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faire que certains travaux de parachèvement, en particulier une partie des parapets du couronnement.

Le réservoir a été rempli pour la première fois le 2 octobre 1923 et c'est le 1er décembre vers 7 heures du matin qu'il s'est vidé à travers une brèche ouverte dans la partie centrale qui atteint à l'amont 100 mètres de largeur.

D'après le gardien, seul témoin de la rupture, ce serait le troisième contrefort de la courbe à partir de la pile-culée de rive droite (fig. 2) qui aurait d'abord cédé; le gardien déclare l'avoir vu se fendre et s'effondrer le premier, les autres ayant été progressivement, mais rapidement entraînés par la violence du courant.

La pile-culée de la rive droite a bien résisté ; le premier contrefort à partir de celle-ci est disloqué; du deuxième contrefort il ne subsiste que le pied amont et à l'aval le soubassement a été enlevé (fig. 2). La brèche se prolonge jusqu'au deuxième contrefort, au delà de la pile-culée de la rive gauche, qui est resté parce qu'il est bien épaulé sur le rocher.

La partie supérieure du soubassement a été emportée ainsi que le pied aval de part et d'autre du tunnel (fig. 2).

Des constatations faites et des renseignements recueillis, on peut expliquer la rupture comme il suit.

Sous l'effet de la poussée de l'eau, l'ouvrage mal construit a dû subir des déformations progressives qui ont augmenté peu à peu les efforts auxquels il était soumis. En particulier le tassement des contreforts, peut-être même du soubassement, sous l'action de la charge maximum, a pu entraîner un accroissement des efforts à l'aval tandis qu'à l'amont il a pu se produire des efforts de traction et par suite des phénomènes de sous-pression, venant encore augmenter le travail à l'aval. Rien n'empêchant le processus de se poursuivre, la situation s'est aggravée peu à peu, jusqu'au moment où, au pied du massif aval du 3e contrefort cidessus désigné, simplement posé sur un rocher poli et plongeant vers l'aval, la limite de résistance au glissement a été atteinte et où le soubassement a glissé, provoquant l'effondrement du contrefort et l'ouverture de la brèche.

Conclusions. Il est indispensable de bien marquer que le

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corps justement réputé des Ingénieurs du Génie civil italien n'a aucune part dans la responsabilité de la catastrophe. D'ailleurs, comme conclusion nous ne pouvons mieux faire que de reproduire celle du Collège des Ingénieurs et Architectes de Milan «constatant que le barrage de Gléno, par la façon dont il a été dirigé et exécuté, constitue un cas absolument anormal qui ne peut se reproduire dans la construction de barrages édifiés par des sociétés hydro-électriques ayant la conscience de leur grave responsabilité et possédant la compétence technique nécessaire >>

N° 16

CHRONIQUE

Note sur l'allure des lignes isostatiques
dans les barrages triangulaires.

Par M. PIGEAUD,

Inspecteur Général des Ponts et Chaussées.

La circulaire du 19 octobre 1923 sur les barrages de grande hauteur demande, pour les projets définitifs, et dans le cas seulement du réservoir en charge, le tracé des lignes isostatiques et des lignes de glissement qui s'en déduisent. Les annexes contiennent des indications très suffisantes pour l'exécution pratique de ce tracé par voie de cheminement. Toutefois plusieurs ingénieurs nous ont fait part de leur surprise au sujet de l'allure des lignes isostatiques, qui sont en effet très différentes suivant que l'on a satisfait largement ou strictement à la condition de Maurice Lévy, ou qu'on n'y a pas satisfait (cas que l'on pourrait distinguer en les désignant respectivement par les mots ultra-Lévy, Lévy, et infra-Lévy pour simplifier le langage); et ils nous ont fait part également de certaines hésitations relatives au raccordement de ces lignes avec les parements, demandant, par exemple, si certains raccordements ne pouvaient pas avoir lieu en des points courants de ces parements, au lieu d'être rejetés à l'infini, ou concentrés au sommet. Pour répondre à ces questions, qui n'offrent guère qu'un intérêt théorique, nous le répétons, il n'est peut-être pas inutile de développer un peu les indications sommaires que nous avions données dans notre cours imprimé de Résistance des Matériau (1), et d'examiner l'allure des courbes dans tout le plan, afin de mieux mettre en évidence ce qui se passe dans le secteur compris entre les deux parements. Sans entrer dans une discussion analytique complète, qui ne serait pas ici à sa place (2), nous rappellerons d'abord

(1) Voir notamment, pages 750 et suivantes.

(2) Pour cette discussion on peut utilement consulter le traité d'Analyse d'Émile Picard (t. III, p. 223 et suivantes) où se trouve étudiée une classe d'équations différentielles plus générale.

quelques principes relatifs aux lignes isostatiques dans un champ de tensions soumis à la loi linéaire et homogène, qui est ici en cause.

A. Prenons un point du plan, qui ne soit pas un point singulier, et par ce mot de singulier il faut entendre un point où la conique des tensions dégénère en un cercle (conditions simultanées N, N2 = 0 et T, = 0). En ce point passent deux directions principales, toujours parfaitement définies, normales l'une à l'autre, et définissant les tangentes aux deux lignes isostatiques qui passent en ce point.

En désignant par 3 et ' les angles que font ces directions avec ox, (angles comptés dans le sens des rotations allant de ox vers oy), l'un d'eux, par exemple ß, est défini par l'équation :

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et l'autre serait donné par une expression semblable dans laquelle le radical serait affecté du signe. — Ces deux angles peuvent être supposés tels que l'on ait toujours

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Ils satisfont d'ailleurs tous les deux à une même équation, plus simple :

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dy

L'équation différentielle de la ligne isostatique d'une première espèce, celle qui correspond au signe + devant le radical, s'obtient en remplaçant tg par ax dans l'équation (1). Celle de la ligne isostatique de la seconde espèce s'en déduirait en changeant le signe du radical. Par voie de cheminement, en partant d'un point donné, ces deux lignes demeureront distinctes, au moins dans une certaine région de départ.

Toutefois les deux lignes ont, au point de vue analytique, un lien très étroit entre elles. En effet, elles satisfont à une même équation différentielle générale que l'on obtient facilement en partant de l'équa

tion (2) et en remplaçant tg 2 B (ou tg 2 3') par

2 tg 3

puis tg B

I

tg2 ß

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Il peut donc arriver qu'au cours du cheminement une ligne isostatique de 1re espèce soit prolongée par une branche appartenant à une ligne de seconde espèce, leur ensemble formant une courbe analytique complète, intégrale de l'équation (2)'. Mais cela ne peut évidemment se présenter que si l'on passe par un point singulier, pour lequel le radical (N N2)+4T, s'annule et où, par suite, les deux signes peuvent s'échanger.

B. On reconnaît facilement sur l'équation (2)' plusieurs propriétés essentielles de ses courbes intégrales.

En premier lieu la fraction du second membre est homogène et ne dépend que du rapport des deux coordonnées x et y. En désignant par o l'angle que fait avec oy le rayon vecteur passant par le point P(xy) (angle qui sera compté cette fois de oy vers ox, à l'inverse de ce

qui est fait pour les angles ß), et en posant tg o

=

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y

on peut

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Pour deux points P et P' situés sur un même rayon vecteur les deux lignes isostatiques passant par chacun d'eux ont donc leurs tangentes respectivement parallèles. Les branches de courbes issues de ces points sont donc homothétiques deux à deux par rapport au sommet.

En second lieu, quand on fait croître l'angle o d'une manière continue, il en est de même de sa tangente p, même lorsque l'on passe par une valeur telle que o La fraction formant le second membre de (2)”

=

Π

2

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va constamment en croissant, ou en décroissant. L'angle 2 ß, dont cette fraction est la tangente, varie lui-même toujours dans le même sens, ainsi que 3. C'est là une propriété remarquable, qui revient à dire que la courbure d'une branche d'une ligne isostatique est toujours de même sens, sa tangente faisant avec une direction fixe ox un angle constamment croissant, ou décroissant avec w.

Une branche de courbe d'une espèce quelconque ne saurait être fermée sans passer par le sommet.

1o On ne peut avoir en effet une disposition telle que la figure 1 laissant le sommet en dehors, car la courbe de même espèce passant par un point P'intérieur étant homothétique de la première couperait celle-ci, ce qui est impossible.

2o On ne peut avoir la disposition de la figure 2 la courbe entourant

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