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« Une contrée a-t-elle des bois trop étendus, est-elle environnée d'eaux stagnantes et de marais infects; les lois n'ont qu'à favoriser l'agriculture et la population, et bientôt on verra les forêts abattues et les marais desséchés les eaux ne seront plus arrêtées dans leurs cours, et l'âpreté du climat diminuera par la suppression des causes qui concouraient à le rendre inhabitable. Ce n'est point là une spéculation vaine et abstraite : les deux hémisphères nous en fournissent un grand nombre de preuves. L'histoire des révolutions

de doute: Il n'y a peut-être pas de climat sur la terre où l'on ne pût engager au travail des hommes libres; parce que les lois étaient mauvaises on a trouvé des hommes paresseux. (Ibid. liv. xv, chap. viii). Il a donc pensé que sous les climats les plus décidés, on pouvait corriger ce qu'ils ont de mauvais, par de bonnes lois.

«

Lorsque cet auteur a recherché les raisons des coutumes et des lois, il en a trouvé quelques-unes dans la nature du climat; cette opinion ne saurait être contredite. Les lois ont été faites par le consentement unanime des nations, ou elles leur ont été données par des législateurs. Pourra-t-on croire qu'un peuple qui se trouve accablé par le poids de la chaleur, fasse des lois qui l'obligent au travail? Elles favoriseront la paresse lorsqu'il

de notre globe offre des milliers d'exemples de changemens opérés dans les climats de plusieurs contrées, par les progrès ou la décadence de la population et de l'industrie des peuples qui les ont habités. La douceur du climat de l'Italie disparut quelque temps après que les barbares du Nord furent venus la dévaster par leurs mœurs et leurs lois, autant que par leurs armes. La population et l'industrie, protégées en Hollande par les lois et par la liberté, ont adouci le climat rigoureux des anciens Bataves. Les mêmes causes ont

regardera l'inaction comme le plus heureux des états. Si le législateur ne se rencontre pas un de ces génies rares qui aperçoivent le bien et le vrai au travers des voiles les plus épais, il ne pensera pas, en sentant sa faiblesse et sa lassitude, qu'elles peuvent être vaincues par des efforts dont il se croit incapable, et qui lui répugnent. Les lois se ressentent partout du caractère, des caprices, du préjugé de celui qui les a faites. Ainsi c'est avoir donné le climat pour cause efficiente dans quelques occasions, et jamais comme cause nécessaire. Si l'on voulait séparer cette distinction de quelques termes répandus dans l'Esprit des Lois, il faudrait encore l'accuser d'être tombé en contradiction avec lui-même.» (Abrégé de la République de Bodin, tom. 11, liv. v, chap. xv, pag. 297 et 298.)

produit des effets semblables dans une grande partie de l'Allemagne, en Angleterre, et dans la Pensilvanie. Les hommes qui habitent cette dernière contrée, ont su se dérober, avec autant de gloire, aux rigueurs de leur climat, qu'aux oppressions de leur métropole. Des lois sages peuvent donc quelquefois adoucir l'âpreté du climat; elles peuvent toujours en corriger les effets, lorsqu'ils sont dangereux: avec quelle étonnante facilité n'en pourrontelles pas profiter lorsqu'ils seront utiles....!» (a).

-«Le Gouvernement, dit Bentham, influe de la même manière que l'éducation. Le magistrat peut être considéré comme un instituteur national; et même, sous un Gouvernement prévoyant et attentif, le précepteur particulier, le père lui-même, n'est, pour ainsi dire, que le député, le substitut du magistrat, avec cette différence que l'autorité du premier a son terme, et que celle du dernier se prolonge sur toute la vie. L'influence de cette cause est immense, elle s'étend presque à tout,

(a) Science de la Législ., tom. 1, liv. 1, ch. x1, pag. 230, 233, 246 et suiv.

ou plutôt elle embrasse tout: car la santé même peut en dépendre à plusieurs égards, en vertu de la police, de l'abondance, du soin d'écarter les causes nuisibles. La manière de diriger l'éducation, de disposer des emplois, des récompenses, des peines, déterminera les qualités physiques et morales d'un peuple.

«< Sous un Gouvernement bien constitué, on verra généralement que les hommes seront plus gouvernés par l'honneur, et que l'honneur sera placé dans des actions plus conformes à l'utilité publique. Les sentimens religieux seront plus exempts de fanatisme et d'intolérance, plus libres de superstition et de respect servile il se formera un sentiment commun de patriotisme. Les hommes s'apercevront de l'existence d'un intérêt national. Les factions affaiblies auront de la peine à recouvrer leurs anciens signaux de ralliement. Les affections populaires seront dirigées vers le magistrat plutôt que vers des chefs de parti, et vers la patrie entière, préférablement à tout le reste. Les vengeances privées ne se prolongeront pas et ne se communiqueront point : les goûts nationaux se dirigeront vers des dépen

ses utiles, des voyages d'instruction, de perfectionnement, d'agriculture, les sciences, les embellissemens de la campagne; on apercevra même dans les productions de l'esprit humain, une disposition générale à discuter avec calme des questions importantes au bonheur public » (a).

Voyez, dit M. Say dans son savant Traité d'Économie politique, voyez l'Afrique presque entière, l'Arabie, la Perse, cette Asie mineure, autrefois couverte de villes si florissantes, dont, suivant l'expression de M. de Montesquieu, il ne reste de vestiges que dans Strabon on y est pillé par des brigands, par des pachas; la richesse et la population ont fui; et les hommes clair-semés qui restent manquent de tout. Jetez, au contraire, les yeux sur l'Europe occidentale; quoiqu'elle soit fort éloignée d'être aussi florissante qu'elle le devrait, la plupart des États y prospèrent, tout accablés qu'ils sont d'une foule de régle

(a) BENTHAM. Princ. de Lég., tom. 1, ch. 1x, sect. II, § VIII, pag. 68. (Voy. aussi ibid. chap. x. Analyse du bien et du mal politique. Comment ils se répandent dans la société, tom. 1, pag. 86.)

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