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D'après ces règles, nous devons considérer comme immeubles par destination,

145. 1° Tous les ouvrages, tous ornements en bas-reliefs, construits ou appliqués contre la façade d'un édifice, puisqu'ils ne peuvent y être incrustés ou enracinés qu'à chaux ou à ciment;

146. 2o Les chaudières d'un brasseur, d'un teinturier, d'un raffineur, les alambics d'un distillateur tous ces objets, s'ils sont posés sur maçonnerie 1, sont une partie accessoire de l'édifice où ils ont été placés par le propriétaire 2;

147. 5o Les boiseries des appartements, puisqu'elles font une partie intégrante de la maison, et qu'on ne pourrait les enlever sans dégrader et détériorer l'édifice;

148. 4° Les chambranles des portes, fe

Une adhérence tout aussi solide, mais qui ne résulterait pas d'un travail de maçonnerie, ne produirait pas les effets de l'immobilisation, si la séparation pouvait s'effectuer sans détérioration ni fracture. L'immobilisation, sous ce premier rapport, est le privilége de ce mode particulier d'incorporation. — Il faut dire ici qu'un métier, un instrument de fabrication scellé à un bâtiment, est toujours immobilisé quelles que soient la destination de l'immeuble et l'importance relative de l'outil. La nécessité, l'utilité ou même l'inutilité d'un instrument scellé à plâtre, ou à chaux, ou à ciment, restent sans influence sur le caractère immobilier. (Hennequin, p. 46.)

Un instrument de travail, un appareil de fabrication, dès qu'ils sont adhérents à une propriété bâtie, reçoivent, dit Hennequin, p. 47, le caractère immobilier, non de la nature de leur emploi, mais de leur mode d'adhérence. Lyon, 8 oct. 1826; S., 27. 2, 205.

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3 Les glaces qui n'offrent pas le signe matériel auquel l'immobilisation est attachée, ont conservé leur caractère mobilier. Paris, 20 fév. 1833; S., 34, p. 80.- De simples tentures sont trop mobiles pour pouvoir servir, comme la boiserie, de base à l'immobilisation. Voir cependant Paris, 10 avril 1834;-S., 34, 2, 223.

4 Les Romains, passionnés pour cette nature de decorations, reconnaissaient au propriétaire le droit d'immobiliser des tableaux, des objets d'art, et ne lui permettaient pas de tromper, en les enlevant, la juste espérance d'un locataire ou d'un acquéreur. Il est permis de conclure des textes qui existent sur ce point, qu'à Rome on suivait, en matière d'immobilisation par adhérence, des règles fort semblables à celles admises parmi nous. (Hennequin, p. 48.)

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Voy. Pothier, Tr. des Choses, 2o p., §1er, 200 alin. L'espèce suivante rentre dans ces principes. Broeta avait hypothéqué au sieur Legrelle un immeuble avec tous ses accessoires, et nommément les glaces se trouvant dans les boiseries. Le créancier hypothécaire a poursuivi l'expropria

Quæ tubule pictæ pro tectorio includuntur, itemque crusta marmoreæ, ædium sunt. L. 17, § 3, D., lib. xix, tit. I, de Actionibus empti et venditi. Il existe même à ce

nêtres et cheminées, par la même raison; 149.5° Les glaces3, les tableaux et autres ornements dont les parquets font corps avec la boiserie (525);

Lors même que le parquet d'une glace ou d'un tableau ne serait pas assemblé dans le corps de la boiserie, si en l'enlevant, le mur devait rester brut et nu derrière, et que le surplus de la pièce eût été boisé, nous croyons qu'alors ce parquet devrait encore être considéré comme immeuble, parce qu'ainsi placé, il serait vrai de dire qu'il remplirait la fonction de boiserie dans une partie de la pièce que le maître aurait voulu etre totalement boisée, sans y souffrir ni laisser la difformité résultant de l'enlèvement du panneau où la glace avait été incrustée 5;

150. 6o Le pressoir dont la charpente est

tion forcée de cet immeuble, et a compris dans la saisie les glaces affectées à son hypothèque. Les syndics des créanciers de Broeta, tombé en faillite, ont soutenu que ces glaces ne devaient pas être considérées comme accessoires de l'immeuble.Jugement du tribunal qui nomme des experts pour constater, ce qui était juste, si les glaces étaient attachées à un parquet faisant corps avec la boiserie.-Arrêt de la Cour de Bruxelles, ainsi conçu : « Attendu que, d'après l'art. 524 du Code civil, tous effets mobiliers que le propriétaire atta

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che au fonds à perpétuelle demeure sont im« meubles par destination; que, cette disposition << renfermant une règle générale, tout signe exté«rieur qui caractérise évidemment l'intention du « propriétaire d'attacher un effet mobilier à per«pétuelle demeure, doit suffire pour constituer << un immeuble pas destination; attendu que les signes caractéristiques indiqués sous ce rapport dans l'art. 525 n'y sont énoncés que « comme présomptions légales, d'où résulte la « destination du père de famille; que cet article « n'exclut done pas tout autre signe légalement « prouvé, et dont cette destination serait mania festement le résultat; attendu que, d'après l'acception vulgaire en ce pays, tout ce qui est at« taché au fonds par le propriétaire, à ciment, à « fer, à terre, ou à clou, est censé attaché à per«pétuelle demeure; attendu que, dans l'espèce, « le débiteur Broeta a hypothéqué la maison dont il s'agit, avec tous les objets de cette nature, « nommément les glaces se trouvant dans les « boiseries; d'où il suit que les glaces dont il « s'agit sont comprises dans la convention hypo« thecaire comme immeubles par destination, << accessoires à la maison hypothéquee, dans la « supposition toutefois que ces glaces soient in« crustées dans les boiseries ou dans le mur, ou qu'elles y soient attachées à fer et à clou, quand « bien même ces glaces ne seraient pas attachées « sur un parquet faisant corps avec la boiserie; « qu'ainsi le premier juge a infligé grief à l'ap<< pelant en bornant l'expertise qu'il a ordonnée sujet un texte plus explicite encore: Item constat, sigilla, columnas quoque, et personas (imagines) ex quarum rostris aqua salire solet, villæ esse. Dictâ lege, § 9.

«

engagée dans le mur, ou assemblée avec la charpente de la maison, est aussi partie accessoire de l'édifice, avec lequel il se trouve ainsi identifié.

Dans ce cas les manivelles, léviers, cordes et agrès du pressoir sont eux-mêmes immeubles par destination, comme ustensiles d'usine 1;

151. 7° Les alcôves et les cloisons; les armoires incrustées dans les murs, ou tenant par assemblage avec les cloisons; les planches de bibliothèques faisant corps avec les boiseries; les armoires assemblées de même, sont également immeubles parce qu'on ne pourrait enlever aucun de ces objets sans dégrader et détériorer essentiellement les pièces où ils ont été placés;

152. 8° La crémaillère de la cuisine, les plaques de feu et de cheminée 2, les rateliers et les mangeoires des écuries, sont aussi partie intégrante de l'édifice, parce qu'on ne pourrait les enlever sans le dégrader et metire obstacle à son usage;

153. 9o Les cuves et tonnes construites dans une cave d'où elles ne pourraient être enlevées sans les démolir, doivent être également considérées comme accessoires de l'édifice, parce qu'en les construisant ainsi sur place, le propriétaire est censé les avoir attachées à perpétuelle demeure; que le désassemblement ou la démolition qui les réduit

« à faire constater, par les experts, si les glaces « réclamées au procès sont attachées sur un para quet qui fait corps avec la boiserie...émendant « quant à ce, ordonne que lesdits experts cona stateront en général la manière dont sont pla« cées et fixées toutes les glaces qui se trouvaient « dans la maison expropriée dont il s'agit.» - M. Hennequin, page 55, improuve cette décision. Dans le texte de cet arrêt se retrouvent, dit-il, les principes qui le condamnent. Il faut un signe extérieur; la cour de Bruxelles le reconnait la seule volonté consignée dans un écrit ne suffit pas. Ce signe doit attester avec évidence le caractère de perpétuité dans la destination; l'arrêt ne le conteste pas davantage. Or, comment ces conditions peuvent-elles être remplacees? A part les usages de la Belgique, anéantis en présence de la loi qu'il s'agissait d'interpréter, l'adhérence, d'après l'article 525, doit offrir un de ces trois caractères: avoir eu lieu à chaux ou à ciment; se trouver tellement intime, qu'elle ne puisse cesser sans dommage; ou résulter, s'il * Brux., 14 juin 1821; J. de Br., 1824, 2o p., 145. Dans une note sur cet arrêt, Dalloz, vo Choses, p. 74, pense que la destination peut résulter de la volonté formellement exprimée du propriétaire. « Et alors, ajoute t-il, il importe peu qu'il existe des signes caractéristiques indiqués par l'article 525.» Poser un principe aussi général, c'est supposer que l'immobilisation peut s'opérer nuda voluntate. Le texte des articles 524 et 525, qui veut que les objets aient été attachés au fonds, suffit à la réfutation de cette opinion.

en pièces est véritablement une fracture qui les dégrade, et qui entraîne pour ces objets les mêmes conséquences que la démolition pour un édifice.

154. « Quant aux statues, porte le dernier << paragraphe de l'article 525, elles sont im« meubles quand elles sont placées dans une « niche pratiquée exprès pour les recevoir, « encore qu'elles puissent être enlevées sans « fracture ni détérioration. »

Par ces expressions, quant aux statues, les auteurs du Code nous donnent clairement à entendre qu'ils ont voulu régler spécialement par ce texte tout ce qui a rapport aux statues, et de là nous devons tirer plusieurs conséquences qu'il est essentiel de bien saisir :

La première, que, suivant le principe général de l'incorporation, les statues sont immeubles, d'abord lorsqu'on ne saurait les enlever sans les dégrader ou les fracturer, ou sans fracturer ou détériorer la partie de l'édifice où elles auraient été construites ou placées ;

La seconde, que c'est par une exception particulière à ce principe général de l'incorporation, qu'elles sont aussi déclarées immeubles lorsqu'elles se trouvent placées dans des niches pratiquées exprès pour les recevoir, encore qu'elles puissent être enlevées sans fracture ni détérioration 3;

155. La troisième, que, cette disposition

s'agit de glaces et de statues, du moyen même que le législateur a pris soin d'indiquer.

Voy. l'art. 593, C. pr.

Une plaque de foyer, placée par le propriétaire et seulement harponnée, est-elle meuble ou immeuble? Une plaque de foyer est un objet dont le but est de conserver, une glace est un objet d'ornement; il ne faudrait donc pas argumenter de ce qu'une glace simplement harponnée est meuble, que la plaque l'est aussi, car la plaque garantit le mur de la cheminée de l'ardeur du feu, elle le conserve et empêche la dégradation; elle est donc utile ad integrandam domum, tandis que la glace est destinée à la décorer. Aussi considérons-nous le contre-feu comme immeuble; (Pothier, de la Communauté, no 57. v. Rép., vo Biens, § 1er); il est vrai que dans notre espèce, il n'est pas scellé comme l'exige l'art. 525; mais cet article ne peut être pris dans un sens restrictif, au moins quant au mode d'attacher une chose à perpétuelle demeure. Il ne pouvait énumérer toutes les diverses manières avec les

quelles on attachait ou attacherait à l'avenir une arrêt du 10 avril 1834, il a été décidé, même à chose à perpétuelle demeure. C'est ainsi que, par l'égard des glaces, que quoiqu'elles ne fussent pas attachées suivant les termes de l'art. 525, on pourrait néanmoins les regarder comme attachées à perpétuelle demeure, si elles l'étaient, conformément à la méthode nouvelle. (Chavot, n° 58.)

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Cum posita sunt ad integrandam domum, dit

spéciale étant déjà une exception à la règle commune, c'est une double raison pour nous de ne pas étendre encore la fiction plus loin; qu'en conséquence il faut tenir pour constant que dans toute autre position les statues sont meubles.

Ainsi elles ne participent point à la qualité d'immeubles si elles sont placées sur des piédestaux, soit dans les maisons, soit dans les cours et jardins, lors même que les piédestaux seraient des massifs fondés en terre, parce que ce n'est pas là la situation voulue par la loi pour en opérer l'immobilisation. Vainement dirait-on que les statues qui sont sur des piédestaux fondés en terre, et construits exprès pour les recevoir, y ont été placées à perpétuelle demeure; qu'on ne saurait d'ailleurs les enlever, et laisser à nu les piédestaux, sans dégrader le fonds; qu'il y a donc un double motif de les réputer immeubles, puisque, d'une part, elles ont été placées à perpétuelle demeure; et que, d'autre côté, leur enlèvement entraîne une dégradation dans le fonds.

Cette objection n'est pas concluante, parce qu'il n'est pas permis d'étendre ici les dispositions de la loi par analogie.

1o S'il est vrai que des statues posées sur des piédestaux y aient été placées à perpétuelle demeure, il est vrai aussi qu'elles n'ont été placées que pour l'ornement, et non pour le service du fonds : leur immobilisation serait donc déjà sous ce premier rapport hors de l'esprit de la loi.

2o Comme les statues ne sont par ellesmêmes qu'un objet de luxe et d'embellissement, leur enlèvement peut bien, en quelque sorte, déshonorer le fonds où elles étaient placées; mais il ne le détériore pas dans le sens que la loi attache ici à cette expression: car lorsqu'elle dit que les statues placées dans des niches sont immeubles, encore qu'elles puissent être enlevées sans fracture ni détérioration, il est évident que l'expression détériorer ne s'applique point à la simple action de déshonorer le fonds par la privation des statues qui servaient à l'embellir, puisque ce texte suppose que leur enlèvement ait lieu sans détérioration de ce fonds. 156. Ces observations, tirées du texte même de la loi, nous conduisent à une autre consé quence dont les applications peuvent être plus étendues: c'est qu'il faut admettre une

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grande différence entre l'enlèvement d'un objet qui n'avait été placé que pour ornement ou décoration, tel qu'une statue, et celui d'une chose qui avait été placée pour le service du fonds, tèlle que serait la plaque d'une cheminée, mise pour protéger le mur qu'elle couvre.

Dans le premier cas, l'enlèvement de la statue n'est point une détérioration, s'il peut avoir lieu sans la fracturer en aucune partie.

Mais dans le second cas, le simple enlèvement de la plaque serait une dégradation du fonds pour le service duquel elle avait été placée, puisqu'il exposerait le mur à toute l'action du feu.

Il résulte de là qu'en thèse générale, et abstraction faite du cas où il s'agirait de statues placées dans des niches, les choses de pur ornement ne doivent être considérées comme immeubles par destination qu'autant qu'elles tiennent physiquement au fonds, et ne peuvent en être arrachées sans fracture ou déchirement; qu'au contraire, ce qui est placé à perpétuelle demeure pour le service du fonds, est immeuble par destination, lors même qu'on pourrait l'ôter sans fracture, parce que l'enlèvement de cette chose dégrade nécessairement le fonds dont il paralyse l'usage.

Nous terminerons cette section en retraçant sommairement les principales conséquences qui dérivent des dispositions du Code sur les immeubles par destination.

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157. Les immeubles par destination sont placés sous la protection des lois qui régissent les immeubles réels et de là il résulte qu'ils ne peuvent être distraits par saisie mobilière pour aucune créance, même celle de l'État, si ce n'est pour aliments fournis à la partie saisie, ou sommes dues aux fabricants ou vendeurs de ces objets, ou à celui qui a prêté pour les acheter, fabriquer ou réparer; pour fermages et moissons des terres à la culture desquelles ils sont employés, loyers des manufactures, moulins et usines dont ils dépendent 2.

158. Les immeubles par destination sont une partie accessoire du fonds auquel ils ont été attachés : donc ils se trouvent compris dans le legs (1018), dans la donation (1064), dans la vente (1615) de ce fonds, s'ils n'ont point été réservés par l'acte qui contient la disposition.

Il résulte encore de là que, dans le cas de la donation entre-vifs d'un fonds, il n'est point

Voy. l'art. 592, C. pr.

Art. 595 du même Code, et encore l'article 2, section 5, de la loi du 6 octobre 1791 sur la police rurale.

nécessaire de se conformer pour les accessoires au prescrit de l'article 948 du Code, qui veut, à peine de nullité, que les donations d'effets mobiliers portent un état estimatif des objets donnés car les accessoires d'un fonds ne peuvent être des effets mobiliers aux yeux de la loi qui les immobilise; et, dès qu'ils sont compris dans la donation du fonds. par cela seul qu'on n'en a point fait une mention pour les réserver, il y aurait de la contradiction à vouloir qu'on en fit un inventaire, afin de les y comprendre.

C'est ainsi que les auteurs du Code l'ont entendu, lorsque, parlant de la donation faite avec charge de substitution, ils ont voulu (1064) que les bestiaux et ustensiles servant à faire valoir les terres fussent censés compris dans les donations entre-vifs ou testamentaires desdites terres. et que le grevé füt seulement tenu de les faire priser et estimer, pour en rendre une égale valeur lors de la restitution. Par là, le législateur suppose visiblement qu'en ce cas l'acte de donation ne porte point d'état estimatif des bestiaux et ustensiles aratoires, puisqu'il charge seulement le grevé d'en faire faire l'estimation, et que cette formalité serait pleinement inutile si l'on y avait déjà satisfait d'avance.

159. LES IMMEUBLES par destination sont considérés, en droit, comme partie du fonds: ils sont en conséquence frappés des mêmes hypothèques (2118), et compris dans la saisie immobilière et l'expropriation forcée du sol, dont le prix doit être distribué aux créanciers par rang d'hypothèques (2204).

Néanmoins, lorsque les choses de cette nature sont distraites par le propriétaire, la fiction de la loi cesse sitôt qu'elles ont cessé d'être attachées au fonds: elles reprennent alors leur qualité naturelle d'effets mobiliers; et, comme les meubles n'ont pas de suite par hypothèque (2119), les créanciers hypothécaires ne peuvent, sous ce rapport, avoir prise contre les acquéreurs de ces effets. Mais dans le cas où il existe déjà une saisie immobilière assise sur le fonds, si le propriétaire saisi en distrait les accessoires en tout ou en partie après la notification de la saisie, autrement que dans la vue de pourvoir aux remplacements exigés par les principes d'une sage administration, il se rend passible de dommages el intérêts à raison desquels il peut être condamné par corps pour avoir dégradé l'immeuble placé sous la main de la justice 1, sans préjudice encore des voies criminelles si la gravité des circonstances pouvait y donner lieu.

160. LES IMMEUBLES par destination suivent

Art. 690, C pr.

la condition du fonds avec lequel ils sont civilement identifiés : ils n'entrent donc point dans la communauté légale des époux (1404); mais ils doivent être entretenus, comme le fonds, par la communauté qui en jouit; et dans le cas des ventes qui peuvent en être faites pendant le mariage, on doit pourvoir au remplacement par d'autres effets de même nature et d'égale valeur; faute de quoi celui des époux auxquels ils appartenaient aura une action en indemnité à exercer lors de la dissolution de la communauté, d'après les principes établis (14353,1456) sur les remplois et reprises des propres aliénés par les époux mariés sous le régime communal.

161. Ainsi une femme qui avait à l'époque de son mariage, ou à laquelle il est échu depuis, un domaine garni de bestiaux et d'ustensiles aratoires, une usine avec tous ses agrès, et qui se trouve forcée de renoncer à la communauté, sera en droit de reprendre son domaine ou son usine garnis de leurs accessoires réputés immeubles (1495); tandis que sans le secours de cette fiction, elle serait obligée d'abandonner tous ces effets (1492) aux créanciers et aux héritiers de son mari, et demeurerait privée des agents et instruments nécessaires pour l'exploitation de son usine.

Ainsi le légataire des fonds trouvera dans les accessoires qui en suivent la condition, des moyens de culture et d'exploitation qu'il n'aurait pas si les animaux de trait et les ustensiles aratoires, n'étant pas déclarés immeubles, appartenaient au légataire du mobilier.

162. C'est donc par des considérations d'une haute sagesse que les auteurs du Code ont voulu, pour l'intérêt du commerce, de l'agriculture et des arts, que les effets mobiliers attachés au service et à l'exploitation des immeubles fussent eux-mêmes civilement immobilisés, et suivissent la condition des fonds.

SECTION III.

Des immeubles par l'objet auquel ils s'appliquent.

163. Les immeubles par l'objet auquel ils s'appliquent, sont les droits incorporels, qui, sans être meubles ni immeubles par euxmêmes, sont néanmoins rangés dans l'une ou l'autre classe suivant qu'ils ont une chose mobilière ou immobilière pour objet.

Les droits incorporels sont, sous plusieurs rapports, soumis à des règles qui leur sont exclusivement propres : c'est pourquoi les Romains en avaient fait une troisième espèce de biens; mais, comme ils sont aussi, sous

les aspects les plus généraux, soumis aux mêmes règles que les autres choses qui nous appartiennent, les auteurs du Code ont voulu, pour plus de simplicité, qu'ils fussent compris dans la division générale des meubles et des immeubles.

Ce n'est que par rapport à cette division que nous avons à les considérer ici. Un autre chapitre sera destiné à examiner leurs qualités particulières, et les conséquences qui dérivent de leur nature de biens incorporels. 164. Art. 526. « Sont immeubles par l'objet auquel ils s'appliquent, l'usufruit des « choses immobilières, les servitudes ou ser« vices fonciers, les actions qui tendent à revendiquer un immeuble.»

$ 1er.

DE L'USUFRUIT.

165. L'usufruit d'un fonds est immeuble parce que l'usufruitier a un droit réel dans la chose même dont il jouit jus in re1; droit susceptible d'hypothèque comme le fonds (2118).

demeure pour le service de la chose 3. Le droit de l'usufruitier n'est déjà lui-même qu'un immeuble fictif: on ne pourrait donc déclarer immeubles les effets mobiliers employés par l'usufruitier à l'exercice de ce droit, sans étendre les dispositions de la loi au delà de leurs limites, et sans cumuler deux fictions l'une sur l'autre, ce qui répugne également aux principes.

Il faut cependant excepter, ainsi que nous l'avons remarqué précédemment, le cas où il s'agirait d'objets dont la fourniture devrait être faite par l'usufruitier pour l'entretien de la chose, tels que les échalas de la vigne : car, étant obligé de les laisser, il les place également à perpétuelle demeure; et c'est moins en son nom propre qu'en celui du maitre qu'il agit en les plaçant, puisqu'il peut y être forcé il est alors un vrai procurator in rem suam et in rem alterius, agissant tant en son nom qu'en celui du propriétaire.

On devrait encore, et même à plus forte raison, porter la même décision en ce qui touche aux réparations ou constructions de clôtures des héritages, comme aux réparations ou constructions de maisons qui ne seraient que des améliorations foncières dont l'usufruitier aurait voulu gratifier le propriċtaire.

$2.

DES SERVITUDES, OU SERVICES FONCIERS. 167. Une servitude est une charge impo

Nous croyons que les droits d'usage et d'habitation doivent pareillement être rangés dans la classe des immeubles, parce qu'ils sont véritablement des droits réels dans la chose, jura in re; néanmoins ils ne sont pas susceptibles d'hypothèque, par la raison qu'étant inhérents à la personne, ils ne peuvent être aliénés au profit d'un autre (651 et 654). Il nous paraît encore que les baux à vie ou à longues années devraient être aussi consi-sée sur un héritage pour l'usage et l'utilité dérés comme immobiliers dans leur objet, d'un héritage appartenant à un autre proparce qu'ils sont semblables au droit d'usu- priétaire (657). fruit qui serait acquis à titre onéreux, qu'ils participent de l'aliénation du fonds, et donnent au possesseur un droit réel dans la chose, jus in re, qui n'appartient point au fermier ordinaire 2.

166. LES EFFETS mobiliers que l'usufruitier attache à l'exploitation du fonds dont il a l'usufruit, tels que les bestiaux avec lesquels il cultive le domaine soumis à sa jouissance, sont-ils immeubles par destination? En cas d'expropriation de l'usufruit, ces animaux seraient-ils aussi compris dans la vente comme accessoire du principal exproprié?

L'immobilisation n'est attachée par la loi (524) qu'à l'acte de destination qui émane du propriétaire même, parce qu'il n'appartient qu'à lui de faire un placement à perpétuelle

Ususfructus pars dominii est. L. 4, ff. de usufr. et quemadm. (7, 1).

Voy. Pothier, Tr. du louage, no 288, et de la Communauté, no 71.

La servitude peut être considérée activement ou passivement.

Considérée activement et par rapport au fonds pour l'avantage duquel elle a été constituée, elle ajoute à ses aisances; elle est pour lui une qualité qui en augmente la valeur; elle le suit en quelques mains qu'il passe, comme une portion de l'autre fonds détachée pour le service de celui-ci elle est donc véritablement immeuble sous ce rapport.

Considérée passivement et par rapport au fonds qui en est grevé, la servitude est l'aliénation d'une portion de la liberté de ce fonds au profit de l'autre; c'est une charge qui diminue la valeur de l'héritage qui en est le débiteur, charge qui le suit également en quelques mains qu'il passe : elle est donc encore véritablement immobilière sous ce second rapport.

3 Delvincourt, t. 2, p. 294.

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