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Dans le cas contraire, il faut, avant de s'occuper du droit, tâcher d'établir l'existence du fait, c'est-à-dire chercher les preuves. (BONCENNE.)

Dans cette recherche des preuves, le juge ne doit s'arrêter qu'aux faits articulés par les parties, et il ne peut les tenir pour avérés qu'autant qu'ils ont été régulièrement prouvés. Ainsi il n'est point autorisé à déclarer un fait constant, par cela seul qu'il en aurait personnellement acquis une connaissance positive, en dehors du procès; ou que ce fait serait considéré comme certain dans l'opinion publique. Dans le cas où la notoriété d'un fait est requise pour l'application d'une disposition de la loi, l'existence de cette notoriété doit ellemême être prouvée, si elle est déniée.

Le juge ne doit admettre ou ordonner que la preuve de faits qui soient de nature à influer, d'une manière plus ou moins décisive, sur le jugement de la cause à l'occasion de laquelle ils sont allégués.

Prouver, c'est, de la part de chacune des parties, soumettre au juge saisi de la contestation des éléments de conviction propres à justifier la vérité du fait qu'elle allègue et que l'autre partie conteste.

Celui qui avance un fait doit le prouver.

La charge de la preuve est pour l'action comme pour l'exception. Toute personne donc qui forme une action en justice, ou qui oppose une exception à une action dirigée contre elle est, en général, tenue de prouver les faits dont son action ou son exception supposent l'existence (Argument de l'art. 1100 C. civ.). Au contraire, celui qui, pour repousser soit une action, soit une exception, se borne à nier les faits sur lesquels elles sont fondées n'est, en général, tenu à aucune preuve.

Le juge n'est pas libre de former sa conviction comme il l'entend la loi prend soin d'établir les limites dans lesquelles

il doit nécessairement se renfermer: elle admet cinq sortes

de preuves:

La preuve littérale (art. 1102 à 1125 C. c.) ;

La preuve testimoniale (art. 1126 à 1133 C. c.);
Les présomptions (art. 1134 à 1139 C. c.);
L'aveu de la partie (art. 1140 à 1142 C. c.),
Et le serment (art. 1143 à 1155 C. c.).

Les preuves sont pleines ou semi-pleines, directes ou indi

rectes.

Pleines, lorsqu'elles entraînent une certaine persuasion : telle est la preuve qui résulte d'un acte authentique ou d'un acte sous seing privé dont l'écriture est reconnue; celle qui résulte des présomptions établies par la loi, de l'aveu de la partie, etc.;

Semi-pleines, lorsqu'elles suffisent pour ébranler la croyance, mais sans opérer une entière conviction; lorsqu'elles ne produisent que des probabilités ou des vraisemblances: telles sont les présomptions abandonnées à la sagesse du magistrat;

Directes, lorsqu'elles prouvent précisément le fait dont il s'agit; les moyens à l'aide desquels se fait la preuve directe sont les descentes et vues des lieux, les actes ou titres, les dépositions des témoins, et, dans certaines circonstances, les rapports ou avis d'experts.

Indirectes, lorsqu'elles établissent une circonstance d'où l'on peut induire l'existence du fait en litige.

Ces inductions, ou conséquences que le magistrat tire d'un fait connu à un fait inconnu, sont encore ce qu'on appelle des présomptions de fait ou de l'homme. (Art. 1134 C. c.)

Lorsqu'il s'agit de faits légalement constants, le juge ne peut ni exiger ni admettre d'autre preuve. Ainsi il ne saurait être question de preuve à produire encore, quant aux faits que la loi répute certains, soit en vertu d'une présomption

efficace à l'égard de toutes personnes indistinctement, telle que les présomptions de légitimité, d'interposition de personnes, de remise de dette, soit en vertu d'une présomption dont l'effet n'est que relatif, telle que les présomptions attachées à l'aveu, au serment, ou à la chose jugée. (Art. 1135 et 1137 C. c.)

Du Désistement

Jusqu'à la décision du juge, on peut, sous certaines conditions, se désister de sa procédure.

Le désistement est la renonciation à un acte de procédure, à une instance ou à une action.

Il convient de se désister: d'un acte de procédure, lorsque cet acte est vicieux, pour prévenir des condamnations ou des frais, en réparant les vices dont il est entaché;

D'une demande (ou d'un chef de demande): 1° lorsqu'elle a été engagée prématurément; 2° lorsqu'elle a été irrégulière en la forme; 3° lorsqu'elle a été portée devant un juge incompétent;

D'une action, lorsqu'elle est mal fondée.

Le désistement d'action emporte aliénation du fond du droit et n'est valablement donné que par une personne capable de disposer du droit auquel il se réfère. Ainsi ne peuvent se désister d'une action: le mineur, à moins qu'il ne soit émancipé et qu'il ne s'agisse d'un objet relatif à son administration. (Arg. C. c. 391);—la personne pourvue d'un conseil judiciaire, à moins qu'il ne s'agisse d'un objet de son administration ou qu'elle ne soit assistée de son conseil.

Le désistement de l'instance ne peut être donné que par celui qui a la disposition du droit litigieux.

Le désistement amiable peut avoir lieu dans les formes et aux conditions qu'il convient aux parties d'adopter.

Le désistement judiciaire est réglé par les art. 399 et 400 du Code de procédure. (Voir ces articles commentés, infrà, pages 280 et suiv.)

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Le tribunal, après avoir entendu les parties ou l'une des parties, peut et doit prendre une décision, c'est-à-dire rendre un jugement.

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Il peut prononcer définitivement sur la contestation ou bien ordonner certaines mesures qui ont pour objet ou d'éclairer sa religion, ou de faire dépendre sa décision d'une affirmation, ou d'accorder un délai, ou encore d'assurer l'exécution du jugement. - Ainsi il peut ordonner la comparution des parties, un compulsoire, une enquête, une expertise, un interrogatoire sur faits et articles, une descente sur les lieux, un serment; accorder des délais; condamner à des dommages-intérêts, à des intérêts, à des restitutions de fruits; prononcer la contrainte par corps; l'exécution provisoire en justice de paix, avec caution, et dans les causes sujettes à l'appel.

On distingue les jugements:

1o En jugements contradictoires et par défaut;

2o En avant faire droit et définitifs: les avant faire droit se subdivisent eux-mêmes en jugements préparatoires, interlocutoires et provisoires;

3o En jugements de dernier ressort et à charge d'appel.

Est contradictoire le jugement rendu sur les défenses respectives des plaideurs. Le jugement par défaut est rendu en l'absence de l'une des parties. Si c'est le défendeur qui ne comparaît pas, le jugement est simplement dit par défaut; si c'est le demandeur, il est appelé défaut-congé.

Le jugement avant faire droit est celui qui, avant de statuer définitivement, ordonne une disposition préalable. Il est préparatoire lorsque, rendu pour l'instruction de la cause, il tend seulement à mettre le procès en état de recevoir jugement définitif. Il est interlocutoire lorsque le tribunal ordonne une preuve, une vérification ou une instruction qui préjuge le fond.

L'influence du jugement sur le fond est le caractère qui distingue le jugement interlocutoire du jugement préparatoire. Le jugement préparatoire n'a d'autre but que d'instruire la cause; il règle la procédure et l'achemine vers l'issue de la cause; rien n'y fait entrevoir la tendance de l'opinion du juge sur le droit litigieux. Le jugement interlocutoire laisse entrevoir cette tendance, la plupart du temps, en l'attachant à un point décisif qu'il veut éclaircir. (BONCENNE.) Les contestations des parties, leur résistance à demander ou à combattre la mesure objet du jugement sollicité servent souvent aussi à caractériser le jugement sous ce rapport. (BIOCHE.)

Il est enfin provisoire lorsque le Tribunal ordonne des mesures propres à pourvoir aux inconvénients dont pourraient souffrir soit les parties, soit les objets litigieux, pendant le temps qu'exige l'instruction d'une cause. Le jugement provisoire n'a aucune influence sur le fond ni sur l'instruction; il peut être rétracté par le juge qui l'a rendu.

Lorsque l'affaire est en état sur le provisoire et sur le fond, il est statué sur le tout par un seul et même jugement (C. p., art. 141), pour éviter des frais. La décision de la question provisoire n'est pas inutile; il faut savoir qui supportera les dépens auxquels elle a donné lieu.

Le jugement définitif est celui qui statue sur la contestation et la termine. Le Tribunal qui a rendu un jugement définitif ne peut, en général, ni le changer ni le corriger.

La distinction des jugements en définitifs, interlocutoires et préparatoires a de l'importance relativement à l'appel (Voir art. 39 C. p. c.) et au pourvoi en cassation (V. art. 918 même Code).

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