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riens eux-mêmes sous le joug de lois sévères dignes du moyen âge, telles que celle qui défend à tous sujets suédois, sous peine d'une amende de 10 thalers, d'assister à l'office divin dans un autre temple que le leur. Comme si ce régime ne suffisait pas à la sécurité de la religion d'État, la Diète rétablit cette année une loj suivant laquelle tout individu riche ou pauvre, jeune ou vieux, en un mot, tout suédois de tout âge, de tout sexe et de toute condition, passerait tous les ans un examen sur le catéchisme. En outre, la Diète rejeta la proposition de permettre aux luthériens eux-mêmes de se réunir hors le temps des offices, dans des maisons particulières pour y lire la Bible, et cependant cette fa-, culté n'était demandée qu'à la condition que le maître de la maison répondrait 1o de l'ordre; 2o qu'aucun discours ne serait prononcé; 3° qu'aucune erreur ne serait répandne; 4o que la réunion se ferait sous la surveillance du pasteur et du syndic de l'église, avec l'obligation de poursuivre les contraventions à la loi.

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Une proposition timide en faveur de la liberté des cultes fut rejetée par les Etats, comme il était déjà arrivé en 1844 et en 1848, et trois Etats, la noblesse le clergé et les paysans, repoussèrent, à une immense majorité, la demande d'autoriser le gouvernement à confier exceptionnellement quelques chaires des universités à des célébrités étrangères ou même à des professeurs non luthériens, de peur que des catholiques ne pussent s'y glisser et y trouver l'occasion de faire des prosélytes.

On le sait, au reste, la qualité de luthérien est la condition nécessaire d'admissibilité aux fonctions publiques, et l'abandon de la religion d'Etat entraîne la perte des droits civils et la peine du bannissement. La moindre accusation de prosélytisme entraîne, pour les représentants du culte catholique, des procès ruineux. Le curé de la paroisse de Stockholm et la directrice de l'école catholique eurent à subir, cette année, une persécution de ce genre, et on vit le journalisme libéral joindre ses excitations à celles des persécuteurs, malgré l'absence évidente de preuves. Et cependant le § 15 de la Constitution de 1809 dit formellement que « le roi ne doit forcer la conscience de personne ni permettre qu'elle soit forcée, mais maintenir chacun

dans le libre exercice de sa religion aussi longtemps qu'il ne trouble point le repos public ou ne cause point de scandale. » Malgré ces déclarations si formelles du pacte fondamental, malgré l'incontestable esprit de légalité qui anime les suédois, la liberté de conscience est restée lettre morte, et l'intolérance luthérienne a triomphé de la Constitution elle-même. Ce n'est que depuis 1781 que les catholiques sont autorisés à s'établir en Suède, et on voit quelle condition leur y est faite aussi leur nombre ne s'élève-t-il pas à 2,000, parmi lesquels on compte à peine quelques nationaux.

La condition des israélites est à peine meilleure. Il n'y a qu'un demi siècle qu'il ont obtenu l'autorisation de s'établir en Suède, encore ne peuvent-il résider que dans quatre villes: Stockholm, Carlskrona, Norköping et Gätteborg. Le mouvement réformiste, commencé en 1847, leur avait fait espérer une émancipation prochaine mais la proposition de leur concéder des droits civils ne fut, en 1848, appuyée que par la bourgeoisie. En Norvège, ce n'est qu'en 1851 que le storthing a autorisé les israélites à s'établir dans le pays.

Quelques mots maintenant sur le développement matériel du

royaume.

D'après les éléments transmis au commencement de l'année, par les gouverneurs civils des provinces au ministère de l'intérieur, la population totale du royaume de Suède pouvait être évaluée à 3 millions 533,200 individus, dont 1 million 842,400 hommes, et 1 million 690,800 femmes. Le 1er janvier 1846, selon le recensement fait à cette époque, la population de la Suède se composait de 3 millions 316,902 personnes, de sorte que pendant les cinq dernières années, elle s'était augmentée de 216,298 individus, ce qui forme 6 pour cent, ou 1 et 1/5 pour cent par an.

La navigation et l'agriculture sont les deux principales industries de ce petit peuple quia su triompher par son activité et par son énergie, des difficultés naturelles que lui oppose un climat rigoureux.

La production agricole a fait en Suède des progrès remarquables pendant le dernier quart de siècle : elle a doublé. Aujour

d'hui, la Suéde exporte des céréales et des pommes de terre. La production générale peut être évaluée à 20 millions de

tonnes.

Les autres éléments d'exportation sont le fer et le bois. Les tarifs libéraux récemment adoptés en Angleterre favorisaient les progrès de ce commerce tout spécial. Déjà il était possible d'apprécier l'influenne de la nouvelle législation anglaise de 1850. De 5,000 lasts environ de 2,418 kilogrammes, en 1848, les transports sous pavillon suédois, dans les ports de la GrandeBretagne, s'étaient élevés, dès 1851, à 18,654 lasts. Le mouvement d'ensemble de la marine marchande de Suède s'effectue au moyen de 2,744 navires jaugeant 282,457 tonneaux, sans compter cinquante navires à vapeur environ, d'une force totale de 2,500 chevaux.

La Norvége, qui, en commerce comme en politique, forme un royaume distinct, voit chaque année s'augmenter sa prospérité et son activité commerciale. Elle est, depuis 1814, celui de tous les États de l'Europe qui marche le plus rapidement dans uhe voie d'agrandissement commercial; véritables rouliers des mers du nord, ses navires couvrent maintenant tous les grands affluents du pas de Calais, et c'est un exemple bien frappant de ce que peut faire pour la richesse d'un pays le commerce des mers. Il serait donc très-important pour le commerce français de fréquenter davantage ces ports, trop peu connus de notre marine.

Stavanger, qui a une population de 12,000 âmes, est une ville riche, où les besoins de luxe commencent à se faire sentir. Les vins de France, les soieries, les draps, les articles de Paris y sont très-appréciés; mais tous ces objets arrivent par navires norvégiens, et, pour la plupart, des entrepôts de Hambourg. Il serait facile à notre marine marchande de deposséder Hambourg de l'avantage dont jouissent les entrepôts de cette ville, d'envoyer nos marchandises françaises dans tout le nord. Le Danemark, lors de la guerre du Slesvig et du blocus de l'Elbe, ne pouvait recevoir des magasins de Hambourg les marchandises qu'il consomme habituellement; ces objets lui arrivaient alors directement d'Angleterre, et les deux pays y gagnaient. Pourquoi n'en serait-il

pas de même pour les produits français? C'est ce que le commerce norvégien appelle de tous ses vœux, et ce qu'il serait trèsfacile de faire au moins pour nos vins et nos esprits, pour nos sèls de Cette, si rêcherchés en Norvége, pour les salaisons de choix, etc., etc., car il y aurait dés retours en rogue dont nous recevons de Berghen, tous les ans, par navires norvégiens, dé 22,000 à 23,000 barils, pesant 150 kilogrammes chacun, soit le chargement de quinze à vingt petits navires, qui pourraient aussi prendre des planches et des bois de construction.

Le mouvement général du commerce norvégien n'avait pas été de moins de 150 millions, en 1850, dont 57 millions à l'importation et 73 à l'exportation. La marine marchandé de ce pays possédait, en 1831, 5,700 navires environ, jaugeant ensemble plus de 500,000 tonneaux et montés par près de 20,000 hommes d'équipage.

Lé commerce intérieur du Royaume-Uni possédera bientôt un nouvel instrument d'activité et de richesse. Sur le vote de la diête, autorisant le gouvernement à garantir 3 pour cent d'in térêt à la compagnie qui se chargerait de construire un chemin de fer du lac Molar au lac Wener, une compagnie anglo-suedoise, représentée par M. le comte Rosen, obtint, le 16 novembre, une concession de quarante ans. La compagnie concessionnaire avait déjà réuni un capital souscrit de 5 millions de francs êt déposé un cautionnemeut de 400,000 francs. Les études étaient terminées. En Norvége, la ligne de Christiania à Micesén, d'enViron 50 milles, était en voie de constructión. Déjà le tronçon le plus difficile, entre Christiania et le fleuve Nitte, était présque achevé, et le chemin tout entier pourrait sans doute être livré à la circulation vers la fin de l'année 1853.

Les transports réguliers par paquebots ne restent pas en arrière dans ce mouvement général. Une société de capitalistes s'est formée à Stockholm en vue de créer, entre Hull et Saint-Petersbourg, des services réguliers de bateaux à vapeur qui passèront par le canal de Gothie qui joint le Cattegat au golfe de Bothnié.

La situation financière de la Suède et de la Norvége, sans être entièrement satisfaisante, ne saurait donner d'inquiétudes. Pour

la Suède, dans le projet du comité des finances (mars 1851), les recettes ordinaires avaient été évaluées à 4,742,580 écus species; les recettes extraordinaires à 6,252,000, au total, 10,974, 580. Les dépenses montant à 12,229,460, le déficit s'élevait à 1,254, 880.

Pour la Norvége, le budget du 1er juillet 1851 au 1er juillet 1854 évaluait les dépenses annuelles à 5,200,000 écus species. Cette somme serait couverte par 2,000,000 produit des douanes; par 1,000,000, produit d'autres recettes, et par 170,000 écus species de la réserve de la caisse de l'État.

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