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quatrième et cinquième sessions du concile œcuménique de Constance, qui a toujours été fort religieusement observé dans ce royaume, et qui même a été approuvé et reçu par les souverains Pontifes, et que c'est abuser de ce concile de dire que ce qu'il a défini sur ce sujet regarde seulement le schisme.

Messeigneurs vos commissaires m'ont encore chargé de vous dire que leur avis est qu'il soit dréssé des articles en forme de canons et de décisions, pour être envoyés à tous les prélats du royaume, avec une lettre circulaire qui marque les motifs que vous avez eus d'éclaircir cette matière, et de déclarer vos sentimens sur un sujet si important. Qu'il vous plaise aussi de prier Messeigneurs nos présidens de porter au Roi avec tous Messeigneurs vos commissaires votre délibération, votre lettre circulaire et vos articles, et de supplier Sa Majesté d'en vouloir autoriser l'exécution, par laquelle il soit défendu de rien soutenir de contraire dans toute l'étendue de son royaume, et enjoint aux Universités d'enseigner cette doctrine, et aux bacheliers de la soutenir dans leurs thèses publiques.

Messeigneurs vos commissaires vous supplient encore d'ordonner qu'il soit mis un avertissement à l'endroit de vos mémoires où

se trouvent insérées les harangues de M. le cardinal du Perron, dans lequel il soit marqué que ce qu'a dit ce cardinal de contraire à l'indépendance de l'autorité royale, étoit son sentiment particulier et non pas celui du clergé de France, au nom duquel il parloit.

Il ne me reste plus, Messeigneurs, qu'à vous supplier très-humblement d'avoir la charité d'excuser les fautes que j'ai commises dans ce rapport. J'espère que Messeigneurs vos commissaires, qui parleront après moi, les corrigeront, et je suis assuré que vos lumières suppléeront à tout ce qui y manque.

J'ai pour le Saint-Siége, Messeigneurs, et pour le souverain Pontife, tout le respect et toute la vénération qu'un évêque est obligé d'avoir. J'ai pour la vérité, que je crois chercher sans flatterie, sans intérêt, sans passion, tout l'attachement que doit avoir un chrétien qui soumet et captive son esprit à l'obéissance de la parole de Jésus-Christ; et quand il s'agit de la religion, Dieu me fait la grace d'avoir dans le cœur ce que disoit saint Paul: Si hominibus placerem Christi servus non essem.

DISCOURS.

SUR LES LIBERTÉS DE L'ÉGLISE GALLICANE,

PAR M. L'ABBÉ FLEURY,

PRÊTRE, PRIEUR D'ARGENTAN ET CONFESSEUR DU ROÍ.

L'ÉGLISE

'ÉGLISE Gallicane s'est mieux défendue que les autres du relâchement de la discipline introduite depuis quatre ou cinq cents ans, et a résisté avec plus de force aux entreprises de la cour de Rome. La théologie a été enseignée plus purement dans l'Université de Paris que partout ailleurs; les Italiens même y venoient étudier, et la principale ressource de l'Eglise contre le grand schisme d'Avignon, s'est trouvée dans cette école. Les Rois de France, depuis Clovis, ont été chrétiens catholiques, et plusieurs très-zélés pour la religion. Leur puissance, qui est la plus ancienne et la plus ferme de la chrétienté, les a mis en état de mieux protéger l'Eglise.

Depuis que les Empereurs ont perdu l'Italie, et que les Papes y ont acquis un état temporel qui en fait la meilleure partie, il n'y est point resté de souverain capable de résister à leurs prétentions, et l'intérêt commun de s'avancer à la cour de Rome, a fait embrasser à tous les Italiens les intérêts de cette cour. La

dignité des cardinaux y efface celle des évêques, qui > sont en très-grand nombre et pauvres pour la plupart. Les réguliers y ont le dessus sur le clergé séculier. Il n'y a que les Vénitiens qui se soient mieux défendus des nouveautés.

En Espagne, depuis l'invasion des Maures, les chrétiens ont été long-tems foibles, obligés d'implorer le secours des autres, et de recourir aux Papes pour avoir des croisades et des indulgences, afin d'encourager leurs troupes. Ce n'est que depuis deux cents ans leur puissance est rétablie et réunie, et c'est alors qu'ils ont reçu l'inquisition, et se sont soumis à la plupart des usages modernes.

que

L'Angleterre, avant le schisme d'Henri VIII, étoit soumise au Pape, même pour le temporel; le Denier Saint Pierre y étoit établi dès le tems des premiers Anglais, et Jean-Sans-Terre avoit achevé de se rendre sujet du Pape, en lui faisant hommage de son royaume. Il n'y a point de pays où l'on se soit tant plaiat des exactions de la cour de Rome.

En Allemagne, les Empereurs ont résisté aux entreprises des Papes par d'autres entreprises et par une conduite outrée et mal soutenue. Leur puissance est tombée dans les derniers tems: les ecclésiastiques ont mêlé à leur vraie autorité le faste et la domination séculière la doctrine et les fonctions ecclésiastiques ont été presqu'abandonnées à des réguliers dépendans particulièrement du Pape; et depuis Luther, les catholiques voulant relever l'autorité du Pape, se sont souvent jetés dans les excès contraires. Il en est de même

à proportion de la Pologne. Le christianisme n'y a commencé que vers le tems où les Papes s'accoutumoient à pousser le plus loin leurs prétentions.

Les maximes des Ultramontains que nous rejetons en France, sont les suivantes :

1o. La puissance temporelle est sous-ordonnée à la spirituelle, en sorte que les Rois et les Souverains sont soumis; au moins indirectement, au jugement de l'Eglise, en ce qui regarde leur souveraineté, et peuvent en être privés, s'ils s'en rendent indignes.

2o. Toute l'autorité ecclésiastique réside principalement dans le Pape qui en est la source, en sorte que lui seul tient immédiatement son pouvoir de Dieu, et les évêques le tiennent de lui et ne sont que ses vicaires; c'est lui qui donne l'autorité aux conciles même universels; lui seul a droit de décider les questions de foi, et tous les fidèles doivent se soumettre aveuglément à ses décisions, parce qu'elles sont infaillibles; il peut lui seul faire telles lois ecclésiastiques qu'il lui plaît, et dispenser même sans cause de toutes celles qui sont faites ; il peut disposer absolument de tous les biens ecclésiastiques; il ne rend compte qu'à Dieu de sa conduite; il juge tous les autres, et n'est jugé de personne.

De cette maxime jointe à la première, les Ultramontains concluent que le Pape peut aussi disposer des couronnes, et que toute puissance temporelle ou spirituelle se rapporte à lui seul.

Ces maximes ont été avancées peu-à-peu depuis Grégoire VII qui tenoit le Saint-Siége l'an 1080, et qui soutint le premier que tous les royaumes dépendoient

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