire à l'existence et au repos de la société.

Mais quand une loi se présente avec tous les caractères qui peuvent lui concilier la faveur publique, c'est une tâche facile et désirable que d'être appelé, je ne dirai pas à la défendre, car qui voudrait l'attaquer? mais d'avoir à compter ses titres à l'approbation du législateur, à la reconnaissance des citoyens.

La loi qui établit que, dans chaque famille de sept enfants, l'un d'eux, au choix du père, serait élevé aux frais de l'Etat, une telle loi, dis-je, n'a

besoin que d'être énoncée pour être appréciée; le cœur devance l'esprit lorsqu'on veut la méditer, et l'orateur du Gouvernement, qui vous en a développé les motifs avec cette éloquence persuasive qui le distingue, ne m'a rien laissé à recueillir, pas même à glaner après lui. Si j'entreprends de montrer aujourd'hui que cette loi tend à honorer le mariage; à augmenter la population, en l'améliorant; à associer l'intérêt de l'Etat à celui des familles; qu'elle est l'une des plus belles pensées d'une autorité prévoyante et paternelle, je ne ferai que classer de nouveau des idées qui, après vous avoir assaillis confusément à l'ouïe du texte de la loi, vous ont été complétement développées par le rapporteur du Conseil d'Etat.

Mais, Messieurs, c'est précisément lorsqu'une loi se présente sous tant de faces séduisantes, quand le sentiment de sa convenance nous saisit, nous éblouit presque, c'est alors surtout que nous devons nous mettre en garde contre ces impressions. L'évidence n'est complète que lorsque la froide raison a tout calculé, tout balance; c'est pour procurer cette évidence, que les Constitutions de l'Empire soumettent les projets de loi à deux discussions successives dans deux corps respectivement indépendants; et s'il est un moyen de se préserver des erreurs qui, dans les sciences vulgaires, ne sont qu'humiliantes, mais qui peuvent devenir plus ou moins funestes en matière de législation, c'est sans doute ce double examen. Qu'il me soit donc permis de vous retracer les traits principaux de la discussion que le projet qui vous est soumis a provoquée dans la section du Tribunat, à laquelle vous l'avez renvoyé.

L'effet immédiat de la loi proposée paraît devoir être l'encouragement de la population: d'autres lois pourraient dans l'avenir avoir la même tendance. On a donc cherché à remonter jusqu'à des principes qui leur fussent applicables à

toutes.

Convient-il toujours d'encourager la population? Premier principe à examiner; première question à résoudre.

S'il est établi qu'il convienne de l'encourager dans des circonstances données, comment faut il y procéder? Seconde question.

Il semble que ce soit un paradoxe, et presque un blasphème, de mettre en doute qu'il convienne toujours d'encourager la population: mais, serrons la question de près, et nous découvrirons que sa solution n'est pas aussi simple qu'on pourrait le présumer.

valle dans lequel la population dans une zone tempérée se doublera naturellement, il s'ensuit qu'au bout de 50 ans elle sera quadruplée; octuplée en 75 ans; et enfin seize fois plus considérable au bout d'un siècle sur un sol donné.

Supposons, d'autre part, qu'à l'origine de cette progression alarmante, le sol soit déjà cultivé de manière que ses produits soient consommés en totalité par les individus qui l'habitent. Quelques progrès qu'on veuille admettre dans l'art de la culture, peut-on raisonnablement espérer que ses produits annuels seront doublés au bout de 25 ans, quadruplés dans 50, octuplés dans 75, etc.? Certainement non l'expérience nous apprend que les efforts des agriculteurs n'augmentent que d'une aliquote assez bornée les produits du sol, et qu'on ne tarde pas à atteindre la limite à laquelle il fournit tout ce qu'il est possible d'en attendre.

Quel est l'effet naturel et nécessaire du défaut de proportion entre ces deux forces, l'une qui fait naître les consommateurs, en progression rapidement croissante; l'autre qui produit les subsistances, selon une progression qui décroît trèspromptement? L'histoire nous apprend que l'état d'équilibre est ramené, tantôt par des causes qui agissent d'une manière brusque et violente; par de grandes émigrations, des guerres sanglantes, des famines, des contagions; tantôt par des causes dont l'action est lente, mais infaillible; c'est-à-dire par l'influence combinée du climat, des lois, du gouvernement, et surtout des mœurs. Il suit de ces considérations, d'abord, cette conséquence singulière et bien opposée au principe d'un encouragement indéfini ou illimité à donner à la population; c'est que, partout où elle a atteint son équilibre avec les moyens de subsistance, les individus qui existent alors, les invités au banquet de la vie, loin d'être tenus de faire place aux nouveaux venus qui prétendraient s'y asseoir avec eux, sont autorisés à les repousser, par le premier de tous les droits, la légitime défense de soi-même.

Ce terme est atteint dans quelques contrées de l'Orient, où l'usage barbare de l'infanticide en a été la conséquence il l'était en Grèce. « Les « politiques grecs (dit Montesquieu) nous parlent « toujours de ce grand nombre de citoyens qui « travaillent la République. » Ce terme était atteint, malgré la défaveur du climat, chez ces peuplades du Nord de l'Europe qui envahirent le Midí dans le moyen âge: il l'est de nos jours, et sous nos yeux, dans les grandes villes. Lå, l'existence de la mendicité, l'établissement nécessaire des hospices, les difficultés, quelquefois les an

tances, sont autant de symptômes de cette saturation qui précède l'anéantissement d'une portion de la race humaine.

Deux grandes forces, analogues dans leur prin-goisses du Gouvernement pour assurer les subsiscipe, mais très-différentes dans leurs effets, animent et perpétuent la nature vivante: l'une, l'attrait réciproque des sexes, reproduit les animaux; l'autre, la force, la végétation, fait croître les aliments nécessaires à leur subsistance, et à celle de l'homme en particulier.

Ces deux forces, quoiqu'en rapport constant et intime, ne marchent point parallèlement dans leurs résultats; et la conséquence inévitable de ce défaut de proportion est très-essentielle à considérer.

C'est une vérité d'expérience, que, dans un climat tempéré et sur un sol passablement fertile, l'effet de la force propagatrice humaine est de doubler la population dans le terme de vingt-cinq ans. La période est bien plus courte dans les Etats-Unis d'Amérique, mais la différence s'explique en partie par l'immigration.

En supposant seulement 25 ans pour l'inter

Il n'est donc pas vrai qu'il soit toujours convenable d'encourager la population.

Mais admettons que dans l'Empire français, considéré en masse, ce maximum redoutable soit encore assez distant pour que la politique puisse actuellement sans crainte adopter des mesures qui tendent à combler l'intervalle, comment devra-t-elle procéder? C'est la seconde question que nous avons examinée.

Les considérations que je viens de développer prouvent d'abord que prétendre encourager un principe d'action qui, par l'effet de sa propre énergie, tend toujours à multiplier indéfiniment et très-rapidement les hommes, et à en couvrir en très-peu de temps la portión habitable du globe, c'est employer une expression qui est

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fausse. Pourrait-on jamais dire qu'on encourage la gravitation, ou telle autre des forces premières de la nature?

Mais, dans les cas où la population est évidemment trop faible sur un sol donné, c'est indirectement, c'est-à-dire en écartant les obstacles naturels ou artificiels qui retardent ou restreignent l'action puissante et continue de l'instinct, qu'il faut procéder.

Le premier de ces obstacles est sans doute le défaut actuel de subsistances dans un sol qui pourrait d'ailleurs les fournir. Il faut donc les créer, ces subsistances, les assurer préalablement, en faciliter les transports, c'est-à-dire encourager l'agriculture, ouvrir des routes et des canaux : on verra les hommes naître et pulluler partout où ces mesures auront été prises.

Le second obstacle, l'insuffisance absolue du sol à nourrir ses habitants, peut encore être écarté par les admirables ressources de l'industrie qui crée les objets d'échange, et du commerce qui fait arriver dans un lieu les moyens de subsistance que la nature a prodigués dans un autre. Favorisez donc l'industrie, n'entravez pas le commerce, et vous créerez des hommes.

Le troisième obstacle à la population, l'existence des fléaux destructeurs, la guerre, la famine, les maladies épidémiques et contagieuses, est sous l'influence plus ou moins directe, puissante et éclairée des gouvernements. Ainsi, maintenez la paix, provoquez les lumières et les découvertes sur tous les arts conservateurs de l'espèce, et vous créerez encore des hommes.

Enfin, le quatrième obstacle résulte de l'intensité même de l'instinct en vertu duquel l'espèce se multiplie son action cesse d'être productive quand elle est désordonnée. Rendez-là régulière par les mœurs, par les institutions civiles, et surtout par celle du mariage; alors son produit sera en même temps le plus abondant et le meilleur possible. Ici la loi proposée forme un anneau brillant dans la chaîne que j'ai essayé de déployer.

Cette loi encourage évidemment le mariage. Quelle perspective plus rassurante pour un jeune homme qui pense à devenir père, que de prévoir qu'à l'époque où l'accroissement de sa famille pourrait être pour lui un objet d'inquiétude, alors le père de la grande famille adoptera un enfant; que cet enfant puisera dans une source riche et pure une instruction assortie à ses talents natu rels et à sa vocation; qu'il y puisera encore, avec l'amour de la patrie, le désir constant de reconnaître le bienfait signalé qu'il aura reçu d'elle!

La loi tend à rendre féconde l'union que le père aura contractée. Ici, Messieurs, les belles expressions du rapporteur ont forcé ma plume, et deux fois elles résonneront dans cette enceinte. « La fé« condité dans les mariages, dit-il, annonce pres« que toujours l'union entre les époux, les bonnes « mœurs, le travail, l'industrie, et cette heureuse « confiance de l'homme juste dans la double pro«vidence de la divinité et des lois qui s'unissent « pour le protéger. »

Mais cette fécondité même, quand elle dépasse de beaucoup les bornes ordinaires, peut devenir un inconvénient plus ou moins grave dans les familles, selon les circonstances; ainsi toute mesure législative qui tendrait à la provoquer sera mal calculée. « Il n'est pas questa de réconi penser des prodiges, » dit Montes

d'une ordonnance de Louis de certaines pensions à ceux fants, et de plus fortes p raient douze. Presque parto

sont venus au secours des parents surchargés Mais entre une faveur accordée à titre de secours et une prime d'encouragement, qui serait trèsdéplacée, la limite est difficile à établir. La loi se maintient à cet égard dans de sages bornes, et elle a, sous ce rapport, un titre de plus à votre approbation.

Le laconisme de sa rédaction laisse indécises plusieurs questions, qui se présenteront lorsqu'on sera dans le cas de l'appliquer selon les formes prescrites. Dans l'impossibilité où l'on était d'établir un rapport exact entre les demandes futures et les moyens d'y pourvoir, le Gouvernement a dû se réserver le droit d'étendre la faveur à la mesure de ses facultés, s'il ne peut le faire à celle de sa bienveillance. Mais il ne perdra point de vue que comme loi de faveur, celle que nous vous portons doit recevoir, dans les cas douteux, l'interprétation la plus avantageuse aux administrés.

Ainsi, Messieurs, la même autorité qui naguère vous a demandé la portion de la jeunesse française, annuellement dévouée à la défense de l'État, cette autorité suprême et tutélaire offre aujourd'hui à une classe de pères, sinon comme compensation, du moins comme adoucissement à leur sacrifice, l'espérance de voir un de leurs nombreux enfants spécialement adopté par cette patrie à laquelle il est si glorieux d'appartenir.

La section de l'intérieur a voté l'approbation de ce projet, et vous invite à le convertir en loi par vos suffrages.

Aucun autre orateur du Conseil d'État ni du Tribunat ne prenant la parole, la discussion est fermée.

Elle s'ouvre de suite sur un autre projet de loi présenté le 19 nivôse par MM. les conseillers d'État Regnauld (de Saint-Jean-d'Angély) et Miot, et relatif à des échanges, concessions, acquisitions, impositions extraordinaires, demandés par un très-grand nombre de communes.

M. Beauvais, rapporteur de la section de l'intérieur du Tribunat.

Messieurs, vous avez suivi avec intérêt, depuis plusieurs années, le développement de ce système bienfaisant d'administration qui parcourt les communes de l'Empire, et s'attache à féconder partout les ressources des hospices, des écoles publiques et de tous les établissements utiles.

Le Gouvernement, constant dans sa marche, veut offrir à votre sanction tous les projets de loi dont l'objet est le même. Vous ne montrerez pas, Messieurs, moins de zèle et d'empressement à seconder des opérations dont vous savez apprécier l'influence sur la prospérité générale.

La section de l'intérieur du Tribunat a eu à examiner un projet de loi qui se divise en sept titres, et à l'appui duquel il a été produit un grand nombre de procès-verbaux et de pièces justificatives: l'analyse détaillée ne peut faire partie du rapport que je suis chargé de vous présenter; il suffira de vous assurer, après la lecture la plus attentive, que les formalités prescrites par les lois y sont observées avec toute l'exactitude désirable, et qu'il ne s'y rencontre rien qui puisse en affaiblir la garantie. C'est sur le sujet en lui-même que votre attention do't particulièrement se fixer. Permettez-moi de pa urir devant vous chacune 1. ses divisions.

La première trai communes, par de bienfaisance conviennent pa une vérite qu' ujours être

aliénations à faire par Epices et par des buJes genres de pro→ortes d'établisse*m trop méconnue, aux yeux de pƐ

l'administrateur éclairé. Nous en retrouvons l'heureuse application dans les mesures dont il s'agit : par l'effet des aliénations proposées et par la destination de leur produit, des bâtiments inhabités seront remplacés par des constructions utiles, par des écoles, par des fontaines: ces terrains incultes serviront à constituer des revenus certains à des hospices; et des fonds sans valeur seront utilement employés à des réparations d'églises et de maisons communes. C'est ainsi que de sages combinaisons créent des ressources là où l'insouciance et l'inactivité ne trouvaient que des besoins et des charges.

Je ne dois pas négliger de vous faire remarquer la disposition de l'article 13 de ce titre, qui réserve, pour le musée des monuments français, les vitraux peints de l'église de l'Hôtel-Dieu de Senlis. Il est digne d'un gouvernement ami des arts, de respecter leurs productions, et de recueillir soigneusement celles qui peuvent servir à l'histoire de leur progrès et même de leur décadence.

Le 2e titre, des acquisitions, contient une série d'observations qui réclament la faveur spéciale du législateur. Dans tel département, la préfecture acquiert un emplacement qui lui manquait : telle ville s'embellit d'une place publique ou d'une maison commune; ici s'élèvera une halle nouvelle, une maison d'arrêt, une caserne de gendarmerie; là se placera un tribunal de paix; plus loin, un instituteur, un ministre du culte, trouveront un logement convenable. Telles sont les salutaires mesures qu'il est question de réaliser. Les conditions de la vente, les moyens de paiement, tout est prévu et déterminé, et l'intérêt public se concilie toujours avec l'intérêt particufier.

Dans le troisième titre, relatif aux concessions à rente, vous remarquerez avec satisfaction les efforts sans cesse croissants de l'industrie, et les progrès journaliers de l'agriculture. Des terrains ingrats ne rendaient que des produits illusoires entre les mains des communes désormais ils répondront à l'activité des particuliers, et prépareront l'aisance et le bien-être de nouvelles familles, en même temps qu'ils assureront l'accroissement du revenu communal.

De toutes les mutations de propriété, les plus favorables aux intérêts de chaque partie sont celles qui s'opèrent par l'échange. C'est la convenance qui les détermine, et rarement la bonne foi peut avoir à redouter quelque surprise. Vous donnerez votre assentiment aux dispositions du titre qui consacre des arrangements de cette nature entre des particuliers et des communes ou des hospices tel a paru devoir être le résultat des échanges à faire, que les deux parties y trouveront respectivement des avantages; ce qui s'explique par la diversité des moyens d'exploitation.

Il s'agit ensuite d'autoriser des impositions extraordinaires dans diverses communes. Le cinquième titre en détermine la quotité et l'emploi. Il y a eu des procès à poursuivre, il y a des ponts à réparer, des bacs à reconstruire, des hospices à transférer toutes ces dépenses exigent des suppléments aux recettes annuelles; nous avons acquis la certitude que les besoins ont été rigoureusement calculés, et que les moyens d'y pourvoir se trouvent fixés dans la plus juste proportion.

Je ne vous entretiendrai pas du titre des objets mixtes; vous n'y verriez qu'une réunion d'opérations du genre de celles qui précèdent, des aliénations à charge de constructions, et des concessions à charge de travaux publics. Cette partie du projet offre la même tendance au bien, les mêmes vues

T. VIII.

d'amélioration auxquelles vous avez eu tant d'occasions d'applaudir.

Il est un dernier titre qu'on peut regarder comme le complément de la loi, et qui prescrit des dispositions applicables également à tous les actes qu'elle autorise. Son objet principal est de fixer le mode des impositions, d'arrêter les conditions d'amortissement des rentes, de déterminer l'emploi des fonds provenant de remboursements, aliénations ou soultes d'échange, enfin de régulariser les travaux à faire dans les communes ou les départements. Vous vous rappelez, Messieurs, que la plupart de ces mesures ont été plusieurs fois adaptées à des lois du même ordre elles sont devenues, en quelque sorte, traditionnelles par la sanction de l'expérience qui les justifie chaque jour, en même temps qu'elle indique de nouveaux moyens d'ajouter encore à leur utilité.

Je me bornerai, Messieurs, à ces considérations sur le projet de loi que vous avez transmis aux sections du Tribunat le 19 de ce mois. Toutes les dispositions qu'il présente découlent de principes qui sont les vôtres; ce sont les conséquences d'une grande pensée du bien public qui occupe le Gouvernement tout entier, et qui, descendant des objets les plus élevés aux plus minutieux détails, représente en quelque sorte cette providence de la nature qui coordonne les relations de tous les êtres et en fait résulter l'ordre universel. La section de l'intérieur m'a chargé, Messieurs, de vous exprimer son vœu d'adoption. La discussion est fermée.

Le Corps législatif délibère simultanément sur les deux projets de loi.

Celui concernant l'éducation aux frais de l'Etat d'un des enfants des pères de famille surchargés est décrété à la majorité de 235 boules blanches contre 8 noires.

Celui relatif à des échanges, concessions, etc., à la majorité de 244 contre 1.

L'assemblée procède, par un second scrutin, à l'élection de candidats pour la questure. Personne n'ayant encore obtenu la majorité absolue, il sera formé lundi un troisième scrutin, et les suffrages devront porter sur les douze membres qui, aujourd'hui, ont obtenu le plus de voix.

M. Agar. M. Devisme, notre collègue, a désiré que j'eusse l'honneur de vous présenter, en son nom, un écrit intitulé: Hugues Capet. C'est un fragment d'un ouvrage plus étendu que l'auteur se propose de mettre au jour. Il offre un précis historique des événements qui arrachèrent le sceptre des mains de la race de Charlemagne, et firent monter sur son trône la troisième race de nos rois. La modestie qui a fait craindre à l'auteur de parler lui-même de son ouvrage l'aurait empêché sans doute de vous dire qu'on y trouve des détails peu connus, des recherches profondes et curieuses, des dissertations savantes sur quelques faits diversement racontés par nos anciens historiens et mal éclaircis par les modernes.

Je rends avec plaisir cet hommage aux talents et à l'érudition de notre collègue, après lui avoir déclaré cependant, et en déclarant ici, que sur des points très-graves je n'adopte pas ses conjectures qui ne paraissent peu d'accord avec les monuments qui nous restent de l'époque dont il a tracé l'histoire.

Le Corps législatif ordonne la mention de cet hommage au procès-verbal, et le dépôt de l'exeinplaire offert par M. Devisme à sa bibliothèque. La séance est levée.

29

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CORPS LEGISLATIF. PRÉSIDENCE DE M. FONTANES.

Séance du 1o pluridae on XIII Landi 21 janPier 1805.

Le procès-verbal de la séance du 29 nivise est adopté.

M. Boulard, Messieurs, M. Gin d'Ossery, ancien magistrat, digne fils d'un homme de lettres respectable, auquel nous devons un grand nombre de production littéraires justement estimées. vous prie de vouloir bien accepter l'hommage dun nouvel écrit intitulé : Abrégé chronologique de histoire de la marine française. Cet ouvrage, qui sera utils à l'instruction de la jeunesse, isté resse tous les Français, parce qu'il rappelle les hauts faits et les victoires de nos célébres marins. Le Corps législatif ordonne la mention honorable de cet hommage au procès-verbal, et le dépôt de l'exemplaire à sa bibliothèque.

M. Gattoire, Mes collègues, dans une de vos précédentes séances, il vous a été donné lecture du proces-verbal de la séance du 24 du mois dernier, pour Finauguration de la statue de NAPOLÉON BONAPARte Í", EmpereUR DES FRANÇAIS. Je crois que, pour consommer le grand acte que ce proces-verbal renferme, il convient qu'il soit rédigé en double minute, et qu'une de ces minutes soit portée à Sa Majesté Impériale par une députation du Corps législatif. Cette démarche dictée par la bienséance et les procédés, sera en même temps un hommage rendu à la modestie de Sa Majesté qui ne lui a pas permis, sans doute, de venir dans cette enceinte recueillir en personne les témoignages de reconnaissance et d'amour que lui ont si justement mérités ses sublimes et glorieux travaux. J'ai l'honneur de vous en faire la proposition.

Le Corps législatif arrête à l'unanimité qu'une députation sera chargée de porter à Sa Majesté une minute du procès-verbal de la séance du 24 du mois de nivose an XIII, jour où le Corps législatif a érigé dans la salle de ses séances une statue à NAPOLÉON 1o, EMPEREUR DES FRANÇAIS, comme un juste tribut de reconnaissance' nationale.

MM. Dauchy et Fleurieu, conseillers d'Etat, sont introduits.

M. Dauchy présente un projet de loi relatif à la dotation définitive de la Légion d'honneur. En voici le texte et l'exposé des motifs.

Messieurs, l'article 3 de la loi du 29 floréal an X, relative à l'établissement de la Légion d'honneur, porte qu'il sera affecté à chacune des cohortes qui la composent, des biens nationaux portant 200,000 francs de rente.

Quelque empressement que l'on ait mis à exécuter cette disposition, il n'a pas été possible, jusqu'à ce moment, d'en remplir le vœu d'une manière satisfaisante, et qui puisse faire regarder la dotation actuelle de la Légion autrement que comme provisoire.

Il a bien été assigné à chaque cohorte des propriétés nationales d'un revenu égal à celui qu'a fixe la loi. Les préfets et les directeurs des domaines ont mis le plus grand zèle à indiquer toutes celles qui étaient disponibles pour cette intéressante destination. Mais les ventes de domaines nationaux, très-avancées à cette époque dans la plupart des départements, avaient déjà mis hors des mains de la République presque toutes les masses importantes d'immeubles. Il ne restait plus, pour composer les dotations qu'il s'agissait de former, qu'une infinité de petits ar

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Quoiqu'on n'ait pas été dans le cas de se montrer dificile sur le choix des objets qu'on avait à faire entrer dans cette composition, on s'est encore trouvé obligé de chercher le complément do reveau de plusieurs cohortes dans des departements placés nors de leur circonscription, et quelquefois à une grande distance de leur cheflieu.

On conçoit aisément combien la manutention de ces revenus dispersés doit occasionner d'embarras et de frais: "combien leur recouvrement peut éprouver de retards et de non-valeurs; combien, par conséquent, un tel état de choses quirait à F'ordre età Texactitude avec lesquels doivent s'acquitter, suivant l'esprit de la loi, les traitements affectés aux membres de tout grade de la Légion d'honneur.

Il était digne des vues du héros qui a conçu l'idée de cette grande institution, de vouloir que le caractère de grandeur et de perpétuité qui la distingue se fit reconnaitre jusque dans la formation du patrimoine destiné à en soutenir les charges.

Le projet de loi qu'il nous charge de vous proposer a donc pour objet de constituer définitivement, et avec la dignité convenable, la dotation des seize cohortes de la Légion d'honneur. Le temps dans lequel cette grande opération doit être terminée est fixé par l'article fer, au cours de cette année et de celle qui doit la suivre.

Ce n'est que par des acquisitions et des échanges de propriétés privées que l'on pourra parvenir à rassembler, à la proximité de chaque administration de cohorte, des corps de biens d'une consistance imposante, d'une régie simple et facile, d'un produit certain et susceptible d'amélioration. On a prévu qu'il serait souvent difficile de trouver prêt à se vendre, dans l'arrondissement d'une seule cohorte, une quantité d'immeubles tels qu'on cherchera à les acquérir, suffisante pour composer sa dotation entière. Il a paru convenable de ne l'astreindre à en former que la moitié en revenus de cette nature. C'est l'objet des dispositions de l'article 2.

La vente des immeubles qu'on sera, par ce moyen, dispensé de conserver en nature, fournira, par l'emploi de son produit, tel que le prescrit l'article 3, un genre de revenu qui, en liant plus particulièrement l'intérêt de la Légion à la fortune de l'Etat, ne peut qu'affermir le crédit des effets publics, et en élever de plus en plus la valeur. La bonification qui résultera de cet emploi dédommagera amplement la Légion des sacrifices en valeur capitale que les convenances auront pu conseiller, pour faciliter les réunions mentionnées en l'article précédent.

Ce genre de placement doit même produire un accroissement assez sensible de revenu annuel, pour en pouvoir distraire le dixième réservé par l'article 8 pour former un fonds d'accumulation. Cette mesure de prévoyance ne laissera point à craindre que la portion de revenus assignée en rente éprouve de diminution. On sera, au contraire, assuré qu'elle suivra toujours et pourra même devancer l'augmentation progressive dont les immeubles sont susceptibles en proportion du rehaussement du prix des denrées et des autres valeurs commerciales.

Le moment où l'on s'occupera de refondre aussi

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