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CHAPITRE XLI.

Renouvellement à Cherson de la maison de commerce fondée en 1782. Motifs de la préférence donnée

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à ce port sur celui d'Odessa.

L'OPINION publique présageait si affirmativement une paix durable à la France, qu'immédiatement après notre traité avec la Porte, je m'occupai à faire revivre mon établissement à Cherson ; je l'unis d'intérêts avec celui que j'avais à Constantinople, en considération de l'utilité qui résulterait, pour eux et pour ma maison de Marseille, de la position intermédiaire du dernier.

Quoique la place d'Odessa fût devenue beaucoup plus commerçante que celle de Cherson, j'avais préféré ce dernier port pour le siége de mon établissement, et je n'avais voulu entretenir qu'un simple facteur à Odessa. La distance de l'une à l'autre ville n'étant que de cent quatre-vingts verstes (quarantecinq lieues environ), espace qu'on peut par

courir dans vingt-quatre heures, l'un des directeurs de l'établissement se rendait à Odessa toutes les fois que des affaires y exigeaient sa présence.

Mes motifs, pour donner la préférence à Cherson, étaient d'abord la connaissance exacte que nous avions du pays, l'ancienneté de nos liaisons avec ses habitans, l'abondance et le bas prix des vivres et du bois, la médiocrité de celui des loyers de maisons et de magasins, le changement survenu dans le climat de cette contrée, qui avait acquis plus de salubrité, mais surtout l'avantage d'acheter les productions de la Russie arrivant à ce port, qui est pour elles un lieu d'entrepôt. Comme ces marchandises ne pouvaient passer à Odessa que sur des alléges, les frais et les risques de leur transport en renchérissaient le prix, de sorte qu'il y avait plus de convenance à les exporter directement de Cherson; ce que rendait praticable le bureau de douane de sortie qu'on a laissé subsister dans ce port.

Le bureau de la douane d'entrée y a été supprimé. Son lazaret ayant été transféré à Odessa, les navires ne peuvent plus faire leur quarantaine à Gloubok et à Cherson; il faut qu'ils s'arrêtent pour cet objet à Odessa, et y

terminent le débarquement de leurs marchandises; elles ne peuvent entrer à Cherson qu'après avoir acquitté les droits à Odessa, et le navire qu'après avoir fait sa quarantaine dans ce port.

Mais, d'un autre côté, Cherson est désigné pour l'un des quatre ports principaux de la Mer-Noire. Il sert de chantier de construction à la marine impériale, et il est le principal chantier de la marine marchande. Il doit ces avantages à sa proximité des pays d'où l'on tire les munitions navales, et à l'économie de leur transport par le Niéper. La construction de ces bâtimens attire et emploie beaucoup d'ouvriers; elle a exigé la présence d'une administration de mårine. Il y a constamment dans cette ville, dont la population s'élève de vingt à vingt-cinq mille ames, beaucoup de troupes de terre et de mer. Toutes les affaires civiles et militaires de Cherson ressortissent en premier lieu à un gouverneur particulier établi dans cette ville, qui en rend compte an gouverneur - général résidant à Odessa.

Les plaines immenses et fertiles qui avoisinent cette cité, produisent une grande quantité de blé et de légumes; elles nourrissent

de nombreux troupeaux de bœufs et de moutons; ce qui procure au commerce, du suif, de la laine et des peaux. Le bas prix des bœufs permet d'en saler la viande pour l'exporter à l'étranger.

Il se tient deux foires à Cherson, l'une en mai, l'autre en septembre. Des marchands russes y viennent de l'intérieur avec des denrées du pays, et prennent en échange des marchandises étrangères.

On sème du blé, dans le territoire de Cherson, en hiver et au printemps; celui qu'on recueille, provenant des semences de l'hiver, est préférable. Les achats de cette denrée se font avec plus d'avantage dans l'automne qu'en toute saison.

Les habitans de Cherson qui sont propriétaires, peuvent faire construire ou acheter des bâtimens, et les faire naviguer sous le pavillon russe. Ceux qui n'ont aucune propriété jouissent de la même faculté, en fournissant une caution.

Depuis l'époque où je fis le tableau de Cherson, qui est au commencement de cet ouvrage, cette ville a été privée de son lazaret et du bureau de la douane d'entrée.

A ces dispositions du Gouvernement, qui éloignent le commerce de ce port, se joint

un nouveau motif de découragement, l'inconvénient des bas-fonds du Niéper, à la partie du fleuve nommée Passage de Kisimis, que ne peuvent franchir les navires qui tirent au-dessus de six pieds d'eau.

CHAPITRE

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