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N° 5

BIBLIOGRAPHIE

Le Nil argentin (Rio Negro)
et les irrigations dans sa vallée.

Résumé d'un ouvrage de M. Soldano,
Professeur d'Hydraulique agricole à l'Université de La Plata,

Présenté par M. IMBEAUX,
Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées.

la réu

Tout comme le Nil égyptien qui, après s'être constitué par nion du Nil Blanc et du Nil Bleu à Khartoum (plus exactement après le confluent de l'Atbara un peu au sud de Berber), ne fait plus que se propager au travers d'un désert (il y a 2.978 km. entre Berber et la Pointe du Delta, au Barrage), de même le Rio Negro, formé par la réunion à Cipoletti du Rio Neuquen et du Rio Limay, ne fait plus que se propager vers l'est ou le sud-est dans une région désertique (moins de 0 m. 20 de pluie annuelle), sur une distance de 6 degrés de longitude aux environs du 40me parallèle (soit sur un cours de 527 km.). On peut donc penser que les eaux de ce fleuve sont susceptibles de féconder par l'irrigation une certaine portion de sa vallée, comme le Nil fait, de temps immémorial, pour l'Égypte : toutefois les parties hautes des bassins du Neuquen et du Limay n'étant pas sous l'influence des pluies équatoriales, il manque ici la régularité et l'ampleur de la crue annuelle du fleuve égyptien.

Certaines autres analogies sont cependant à signaler. Ainsi le Rio Limay, comme le Nil Blanc, sort d'une série de grands lacs (il y en a 37 d'une superficie totale de 1149 km2,, dont les principaux sont le Nahuel-Huapi, le Traful, le Huechu-Lafquen, l'Aluminé et le Lolog, occupant ensemble 800 km2), qu'il serait facile de régulariser: sans doute on n'obtiendra pas en exhaussant d'un mètre le seuil de ces lacs une retenue de 68 milliards de m3 comme avec le grand lac Victoria Nyanza, mais on aurait facilement une retenue de 1 milliard de m3, suffisante pour augmenter de 190 m3 par seconde le débit d'étiage du

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Fig. 1.

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Limay, tout en modérant les crues. Sur le cours du Neuquen il n'y a plus que des lacs hors d'activité, c'est-à-dire des dépressions analogues au fameux lac Moeris et susceptibles de recevoir les eaux excédentes des crues telles sont les deux Cuencas de l'Añelo et de Vidal, la première avec une superficie de 2.520 km2, une profondeur de 175 m. en dessous du fleuve et une capacité de 295 milliards de m3, la seconde avec une superficie de 250 km2, une profondeur de 42 m. et une capacité d'un peu plus de 5 milliards de m3 (1). Enfin, il n'est pas jusqu'au Bahr Yousef qui n'ait son analogue en petit sur le Rio Negro, dans ie bras qui contourne au sud la grande île Choele-Choel (plus de 100 km. de longueur).

La petite carte ci-jointe montre la répartition des pluies: c'est seulement la région montagneuse qui alimente les cours d'eau, et plus particulièrement le haut bassin du Limay. Les neiges tombées pendant l'hiver sur les hautes régions des Andes ont une grande importance et leur fonte produit des hautes eaux pendant la première partie de la saison chaude, c'est-à-dire d'octobre à décembre. Une période de pluies s'étend en outre d'ordinaire de mai à août et produit des crues, qui ont une allure plus violente que les crues de fonte de neiges : pour la même raison, les montées du Neuquen sont plus brusques et plus fortes que celles du Limay. Enfin, il y a une période d'étiage de février à avril, c'est-à-dire à la fin de l'été.

On admet que le débit d'étiage du Limay est d'environ 110 m3 par seconde (c'est lui qui pourrait être porté à 300 m3 par la régularisation des lacs), et que celui du Neuquen est de 70 m3. Quant aux débits des plus fortes crues, pour lesquels on comprend qu'on ne soit pas très bien fixé encore, le maximum serait d'environ 6.000 m3 pour le Limay et de 8.100 m3 pour le Neuquen cette dernière évaluation faite en 1918 par M. Ballester, sous-directeur des travaux du barrage du Neuquen, est bien différente de celle de 3.700 m3 faite par M. Severini, auteur du projet de cet ouvrage, ce qui montre combien il est imprudent de baser des projets sur des données expérimentales insuffisantes. A l'aval de Confluencia, les crues du Rio Negro dépendent surtout de la concordance ou de la discordance du flot du Limay et du Neuquen ainsi le 20 juillet 1899, le Neuquen subit une forte crue qui se greffa sur une période de hautes eaux du Limay et produisit une grande inondation avec un débit de plus de 10.000 m3 par seconde du Rio Negro, tandis qu'en juillet 1900 une pareille montée du Neuquen

1) On signale encore deux autres dépressions plus petites (lacs éteints), la Cuenca de los Barriales et le Mari Menuco.

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Déversoir
dinondation

(Vers la Cuenca de Vidal)

alorigine

et ouvrage de prise

Canal d'irrigation

1Km

Plan de détail (Angle du barrage et de la prise d'eau

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Elévation du barrage. (12 ouvertures de 20

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Coupe transversle AB sur le barrage.

B

Fig. 2.

Barrage du Neuquen.

trouvant le Limay en eaux ordinaires s'écoula sans débordement du Negro.

Ces données hydrologiques esquissées, quelles conclusions en tirer pour le triple problème qui se pose pour le Rio Negro comme pour notre Rhône au point de vue de la suppression des inondations, de la navigabilité du fleuve et de l'utilisation de ses eaux pour l'irrigation et la force motrice ? Comme M. Soldano le dit et comme l'avait prévu l'Ingénieur Cipoletti, il semble bien que c'est par l'exhaussement du seuil des principaux lacs du Limay que l'œuvre de régularisation et d'emmagasinement aurait dû être commencée. Or jusqu'à présent, d'après les projets de M. l'Ingénieur Severini, on ne s'est adressé encore qu'au Neuquen on a établi sur ce fleuve à environ 35 km. à l'amont du confluent : 1° un large barrage transversal avec prise d'eau à l'origine d'un canal d'irrigation; 2° un déversoir d'inondation pour amener dans la Cuenca de Vidal les eaux surabondantes des crues du Neuquen (à raison de 1.300 m3 par seconde).

Le barrage, qui n'est pas encore tout à fait achevé, a une longueur de 276 m., comprenant 12 travées de 20 m. chacune d'ouverture libre et des piliers de 3 m. de largeur, supportant eux-mêmes une élégante passerelle métallique. Les passes sont fermées par des vannes Stoney, de 4 m de hauteur, glissant sur des trains de rouleaux qui se déplacent en même temps qu'elles, mais avec une vitesse moitié moindre chacune de ces vannes pèse 32 tonnes et est équilibrée par deux contrepoids de 16 tonnes, cachés l'un de chaque côté dans la partie supérieure des piles; elle se meut au moyen d'un moteur électrique de 3 HP ou à la main. Les piles, en béton, ont été fondées au moyen de caissons à l'air comprimé à une profondeur moyenne de 7 m. 50; entre deux piles, par un caisson supplémentaire, on a descendu à 6 m. 80 en dessous du seuil des vannes une cloison formant le parafouille d'amont du radier. Enfin le radier qui a 22 m. de largeur, avec une épaisseur variant de 2 m. 40 à 1 m. 60, se termine à l'aval par un petit mur suivi de blocs de béton: sous les arcs, il est revêtu en bois.

Le canal de prise d'eau pour l'irrigation part de l'angle de rive gauche du barrage; il a 45 m. de largeur, et avec 2 m. de hauteur d'eau porte 65 m3. La prise est un ouvrage régulateur de 12 arches, de 5 m. d'ouverture chacune, qui doivent être fermées par des vannes Stoney (non encore posées). Dans son parcours de 4.326 m., le canal comporte 3 chutes de 0 m. 85 chacune (afin de diminuer la pente du fond), du type des Notched falls de l'Inde (ce sont des barrages crénelés (1) avec

(1) Les crénelures sont produites par les notches, ouvertures trapézoïdales faites dans le mur de chute (dalle de béton) à des intervalles de 2 m. 50 d'axe en axe : les vides trapézoïdaux ont 0 m. 43 de largeur en bas, 1 m. 27 en haut sur 2 m. de hauteur.

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