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cubes d'eau à 63 mètres de hauteur) et la production de vapeur (160.000 kilogrammes) à réaliser par vingt-quatre heures; ils fixaient la consommation maxima de vapeur des machines élévatoires (9,250 par heure et par cheval utile mesurée en eau montée) et la production minima des chaudières (7,50 par kilogramme de charbon tout venant des mines d'Aniche); ils imposaient un nombre minimum d'appareils distincts, la parfaite similitude des pièces correspondantes, des dispositions spéciales pour assurer le service en temps de crue; enfin, ils limitaient la pression de la vapeur à 6 kilogrammes, la vitesse moyenne des pistons des pompes élévatoires à 1m,10 par seconde et prescrivaient que le mouvement des clapets fût rendu apparent à la vue si cette vitesse dépassait 0,50. Sauf ces conditions, la plus grande latitude était laissée aux concurrents dans le choix des types et des dispositions à proposer, et l'administration se réservait de se prononcer en toute liberté sans être liée ni par le prix, ni par aucune autre circonstance.

Les soumissionnaires avaient à fournir des dessins complets et détaillés — sans préjudice de l'atlas des dessins d'exécution qui serait réclamé plus tard à l'adjudication et un mémoire descriptif et justificatif. L'entreprise devait, moyennant un prix à forfait pour chacun des deux lots, comprendre la tuyauterie générale, tous les organes accessoires, l'outillage de service, le montage. Les délais de livraison étaient fixés à douze mois pour les machines et dix pour les chaudières; ceux de montage respectivement à six et trois mois; ceux de garantie à deux ans et un an après la réception provisoire. Cette réception devait, d'ailleurs, être prononcée après quinze jours de marche normale; mais les essais habituels de consommation étaient remplacés par le relevé de la moyenne pratique obtenue durant le délai de garantie, et, dans le cas où ce relevé ne donnerait pas de résultats satisfaisants, l'adju

dicataire s'exposait à des pénalités considérables, calculées de manière à compenser à peu près la perte que subirait de ce chef le service lui-même.

Ce concours a eu le plus grand succès. Pour les machines onze soumissionnaires, parmi lesquels le Creusot, Cail, Fives-Lille, Claparède, etc., n'ont pas présenté moins de trente projets différents; pour les chaudières, on comptait vingt-quatre projets étudiés par douze soumissionnaires. Les prix variaient du simple au double en passant par tous les intermédiaires, et les offres comportaient les systèmes les plus divers: machines verticales et horizontales, monocylindriques, Compound, Woolf; pompes horizontales, verticales, à piston plein, à piston plongeur, à double et à simple effet, avec ou sans pompes nourricières,... commande directe et par balanciers,... générateurs à bouilleurs, à foyer intérieur, semi-tubulaires, tubulaires. A la suite d'un examen très détaillé et très approfondi, la commission spéciale a proposé l'adjudication des deux lots à M. Joseph Farcot, le constructeur bien connu de Saint-Ouen, qui se trouvait avoir présenté les projets les plus satisfaisants sous tous les rapports et demandé les plus bas prix pour les moteurs et les pompes.

Les machines élévatoires, livrées par la maison Farcot, sont au nombre de six. Chacune d'elles comprend un moteur horizontal à un seul cylindre, avec distribution, genre Corliss modifié, à quatre distributeurs rotatifs placés dans les fonds du cylindre de manière à réduire au minimum les espaces nuisibles, et commandés par un disque tournant actionné lui-même par le régulateur; la fermeture brusque de l'admission de vapeur est obtenue par des ressorts-vapeur; le condenseur est placé en contre-bas et la pompe à air commandée par un balancier vertical relié à la tige du piston (Pl. 1, fig. 19). Ce moteur met en mouvement, par l'intermédiaire d'un

balancier coudé ou plutôt d'un arbre horizontal, sur lequel il agit à l'aide d'un balancier vertical, et qui porte lui-même deux manettes horizontales rattachées aux tiges verticales des pistons élévatoires, une pompe double, composée de deux pompes à simple effet juxtaposées que l'eau traverse successivement (Pl. 2, fig. 3). Les pistons, pleins, de 0,91 de diamètre, portent des clapets multiples, plats, munis de ressorts en caoutchouc (Pl. 2, fig. 4). Une bâche en tôle permet d'accéder aux couvercles des pompes et de visiter toutes les parties mobiles, même en temps de crue; une autre enveloppe la partie basse du volant. Sur le refoulement est placé un réservoir d'air, en forme de cloche verticale; sur l'aspiration un autreréservoir d'air est disposé horizontalement.

Les chaudières, au nombre de huit, auxquelles sontvenues s'ajouter deux chaudières semblables de rechange, se composent chacune de deux corps cylindriques superposés, dont l'un, le plus élevé, forme réservoir d'eau et de vapeur, et l'autre contient le foyer avec un faisceau de tubes horizontaux pour le passage des gaz de la com-bustion à travers la masse d'eau, le tout recouvert d'une enveloppe métallique à deux parois de tôle séparées par une couche de matières peu conductrices de la chaleur (Pl. 1, fig. 20). L'alimentation se fait au moyen des eaux de purge des enveloppes des cylindres de vapeur et d'une partie des eaux de condensation, refoulées par des pompesspéciales montées sur les machines et qui pénètrent dans les chaudières, en passant par un bouilleur alimentateurplacé au-dessous du sol de la chaufferie. La batterie de générateurs a été complétée par l'addition de deux chaudières de secours du type multitubulaire Belleville (Pl. 1, fig. 21), un peu plus fortes que les deux autres, et qui envoient leur vapeur par l'intermédiaire de détendeurs dans la même conduite générale; cette conduite a été pourvue depuis de clapets de sûreté à boulet, du système

Labeyrie; un petit cheval alimentaire, qui prend l'eau dans la conduite générale d'alimentation, fait le service des chaudières multitubulaires qui fonctionnent à une pression supérieure.

Ces machines se comportent fort bien. Au début, il se produisait dans les pompes des chocs assez violents, qu'après de longues observations et des expériences répétées on a dû attribuer à des cantonnements d'air dans le corps de pompe inférieur et au fonctionnement irrégulier du réservoir d'air d'aspiration; les causes dé terminées, il est devenu possible de trouver les remèdes, et les chocs ont disparu à la suite de modifications apportées à la disposition relative des corps de pompe et au jeu du réservoir inférieur. La consommation de charbon garantie par cheval-heure pour l'ensemble du système (1,030) a été obtenue sensiblement, bien que la production des générateurs tubulaires soit restée audessous du chiffre garanti, 8kg,500 de vapeur par kilogramme de charbon, et cela grâce à la compensation résultant de la faible consommation de vapeur dans les moteurs. Seul le bouilleur inférieur adapté aux chaudières tubulaires n'a pas donné ce qu'on en attendait; les dépôts boueux et calcaires ne s'y sont produits qu'en faible quantité et ils ont continué à s'accumuler, comme dans les chaudières de même type sans bouilleur, dans le corps cylindrique inférieur autour du faisceau de tubes.

Dispositions générales de l'usine. Les six machines. élévatoires, toutes identiques, sont placées sur une même ligne dans la grande salle, les pompes du côté de la Seine, les volants du côté opposé. Dans la salle contiguë les douze chaudières, rangées en batterie, les deux générateurs Belleville au milieu, entre deux groupes de cinq générateurs tubulaires de part et d'autre, présentent tous leurs foyers sur un même alignement, faisant face au parc à charbon (Pl. 2, fig. 1).

Les massifs de fondation, entièrement en meulière et mortier de ciment Portland, à l'exclusion de la pierre de taille, ont été établis directement sur le sable fin d'alluvion, qui constitue en ce point un sol incompressible suffisamment résistant; des trous verticaux y ont été ménagés grâce à l'emploi de tuyaux en zinc, des niches au moyen de mandrins ou de petits cintres en bois, de manière à rendre aisée et rapide la mise en place des boulons.

Les murs des bâtiments principaux, fondés également sur le sable, et construits de même en meulière et ciment jusqu'au-dessus du niveau de la cour, sont formés en élévation de maçonnerie de moellons calcaires avec piliers et encadrements en briques de Bourgogne, le tout hourdé en mortier de chaux hydraulique.

La couverture en zinc repose sur des combles métalliques formés de deux séries de fermes genre Polonceau, avec lanternon, panneaux vitrés et parquet à point de Hongrie dans l'intérieur (Pl. 2, fig. 2).

Trois escaliers donnent accès aux sous-sols du bâtiment des machines, qui, largement aérés et suffisamment éclairés, offrent les plus grandes facilités pour le service des condenseurs et communiquent avec la galerie contenant les conduites de refoulement. Sous le bâtiment des générateurs il n'a été ménagé que trois chambres utilisables; une, au milieu, contient les monte-charges qui relicnt le parc à charbon à la chaufferie; une autre renferme les appareils d'éclairage électrique et la troisième le dépôt des mâchefers; les deux intervalles sont occupés par les carneaux principaux qui conduisent la fumée aux deux cheminées en briques.

En passant on remarquera le profil très simple de ces cheminées, présentant à la base un épanouissement au lieu du piédestal habituellement adopté. Là, comme dans toutes les parties de l'usine, on a voulu éviter toute

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