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fit des locataires. D'après l'art. 1733 du Code civil, chaque locataire est, de plein droit, responsable, envers le propriétaire, de l'incendie qui a commencé dans son habitation. Il résulte de cette responsabilité un risque véritable, contre lequel les locataires se font assurer. Les assureurs s'engagent envers eux à les garantir des suites de cette responsabilité, soit en payant au propriétaire l'indemnité qu'il aurait droit d'exiger de son locataire, soit en renonçant, vis-à-vis des locataires assurés, à la subrogation dans le recours que le propriétaire aurait eu contre eux, et qu'il est tenu de céder aux assureurs lorsqu'il est lui-même assuré. D'après le principe qui ne permet pas que l'on se fasse assurer contre les suites de ses propres fautes, il semble que l'on ne devrait point déclarer valable l'assurance stipulée par un locataire contre le risque résultant de sa propre responsabilité. Néanmoins, si l'on fait attention que la responsabilité du locataire est une responsabilité légale qui a lieu contre lui de plein droit, et sans qu'on ait besoin de prouver aucune faute de sa part, on reconnaît que le risque attaché à cette responsabilité, résultant du seul fait de la location, indépendamment de toute faute de la part du locataire, est un risque susceptible d'être assuré. Seulement, l'assurance contractée de la sorte envers le locataire doit cesser d'avoir son effet dans le cas où il est bien prouvé, en fait, que l'incendie provient de sa faute. Le propriétaire luimême perdrait ses droits à l'assurance dans le cas où il

serait prouvé qu'il a causé l'incendie par sa faute. La

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condition du locataire ne doit pas être plus avantageuse, mais elle doit être la même que celle du propriétaire vis-à-vis des assureurs. L'un comme l'autre a droit au bénéfice de l'assurance, si l'on ne prouve point qu'il est en faute.

48. Nous avons vu quelles sont les choses, et les droits inhérens à ces choses, qui peuvent être assurés contre l'incendie, venons maintenant à l'assurance des récoltes.

Lorsque l'héritage dont il s'agit d'assurer les récoltes est soumis à un usufruit, l'assurance ne peut être stipulée qu'au profit de l'usufruitier, puisque cet usufruitier possédant, exclusivement au nu-propriétaire, le droit réel de jouissance du fonds, dont ces fruits sont les produits, en supporte seul la perte.

On verra plus tard si l'assurance stipulée au profit de l'usufruitier appartient au propriétaire dans le cas où l'usufruit a cessé d'exister avant le sinistre.

49. Mais le fermier ne peut-il pas stipuler une assurance à son profit pour le cas où les récoltes de l'héritage à lui affermé seraient détruites par la gelée ou la grêle.

Le fermier ne pourrait faire assurer les récoltes à son profit, qu'autant qu'elles seraient à ses risques. Car, nous le répétons, on ne peut faire assurer que ce que l'on court risque de perdre. Or, en général, les fruits encore pendans sont aux risques du propriétaire. C'est lui qui en supporte la perte, au moyen de la remise qu'il est obligé de faire au fermier des loyers représen

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tatifs de la récolte perdue. Ce n'est qu'après que les fruits sont recueillis qu'ils appartiennent au fermier, et sont à ses risques : aussi n'a-t-il droit à aucune remise pour la perte qui arrive après que les fruits sont séparés de la terre. (Art. 1769, 1770, 1771 du Code civil, et Pothier, Traité du Louage n.o 155,in princ.).

Il s'agit ici d'une perte qui arrive avant que les fruits soient séparés de la terre. Il semble donc que cette perte regarde exclusivement le propriétaire, et que l'assurance n'en peut être stipulée qu'à son profit. Cependant on doit remarquer que les articles 1769 et 1770 du Code civil mettent aux risques du fermier, sans remise de la part du propriétaire, la perte qui ne s'élèverait point à la valeur de la moitié d'une récolte. Le fermier peut donc valablement se faire assurer contre cette perte.

Le fermier pourrait même se faire assurer contre la perte totale de la récolte qui serait à ses risques, dans le cas où il se serait chargé des cas fortuits par une clause de son bail, telle que celle qui est prévue par l'art. 1772 du Code civil.

50. Le principe qu'on ne peut faire assurer que ce qu'on court risque de perdre étant un principe qui tient à l'essence même du contrat, est applicable aux assurances sur la vie, comme à toutes les autres espèces d'assurances. Une assurance sur la vie d'un tiers, faite sans autre intérêt que celui de gagner une somme à la mort de ce tiers, ne serait qu'une gageure sur l'époque incertaine de sa mort. Pour être valable, une pareille

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assurance doit donc avoir pour objet quelque chose que l'on risque de perdre, arrivant le décès de ce tiers. C'est pour maintenir l'observation de ce principe, que le statut établi chez les Anglais sous le règne de Georges III, déclare nulle toute assurance sur la vie d'une personne, stipulée au profit d'un individu qui n'aurait point d'intérêt à la durée de la vie sur laquelle l'assurance est faite, et que le même statut défend de payer et de recevoir une assurance supérieure au montant ou à la valeur de l'intérêt de l'assuré.·

51. Lorsqu'on dit que pour stipuler valablement une assurance à son profit, il faut avoir intérêt à la durée de la vie sur laquelle on fait assurer, on fait assurer, on n'entend point parler d'un intérêt de pure affection qui ne peut s'apprécier ni se compenser en argent. L'assurance ne peut avoir pour objet que des choses ou valeurs estimables à prix d'argent, suivant les termes de l'art. 334 du Code de commerce.

Celui qui veut faire assurer une somme à son profit sur la vie d'une autre personne, doit donc justifier qu'il a un intérêt pécuniaire à la durée de la vie de cette personne, en telle sorte que l'assurance soit pour le stipulant l'indemnité de la perte que la mort de cette personne peut lui occasionner. Un créancier auquel son débiteur ne peut offrir que des sûretés attachées à sa personne, telles que des salaires, des traitemens, des pensions viagères, a précisément un intérêt susceptible de servir de base à une assurance sur la vie. Il peut donc valablement se faire assurer le montant de

sa créance pour le cas où son débiteur viendrait à décéder. On peut même en dire autant de tout créancier qui n'a d'autre sûreté de son remboursement que l'obligation personnelle de son débiteur, car cette obligation peut devenir sans effet, dans le cas où le débiteur viendrait à mourir sans laisser aucuns biens. Si l'on aperçoit quelqu'inconvénient dans l'hypothèse contraire, c'est-à-dire, dans le cas où le créancier pourrait se faire rembourser par les héritiers de son débiteur la dette dont le paiement lui est garanti par la compagnie d'assurance, cet inconvénient disparaît lorsque l'on considère que l'assuré est obligé de subroger l'assureur dans tous ses droits contre les héritiers de son débiteur, et de lui transmettre à cet effet tous les titres qu'il peut avoir contre ceux-ci. Si le créancier avait reçu son paiement du débiteur ou de ses héritiers, il serait non recevable à réclamer l'assurance qui n'est qu'une indemnité, puisqu'il ne perdrait rien.

Mais un créancier, auquel son débiteur aurait donné une hypothèque ou toute autre sûreté équivalente, ne courant point le risque de perdre sa créance à la mort de son débiteur, ne pourrait la faire assurer sur la vie de celui-ci. Il n'est pas probable, au reste, que l'on ait recours dans ce cas à l'assurance, et que l'on cherche à obtenir à prix d'argent une sûreté qui serait tout-àfait superflue.

52. Le créancier d'une rente viagère constituée sur la tête d'un tiers, étant menacé de voir sa rente s'éteindre dans le cas où celui sur la tête duquel elle est con

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