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Le viel Chateau et partie du pont de Corbeil pont de Corbeil veu du cofte de Seinemont.

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e privil du Roy

Lu Roy

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plomate italien, aussi érudit qu'autorisé, qui assista de sa personne à une partie de ce siège de 1590, dont le Jésuite Dondini nous retracera les détails et les sanglantes horreurs.

<< La situation de Corbeil est remarquable; cette ville, assise sur la rive gauche de la Seine, est entourée de bonnes murailles qui lui donnent la forme d'un triangle dont, au levant, la Seine fait l'un des côtés. Au midi elle est défendue seulement par la muraille et ses fossés. Au couchant, la rivière d'Etampes, défense naturelle, forme le troisième côté et se joint ensuite à la Seine, en faisant avec ce fleuve un angle tourné vers le Nord. On peut dire, en quelque sorte, que cette ville ressemble à une île, les deux rivières se communiquant encore par le fossé du Midi.

<<< Sur la rive droite sont des coteaux couverts de vignes, et entre ceux-ci et le fleuve s'étend le faubourg où logeait le duc de Parme avec une partie de son armée (1). Un pont réunit les deux rives de la Seine et fait communiquer le faubourg avec la ville. A la tête de ce pont, du côté du faubourg, s'élève le château, un peu au-dessous duquel se trouve, sur le pont même, une antique tour ronde, en pierres, aussi grosse que forte, et à moitié remplie de terre. On l'appelle la Tour de César (2). Elle était défendue par une quarantaine de soldats et, bien que le château fût déjà en notre pouvoir, elle tenait encore, parce que l'ennemi avait coupé le pont (3) ».

Le Corbeil d'aujourd'hui ressemble bien peu à celui dont Pigafetta vient de nous donner la description fidèle; la situation est toujours la même, aussi pittoresque qu'autrefois, mais grâce à la disparition de son enceinte et au calme relatif des derniers siècles, aidée aussi par les nombreuses industries qui sont venus s'y établir, cette jolie petite ville a pu prendre son essor et acquérir un assez grand développement

Solidaire des grands événements parisiens, elle a ressenti bien des chocs et subi bien des sièges; celui de 1590, œuvre de la Ligue, fut certainement l'événement le plus grave et le plus sanglant auquel la pauvre cité ait assisté depuis qu'elle existe.

(1) Le duc de Parme s'était logé dans la maison du Tremblay, au faubourg SaintJacques; il occupait en outre le château du Val-Coquatrix, à Saint-Germain-le-vieuxCorbeil, qu'il incendia au moment de le quitter (Doc. inéd. provenant d'archives privées). (2) De La BarrE, dans ses Antiquitez de la ville, comté et châtelenie de Corbeil (Paris, 1647), donne à cette tour le nom de « tour du Hourdy ».

(3) Relatione dell' assedio di Parigi col dissegno di quella citta e de luoghi circonvicini, di Filippo Pigafetta. Rome, 1591. Trad. de A. Dufour, Paris, 1875, p. 102.

On sait ce que fut la Ligue ou Sainte-Union, et comment ses chefs voulaient utiliser cette faction au profit de leur ambition personnelle. Les Guise en étaient l'âme, mais après leur fin tragique à Blois, en 1588, le duc de Mayenne, leur frère, en prit la direction, avec l'appui de Philippe II, roi d'Espagne, qui avait pour sa fille des prétentions sur la couronne de France.

Après la mort d'Henri III, assassiné à Saint-Cloud en 1589 par Jacques Clément, Henri de Bourbon, qui fut plus tard Henri IV, et qui n'était alors que roi de Navarre, se trouva l'héritier du trône, mais comme il appartenait à la religion réformée, la Ligue refusa de le reconnaître et proclama roi de France, à sa place, sous le nom de Charles X, le cardinal Charles de Bourbon, son oncle. Ce prince était alors enfermé, depuis 1589, dans le château de Fontenay-le-Comte, en Vendée, où il mourut le 8 mai 1590, pendant le siège de Paris. Il ne fut donc roi que nominalement, mais néanmoins la justice était rendue en son nom et la monnaie frappée à son effigie, ce qui se continua longtemps, même après sa mort, car on a des monnaies de lui jusqu'à la date de 1597.

Le jeune roi de Navarre, qui tenait à ses droits, rassembla ses partisans et forma une armée, à l'aide de laquelle il battit le duc de Mayenne, à Arques d'abord, le 21 septembre 1589, puis à Ivry, le 14 mars 1590. Cette dernière victoire lui ouvrit le chemin de la capitale, devant laquelle il vint mettre le siège le 25 avril suivant. Mais son armée n'était pas assez puissante pour prendre Paris par un coup de force; d'ailleurs la ville était fortifiée et bien défendue; il résolut donc de s'en emparer par la famine, en interceptant les vivres qui arrivaient, pour la plus grande partie, par la Seine et la Marne.

Le Béarnais, comme on l'appelait alors, s'était déjà assuré, dans ce but, de la ville de Corbeil, qui commandait le cours de la Seine eu amont de Paris. Il y vint le 4 avril 1590 (1) et se logea à la commanderie de Saint-Jehan-en-l'Isle, où le prévôt Eustache Gilbert, accompagné des échevins et des notables, alla lui présenter les clefs de la ville en implorant sa protection. De la Barre, l'historien de Corbeil et prévôt de cette ville de 1607 à 1624, raconte ainsi cette entrevue :

(1) Les historiens ne sont pas d'accord sur cette date, mais on doit la fixer définitivement au 4 avril. Il existe, en effet, dans les archives de la ville de Corbeil, une charte signée Henry (Henri IV) et datée du camp de Corbeil, le 4° jour d'avril 1590.

« Le Roy les receut de bon visage et leur donna de bonnes paroles, avec espérance d'estre traittez favorablement ; il leur commanda d'aller promptement faire restablir les ponts et chaussées des advenües de la ville, afin que son armée et l'attirail de ses canons et bagage y peussent passer seurement, ce qui fut accomply en toute diligence, et en peu d'heures le tout fut mis en ordre ; et le clergé avec la croix et bannière, suivis des Officiers, Eschevins, avec plusieurs habitans, furent recevoir le Roy à l'entrée de la ville, où il les asseura derechef de sa bonne volonté à la conservation de leur Religion, de leurs personnes et biens et tournant la tête vers Gilbert, il lui dit : Servez moy aussi bien que vous avez fait la Ligue et je vous en récompenseray mieux qu'ils n'ont pas fait » (1).

Maître de Corbeil et du cours supérieur de la Seine, le Roi en partit pour aller prendre Lagny et tenir de ce côté le cours de la Marne. En quittant Corbeil, Henri y avait laissé une garnison commandée par le capitaine Rigaut, homme de cœur et d'énergie qui lui était dévoué et qui lui avait promis de défendre la ville de tout son pouvoir et de mourir plutôt que de se rendre.

Nous passons sur les événements du siège de Paris qui dura du 25 avril au 30 août et dont les horreurs furent alors comparées à celles du siège de Jérusalem par les Romains; il y eut peu de faits. de guerre, mais en revanche la famine y fut épouvantable et une partie de la population y mourut de faim (2).

La ville était à toute extrémité et ne pouvait tarder à ouvrir ses portes, lorsque l'armée de secours envoyée par Philippe II et commandée par Alexandre Farnèse, duc de Parme (3), à laquelle le duc de Mayenne, à la tête de ses troupes, était allé se joindre à Meaux, vint forcer Henri IV à lever le siège de Paris et à s'éloigner de cette ville.

(1) Antiquitez de Corbeil, p. 257.

(2) Cf. Relation du siège de Paris, par Pigafetta. Trad. de A. Dufour. Cf. aussi : Discours brief et véritable des choses plus notables arrivées au siège mémorable de la renommée ville de Paris....., par Pierre Corneio, ligueur. Paris, 1590.

(3) Alexandre Farnèse, duc de Parme et de Plaisance, était fils d'Octave Farnèse, duc de Parme, et de Marguerite d'Autriche, fille naturelle de Charles-Quint. Dévoué à Philippe II, il fit rentrer dans le devoir les Pays-Bas révoltés contre ce prince, et ne parut jamais dans son duché de Parme. Le roi d'Espagne l'envoya en France pour soutenir la Ligue; après de grands succès, il fut blessé devant Caudebec, en mai 1592, et alla mourir à Arras, le 2 décembre de la même année. Suivant sa volonté, son corps, revêtu d'un costume de capucin, fut transporté en grande pompe à Parme et inhumé chez les capucins de cette ville.

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