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232. La plupart des compagnies d'assurance contre l'incendie, exigent que l'assuré fasse ensuite sans délai devant l'autorité locale, ordinairement devant le juge de paix du canton, une déclaration de l'incendie, de ses circonstances et de ses causes, et des pertes et dommages qu'il a occasionnés. Copie de cette déclaration, certifiée par l'assuré ou par son fondé de pouvoirs, doit être immédiatement transmise aux assureurs. L'exigence de cette déclaration circonstanciée a pour but de faciliter aux assureurs la preuve des faits contraires, qui leur est toujours réservée de plein droit.

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233. L'intervention de l'autorité locale, rapprochée du théâtre de l'évènement, et à portée de recueillir tous les renseignemens propres à éclairer sur ses causes et ses circonstances, offre sans doute les plus grandes garanties à la société pour la recherche des crimes délits ou contraventions qui pourraient avoir causé ou accompagné l'incendie; mais elle garantirait d'une manière plus complète les intérêts respectifs des parties, si l'autorité locale était appelée à vérifier, dans tous les la déclaration de l'assuré. C'est à une vérification de ce genre qu'est due toute la force probante attachée au rapport du capitaine, qui forme, en matière d'assurance maritime, la principale preuve du sinistre (1).

234. Mais un fonctionnaire de l'ordre judiciaire ne peut tenir la mission de faire des actes d'instruction que d'une

tom. III, no. 346; et le Cours de Droit maritime de M. BoulayPaty, tom. IV, pag. 292 et 293.

(1) Voy. art. 242, 244, 246 et 247 du Code de commerce.

loi positive, ou d'un tribunal qui ordonne une voie d'instruction dans le cours d'une instance. Un fonctionnaire de l'ordre administratif ne peut également recevoir de mission que de la loi ou de l'autorité supérieure, dans un but d'intérêt public. Ni l'un ni l'autre ne peuvent recevoir une mission de ce genre, d'une partie privée, dans un but d'intérêt privé.

235. On doit même remarquer que les juges de paix et les maires ne sont chargés par la loi de dresser des procès-verbaux, de recevoir des déclarations de témoins, de faire des visites, et autres actes d'instruction, que dans les cas de flagrant délit, et dans le cas de réquisition d'un chef de maison pour faire constater un crime ou délit commis chez lui (1).

236. Il est vrai que la loi du 24 août 1790, titre II, art. 3, range parmi les objets de police confiés à la vigilance et à l'autorité des corps municipaux (auxquels les maires sont subrogés en cette partie par la loi du 28 pluviôse an VIII), le soin de prévenir par des précautions convenables, et celui de faire cesser par la distribution des secours nécessaires, les accidens et fléaux calamiteux tels que les incendies.

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L'autorité municipale est en outre autorisée par la loi du 22 juillet 1791, titre I., art. 46, à publier de nouveau les lois et réglemens de police; ce qui lui donne la faculté de faire exécuter les anciens réglequi prescrivent des mesures de pure localité

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(1) Art. 49 et 50 du Code d'instruction criminelle.

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pour prévenir les incendies, et de faire appliquer aux contrevenans les peines portées par ces réglemens. C'est ce qui résulte de la combinaison des lois qu'on vient de citer, avec l'art. 11 du Code d'instruction criminelle, par lequel les maires, et, à leur défaut, adjoints de maires, sont chargés de rechercher les contraventions de police.

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237. Mais si, d'après ces dispositions, les maires et adjoints de maires sont chargés de faire des recherches et même de dresser des procès-verbaux dans les cas d'incendie qui présentent des indices de culpabilité, cette mission, qui leur est confiée dans l'intérêt de la sûreté publique, n'a rien de commun avec celle de constater, dans un intérêt privé, les dégâts, pertes ou dommages causés par l'incendie. On ne peut obliger les maires ni les juges de paix à se charger de ce mandat particulier.

238. En Angleterre, les compagnies d'assurances contre l'incendie exigent que l'assuré produise un certificat signé du ministre et des notables de la paroisse, attestant qu'ils savent ou du moins sont sincèrement convaincus que l'assuré a réellement souffert par l'effet d'un incendie fortuit, sans fraude ni dol, la perte ou le dommage qu'il allègue jusqu'à concurrence de la valeur à laquelle il l'estime.

239. En France, il nous paraît impossible d'exiger que l'assuré produise un certificat semblable ou analogue de l'autorité locale; car l'assuré n'aurait aucun moyen de la contraindre à le lui délivrer, et il serait

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tout-à-fait injuste de faire dépendre le droit de l'assuré d'une condition qu'il n'aurait pas le moyen de remplir.

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240. Toutefois, «< il n'est pas douteux que l'assuré <«< ne soit obligé de prouver le sinistre qu'il allègue; » (Émérigon, chap. XIV); « le pacte que l'assureur s'en « tiendra à l'affirmation de l'assuré au sujet du sinistre, «<< est illicite. »

Mais le cas d'incendie étant un des cas où l'on est dispensé d'une preuve littérale à cause de l'impossibilité où l'on se trouve presque toujours de se procurer une semblable preuve, il faut appliquer en matière. d'assurance contre l'incendie, cette doctrine reçue en matière d'assurance maritime, «Que la preuve du sinis<< tre n'a aucune forme nécessaire et de rigueur. H <«< suffit que la perte soit constatée d'une manière capable « de convaincre tout homme raisonnable, sans qu'on ait « besoin de recourir à des formalités extrinsèques qui, << par les circonstances des temps, des lieux et des per<«< sonnes, sont souvent impraticables. » (Émérigon.)

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241. La destruction d'un édifice par l'incendie est un fait notoire et facile à prouver; mais il est beaucoup plus difficile de constater si tels meubles ou telles marchandises qui se trouvaient dans un appartement ou dans un magasin à l'époque de la formation du contrat d'assurance, s'y retrouvaient encore à l'époque de l'incendie, et ont été réellement consumés par cet incendie. La police constate bien leur existence dans les lieux à l'époque du contrat, mais elle ne peut constater leur existence à l'époque du sinistre.

242. L'assuré est donc tenu de faire cette justification par tous les moyens qui sont en son pouvoir, par ses factures, par ses livres, ou lorsque ce moyen lui manque parce qu'il n'est point commerçant, par le témoignage des personnes qui se trouvaient dans le même lieu, enfin par son serment.

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On ne peut donner sur ce point de règles fixes et précises. « En pareil cas, on se contente des preuves qu'il est possible d'avoir.» (Émérigon, chap. XI, sect. 3. Leviores et quæ possunt haberi admittuntur probationes. )

243. Dans les assurances sur la vie, on doit justifier du décès qui constitue l'évènement du risque assuré, par un acte de décès rédigé conformément aux dispositions des articles 78 et suivans du Code civil. Lorsqu'il n'aura pas existé de registres de l'état civil, ou lorsqu'ils seront perdus, la preuve en sera reçue tant par titres que par témoins ; et dans ce cas, le décès pourra être prouvé tant par les titres et papiers de famille que par témoins. (Art. 46 du Code civil.)

244. Il faut bien remarquer que c'est la mort naturelle qu'il s'agit de prouver. Dans les conventions, et surtout dans les conventions aléatoires qui reposent sur l'incertitude de la durée de la vie, les expressions. de vie et de mort s'entendent toujours de la vie et de la mort naturelles. (Art. 1982 du Code civil.)

245. Nous pensons que dans le cas où la personne dont la vie avait été assurée, a disparu sans donner de ses nouvelles, le jugement de déclaration d'absence ne

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