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et autres obstacles longeant cette rive (voir figure 2), ils sont entraînés, volontairement ou non, à passer assez près de la pile sur laquelle vient reposer le voussoir avarié.

Si le passage a lieu en hautes eaux, la superstructure du chaland est fort exposée à heurter le voussoir de naissance de l'arc amont. Qui cédera? la superstructure du chaland ou le voussoir? Le 18 février 1923, c'est le voussoir qui a cédé.

Nous avons donc jugé très opportun, pour ne pas dire plus, de renforcer ce voussoir, après réparation à la soudure, par trois lames d'acier de o m. 25 de largeur moyenne s'étendant sur toute la longueur du voussoir, l'une de 20 mm. d'épaisseur reposant sur la semelle inférieure, les deux autres de 30 mm. d'épaisseur étagées régulièrement entre les semelles inférieure et supérieure (voir figure 6).

Ces lames d'acier ont été fortement calées et soudées électriquement à leurs deux extrémités sur les nervures des joints du voussoir; elles ont été aussi soudées électriquement sur le voussoir lui-même sur toute sa longueur, et maintenues en position entre elles et avec le voussoir par des nervures verticales soudées aux lames et au voussoir.

Ces trois lames d'acier ainsi fixées ont un double but : elles renforcent et suppléent, s'il y a lieu, le voussoir en fonte au point de vue de la transmission des efforts de compression directe agissant dans la direction de la fibre moyenne de l'arc; à ce point de vue, l'ensemble des trois lames ayant une section égale à la moitié de celle du voussoir et le coefficient d'élasticité de l'acier étant double de celui de la fonte, l'addition de lames augmente d'environ 100 °/。 la résistance du voussoir aux efforts directs de compression.

Elles ont en outre et surtout pour objet de renforcer très fortement le voussoir contre les efforts de flexion dus aux actions transversales auxquelles ce voussoir est particulièrement exposé et qui avaient causé l'avarie à réparer; à ce point de vue, les lames d'acier ayant une largeur de o m. 25 et une section totale égale à celle des semelles du voussoir, leur addition augmente de près de 200 °/。 la résistance du voussoir aux efforts de flexion dus

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aux actions transversales, sans même tenir compte du renforcement supplémentaire dû à la présence des nervures soudées à ces lames et au voussoir.

La figure 6 donne très nettement le dispositif du renfort sans qu'il soit nécessaire d'avoir sous les yeux les dessins cotés d'exécution.

Ce programme a été réalisé en août-décembre 1923 sous la direction de M. Mayer, ingénieur en chef, et de M. Parmentier, ingénieur des Ponts et Chaussées, par la Société de la Soudure autogène française.

Le travail de réparation devait, avons-nous dit, non seulement réparer l'avarie causée, mais encore constituer un renforcement tel que le voussoir réparé fût plus résistant que le voussoir neuf avant son avarie.

Un événement involontaire et imprévu est venu démontrer que le but était bien atteint.

Au cours du 1er semestre 1924 un gros chaland est venu de nouveau heurter le voussoir réparé ; mais cette fois le voussoir a résisté et n'a subi qu'une légère fissure voisine du joint supérieur Par contre, la superstructure du chaland a été démolie.

Cet incident montre bien que le voussoir est sérieusement renforcé mais il rappelle aussi que le voussoir réparé est, beaucoup plus que tout autre voussoir du pont, exposé à des chocs très violents.

Aussi avons-nous suggéré qu'il serait opportun d'envisager encore, dès qu'il serait possible, deux opérations particulièrement utiles :

1o Dégager la rive gauche sur une certaine longueur en amont du pont, d'une partie des obstacles longeant cette rive (voir figure 2) (ponton de départ des bateaux parisiens et stationnement des péniches de sable utilisant le port de Suresnes) qui obligent parfois les chalands descendant la Seine à passer trop près de la pile de rive gauche.

2o Augmenter encore la résistance du voussoir réparé en le reliant par quelques entretoises en acier avec un ou deux des arcs intermédiaires. On pourrait, en solidarisant ainsi deux ou trois

arcs, opposer aux chocs éventuels survenant contre l'arc de rive une résistance quatre ou cinq fois plus grande qu'actuellement, car les arcs intermédiaires sont par eux-mêmes plus robustes que les arcs de rive.

Au point de vue des dépenses, le mode de réparation a été économique car il a entraîné seulement une dépense totale de 50.000 francs.

Enfin, au point de vue esthétique il a eu l'avantage de ne pas déparer un ouvrage très architectural, car la réparation ne laisse finalement rien d'apparent sur la face extérieure du voussoir; il suffit, pour s'en rendre compte, d'examiner la photographie no 5 prise après la réparation terminée.

Quant à la face intérieure du voussoir, on peut, mais avec quelque difficulté, voir sur la photographie no 3 les lames d'acier ajoutées qui sont dans l'ombre et d'autant moins visibles qu'elles sont sur l'arc de rive dont la face intérieure est, par opposition avec le jour extérieur, dans une obscurité relative permanente.

No 8

Construction de Ponts en béton armé

SUR LA MARNE

PAR M. WAHL

Ingénieur des Ponts et chaussées

Il nous a paru intéressant de réunir ici quelques renseignements sur la construction de ponts en béton armé, sur la Marne, en remplacement des ponts détruits pendant la guerre dans le département de Seine-et-Marne.

Ces ponts, qui ont dû être entièrement reconstruits, à l'exception pour certains d'entre eux, des piles et culées, sont au nombre de dix et on a été amené à adopter des dispositions assez différentes pour chacun de ces ouvrages. Il y avait en effet à satisfaire à des conditions très diverses: par raison d'économie, il convenait, partout où la chose n'était pas impossible, de réutiliser tout ce qui pouvait rester de l'ancien ouvrage ; la destruction n'avait pas, en général, porté sur les piles et culées; ou tout au moins les fondations pouvaient souvent être mises à profit. On devait en même temps améliorer les conditions de circulation, en donnant plus de largeur aux ouvrages, améliorer aussi les conditions de navigation pour permettre la mise ultérieure de la Marne au gabarit nécessaire pour recevoir les chalands rhénans, dans certains cas faciliter l'écoulement des eaux pour diminuer les conséquences possibles des inondations. Il convenait, en outre, de rechercher des formes d'ouvrages dont l'aspect fût acceptable.

Certains de ces ponts présentent des dispositions tout à fait spéciales tel que le pont de Lagny (R D); les procédés de construction pour certains d'entre eux tels qu'Annet et Trilbardou méritent de retenir l'attention. Enfin nous dirons en

passant un mot sur les méthodes de calcul employées et sur les questions spéciales que ces calculs nous ont paru soulever. Les ponts à reconstruire étaient, en partant de l'aval pour remonter vers l'amont les deux ponts de Lagny, les ponts d'Annet, Trilbardou, Isles-les-Villenoy, Germigny-l'Évêque, Congis, Mary-sur-Marne, Changis-Saint-Jean, Ussy, les deux ponts de La Ferté-sous-Jouarre (le pont de Meaux et le pont de Trilport ont été réparés pendant la guerre) (1).

Tous ces ponts, à l'exception des ponts de Germigny-l'Évêque et l'un des ponts de La Ferté-sous-Jouarre (route nationale), dont nous ne nous occuperons qu'en annexe, avaient leur tablier entièrement détruit.

Les ponts existant avant guerre étaient, en général, des ponts en maçonnerie à trois arches: toutefois, au deuxième pont de Lagny (route départementale), au pont de Mary, existaient des arches métalliques; le pont de Congis était un bow-string métallique; le pont de Trilbardou, un pont à tablier droit métallique.

Sur la demande du Service de la Navigation, on a décidé de reconstruire à deux arches les ponts d'Isles-les-Villenoy et La Ferté-sous-Jouarre ; à une seule arche, le pont d'Annet. On décidait en même temps de déplacer le pont de Trilbardou et de le reconstruire à 50 mètres en aval. Ces dispositions ne permettaient la réutilisation des piles et culées que dans le cas du pont de Congis, des ponts de Lagny (route départementale) et de Mary. Mais les supports ne permettaient pas d'accepter les poussées qu'auraient occasionnées des ouvrages plus larges, plus surbaissés pour augmenter le gabarit de navigation, et susceptibles de recevoir des surcharges plus considérables. On a donc été amené à envisager à ces trois endroits, des ponts ne donnant pas de poussées et par suite à poutres droites. A Congis, on a exécuté un pont bow-string : cette solution envisagée un moment à Lagny était inadmissible pour un passage situé au milieu de l'agglomération, il y avait d'ailleurs intérêt à

(1) La réparation du pont de Trilport a fait l'objet d'un article de M. WENDER dans le numéro des Annales, 1916, fasc. 2, page 225.

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