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29 suivant. Le 15 février une drague commençait le travail et celui-ci était achevé le premier avril suivant. Pour l'appuyer dans la mesure du possible on s'efforça, au moyen d'une ligne de clayonnages de 800 mètres de longueur, de fermer un chenal secondaire qui avait coupé le banc du Bec (sondages généraux de 1888) et qui donnait passage, de Garonne en Dordogne, à des courants traversiers dont la violence à mi-marée était extrême. De chaque côté de cette ligne on versa, en outre, des produits de dragages destinés à hâter le colmatage de la rivière. Les efforts tentés dans cette direction réussirent et à la fin d'avril 1889, la navigation était en possession, sur la barre amont, d'un chenal de plus de 100 mètres de largeur ayant 3 mètres environ de profondeur sous l'étiage. Ce chenal se maintint jusqu'à l'époque du grand hiver 1890-1891, durant lequel les glaces encombrèrent le lit maritime jusqu'à Blaye pendant près de trois semaines, tarirent en partie les affluents et diminuèrent la chasse des marées. Le seuil d'Ambès amont tomba alors à 2 m. 55 (sondages du 28 janvier 1891).

On procéda alors à un deuxième essai de dragages non plus poussé comme le premier à 3 mètres de profondeur sous l'étiage, mais bien à 4 mètres. Ce dragage, qui se trouvait déjà autorisé par une décision ministérielle antérieure du 28 août 1890, fut terminé le 14 août 1891.

Il fut suivi, conformément à la décision du 12 janvier 1892, d'un troisième et dernier dragage à 5 mètres de profondeur, celui-là sur les deux barres amont et aval à la fois; le dragage de la barre amont a été ouvert à travers un banc compact d'argile régnant au-dessous de la cote 4; on ne rencontra sur la barre aval que des sables plus ou moins mêlés de vase.

Les deux premières opérations de dragages dont nous venons de parler ont porté sur des cubes de 75.254 m3 et de 185.533 m3, et la troisième sur un cube de 650.000 m3 environ de déblais en 1892 augmenté d'un cube sensiblement égal en 1893.

Le creusement intérieur des bassins de l'île Cazeau avait été terminé à la fin de l'année 1890. Ces bassins, au nombre de 6, étaient séparés les uns des autres par des digues perpendiculaires

à l'axe de la rivière, appelées traverses. Lorsqu'il s'agit de mettre ces bassins en communication avec la rivière, le plan de l'exécution ayant été modifié, on dut formuler de nouvelles propositions d'achèvement.

Dans les conditions où l'opération se présentait, si on s'était borné à faire disparaître l'enceinte extérieure et les traverses des bassins, on aurait réalisé un simple élargissement de la rivière, obtenu par l'incorporation au lit d'un plateau dragué à la cote-3, plus élevé, par suite, que le thalweg existant. On ne voyait pas pourquoi les courants auraient quitté ce thalweg pour en creuser un nouveau le long de la rive nouvelle absolument rectiligne. Une décision ministérielle du 29 janvier 1891 prescrivait la marche suivante :

Exécution de dragages sur la ligne de navigation jusqu'à la cote 5. (Ce sont les dragages qui ont fait ultérieurement l'objet d'une nouvelle décision du 12 janvier 1892 et qui ont été déjà mentionnés ci-dessus).

Réunion des bassins à la rivière au moyen d'un recoupement de l'enceinte extérieure tracé de façon à réaliser le premier élargissement de 100 mètres prévu par les projets primitifs.

Ajournement du surplus du rescindement jusqu'à ce qu'on ait pu constater les résultats obtenus par la première partie du travail.

Le rescindement limité à 100 mètres était entièrement réalisé au mois de juillet 1892. Au cours de ce travail ont eu lieu des ruptures des traverses intermédiaires qui ont produit la mise en communication indirecte de tous les bassins avec la rivière dès le 8 mai 1891.

IV. TROISIÈME PÉRIODE DES TRAVAUX (1892-1910).

Commission spéciale du 12 octobre 1892.

A la suite d'une intervention de la Chambre de commerce, qui posait la question de savoir si la direction imposée aux travaux, particulièrement en ce qui concerne le Bec d'Ambès,

était bien conforme au programme de la loi de 1881, une commission d'Inspecteurs généraux fut nommée par décision ministérielle du 12 octobre 1892 (1) en vue de constater les résultats obtenus et de déterminer les mesures à prendre pour assurer la continuation des travaux. La connaissance de la rivière acquise au cours des dix années d'expériences, ainsi que les progrès faits dans le même temps par l'hydraulique fluviale, justifiaient entièrement une mise au point rationnelle du programme à suivre.

Les idées qui avaient guidé les auteurs de l'avant-projet en 1880 reposaient avant tout sur l'influence du tracé des rives considérée comme essentielle au point de vue de la stabilité des passes. Or, le rapport présenté par M. Franzius au Congrès de Francfort-sur-le-Mein (1888), à la suite des travaux de régularisation qu'il venait d'effectuer sur la Weser, avait fait prévaloir depuis peu l'opinion que « le principe fondamental de toute régularisation dans la partie maritime d'un fleuve consiste à augmenter le plus possible la force vive de l'onde-marée, par suite le cube d'eau à l'entrée et à la sortie ainsi que la vitesse de cette eau, ou encore le pouvoir hydraulique en chaque point et à chaque instant ». Les deux points de vue différents qui viennent d'être exposés n'étaient d'ailleurs nullement contradictoires à l'étude du tracé en plan, il fallait seulement joindre celle de la succession des sections transversales et des vitesses aux divers points.

et

Le programme nouveau exposé pour la section de Bordeaux au Bec, dans deux rapports des Ingénieurs des 8 février (2) et 3 décembre 1892 (3), avait en conséquence spécialement en vue l'amélioration du lit mineur. Le lit majeur, auquel on doit surtout demander d'être aussi vaste que possible, en vue de l'emmagasinement d'un grand volume de flot dont les eaux

(1) Composée d'inspecteurs généraux des Ponts et Chaussées : M. Fenoux, président; MM. Carlin, Eyriaud des Vergnes, Mengin-Lecreulx, Holtz, Quinette de Rochemont, M. Ribière, secrétaire.

(2) M. Pasqueau, ingénieur en chef; M. Crahay de Franchimont, ingénieur ordinaire.

(3) M. Crahay de Franchimont, ingénieur en chef; M. de Volontat, ingénieur ordinaire.

puissent exercer une action corrosive, tant au montant qu'au perdant, se trouvait fixé entre Bordeaux et le confluent, sur l'une et l'autre rive, de telle façon qu'une augmentation de sa largeur pour augmenter l'emmagasinement de l'onde-marée, serait sortie sans conteste des limites pratiquement réalisables. Le lit mineur, situé au-dessous des basses mers, était d'ailleurs la partie qui intéressait le plus directement la navigation puisque c'est dans ce lit que se faisait la concentration des eaux, dans la dernière période du jusant, c'est-à-dire dans la période où l'action de creusement de ce courant paraît être la plus efficace.

La détermination du lit mineur, tant en profil transversal qu'en plan, était donc le problème qu'on devait chercher à résoudre, en considérant toujours l'unité de chenal pour le flot et le jusant comme le desideratum à réaliser. On étudiait donc successivement les largeurs et surfaces des sections au niveau de basse mer (les sections étant supposées trapézoïdales pour simplifier les calculs) ainsi que le tracé en plan. On parvenait ainsi à un aménagement théorique du lit de la Garonne maritime dont il convenait de se rapprocher le plus possible.

Les travaux à exécuter à cet effet devaient comprendre des terrassements et des consolidations du lit et des rives. En ce qui concerne les terrassements, il n'était pas nécessaire d'exécuter tous les mouvements de terre que comporte le tracé. Il suffisait de s'en approcher de telle sorte que les écarts soient de l'ordre des modifications que le fleuve apporte lui-même à son lit suivant les variations de son débit ou des marées.

Les déblais sableux seraient employés à la confection des remblais dans le fleuve, remblais dont le cube dépasse 2.600.000 m3. Au contraire, les déblais trop vaseux évalués à environ 1.300.000 m3 seraient relevés sur berges.

On laisserait au fleuve le soin de faire lui-même les remblais dans les parties convexes. On remblaierait artificiellement les concavités et on protégerait ces remblais en y établissant à la laisse de basse mer des lignes de clayonnages verticaux, et, sur les parois concaves du lit :

1o des digues basses en enrochements lorsque l'inclinaison du talus devra être inférieure à 1/5 (jonction de la digue de Bassens avec l'extrémité amont de la traversée du chenal vers Lagrange; massif de soutien des remblais à faire dans le faux chenal longeant la digue de Macau);

2o des dépôts de graviers extraits de la Garonne en amont de Bordeaux lorsque les inclinaisons seront comprises entre 1/5 et 1/10 (Passage de Bassens à la suite des enrochements);

3o des matelas de branchages lorsque l'inclinaison sera de plus de 1/10. Ces matelas seraient disposés de manière à former des sortes de digues tracées suivant les lignes de niveau —— 4 et - 2 et suivant des perpendiculaires à ces lignes espacées du double de leur longueur. Ces digues constitueraient une ossature dont les cadres seront remplis avec les remblais sableux.

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Au Bec, la valeur de la section moyenne du bras d'Ambès devait être maintenue sans changement. Néanmoins, il fallait faciliter l'entrée du flot et faire disparaître les courbures défectueuses des rives.

Pour répondre à ces conditions, le meilleur parti semblait être de diviser la section transversale en deux lits bien distincts:

1o un lit mineur profond, comportant des courbes très allongées et aussi régulières que possible, d'une largeur variant de 630 à 670 mètres avec rétrécissement léger au point d'inflexion des rives;

2o un lit majeur largement ouvert à l'introduction du flot, limité d'une part à l'éperon du Bec, qui serait renforcé en longueur et en largeur, d'autre part, à la nouvelle berge de l'île Cazeau.

Dans cette hypothèse, on admettait comme limite supérieure de la berge de l'île Cazeau le tracé primitif du rescindement total. On déraserait les massifs des traverses et du bourrelet extérieur suivant une pente continue, partant de la berge et aboutissant à la ligne fixée pour la basse mer par la décision ministérielle du 29 janvier 1891.

Le délai d'exécution prévu était de cinq ans et la dépense de 5 millions pour l'ensemble des travaux de Bordeaux au Bec

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