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atténuer les effets.

un double inconvénient: entraîner des annnités | triment de notre marine, ou tout au moins d'en très lourdes, nécessitant des taxes assez élevées pour une dépense relativement faible, et en second lieu faire supporter toute la charge par le commerce du port avant qu'il ait pu tirer avantage des travaux entrepris.

Dans les ports étrangers, il n'en est pas de même et les taxes locales y sont plus facilement subies parce que leur payement est la représentation d'un service permanent. Aux termes de la loi anglaise de 1847 (Harbours, Dooks and Pers clauses act), les concessionnaires n'ont le droit de percevoir les droits fixés par leur acte de concession, qu'après achèvement des travaux, constaté par certificat du président des sessions trimestrielles du comité; mais dans la limite de l'acte de concession, ils peuvent continuer la perception tant qu'ils la jugent utile et disposer au mieux des intérêts qu'ils représentent des revenus ainsi créés.

On opère, en général, de la manière suivante la corporation ou compagnie concessionnaire commence par établir des feux, des balises, des bouées de halage ou d'amarrage, des estacades provisoires, etc., et elle perçoit pour l'usage de ces engins des droits assez élevés qui, non seulement servent à payer l'intérêt du capital engagé, mais servent à gager les emprunts émis successivement pour l'exécution des autres travaux. D'amortissement il n'en est pas question au début, la durée des concessions étant très longue. A mesure que le concessionnaire achève un quai, livre un port, ouvre un bassin, un dock ou établit une voie ferrée, il fait payer un nouveau droit d'usage, et ainsi chaque dépense effectuée devient la source d'une nouvelle recette et le point de départ d'une nouvelle entreprise.

La différence entre les deux systèmes est donc considérable, et nous croyons que la loi que nous proposons réaliserait un véritable progrès en permettant aux chambres de commerce ou aux autorités locales de France, de suivre les mêmes procédés.

L'exploitation commerciale des ports de France exige cependant certaines restrictions, et dans l'article 3 il est fait des réserves au sujet des bateaux ou navires qui se livrent à la pêche ou au petit cabotage.

Nous ferons, du reste, remarquer que le système que nous préconisons et qui est suivi en Angleterre, a pour résultat d'exonérer à peu près complètement le cabotage. En premier fieu, parce les taxes sont proportionnelles et plus on moins élevées, suivant le tonnage du navire et la longueur de la traversée qu'il vient de faire; en second lieu, parce que les navires ne payent les droits de quai, de bassin et de docks, qu'à la condition de se servir effectivement de ces quais ou bassins; d'où il résulte que les bateaux de pêche ou les petits caboteurs qui restent dans l'avant-port n'ont aucune charge à supporter.

Nous avons cependant pensé qu'à cause de la jurisprudence établie par l'administration française, il fallait faire à cet égard une réserve formelle. La loi du 30 janvier 1872, qui établit les droits de quai, exonère de moitié les navires faisant le grand cabotage, et décharge de tous droits les bateaux de pêche et les navires faisant la navigation de port à port français.

La régularité des opérations serait assurée par le contrôle annuel de l'Etat; quand les concessionnaires seront des chambres de commerce, des municipalités ou autres corps constitués, ce contrôle sera des plus efficaces, puisque la comptabilité de ces corps est soumise elle-même au contrôle.

La perception ne pourra être faite qu'en vertu des actes de concession qui fixeront un maximum de taxes, et de ce côté l'Etat et le commerce général auront toute sécurité.

La perception des droits locaux pourra être confiée aux agents de l'Etat, par exemple à l'administration des douanes, ou bien elle sera faite par les agents particuliers des concessionnaires.

L'article 4 sauvegarde dans la mesure nécessaire l'exécution des conventions internationales qui nous lient encore pour deux ans visà-vis des puissances étrangères.

Nous avons cru devoir inscrire dans cet article le principe d'une réciprocité indispensable; il ne s'agit pas d'exercer vis-à-vis de certains de nos concurrents des représailles toujours fâcheuses, mais de réserver au Gouvernement le moyen d'obliger les gouvernements voisins à faire supprimer les droits différentiels qui sont encore perçus dans certains ports au dé

Dans certains ports anglais appartenant à des compagnies de chemins de fer, à des compagnies minières ou à des particuliers, on emploie, pour assurer le monopole des transports aux navires attachés au port, un système de détaxes, d'abonnements et de remises qui est contraire à l'esprit des traités de commerce, et qui rend impossible à nos armateurs la fréquentation de ces ports. La chambre de commerce de Bordeaux a signalé ces faits et démontré que c'était grâce à ce système, que les Anglais étaient parvenus à monopoliser toutes les lignes régulières entre l'Angleterre et la France. L'enquête très sérieuse de MM. Colson et Roume a apporté la lumière sur ces faits jusqu'à présent contestés, et il importe que, dans les ports français, on puisse lutter contre de semblables procédés.

Les fonctionnaires chargés de la police des ports resteront à la nomination des ministres compétents et sous leur autorité exclusive.

Les ingénieurs et agents chargés de l'exécution des travaux seront choisis et payés par les concessionnaires; l'Etat pourra détacher ses ingénieurs des ponts et chaussées au service des chambres de commerce, des municipalités, des départements ou des compagnies, comme il les détache au service des compagnies de chemins de fer.

Telle est la proposition que nous soumettons à l'examen du Parlement; elle est sans doute susceptible de modifications ou d'améliorations, mais telle qu'elle est elle nous paraît présenter des avantages sérieux et immédiats.

Tout en mettant à la disposition de nos grands ports de commerce des ressources plus considérables que celles inscrites au budget, on pourrait réaliser sur les crédits affectés à l'entretien et à l'amélioration des ports maintenus une économie de 21 millions compensée. il est vrai, en partie, par l'abandon par l'Etat des produits des droits de quai et de statistique. Les chambres de commerce et autorités locales des ports étant en ce moment lourdement engagées par les avances et fonds de concours fournis à l'Etat, on ne pourrait pas procéder trop vite, et pendant fes premières années il faudrait réduire ce chiffre; mais, par contre, à partir de 1892, on pourrait arriver à un résultat plus complet, si on a la sagesse, au moment du renouvellement du traité de commerce, de réserver des facilités plus grandes pour l'établissement de droits différentiels. Ces droits différentiels qui existent partout, et qui se justifient par la proportion toujours très forte que le commerce local a supportée lors de l'exécution des travaux, constitueraient pour notre marine marchande une protection réelle et efficace; ils auraient en outre l'avantage de protéger efficacement le cabotage injustement sacrifié; l'Etat trouverait des ressources nouvelles en même temps qu'il réaliserait une économie, et il n'est pas exagéré de dire que, dans quatre ans, le budget pourrait se trouver allégé de 30 ou 40 millions.

PROPOSITION DE LOI

Art. 1er. L'exécution de travaux concernant l'établissement total ou partiel, l'amélioration, l'entretien et l'outillage des ports, avantports, canaux, etc., peut être attribuée par I'Etat aux chambres de commerce, ou à leur défaut aux départements, aux municipalités, à des syndicats ou à des particuliers.

Les travaux dont il s'agit, sauf les travaux d'entretien proprement dits, font l'objet d'une à cet effet à une enquête suivant les formes lédéclaration d'utilité publique ils seront soumis gales.

Le montant, la forme, la durée du concours financier de l'Etat, dans le cas où ce concours sera donné, seront déterminés par une loi.

L'administration et l'exploitation des ouvrages ci-dessus énumérés pourra faire l'objet de concessions dont la durée ne pourra excéder quatre-vingt-dix-neuf ans.

Art. 2. Dans le but d'assurer la rémunération et l'amortissement du capital engagé par le concessionnaire, l'Etat autorisera au profit de celui-ci l'établissement de taxes locales dont les tarifs seront déterminés par le décret de concession.

Les droits de quai et de statistique cesseront d'être perçus au profit de l'Etat dans les ports qui auront été l'objet d'une concession; le produit de ces taxes sera exclusivement affecté aux frais d'établissement, d'entretien, d'outillage énumérés à l'article 1er de la présente loi.

Art. 3. La circulation des bateaux de pêche et des navires se livrant aux opérations du bornage et du cabotage entre ports français sera toujours exempte de péage dans les rivières, canaux et ports concédés. Des emplacements seront réservés dans les ports pour les navires et bateaux de cette catégorie et les droits de stationnement auxquels ils seraient assujettis au profit du concessionnaire seront soumis à une tarification spéciale.

Art. 4. En vertu de l'acte de concession, le concessionnaire est substitué aux droits de l'Etat pour ce qui concerne l'établissement et la perception des taxes prévues aux articles 2 et 3.

Le concessionnaire est tenu d'établir un compte annuel des produits de l'exploitation, lequel compte est soumis au contrôle de l'Etat. en ce qui concerne la régularité des opérations.

Lorsque le concessionnaire est la chambre de commerce locale, les recettes et les dépenses des exploitations prévues par la présente loi sont rattachées au budget ordinaire de ladite chambre de commerce.

Art. 5. Les taxes autorisées par la présente loi sont perçues indistinctement sur tous les navires français et étrangers sauf les exceptions stipulées à l'article 3 ci-dessus en faveur des bateaux employés à la petite pêche et des navires faisant le cabotage entre ports français.

Toutefois, tout navire originaire ou en provenance d'un port étranger dans lequel il est accordé, sous une forme ou une dénomination quelconque et dans une proportion quelconque, une modération ou une exemption des taxes locales auxquelles les navires français sont assujettis dans ledit port pourrait être soumis dans les ports français à des taxes spéciales supplémentaires.

Ces taxes seront calculées de manière qu'elles représentent l'équivalent au moins des charges de même nature auxquelles les navires français ou leurs cargaisons sont soumises dans les ports visés au paragraphe cidessus.

Art. 6.

L'exécution des ouvrages faisant l'objet des concessions visées par la présente loi sera faite sous la surveillance de l'Etat; les concessionnaires demeureront soumis aux règlements de police des ports.

Art. 7. Les ingénieurs, agents, employés chargés des travaux et de l'administration de la surveillance des ouvrages et de leur exploitation attribués aux concessionnaires seront nommés et rétribués par lui.

ANNEXE N° 133

PROPOSITION DE LOI ayant pour objet l'unification des pensions de retraite des agents du service actif des douanes liquidées avant le 26 février 1887, présentée par MM. Le Cour, de Lareinty, de Lamarzelle, de La Bassetière, comte de Juigné, Du Bodan, Thellier de Poncheville, comte Albert de Mun, Jacquemart, Corneau, Maurice Sibille, de Montalembert, Achille Adam, députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Messieurs, en augmentant dans de notables proportions la retraite, jusqu'alors dérisoire, douanes, la loi du 26 février 1887 a donné une des agents du service actif des brigades des légitime satisfaction à de braves et loyaux serviteurs de l'Etat, et, comme nous le verrons bientôt, fait un acte de justice en faveur de fonctionnaires lésés dans leurs intérêts par la loi de 1853; mais malheureusement cette lol n'a pas d'effet rétroactif et n'a rien fait pour améliorer le sort des anciens douaniers retraités avant la mise en vigueur de cette loi.

De là une inégalité choquante entre des hommes qui ont parcouru la même carrière, subi les mêmes retenues. Ainsi, les capitaines de 1r classe, dont la retraite a été liquidée aux conditions de la loi de 1887, ont au moins 1,025 fr. de plus que leurs collègues retraités; les lieutenants, 200 fr. de plus que leurs anciens capitaines, et au moins 600 fr. de plus que leurs anciens collègues. La même anomalie se reproduit pour les sous-officiers, dont la retraite est supérieure à celle de bon nombre de leurs anciens lieutenants, ainsi que pour les

préposés, qui touchent, eux aussi, une pension | plus élevée que celle de leurs vieux sous-officiers.

Le Parlement s'est ému de cette situation, il a fait un accueil favorable aux pétitions nombreuses qui lui ont été adressées, et à deux reprises, lors de la discussion du budget, par la prise en considération de l'amendement de MM. Dionys Ordinaire et de Lareinty, il a témoigné son désir de voir réparer cette injustice.

On s'est efforcé de justifier cette inégalité; on a soutenu que l'Etat ne devait rien aux anciens agents, que l'augmentation des retraites était le corollaire obligé de l'augmentation des traitements, et que les réclamants, ayant payé leurs retenues sur de petits traitements, n'avaient pas droit à des pensions surélevées. L'Etat ne leur doit rien, a-t-on dit. Cela est complètement inexact, car l'Etat ne saurait oublier que le jour où, par l'article 1er de la loi de 1853, il a déclaré que les caisses de retraite désignées au tableau 1 seraient supprimées à partir du 1er janvier 1854, et leur actif acquis à 'Etat, ce jour-là, il s'est reconnu débiteur principal de toutes ces pensions aussi bien pour le passé que pour l'avenir.

Ces pensions ne sauraient être moindres que celles auxquelles les fonctionnaires dont on prenait l'épargne avaient un droit acquis au moment où l'Etat a pris les pensions à sa charge, et il est facile de prouver, en ce qui concerne les agents actifs des douanes, que la mesure votée en 1853, loin de leur être favorable, a eu pour effet de leur enlever, chaque année, une partie des ressources sur lesquelles ils devaient compter.

La démonstration en a été faite à plusieurs reprises, et quand le Parlement a voté la loi du 26 février 1887, il n'a fait qu'accomplir un acte de justice; il ne saurait hésiter à accorder la même réparation aux anciens retraités, qui ont les mêmes droits et ont souffert plus longtemps de cet état de choses.

cette extrême mobilité en inspirant des sentiments de stabilité aux agents qu'il emploie.

"

Un des grands griefs contre le système des caisses autonomes, c'était la pensée qu'elles pourraient entretenir parmi les fonctionnaires un certain esprit d'indépendance, et M. le vicomte de la Tour avouait, au cours de la discussion, qu'il craindrait que les employés ne fussent dans ce cas « moins reconnaissants envers le Gouvernement que s'ils tenaient directement de lui une pension à laquelle il contribuera toujours pour une grande part ».

Ce fut donc une mesure politique plutôt qu'un acte de libéralité vis-à-vis des fonctionnaires de l'Etat.

Au point de vue financier, le système de la loi de 1853 a été sévèrement apprécié par le conseil d'Etat à deux reprises, en 1851 et en 1876 (1).

loi a été en outre très préjudiciable à toute une Dangereuse pour les finances de l'Etat, cette catégorie de fonctionnaires.

Avant la loi de 1853, les agents des contribudes douanes avaient des caisses de retraites tions indirectes et les agents du service actif spéciales. Ces caisses étaient alimentées conformément à la loi du 6 floréal an V par une retenue de 5 p. 100 sur les salaires et par une quote-part dans le produit des amendes et confiscations qui leur est concédé par l'Etat. Elles étaient en grande prospérité et on peut affirmer que dans la douane le chiffre des retraites était égal à celui des traitements d'activité.

comment se traduit la libéralité du Trésor visLa loi de 1853 a changé tout cela, et voici à-vis des fonctionnaires de ces deux services.

En 1887, il a été payé en retraites:
Aux contributions indirectes.....
Aux douanes.....

6.054.428 8.055.989 Total.......... 14.110.417

Ces fonctionnaires avaient versé annuellement comme retenue de 5 p. 100 et retenue du premier douzième une somme de 2,380,000 fr. qui, capitalisée pendant trente-cinq ans pour les uns et trente ans pour les autres au taux de p. 100, donne un capital de 185 millions produisant une annuité de 9,250,000 fr.

Nous n'avons pas à revenir sur la loi de 1853. Lorsque le Gouvernement, malgré l'opposition clairvoyante de la commission, malgré les éloquents discours du rapporteur, M. Gouin, et de M. André, eut fait voter le principe de l'absorp-5 tion par l'Etat de l'actif de toutes les caisses spéciales, ces caisses jouissaient, depuis la loi du 15 germinal an II, d'une autonomie et d'une indépendance véritables.

Chaque administration gérant sa caisse pour son compte personnel était directement intéressée à ne consentir des liquidations de pensions qu'avec opportunité et à éviter des abus dont la responsabilité retombait sur elle seule; c'est ainsi que le rapporteur signalait « certaines caisses qui s'étaient résignées à des sacrifices temporaires, par des accroissements de retenues, plutôt que de recourir à des demandes de subvention du Trésor, toujours difficiles à obtenir, et qui avaient mis quelquefois en question le taux exagéré de pensions créées en dehors de la loi par de simples règlements administratifs ».

Il y avait là, pour le Trésor et pour les employés, des garanties précieuses de bonne et sage gestion, et l'état de la caisse des retraites des employés des douanes, au moment de sa liquidation en 1853, était assez prospère pour qu'on puisse affirmer, sans crainte de démenti, qu'elle aurait su se développer progressivement de manière à assurer à ses adhérents les augmentations successives nécessitées par les exigences nouvelles de l'existence humaine.

La prospérité des caisses de retraites fondées vers cette même époque par les chambres de commerce et par certaines grandes compagnies prouve que cette assertion n'est nullement téméraire.

Mais il y avait alors une tendance irrésistible à tout centraliser, à tout concentrer dans les caisses de l'Etat, qui devenait ainsi le dispensateur de toutes les grâces; on faisait ressortir l'état précaire de certaines caisses qui nécessitaient de lourdes subventions, et on alléguait la possibilité d'étendre le bénéfice de la retraite à tous les fonctionnaires de l'Etat en

établissant entre eux une solidarité complète. La pensée des auteurs du projet se retrouve à chaque ligne du rapport.

Nous y trouvons notamment ce passage:

L'Etat attache à son service 158,000 familles. Il est le dispensateur de leur présent et de leur avenir. Au milieu du mouvement qui emPorte la société, il établit un contre-poids à

Cette annuité, augmentée du produit annuel des retenues, atteint le chiffre de 11,630,000 fr., soit un déficit apparent de 2,480,417 fr.

Mais la caisse des pensions civiles n'est pas alimentée que par le produit des retenues sur part importante dans le produit des amendes les appointements: elle perçoit aussi une quote

et confiscations.

Les contributions indirectes moyenne de ce chef:

Par an.....

versent en

Les douanes versent environ.. Total des versements annuels (2)..

1.190.000 540.000 1.730.000

Capitalisée pendant trente-cinq et trente ans au taux de 5 p. 100, cette annuité produit un nouveau capital de 139,850,000 fr., dont l'intérêt est de 6,990,000 fr.

(1) Avis du conseil d'Etat, 25 novembre 1876: Considérant que dans le système adopté en 1853, l'Etat, moyennant des retenues prélevées sur le traitement des fonctionnaires, contracte vis-à-vis d'eux l'obligation de leur servir, après qu'ils ont rempli certaines conditions, une pension viagère d'un chiffre déterminé; que cette combinaison n'aurait pu fonctionner sans trop de péril pour les finances que si le Trésor avait conservé et fait valoir les fonds provenant des retenues; mais qu'au contraire ces ressources ont été inscrites parmi les recettes ordinaires et consommées annuellement comme le surplus des revenus publics; qu'ainsi on a créé des rentes viagères sans affecter aucuns fonds à leur acquittement; que la dépense des pensions semble déjà excessive bien que la loi ne remonte qu'à vingt-trois ans, qu'elle s'élèvera nécessairement jusqu'à l'époque où de nouveaux assujettis auront tous pris leur retraite; qu'en un mot la loi de 1853 a eu pour effet de constituer une sorte d'emprunt dont le remboursement grève déjà les budgets présents et grèvera de plus en plus les budgets futurs. Voir aussi l'avis du conseil d'Etat, du 9 mai 1851.

(2) Le conseil d'Etat évaluerait le produit annuel des retenues sur amendes et confiscations à 2,340,000 fr. pour tous les services.

En ajoutant à cette annuité le versement annuel, on trouve un nouveau chiffre de.

qu'il faut ajouter à la première annuité de ...

Soit..

8.720.000

11.630.000 20.250.000

Les pensions payées étant de..... 14.110.417 il y a un excédent annuel de.................... 6.030.583

La prétendue libéralité de l'Etat consiste donc à enlever chaque année à ces deux services une somme qui permettait d'augmenter de près de 50 p. 100 le montant des retraites.

Pour ces fonctionnaires, il est certain qu'ils auraient tout avantage à verser chaque année leurs retenues, soit à la caisse des retraites sur l'Etat, soit à une compagnie d'assurances sur la vie. Cela a été parfaitement mis en lumière dans le rapport présenté par le conseil d'Etat à l'occasion d'une proposition de loi sur la création d'une caisse nationale de prévoyance déposée en 1874 par l'amiral de Montagnac et plusieurs de ses collègues.

«Le conseil constate que la proposition de substituer une caisse de prévoyance au régime dans lequel l'Etat, en échange de la retenue prélevée, s'engage à fournir une pension à tous fes fonctionnaires qui remplissent certaines conditions déterminées, a pu être appréciée diversement, mais qu'on est aujourd'hui unanime à condamner le procédé financier qui consiste à consommer les retenues encaissées sans se préoccuper des pensions à servir; que cet emploi d'une recette à laquelle correspond un engagement de l'Etat constitue non pas une ressource normale, mais un emprunt onéreux. »

Et examinant la proposition de loi qui n'était que l'application à la caisse de prévoyance des principes de comptabilité des compagnies d'assurances sur la vie, il ajoute que cette combinaison«< serait particulièrement favorable aux instituteurs, aux préposés des douanes et des contributions indirectes, aux facteurs, en un mot à ces nombreux agents dont les traitements augmentent par petites sommes et varient d'un bout à l'autre de la carrière; que si ces fonctionnaires consacrent au service de l'Etat la période entière de leur activité, ils peuvent arriver à une rente viagère au moins égale à leur traitement ».

Les tableaux annexés au rapport font bien ressortir l'avantage résultant de ce système pour les agents des douanes, et encore faut-il observer que dans la proposition de M. Léon Say la caisse ne bénéficiait plus de la retenue sur le produit des amendes et confiscations et y substituait une subvention de 8 p. 100, substitution très désavantageuse aux agents du service actif pour qui la retenue sur les amendes constitue une majoration de près de 50 p. 100.

On nous objectera très certainement que la loi de 1853 établit entre tous les fonctionnaires une solidarité bien justifiée, et que si certaines caisses étaient prospères, d'autres ne pouvaient pas vivre et devaient recourir d'une manière permanente à la subvention de l'Etat.

C'est ainsi, dira-t-on, que si l'on constitue des caisses séparées pour les agents des contributions indirectes et pour les agents des douanes, la caisse des douaniers sera en déficit tandis que celle des agents des contributions indirectes aura un excédent de 7 millions par an.

L'objection est spécieuse, mais elle n'est pas exacte, et il est facile d'y répondre.

Sans doute le montant des pensions des agents du service actif des douanes, des veuves et des orphelins en payement au 1er décembre 1887 s'élevait à 8,055,989 fr.

La retenue se montait à 1,140,000 fr. et, capitalisée pendant trente ans, elle produirait un capital de 71,700,000 fr.

L'annuité moyenne de 540,000 fr. provenant de la retenue de 37.75 p. 100 sur le montant des amendes ne donne qu'un capital de 35 millions de francs.

Le revenu annuel de ces deux sommes ne dépasse pas 5,377,000 fr., soit un déficit appa

rent de 2,678,989 fr.

Mais il convient d'observer que les sommes déposées à la caisse des retraites ne sont pas la propriété de l'Etat et ne doivent pas être immobilisées pendant la période du service des pensions sans autre affectation que le payement aux fonctionnaires des intérêts du capital. Ces sommes doivent revenir aux parties prenantes, intérêts et capital, comme dans les cas des assurances. La caisse des retraites est en effet avant tout une tontine dont la fonction est de

restituer, dans les conditions déterminées par la loi, aux déposants survivants, d'une part les intérêts du capital formé, d'autre part le capital accumulé lui-même. C'est ainsi que le capital de 107,550,000 fr. doit être reversé par aunuités aux déposants pensionnés du service actif des douanes.

D'après le rapport sur le budget des finances de 1887, présenté par M. Dreyfus, le nombre moyen d'années d'existence que les tables de mortalité assignent aux pensionnaires, est de 16.05 pour les hommes et 17.61 pour les femmes. Le nombre des parties prenantes étant de 12,221 pour les hommes et de 6,551 pour les veuves et orphelins, les sommes capitalisées sont à répartir en 16.60 annuités au maximum, puisque la durée moyenne de jouissance est assurément inférieure aux chiffres ci-dessus en ce qui concerne les enfants pour qui le droit à pension cesse à la majorité.

Relativement au service actif des douanes et au capital par lui constitué, la somme que le Trésor est tenu de restituer annuellement dans les conditions de la loi du 9 juin 1883 s'établit au chiffre de 9,550,000 fr. formé par la quotité des intérêts qui décroît au fur et à mesure de la division du capital et de la quotité des annuités disponibles dont le montant est accru en proportion de la diminution des intérêts, de manière à maintenir au quantum fixé et invariable de 9,550,000 fr. la totalité des pensions inscrites pour les hommes, les veuves et les orphelins, savoir:

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1o.

2o.

3o.

40.

5o.

6o.

70.

8o.

90

10°.

11o.

12o.

13°.

14°.

15o.

16o.

17°......

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ci retirent du régime des pensions civiles, sur le prix également variable auquel reviennent ces avantages suivant la nature des fonctions qui sont à cet égard plus ou moins privilégiées, ainsi que sur la durée des périodes de jouissance révélée par les statistiques en ce qui regarde les pensionnaires de chaque administration.

Je viens d'indiquer quel devait être le fonctionnement normal de la caisse des pensions civiles en ce qui concerne la participation des agents du personnel actif des douanes à la formation de cette caisse.

Le total des pensions actuellement payées aux retraités des brigades douanières étant de 8,055,989 fr., et le montant des retenues capitalisées s'élevant, intérêts et annuités disponibles, à 9,550,000 fr., le bénéfice revenant au Trésor, ou plutôt la perte annuellement subie par le personnel actif des douanes par suite de l'absence de gestion de la caisse instituée par la loi du 9 juin 1883 ressort à 1,494,011 fr. Peut-être voudra-t-on critiquer le taux de 5 p. 100 auquel nous avons calculé la capitalisation (1).

Nous savons bien qu'en 1877 ce chiffre avait été repoussé par M. Léon Say comme trop élevé et qu'on avait proposé le taux de 4 1/2 p. 100, mais nous ferons observer que les anciens douaniers dont la retraite a été liquidée antérieurement à la loi de 1887 ont subi leurs retenues pendant une période où le taux des emprunts faits par le Trésor a été presque constamment égal ou supérieur à ce chiffre.

Une autre objection plus sérieuse en apparence et qui est contenue en germe dans l'exposé des motifs du projet de loi présenté en 1877 par M. Léon Say, consiste à dire que la retenue de 3 p. 100 sur le produit des amendes et confiscations est une véritable libéralité de la part de l'Etat et doit être considérée comme une subvention indirecte. Il nous paraît impossible d'admettre cette interprétation. Ce n'est pas par un sentiment de libéralité que l'Etat s'est décidé à abandonner à ces agents une partie des amendes et des confiscations 2.708.642 6.841.358 9.550.000 qu'ils font entrer dans les caisses du Trésor,

2.366.574 7.183.426 9.550.000 2.007.403 7.542.597 9.550.000 1.630.273 7.919.727 9.550.000 1.234.287 8.315.713 9.550.000

381.926 7.638.529 8.020.455

c'est afin de rendre leur surveillance plus active qu'il a tenu à faire dépendre en partie de leur vigilance la rémunération de leur travail. Le système qui consiste à intéresser les em818.501 8.731.499 9.550.000 ployés dans les bénéfices ou produits est bien connu, le commerce et l'industrie l'emploient d'une manière presque générale, et il faut dire simplement que les agents des douanes ont un traitement se composant de deux éléments, un minimum fixe qui leur est garanti par l'Etat et une partie variable qui dépend en partie de leur initiative et de leur zèle. La retenue faite par l'Etat sur la partie variable des traitements, foin d'être une libéralité, est donc au contraire une contribution forcée, et cette portion du capital appartient aux agents au même titre

Les sommes développées à ce tableau ayant été décomptées à raison d'un capital de 107,000,000 de francs et non de 107,550,000 fr., chiffre indiqué plus haut, la minime erreur qui a été nécessairement commise en déterminant pour la facilité des calculs à un chiffre plein Î'intérêt du capital dès la première année se trouve partiellement compensée. Ce capital de 107,550,000 fr. est du reste lui-même certainement inférieur à l'ensemble des sommes qui pourraient et devraient être effectivement capitalisées, attendu que, d'une part, il résulte de la capitalisation par année des sommes versées et non de la capitalisation par mois, et que, d'autre part, les sommes annuellement encaissées sur les annuités pour le service des pensions civiles dépassent dans la moyenne 540,000

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Cela peut se comprendre quand il y a une certaine alternance, quand ce sont tantôt les uns et tantôt les autres qui viennent combler le déficit. Mais que dire quand ce sont toujours les mêmes qui payent et quand ce sont les agents des contributions directes et indirectes qui voient d'une manière permanente prélever sur leur modeste solde l'appoint nécessaire pour assurer les retraites des autres services?

Depuis trente-six ans les agents du service actif des douanes ont ainsi versé dans la caisse commune 1,400,000 fr. par an; l'Etat s'est servi de cette somme pour payer les pensions d'autres fonctionnaires, il a donc bénéficié au détriment des douaniers, et ce n'est qu'en 1887 qu'il s'est décidé à reconnaître que ces agents se trouvaient ainsi perpétuellement lésés et qu'il y avait lieu d'augmenter leur part. On a partiellement rendu justice, mais les anciens agents dont la pension avait été liquidée avant la loi de 1887 ont été oubliés, et ils continuent à être victimes de cet état de choses.

On voit par ce qui précède que ce qu'ils réclament ce n'est pas un acte de libéralité, mais une simple restitution.

Nous avons dû reconnaître l'impossibilité, dans l'état actuel de nos finances, d'inscrire au budget les crédits nécessaires pour faire immédiatement par voie budgétaire l'unification demandée; le ministre des finances craindrait de détruire l'équilibre déjà si instable de son budget en y introduisant, sur un seul chapitre. une augmentation de plus de 2 millions; mais s'ensuit-il de là que de bons et loyaux semiteurs dont la vie tout entière a été passée as service de l'Etat doivent se voir refuser la justice à laquelle ils ont droit?

Les signataires de la proposition de loi ne l'ont pas pensé et ils ont cru répondre au désir du Gouvernement et au vœu manifesté par le Parlement en cherchant le moyen de rendre possible cette unification.

Ils croient que la caisse des retraites, une des plus heureuses créations de l'Assemblée de 1850, pourrait venir utilement en aide au Trésor. Elle pourrait avancer pendant quelques années les sommes nécessaires pour compléter la pension des anciens douaniers, et le Gouvernement la rembourserait de ses avances en lui versant pendant un certain nombre d'années une annuité égale au chiffre inscrit au budget de 1890 pour le payement des pensions liquidées avant la loi de 1887, soit environ 7 millions.

L'opération très simple s'établirait ainsi : Pendant les premières années, la caisse des retraites viendrait suppléer à l'insuffisance du crédit inscrit au budget; pour cela l'Etat lui verserait directement la somme de 7 millions. La caisse payerait aux titulaires le montant de leurs pensions suivant l'état qui lui aurait été remis.

Elle leur fournirait le complément de cette pension et porterait la différence en compte au débit du Trésor.

La première année, elle se trouverait ainsi en découvert de 2,200,000 fr. environ, la différence irait en diminuant d'année en année suivant une proportion donnée par les tables de mortalité. Au bout de cinq ou six ans, l'annuité versée par le Trésor se trouvant supérieure au chiffre des pensions payées par la caisse, celleci commencerait à rentrer dans ses avances et

On veut enfin justifier la loi de 1853 en disant qu'il est juste d'établir une solidarité complète entre les fonctionnaires de l'Etat, que c'est là un grand principe qui domine toute cette matière et qu'il est tout naturel et même indisvir que les 6 dixièmes de la somme de 9 mil-pensable que les uns viennent compléter ce que porterait chaque année au crédit de l'Etat l'exl'apport des autres aurait d'insuffisant. Cette cédent demeuré en fin d'année. raíson est développée dans toutes les discussions de la loi de 1853.

On a pu voir, en outre, qu'en ce qui concerne la dix-septième année, le Trésor n'a plus à serlions 550,000 francs, soit 5,730,000 fr. Le reliquat restant alors à répartir étant de 8,020,455 francs, il apparaît un disponible net de 2 millions 290,455 francs à imputer à un fonds de ré

serve.

Peut-être enfin ne sera-t-il pas inutile de faire observer à cette place qu'il a été fait application aux douaniers pour le reversement des intérêts et annuités de la moyenne d'existence assignée par les tables de mortalité à tous les pensionnaires civils, actifs et sédentaires, et que cette moyenne est incontestablement supérieure à celle que des tables de mortalité établies par catégorie de services administratifs indiqueraient pour les agents des brigades dont les fonctions particulièrement périlleuses et fatigantes n'ont pas de similaires ailleurs. On estimera sans doute qu'il serait intéressant de divulguer les tables en même temps que le détail des sommes versées à la caisse des pensions civiles. Le bulletin du ministère des finances du mois de février 1888 a bien publié huit tableaux énonçant certains renseignements, mais ces renseignements ne relatent rien qui soit de nature à éclairer les intéressés sur les avantages variables que ceux

(1) Le conseil d'Etat a cru pouvoir prendre pour base de ses calculs le taux de 5 p. 100; il s'appuyait sur les motifs suivants :

«La caisse des retraites pour la vieillesse, obligée par la loi de placer ses fonds exclusivement en rentes sur l'Etat, a obtenu le taux moyen de 4.67 p. 100 dans une période pendant laquelle le cours de la rente a été le plus souvent très élevé. L'autorisation donnée à la caisse de prévoyance, d'une part, de faire aux départements et aux communes des prêts dont l'intérêt est presque toujours supérieur au revenu donné par la rente; d'autre part, de placer ses fonds en obligations de chemins de fer et par conséquent d'absorber des séries entières d'obligations et de bénéficier sûrement du remboursement au pair, toujours aléatoire pour le particulier qui ne possède qu'un nombre respectable de titres, semble de nature à lui assurer un taux d'intérêt bien supérieur au taux moyen que produisent les placements de la caisse des retraites. >>

Les intérêts seraient calculés à 3 1/2 p. 100, la caisse ne ferait ni bénéfice ni perte, et l'opération se faisant en compte courant prendrait fin dès que la balance se trouverait établie.

Dix à douze ans suffiraient, selon toute probabilité, à liquider le compte; une fois le compte arrêté, le Trésor ne ferait plus que couvrir la caisse du montant des pensions restant à payer.

Le sacrifice total consenti par le Trésor serait peu considérable étant donné l'âge moyen des retraites, qui est d'environ soixante-cinq ans (exactement soixante-quatre ans cinq mois), donnant un taux d'extinction très rapide.

Au point de vue de la procédure parlementaire à suivre, il importe en premier lieu de distraire du chiffre des pensions civiles (chapitre 31 du ministère des finances) le montant des pensions dues aux anciens agents du service actif retraités avant la loi de 1887. Le chiffre des pensions payées dans le courant de 1887, déduction faite de 223,334 fr. de pensions liquidées suivant le nouveau tarif au cours de l'année 1887, était exactement de 7,832,655 fr. En tenant compte de 450,000 fr. d'extinctions

1

rvenues dans le courant de 1888 et de celles i se reproduiront en 1889, on peut s'assurer He la somme de 7 millions représente assez ensiblement le crédit à inscrire pour ce service a budget de 1890.

Nous croyons donc qu'il convient de prendre ce service comme base de l'opération et de faire n chapitre 31 bis, ainsi fibellé : « Annuité Dayée à la caisse nationale des retraites pour pensions des agents du service actif des doua' nes, des veuves et des orphelins, liquidées avant la loi du 25 février 1887. »

Ce chapitre 31 bis sera maintenu au budget Conformément aux dispositions de la proposition de loi, pendant le temps nécessaire pour que la caisse des retraites se récupère de ses

vances.

L'économie générale du budget ne sera donc Pas changée et aucune augmentation de crédit De figurera de ce chef à la colonne des déPenses.

Que si l'on objecte que c'est un emprunt déquisé, nous répondrons que c'est le contraire 'un emprunt, puisque c'est le remboursement Partiel de sommes que le Trésor public a perCues pendant de longues années, en les détournant de leur véritable destination.

Il s'agit là du patrimoine des pauvres, et c'est une dette d'honneur que les Chambres françaises ne voudront pas renier.

Le rôle que nous voulons faire jouer à la caisse des retraites sur la vieillesse est à peu près le même que celui que le conseil d'Etat assignait en 1877 à la Caisse des dépôts et consignations (1).

L'opération pourrait se faire également avec cette Caisse, mais nous croyons préférable d'en, charger la caisse des retraites sur la vieillesse qui rentre absolument dans les conditions de la caisse de prévoyance que M. Léon Say proposait d'établir en 1877.

L'objection grave qu'on peut nous faire, c'est que nous allons reporter sur les années 1899 et 1900 une charge excessive.

A cela nous répondons :

1° Qu'en admettant avec le conseil d'Etat que les extinctions d'une année représentent les concessions de la treizième année précédente, on voit que les années sur lesquelles doit porter la plus lourde charge coïncident précisément avec la période de 1880 à 1887, pendant laquelle le chiffre des pensions a passé brusquement de 44,790,000 fr. à 60 millions, soit un écart de 16 millions par suite de la réforme de la magistrature et des changements de personnel administratif.

La charge maxima coïncidera donc avec une période dans laquelle les extinctions seront nombreuses et l'équilibre budgétaire ne sera pas détruit.

2o Qu'il est facile d'atténuer cette transition, en augmentant de 500,000 fr. les premières annuités et en diminuant les dernières qui se répartiront sur un nombre plus considérable d'années, de manière que l'augmentation des dernières annuités ne dépasse pas un maximum de 1,500,000 fr. par exemple. C'est une combinaison extrêmement simple et qu'il suffit d'indiquer.

Ajoutons enfin que nous réservons à l'Etat la faculté de reprendre à toute époque le service direct des pensions, et d'arrêter le compte courant ouvert par la caisse nationale des retraites en lui remboursant le montant du solde reconnu en sa faveur.

Dans ces conditions, nous espérons que la Chambre ne se refusera pas plus longtemps à chercher le moyen le plus économique de

(1) Texte proposé par le conseil d'Etat :

TITRE VIII

Dispositions transitoires.

Art. 44. Le ministre des finances est autorisé à passer, avec la Caisse des dépôts et consignations, un traité ayant pour objet de fixer le montant du capital à verser en une fois, ou de l'annuité à fournir pendant un certain nombre d'années par l'Etat pour que la Caisse s'engage à remettre au Trésor le montant des retenues, et à payer les subventions afférentes aux traitements des fonctionnaires nommés pendant la période de transition.

Ce traité est approuvé et ne peut être modifié qu'en la forme prescrite par les règlements d'administration publique; il ne doit causer ni profit ni perte à la Caisse des dépôts et consignations.

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Art. 2. Pour couvrir la caisse des retraites des avances qu'elle devra faire pendant les premières années pour l'augmentation des retraites, le Gouvernement s'engage à maintenir au budget un crédit de 7 millions, montant approximatif des pensions à servir en 1890, jusqu'à ce que la caísse des retraites ait été intégralement remboursée des avances qu'elle devra faire dans les premières années. Les intérêts seront calculés à raison de 3 1/2 p. 100.

Art. 3. L'opération devra se faire en compte courant sans qu'il puisse en résulter pour la caisse nationale des retraites ni bénéfice ni perte. Le versement de l'annuité cessera de plein droit à partir du jour où la caisse sera rentrée dans ses avances et le Trésor n'aura plus à verser annuellement que les sommes nécessaires pour assurer le service des pensions restant à payer.

Art. 4. L'Etat conserve la faculté de reprendre à toute époque le service direct des pensions, objet de la présente loi et d'arrêter le compte courant ouvert par la caisse nationale des retraites en lui remboursant le montant du solde reconnu en sa faveur.

ANNEXE N° 134

PROPOSITION DE LOI contre le duel, présenté par M. Cluseret, député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Messieurs, à toutes les époques de décadence le duel a pris le haut du pavé. Il en est actuellement maître en France.

Et ce qui caractérise bien le duel, son motif et son but, la réclame, c'est qu'il s'est retranché principalement dans cette partie de la société moderne qui en vit, politiciens et journalistes.

Voilà les duellistes de l'époque. L'armée en fournit très peu.

Sur cent duels, dix sont provoqués par la lâcheté morale du qu'en-dira-t-on?

Les quatre-vingt-dix autres n'ont qu'un but: attirer l'attention sur le duelliste, et le faire passer pour brave, tout en étant du pleutre le plus parfait modèle.

Ce qui intéresse les duellistes, c'est le compte rendu imprimé par la presse.

Ce qu'ils redoutent c'est le danger.

Aussi serait-il de la dernière inconvenance et déloyal au suprême de chercher à se faire du mal. On ne se bat pas l'un contre l'autre, mais pour la galerie. Dès lors une simple égratignure au poignet ou à l'avant-bras sulfit. Pour ces gens l'honneur commence à l'ongle et finit au coude.

La presse délivre un certificat de bravoure et tout est dit.

Cette réduction Colas du duel dépasse cependant la puissance stoïque de certains duellistes de la plume.

Tout le monde a présent à l'esprit les deux duels homériques du directeur d'un des grands journaux parisiens.

La vue de l'épée le mit en telle émotion, qu'il perdit tout sang-froid et ne put commander l'immobilité à ses jambes. Elles se mirent en mouvement malgré lui et l'emportèrent loin de son adversaire qui, philosophiquement, l'épée sous le bras, roulait une cigarette en attendant qu'il plût à son adversaire de venir offrir son avant-bras à la piqûre réglementaire.

La plupart des duellistes comptent sur la pratique des salles d'armes pour intimider cer

L'escrime est devenue partie intégrante des humanités. Si celles-ci développent la faconde électorale et parlementaire, celle-là lui assure l'impunité.

casses

Le peuple, avec son tact simpliste, ne comprend rien à ces hypocrites bravoures Fraen face des faibles et qui se laissent souffleter quand ils rencontrent plus forts qu'eux. Il y voit tout au contraire la pire des lâchetés, la lâcheté morale incompatible avec la bravoure physique ou militaire.

Un militaire brave au feu peut avoir des défaillances morales, mais un homme dépourvu d'énergie morale ne sera jamais brave au feu.

Celui qui ne sait s'élever au-dessus de l'opinion pour la juger et réserver sa soumission à sa conscience, celui-là ne peut inspirer aucune confiance à la patrie. Brave accidentellement, aux hasards d'une bonne digestion, il sera, demain, lâche sous une influence contraire. Il faut à un grand peuple d'autres virilités, d'autres sécurités pour les jours sombres, où la patrie menacée réclame non seulement les bras, mais les cœurs.

La virilité d'un peuple réside dans son entrainement moral et non dans des pratiques aussi grotesques qu'odieuses et qui en sont la négation.

Jamais dans ma longue expérience des hommes d'action au milieu desquels j'ai dépensé ma vie, je n'ai rencontré un duelliste.

Ni Garibaldi et ses compagnons, ni Mirovlawski et ses Polonais, ni les officiers turcs, ces souverains contempteurs de la mort, ni les officiers américains, ni les officiers anglais, ni les officiers français, ni les officiers russes, dans les diverses campagnes que j'ai faites avec eux ou contre eux, ne m'ont offert le triste spectacle de duellistes ferraillant pour la galerie.

Dans une seule armée, j'ai été à même d'en constater quelques exemples, dans l'armée italienne et à une époque où certaines animosités politiques pouvaient jusqu'à un certain point expliquer le fait.

Même en Amérique où le duel était alors dans les mœurs, mais duel sérieux toujours suivi de mort il ne me souvient pas d'avoir vu un seul duel militaire pendant les quatre années qu'a duré la guerre de sécession.

En France, il faut remonter à la triste époque de la Restauration pour trouver le duel dans l'armée, et là. comme en Italie, la haine, conséquence naturelle des événements qui venaient d'ensanglanter l'Europe, en était la cause. Il disparut avec la Restauration.

Le duel, sans danger pour les duellistes, tel qu'il se pratique en France, constitue cependant un danger par la maladresse. On l'â vu récemment à Longchamps et à Marseille. Deux maladroits ont donné la mort dans un duel. Maladresse très fâcheuse, complètement imprévue et très regrettée de la part de l'adversaire obligé de perdre son temps en comparutions, sans objet pratique, devant la justice.

On objectera qu'il n'y a rien de parfait en ce monde et que, pour deux maladroits, on ne saurait supprimer une institution qui jadis fit la fortune des restaurateurs et fournit aujourd'hui suffisamment de copie au reportage.

Va-t-on supprimer le corps de bâtiment parce que chaque jour des couvreurs dégringolent des toits, des maçons de leur échafaudage? Faut-il supprimer l'industrie et le duel en parce que de temps à autre la machine éventre le mécanicien ?

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Non, car d'un côté je constate l'utilité du sacrifice tandis que je cherche en vain celle du duel.

Le duel civil en France n'a qu'un but, décerner sans danger un brevet de bravoure. C'est donc l'hypocrisie de la bravoure, ou la pire des lâchetés, l'abaissement du niveau moral national, la destruction des caractères.

Au point de vue intellectuel le duel est-il plus défendable? Peut-on admettre que la force prime la raison et qu'une preuve soit inférieure à un dégagement, un battement, ou un coup droit?

Au point de vue social, la substitution de la force individuelle à la justice et à la raison est la négation de la société. Ce ferraillement perpétuel, s'il venait à être légalisé, serait le retour au point de départ des sociétés primitives.

Gâtechair y serait président et Tom Cannon ou Sullivan chef du cabinet.

Au point de vue légal, c'est simplement la loi

bafouée, puisque le duel se pratique au mépris des lois qui de tout temps et chez tous les peuples l'ont proscrit.

En ce qui concerne la France, la cour de cassation avait fixé la jurisprudence en 1837. Elle assimilait le duel soit à l'homicide, soit aux blessures, soit aux voies de fait suivant le cas; mais les mœurs sont tellement déchues et la loi si peu respectée que, l'année dernière, il nous a été donné le triste spectacle de deux ministres ferraillant au mépris de la loi et sous la protection de la police.

Comment invoquer le respect des lois, si ceux qui sont chargés de les faire respecter donnent au peuple l'exemple de leur violation?

Un peuple viril eût immédiatement demandé compte à ses mandataires d'une telle violation. Il n'en a rien été. La loi a été violée, puis étouffée avec la complicité parlementaire.

Cet état de choses dégradant et avilissant à tous les points de vue doit cesser.

Il n'est pas admissible que la France républicaine, fille du peuple et des Droits de l'homme, c'est-à-dire de la raison et de la morale, continue à tolérer une pratique aussi odieuse que ridicule.

Il est impossible que la France du centenaire, celle qui vient de donner au monde le spectacle d'un effort civilisateur aussi considérable que l'Exposition, déclare urbi et orbi qu'elle entend s'arrêter dans sa marche civilisatrice et retourner à la barbarie.

En conséqence, nous soumettons à la Chambre la proposition de loi suivante; pour laquelle notre collègue M. Freppel avait obtenu la prise en considération dans la dernière législature.

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La même peine sera applicable à ceux qui auront accepté d'assister au duel en qualité de témoins.

Art. 3. Celui qui excite directement un tiers à se battre en duel, ou qui, parce que le tiers ne provoque pas une autre personne en duel ou n'accepte pas une provocation, lui fait des reproches en public, le menace de mépris ou l'expose à la raillerie, sera puni d'un emprisonnement de six jours à un mois et d'une amende de 16 francs à 200 francs.

Art. 4.

Le duel, même s'il n'est résulté de la rencontre ni mort ni blessure, sera puni d'un emprisonnement de six mois.

Art. 5. Celui qui aura blessé son adversaire en duel sera puni d'un emprisonnement de deux à trois ans, selon la gravité des blessures, sans préjudice des dommages-intérêts qui pourront être accordés au blessě, à ses ascendants ou à ses descendants

Art. 6. Celui qui aura tué son adversaire en duel sera puni de la détention pour une durée de six a douze ans, sans préjudice des dommages-intérêts qui pourront être accordés à la veuve, aux descendants ou ascendants de la victime.

Art. 7. Celui qui, usant de déloyauté et de perfidie, aura tué ou blessé son adversaire en duel, sera passible des peines de droit commun portées contre le meurtre, les blessures et coups volontaires, aux sections 1 et 2 du titre II du code pénal.

Art. 8.

1

Dans tous les cas qui précèdent, les règles concernant la complicité seront appliquées aux témoins du duel, conformément aux articles 59 et suivants du code pénal.

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1o D'assurer aux anciens sous-officiers et soldats entrés dans les services civils de l'Etat, au moment où ils sont admis à faire valoir leurs droits à la retraite, une rémunération pour les années qu'ils ont passées sous les dra

peaux;

20 De leur permettre de faire entrer leurs années de service militaire dans le décompte du temps exigé par l'Etat pour avoir droit à une pension.

Cet article 8 est ainsi conçu :

» Les services dans les armées de terre et de mer concourent avec les services civils pour établir le droit à la pension et seront comptés pour leur durée effective, pourvu toutefois que la durée des services soit au moins de douze ans dans la partie sédentaire ou de dix ans dans la partie active.

« Si les services milltaires de terre ou de mer ont été déjà rémunérés par une pension, ils n'entrent pas dans le calcul de la liquidation; s'ils n'ont pas été rémunérés par une pension, la liquidation est opérée d'après le minimum attribué au grade par les tarifs annexés aux lois des 11 et 18 avril 1831. »

La loi du 11 avril 1831 visée par cet article est relative aux pensions de l'armée de terre; celle du 18 avril est relative aux pensions de l'armée de mer.

Ces lois étant les seules qui déterminaient le chiffre des annuités à payer pour les services militaires, les législateurs de 1853 ne pouvaient que s'en référer à ces tarifs.

Voici du reste deux tableaux indiquant par catégories de militaires le taux de la pension pour trente ans de services :

Armée de terre.

Loi du 11 avril 1831.

Adjudant sous-officier; secrétaire, archiviste de place, s'il n'est pas officier; portier-consi

GRADES

Adjudant ou assimilé.... Sergent-major ou assimilé.. Sergent ou assimilé... Caporal ou assimilé.......... Soldat ou assimilé..

Moyenne par homme et par année..

L'examen de l'ensemble de ces lois indique nettement que les membres des différentes Assemblées qui les ont élaborées ont été animés d'une même pensée élever les tarifs afin d'assurer une rémunération convenable pour le temps passé à servir son pays.

Il est très important de remarquer que chacune de ces lois a abrogé celle qui l'a précédée; de telle sorte qu'en équité comme en fait la loi du 23 juillet 1881 est la seule en vigueur pour établir le décompte des annuités dues pour services militaires fors de la liquidation de la pension militaire.

Quant aux anciens militaires entrés dans les services de l'Etat, ils se sont vus privés des avantages stipulés dans les lois successives, et à l'heure actuelle le temps qu'ils ont passé sous les drapeaux continue à leur être payé d'après les tarifs de la loi de 1831.

Depuis 1878, la question est pendante devant la Chambre des députés, sans qu'aucune solution ne soit intervenue pour mettre fin à un état de choses tout à fait normal.

A chaque nouvelle législature la proposition de loi subit toutes les phases de la procédure parlementaire jusqu'à l'inscription à l'ordre du jour, sans pouvoir arriver en ordre utile pour la discussion publique.

Comme nos honorables prédécesseurs, nous pensons que la perte imposée à certains anciens militaires placés dans des situations identiques à celles de leurs camarades, constitue une réelle injustice, et nous estimons que faire revivre au détriment de ceux qui, en quittant l'armée, sont entrés dans les services civils de

gne de ire classe dans les places de guerre, 400 fr., soit 13 fr. 33 par année.

Sergent major, maréchal des logis chef: tambour-major, trompette - major, maréchal des logis trompette; portier - consigne de 2 classe dans les places de guerre; gardien de batterie, 300 fr., soit 10 fr. par année.

Sergent, maréchal des logis, maître ouvrier, dans les corps de troupes, portier-consigne de 3 classe dans les places de guerre, et portierconsigne des parcs de construction du train des équipages militaires, 250 fr., soit 8 fr. 3 par année.

Caporal, brigadier, 220 fr., soit 7 fr. 33 par an

née.

Soldat de toute arme, instrumentiste, tambour, trompette, clairon, batelier, aide portierconsigne, 200 fr., soit 6 fr. 66 par année. 9 fr. 13. La moyenne par homme et par année est de

Armée de mer.

Loi du 18 avril 1831.

Maître entretenu au-dessous de 1,500 fr., conducteur de travaux de 2 et 3 classes, 500 fr soit 16 fr. 66 par année.

Second maître et contremaître, 250 fr., soit 8 fr. 33 par année.

Aide et quartier-maître, 220 fr., soit 7 fr. 33 par année-.

Matelot, novice et mousse, 200 fr., soit 6 fr.6 par année.

La moyenne par homme et par année est de 9 fr. 745.

Tels étaient les chiffres minima de la pension pour les services militaires.

Depuis cette époque, diverses lois sont intervenues qui ont amélioré les tarifs dans une large mesure; ce sont les lois des 26 avril 1855, 18 août 1879 et 23 juillet 1881,

Le tableau ci-dessous indique la progression.

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l'Etat, une loi qui n'existe plus, constitue un acte que le législateur doit faire cesser.

La pension de retraite pour services militaires n'est point un secours; c'est une dette contractée par l'Etat envers des citoyens qui ont exposé leur vie pour défendre et servir la patrie. Dans cet ordre d'idées, le dévouement au pays n'a pas d'échelons à gravir.

C'est pour cela que l'engagement pris est un. Lorsqu'on marche au feu, on ne s'inquiète guère de la jurisprudence qui devra intervenir quand viendra l'heure de la retraite.

Nos pères l'avaient si bien compris que dans l'importante loi du 22 août 1790, qui doit être considérée à juste titre comme la loi fondamentale concernant les pensions, on y trouve un article 4 ainsi conçu :

«Tout citoyen qui a servi, défendu, illustré. éclairé sa patrie, ou qui a donné un grand exemple de dévouement à la chose publique, a des droits à la reconnaissance de la nation et peut, suivant la nature et la durée de ses services, prétendre aux récompenses. »

L'article 8 de la loi de 1853 ne répond guére cette pensée. Il autorise une mauvaise interprétation de la loi; il est dès lors indispensable qu'il soit modifié.

Du reste, quelques exemples montreront à quels fâcheux résultats conduit l'application actuelle de la loi :

Un employé purement civil, ayant un traitement moyen de 1,000 fr. pendant les six dernières années, lesquelles déterminent la quotité du chiffre de la pension, aura droit, d'après la loi de 1853, à une retraité égale à la moitié du traitement moyen, soit 500 fr. par an.

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