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choses, qu'il ne s'agit que des frais de navigation qu'on a pu prévoir et calculer à l'avance, et qui, par conséquent, ne sont point des avaries; que s'il est question de frais extraordinaires, ils sont prévus au no 7 de l'article 211; que s'il s'agit de dépenses ordinaires, il est plus simple de les faire entrer dans le montant du fret; car c'est là qu'est leur place; au surplus, en disposant ainsi, la loi ne fait que confirmer ce qui s'est établi par l'usage; et en effet, jamais on ne dresse des comptes d'avaries pour de pareils articles; mais par le connaissement, on convient d'une somme fixe avec le capitaine.

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· Nous passons à l'article 218 de la loi, qui indique par qui le dommage est payé en cas d'abordage. L'ordonnance avait statué sur deux cas (articles 10 et 11); l'un, quand l'abordage a été fait par la faute de l'un des capitaines ; l'autre, quand il y a doute sur les causes de l'abordage. Il en est un troisième, quand l'abordage est un effet du hasard qu'on ne peut imputer ni à l'intention, ni à la maladresse, ni à la négligence de personne; alors c'est un évènement dont quelqu'un peut souffrir, mais dont nu! ne doit répondre. La loi ajoute en conséquence aux dispositions.de l'ordonnance : en cas d'abordage de navires, si l'évènement a été purement fortuit, le dommage est supporté, sans répétition, par celui des navires qui l'a éprouvé.

Après avoir défini l'avarie en général, après avoir classé les différentes sortes d'avaries, après avoir appliqué à chaque espèce la disposition qui lui est propre, après avoir posé les exceptions, nous sommes arrivés à cette question : une demande pour avarie sera-t-elle toujours recevable? Nous avons considéré que la demande ne devait point être admise, quand, pour jouir de son

effet, il faudrait dépenser en frais autant ou plus que le dommage qu'on obtiendrait, parceque alors il n'y avait d'intérêt pour personne, soit à demander, soit à défendre. Cependant nous n'établissons ce principe que dans les cas où le silence des parties n'aurait pas fait connaître leurs volontés.

Tels sont les motifs qui ont déterminé quelques changements et additions au titre des avaries de l'ordonnance. La loi n'en présente aucun d'essentiel au titre du jet et de la contribution, et à celui des fins de non-recevoir. A l'égard de celui des prescriptions, nous y avons distingué l'action en délaissement de celle dérivant d'un contrat à la grosse, ou d'une police d'assurance.

L'action en délaissement est prescrite dans le terme de six mois, à partir du jour de la réception de la nouvelle de la perte, suivant l'article 184, dont l'un des orateurs qui nous a précédé à cette tribune vous a fait connaître les motifs.

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En ce qui concerne l'action dérivant d'un contrat à la grosse et d'une police d'assurance, elle est prescrite après cinq ans, à compter de la date du contrat. Le commerce réclamait ce changement à l'article 48 de l'ordonnance, dont l'exécution a été accompagnée d'un grand nombre de procès, parcequ'il établissait une grande diversité de prescriptions.

Mais si des prescriptions doivent être établics contre les négociants qui négligent d'user de leurs droits, il était aussi de la justice de dire qu'elles ne pourront avoir lien quand il y aura eu cédule, obligation, arrêté de compte ou interpellation judiciaire, et c'est ce que veut l'article 245 de la loi.

Messieurs, le livre dont nous venons de vous faire

merce.

connaître les dispositions, complète le Code de Com- Comme les ordonnances de Louis XIV qu'il va remplacer, il s'est envirouné des trophées de la victoire; il prend sa place parmi les lois; il vient régler les transactions commerciales d'un peuple dont les rapports de tout genre se trouvent étendus par les armes, par les négociations politiques, et plus encore par cette influence qu'un grand homme exerce sur les nations voisines de son Empire, surtout quand les unes l'ont voulu pour législateur, quand les autres l'ont proclamé leur protecteur.

Par suite de cette augmentation de rapports commerciaux entre le peuple français et les autres peuples de l'Europe, l'action du Code ne sera pas renfermée dans les limites de la France; il peut même devenir une loi commune aux peuples que leur intérêt place dans notre système de fédération et d'alliance. Notre auguste Empereur l'avait ainsi prévu, quand il a demandé que les dispositions du Code de Commerce fussent, le plus possible, en harmonie avec les autres législations commerciales de l'Europe; quand il a demandé qu'on interrogeât tous les intérêts; quand, après avoir confié une première rédaction du Code à des hommes habiles, il l'a fait discuter dans les cours de cassation et d'appel, dans les tribunaux, dans les chambres et dans les conseils de commerce. Nous devons le dire, cette discussion a été honorable pour ceux qui y ont pris part; ils ont été dirigés par le seul sentiment d'améliorer un travail déjà très recommandable en lui-même.

Les résultats de cette discussion lumineuse formaient une collection immense; recueillie par les ministres de la justice et de l'intérieur, il fallait analyser toutes les observations qu'elle contenait; il fallait les comparer; il fallait

profiter de ce faisceau de lumière pour faire à la première rédaction du Code tous les changements que réclamaient les besoins du commerce et l'intérêt national. La commission instituée en l'an 9, ayant rempli sa tâche, se regardait comme dissoute; trois des membres de cette commission, MM. Gorneau, Legras et Vital-Roux, jurisconsultes et négociants éclairés, pleins de zèle, mais surtout forts de leur dévouement à l'Empereur, sollicitant des ministres de Sa Majesté la permission d'entreprendre, à leurs frais, la révision du Code; ces ministres les y autorisent; ils font plus, ils les y encouragent. Bientôt, ils se livrent avec ardeur à ce nouveau travail; ils accroissent leurs inmières de celles de MM. Vignon et Boursier, de celles qu'ils trouvent dans les auteurs français, dans la législation des autres peuples de l'Europe; ils s'établissent juges impartiaux d'un ouvrage auquel ils avaient pris tant de part; ils mettent ainsi Sa Majesté à même d'ordonner, en l'an 11, l'impression du Code de Commerce revisé, lequel a servi de base aux méditations du ministre de l'intérieur, aux discussions du conseil d'état.

Si le sentiment de la reconnaissance nous a déterminés à vous désigner ceux qui nous ont plus particulièrement aidés à répondre au vœu de Sa Majesté et du commerce, qu'il nous soit permis d'exprimer le même sentiment à ceux d'entre vous, Messieurs, qui ont éclairé de leurs lumières les cours, les tribunaux et la chambre de commerce dont ils sont membres.

C'est cette réunion de lumières qui a produit le Code du Commerce; il n'est l'ouvrage de personne en particulier c'est une sorte de monument national élevé le concours de tous les hommes éclairés de l'Empire.

par

MOTIFS

Du projet de loi contenant le Livre III, sur les Faillites et Banqueroutes.

PRÉSENTÉS PAR M. SÉGUR, Conseiller d'État.
Séance du 3 septembre.

MESSIEURS,

L'Empereur a rétabli et porté au plus haut degré la réputation de nos armes; il a fait renaître la justice dans nos lois, l'ordre dans notre administration; il veut plus encore, il veut ressusciter la morale publique, parcequ'il sait que sans elle les nations qui jettent le plus d'éclat n'ont point de grandeur réelle, de puissance solide, de prospérité durable : nous avons assez de gloire, il nous faut des mœurs.

C'est dans cette vue qu'il nous charge de vous présenter une loi sévère : son titre suffit pour vous faire connaître son importance; c'est une loi sur les faillites et les banqueroutes.

Malheureusement, cette loi répressive est devenue un besoin public; l'indignation générale l'appelle, le vœu universel l'attend, tout ce que la France renferme de né→ gociants honnêtes la réclament; et peut-être, pour la première fois, on serait tenté de croire que la vigilance infatigable de notre souverain, qui, jusqu'à présent, a prévenu tous les vœux du peuple français, n'a fait aujour d'hui qu'y répondre.

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