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Le sieur Schollaert répliquait, que la spécialité de l'hypothèque, objet essentiel de la loi du 11 brumaire an VII, ne serait plus qu'une chimère, si le système de son adversaire pouvait être adopté.

Dans les circonstances du besoin, les débiteurs subissent les conditions qu'on leur impose: ils passe ront tous condamnation volontaire, et, dès le len demain, leurs immeubles se trouveront intégralement affectés par une simple ordonnance du juge, pour des sommes qui n'auront aucune proportion avec la valeur du gage: ils se constitueront ainsi, dans l'impuissance d'avoir un nouveau crédit sur leur fortune: on ne peut rien imaginer de plus funeste au commerce et à l'intérêt public, car le systême de la généralité des hypothèques est la paralysie des richesses territoriales.

C'est bien assez que ce systême soit inséparable des condamnations vraiment judiciaires; mais du moins le débiteur a eu le droit de se défendre il doit imputer son sort, ou à sa négligence, ou à sa mauvaise foi; mais par la stipulation suivie de la clause de condamnation volontaire, il est lié par l'acte même; il a terme pour payer, mais il s'est privé de toutes les ressources de son crédit : il est pour ainsi dire exproprié, et en effet, de telles clauses, si elles sont efficaces, conduisent naturellement à la voie de l'expropriation forcée.

Le titre sous signature privée, même sans jour et sans terme, n'a pas les mémes inconvéniens. Jusqu'au moment de l'inscription du jugement, le débiteur a la liberté de vendre ou d'affecter une partie de ses biens pour se procurer des fonds sa

condition est donc préférable à celle qu'il subirait sur condamnation volontaire.

Sur cette contestation, jugement du tribunal d'Audenarde, du 7 germinal an XII, qui accorde la préférence à la dame Desmet, motivé sur ce que la disposition du 6 frimaire an X, a tous les caractères qui constituent un jugement, et qu'ainsi la condamnation qui y est portée, a conféré l'hypothèque au moyen de l'inscription.

Cette décision, ayant été attaquée par la voie de l'appel, fut réformée ensuite d'une discussion où l'on avait renouvellé les moyens produits en première ins

tance.

Attendu, est-il dit dans l'arrêt, que l'acte par le quel l'hypothèque générale a été consentie, est pos térieur aux lois sur le notariat, et qu'ainsi ledit acte étant exécutoir epar lui-même, la clause de condamnation volontaire usitée dans l'ancien régime, 'était superflue et inopérante dans le cas.

Attendu qu'aux termes de la loi du 11 brumaire an VII, toute stipulation volontaire d'hypothèque doit indiquer la nature et la situation des immeubles hypothéqués, ce qui exclut l'hypothèque géné rale, qui ne résulte que de la stipulation volontaire, telle qu'elle existe dans l'acte du 16 germinal an IX.

Attendu que la disposition de cette loi n'a pu être éludée en transformant la stipulation volontaire en un simulacre de jugement frustratoire.

La Cour réforme et accorde la préférence au sieur Schollaert, appelant.

Du 5 thermidor an XII. Deuxième section.

MM. Audoor et Desmet.

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LA suspension d'un tuteur dont l'administration paraît suspecté, peut-elle être prononcée, de la seule autorité du juge, lorsqu'elle est provoquée incidemment à l'exécution d'un jugement qui le condamne à rendre compte?

DÉCIDÉ AFFIRMATIVEMENT DANS LES CIRCONSTANCES DE

LA CAUSE SUIVANTE.

JOSEPH DUBIEZ avait été nommé tuteur de sa nièce Thérèse-Josephine Dubiez.

La conduite de ce tuteur inspira quelques inquiétudes aux parens de la mineure: il y eut, le 10 nivôse an XI, conseil de famille, où l'on nomma François Dumont, particulier à Tournai, subrogé tuteur, avec pouvoir d'user des moyens nécessaires pour con traindre Joseph Dubiez à rendre compte.

Au bureau de conciliation, Dubiez consentit à la reddition du compte demandé.

Même consentement déclaré devant le tribunal de Tournai, le 26 floréal an XI; en conséquence, jugement qui ordonne que le compte sera présenté, et qui fixe le jour.

Au jour fixé, Dubiez ne comparaît pas. Le subrogé tuteur demande qu'il lui soit permis d'exécu

tèr le jugement du 26 floréal, par voie de saisie et exécution des biens du comptable. Ses conclusions lui sont adjugées par défaut.

Opposition à ce dernier jugement à la requête de Dubiez, mais à l'échéance de l'assignation il fait encore défaut.

Alors, Dumont pensa qu'il ne suffisait pas de contraindre le tuteur à rendre compte, mais qu'il importait de lui faire ôter provisoirement l'administra tion de la tutelle, pour ne pas compromettre davantage les intérêts de la mineure : il demanda qu'il fût suspendu, et sa suspension fut prononcée.

*

Le terme était impropre et inusité en matière de tutelle; mais que demandait-on et qu'a-t-on jugé ? Que vu la demeure de Joseph Dubiez, et le péril dont son insolvabilité menaçait les intérêts de la mineure; il était urgent de lui interdire l'administration.

Quoi qu'il en soit, cette dernière décision tira toutà-coup Joseph Dubiez de sa léthargie; il se rendit appelant de tous les jugemens rendus contre lui dans cette affaire.

Contre le premier jugement, il disait, que suivant l'article 471 du code civil, il n'était tenu de rendre un compte définitif qu'à la majorité de sa nièce.

Que l'article 470 l'obligeait uniquement à présenter un état de situation;

Contre le second, qu'il n'était pas exact d'avancer

qu'il n'avait point comparu au jour fixé pour l'exé cution du jugement du 26 floréal an XI; qu'il s'était présenté avec un état de situation, mais qu'il n'avait pu parvenir à se faire écouter, parce que Dumont et le tribunal ont entendu ce jugement dans le sens, que c'était un compte et non un état de situation qui était ordonné.

Il concluait de cette interprétation, que les deux jugemens étaient rendus en contravention au code civil.

Contre le troisième, il observait que le tribunal de Tournai avait créé une disposition législative, et par conséquent excédé son pouvoir en prononçant la suspension d'un tuteur.

Que les règles de la tutelle étaient tracées dans la loi du 5 germinal an XI, faisant partie du code civil.

Que la section 7 du chapitre du chapitre 2 de cette loi, traitait particulièrement de l'incapacité, des exclusions et destitutions de la tutelle, mais qu'il n'y était pas dit un mot de suspension, ni de mesure provisoire équipollente.

Que, s'il s'agit d'une destitution, c'est au conseil de famille que le code civil délègue exclusivement le pouvoir de la prononcer.

<< Toutes les fois qu'il y aura lieu à une desti<«tution de tuteur, elle sera prononcée par le con« seil de famille, convoqué à la diligence du su«brogé tuteur, ou d'office par le juge de paix ». Art. 446.

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