Page images
PDF
EPUB

Ils disculpaient les huissiers des imputations qui leur étaient faites sur l'inexactitude des dates de leurs procès-verbaux, auxquels foi devait être ajoutée jus-. qu'à inscription de faux.

Comme on ne reprochait aucun vice à la dernière contrainte, quant à la forme, les créanciers la soutenaient valable.

Une première nullité, disent-ils, n'ôte pas aux créanciers, qui ont un jugement portant condamnation par corps, le droit d'exercer une nouvelle contrainte.

Aucune loi ne détermine l'intervalle qui doit être laissé au débiteur, pour le mettre à l'abri d'une seconde exécution.

Il n'y a eu ni concert, ni intelligence entre les créanciers et les huissiers, chargés de leur pouvoir. La nullité commise dans la première arrestation est le produit d'une erreur.

Au surplus, Gillot n'est-il pas débiteur? Ses exceptions sont d'autant plus odieuses, qu'il ne les accompagne ni de paiement, ni d'offres de payer. N'estce pas le cas de lui dire si debitor solvisset, creditor non peccasset.

Il préfère sans doute le parti de tracasser ses créanciers et de chercher sa libération dans des dommagesintérêts; mais la foi due aux transactions commerciales, et l'autorité des jugemens qui en ordonnent l'exécution, doivent l'emporter sur l'esprit de chicane qui dirige les débiteurs insolvables et de mauvaise foi.

C'est sous ce point de vue que les tentations de Tome III, N.° 7.

39

Gillot ont été repoussées en première instance: il ne réussira pas mieux en cause d'appel.

M.r Malfroid, substitut du procureur générel, avait partagé l'opinion du premier juge, et conclu à la confirmation du jugement.

La Cour a considéré

Qu'il résultait, tant du procès-verbal, de radiation d'écrou, que des autres faits, circonstances et pièces de la cause,

1. Que la mise en liberté de Gillot n'avait été que provisoire et simulée; qu'il était réellement resté sous une surveillance dont l'effet avait été de le livrer, en sortant de la prison, à l'huissier et aux recors apostés dans la rue pour le ressaisir;

2.° Qu'un procédé aussi insidieux tendait à détruire l'effet des formes prescrites par la loi du 15 germinal an VI, puisque leur violation mettrait toujours le contraignable à la merci du créancier qui parviendrait à son but, en commençant son exécution par une voie réprouvée;

3. Que Gillot n'ayant été incarcéré à Bruxelles que par la suite des voies de fait exercées contre lui dans le canton d'Anderlecht, sa mise en liberté de vait être pleine et entière, avec un intervalle suffisant pour faire présumer que la seconde contrainte n'était pas le produit de la première;

[ocr errors]

4. Enfin, que ce serait rétorquer la loi contre ellemême, que de permettre que la violation des formes qu'elle prescrit puisse servir de moyen de l'exécuter;

En conséquence, par arrêt du 12 fructidor an XIII, troisième section, l'appellation, et ce dont est appel, ont été mis au néant; la contrainte du 22 prairial déclarée nulle, avec 200 francs de dommages-intérêts, etc.

Plaidans: MM. Vanderplas et Wyns fils.

ÉTRANGER. - Vœux.

Code civil.

Succession.

UNE Française qui a émis des voeux solennels en pays étranger, et perdu ainsi la qualité de Française, est-elle habile à recueillir la succession de son père, ouverte en France depuis la publication du code civil?

NOUS

ous avons déjà observé (voyez le n.o 2, page 1.re Cour d'A et suivante de ce volume) que cette question pré- pel de Lie sentait un grand intérêt pour l'ordre public: la Cour de Bruxelles ne la décida pas dans la cause, ci-devant rapportée, de la demoiselle Defranquen, parce que l'admission d'une fin de non-recevoir termina le litige; mais, comme il avait été ordonné aux parties de plaider à toutes fins, on a vu que la question avait été débattue par leurs défenseurs, et que le ministère public, représenté par M. Tarte aîné, avait pensé que la religieuse était inhabile à exercer un droit civil quelconque. Ce magistrat, après avoir posé le principe, qu'un Français, devenu étranger par l'é

mission de vœux religieux hors la France, perd l'exercice des droits civils en France, comme dans la contrée où l'individu a fait abnégation de sa personne, puisque l'incapacité le suit par-tout, examinait ensuite les conséquences du principe contraire; il montrait, que si nous admettons dans l'empire français la capacité personnelle des religieux étrangers, nous rétorquons contre nous-mêmes l'effet de la suppression si salutaire des vœux monastiques, nous enfouissons chez l'étranger les personnes et les richesses que la législation n'a voulu rendre qu'à la société, alors, a-t-il dit, on verra fréquemment de moines et de religieuses feindre leur retour en France, et y réclamer des successions dont le produit enrichira des corporations étrangères. Les supérieurs ne manqueront pas d'accorder la liberté de commettre cette fraude, parce qu'elle sera nécessaire pour augmenter leur dotation, et c'est ainsi que, par des moyens obliques, on pourra soutirer des capitaux de l'empire français, etc., etc.

Cette prédiction commence à se réaliser dans l'espèce que nous allons analyser, quatre demoiselles de Ruremonde, département de la Meuse - Inférieure, reste d'une famille de onze enfans, se sont faites religieuses en Westphalie, et à la mort de leur père, elles se présentent pour en recueillir la succession.

Le 27 germinal an XI, le sieur George-Guillaume Vanthyssen, domicilié en ladite ville de Ruremonde, fait un testament: ses quatre filles sont instituées héritières, avec substitution au profit de ses plus proches parens.

Le téstateur meurt le 16 frimaire an XII : ses filles réclament la succession paternelle.

Le sieur Huseman, neveu du défunt, et son successible après les religieuses, ses cousines, soutient celles-ci non-recevables. La contestation s'engage devant le tribunal civil de Ruremonde.

Les dames Vanthyssen disaient :

La législation française a supprimé toute corporation monastique : elle a cessé par là même de reconnaître les vœux: dès-lors, notre incapacité à succéder, résultant de notre entrée en religion, n'est plus que relative et restreinte au pays où elle est un motif d'exclusion: ainsi, dans l'hypothèse où les lois prussiennes priveraient les religieux des droits de succession, ces lois ne pourraient étendre leur empire sur les propriétés dépendantes d'une puissance voisine, et régies par une législation différente.

La France n'exclut ni les religieux étrangers, ni les religieux républicoles. Le Français est admis, parce qu'au titre du code civil, qui détermine les causes d'incapacité ou d'indignité, celle des vœux n'est point comprise il en est de même de l'étranger, celui-ci est habile à succéder, par la raison que la législation n'exige d'autre condition que la réciprocité : or, d'après les traités qui lient les nations française et prussienne, le Français jouit du droit de successibilité en Prusse : donc, nulle exception résultant de l'incapacité ne peut nous être opposée, à nous, que les tribunaux français ne peuvent traiter que comme les autres sujets de sa majesté le roi de Prusse, lesquels peuvent sans contredit réclamer, en vertu de l'article 726 du code civil, les successions qui leur sont échues en France: donc, la loi positive est ici d'accord avec la nature et les droits du sang pour légitimer notre

« PreviousContinue »