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fois, lorsque les jugemens n'ont pas spécifié la manière dont la preuve devait être acquise.

Le juge de la contestation doit bien se pénétrer de la nature de l'objet dont il demande la vérifica tion, pour discerner ce qui appartient à la connaissance des personnes de l'art, de ce qui ne peut être prouvé que par des témoins dont les sens sont interrogés sur des faits qu'ils sont présumés avoir vus, entendus ou appris.

Le discernement de la matière est d'autant plus nécessaire, qu'outre que des témoins seraient aussi déplacés pour examiner si un bâtiment est bien construit, que des experts seraient inutiles pour prouver le fait d'une injure, l'ordonnance prescrit des règles particulières e distinctes de procédure pour les expertises et pour les enquêtes.

Ainsi qu'en matière d'enquête, le jugement doit contenir spécifiquement les faits dont la preuve est ordonnée; de même, le jugement qui prescrit une expertise doit articuler ceux qui font l'objet du rapport: c'est sur ces faits que les experts sont consultés, qu'ils délibèrent, et qu'ils donnent leur avis. Sans donnée certaine, il leur arriverait souvent de résoudre des points inutiles pour l'éclaircissement de la contestation, et même de s'abandonner à des questions hors de leur sphère. Ad quæstionem facti respondent juratores, ad quæstionem juris respondent juridici.

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Aussi le texte de l'article 8, titre 21, de l'ordon nance de 1667, est-il précis à cet égard.

« Les jugemens qui ordonneront que les lieux et << ouvrages seront vus, visités, toisés ou estimés par

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« experts, feront mention expresse des faits sur lesquels les rapports doivent être faits, du juge qui « sera commis pour procéder à la nomination des « experts, recevoir leur serment et rapport, comme « aussi du délai dans lequel les parties devront com« paroir par-devant le commissaire. »

Comme on vient de le remarquer, le jugement qui ordonne une expertise doit non-seulement indiquer · les faits, mais aussi nommer le juge pour recevoir la nomination des experts: on prévient par là les frais qu'il faudrait faire pour obtenir un commissaire.

Le législateur exige aussi que le délai soit prescrit par le jugement; mais cette disposition est peu observée, sans, dit-on, qu'il en résulte d'inconvéniens. Le but est d'accélérer l'instruction du procès : pourquoi ne pas l'atteindre autant que possible?

C'est donc par-devant le commissaire que les parties conviennent de leurs experts, ce qui sans doute n'exclut pas la faculté qu'elles ont de les nommer sur-le-champ; mais elles ont souvent besoin de se recueillir sur le choix des personnes, et on ne peut exiger qu'elles indiquent les experts autrement que devant le juge commis.

La partie la plus diligente prend l'ordonnance da commissaire, et fait assigner sa partie adverse au domicile de son avoué, pour convenir d'un expert, å l'effet de procéder, avec celui qu'elle désignera, à l'exécution du jugement du ......, etc.

Le procès-verbal contient la nomination de l'expert de la partie diligente si l'autre partie comparaît, et qu'elle nomme aussi son expert, le commissaire donne

acte des nominations, et ordonne que les experts viendront préter serment au jour qu'il fixe par le procèsverbal même.

Si la partie assignée ne comparaît pas, ou si elle refuse de nommer un expert, le commissaire en nomme un d'office pour elle. Art. 9, titre 21, de l'ordonnance de 1667.

«En cas de refus fait par les deux parties, de nomle commissaire nomme d'office ». Ibid.

mer,

dit

dans Sallé, sur cet article de l'ordonnance, que, le cas où les deux parties sont refusantes, le commissaire ne nomme qu'un seul expert pour parties.

les deux

Sur quoi cela est-il fondé? L'ordonnance dit : en nommera d'office. Il semble que si le commissaire était autorisé à se borner à la nomination d'un seul, on aurait dû dire: en nommera un d'office.

Quoi qu'il en soit, c'est un parti au moins trèssage de n'en désigner qu'un, car la nomination en nombre pair a beaucoup d'inconvéniens, sur-tout lorsles parties. qu'elle se fait par

Les experts nommés sont assignés au jour indiqué par le commissaire, pour prêter serment: on assigne aussi la partie pour les voir jurer: mais son incomparution n'empêche pas qu'il ne soit procédé à la réception du serment.

Dépend-il d'une partie de nommer plusieurs experts, et de contraindre par là l'autre partie à nommer en pareil nombre ?

Le

Le commissaire auquel les parties s'en rapporteraient sur le choix des experts, peut-il en indiquer plus de deux, en tout cas, plus de trois?

On fait cette question, parce que le cas s'est présenté en exécution d'un arrêt de la Cour, qui avait délégué le juge de paix du lieu. L'arrêt confiait à des experts une vérification et appréciation sur des objets contestés entre deux parties. Qu'est-il arrivé? Que le juge de paix a nommé lui-même quatre experts. Ce procédé est irrégulier : chaque partie a le droit de nommer un expert: l'opération se fait d'abord par les deux experts (sauf le cas où le juge commis n'en aurait nommé qu'un pour les deux parties): c'est ce qui résulte évidemment de l'article 9, titre 21, de l'ordonnance de 1667, où il est dit: pour procéder à la visitation, avec l'expert nommé par l'autre partie.

Aussi, quand une expertise est ordonnée, elle se fait d'abord par deux experts, à moins que sur la réquisition des parties, ou par des considérations particulières, le jugement n'eût prescrit une autre marche.

Avant de procéder à l'expertise, l'arrêt ou jugement qui l'ordonne est remis entre les mains des experts: cette remise s'effectue, lorsqu'ils ont prêté serment, et il en est fait mention dans le procès-verbal. Voyez l'article 10 du même titre de l'ordonnance.

C'est le jugement qui dirige l'opération des experts: on remarque par là combien il est essentiel que les

faits soient exactement articulés.

«

Lorsque les deux experts sont de la même opi, Tome III, N. 5,

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«nion, ils ne font qu'un seul et même rapport : « s'ils sont d'avis contraire, chacun donne un rapport particulier ». Art. 13 ibid.

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« Dans ce dernier cas, c'est-à-dire, s'il y a dis«< sentiment, il est nommé d'office un tiers expert ». Ibid.

La loi prévient avec raison les difficultés qui naitraient presque toujours entre les parties, si le choix du tiers expert leur était laissé : c'est au commissaire à le nommer.

Ici commence une procédure qui exige de l'attention, et dans laquelle il se commet beaucoup de fautes.

Il est inutile d'observer que le tiers expert doit avant tout prêter serment par-devant le commissaire, parties présentes, ou dûment appelées : sa mission doit être revêtue des mêmes formes que celle des premiers experts.

Comment doit-il procéder

L'article 13 veut qu'il opère à l'assistance des premiers experts; règle fondée en raison, et de laquelle on s'écarte souvent.

Puisque le tiers expert est en quelque sorte constitué juge entre les deux premiers, il faut bien qu'il prenne connaissance des motifs qui les ont divisés sur l'objet mis en question; et comment en serait-il instruit, sil ne les entendait pas sur les lieux, s'il n'était pas mis à même d'apprécier leurs observations?

Cette conférence est très-utile, et obtient souvent

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