II. Qu'il vous plaise, ma Dame, de ne pas faire défaut en cette occasion au cœur qui vous aime tant, qui attend ce secours de vous seule. Car un bon seigneur ne tourne jamais bride auprès de son esclave, quand celui-ci implore son aide; et c'est bien moins son serviteur qu'il défend que son propre honneur. Le chagrin de mon cœur s'augmente encore, ma Dame, quand je pense que votre image y est peinte par la main même de l'Amour. Aussi devez-vous prendre d'autant plus de soin de lui, que l'empreinte qu'il porte de vous doit vous le rendre plus cher. III. Mais, ô ma douce espérance! si vous tardez de satisfaire à ma demande, sachez que je ne puis plus attendre et que mes forces sont à bout. C'est, d'ailleurs, ce qu'a dû vous faire comprendre l'ardeur que j'ai mise à chercher ma dernière espérance. Car l'homme est II. Piacciavi, donna mia, non venir meno Così e voi dovete Vie maggiormente aver cura di lui, Che quel, da cui couvien ch'l ben s'appari, Per l'immagine sua ne tien più cari. III. Se dir voleste, dolce mia speranza, Di dare indugio a quel "ch'io vi domando, tenu de supporter tous les malheurs de la vie, jusqu'à ceux qui causent la mort, avant de mettre à l'épreuve son plus grand ami, sans savoir même si il le trouvera fidèle. Mais si la réponse de celui-ci est contraire, il n'y a rien qui paraisse plus dur, car alors la mort devient plus prompte et plus amère. IV. Et vous êtes celle que j'aime le plus, qui pouvez me faire le plus de bien, celle en qui reposent mes plus fermes espérances. C'est pour vous, seulement, que je désire vivre, que je veux et que je demande les choses qui doivent concourir à élever votre gloire; car tout le reste me déplaît et m'est pénible. Vous seule pouvez me donner ce qu'aucun autre ne serait assez hardi pour m'accorder. Car Amour a mis en votre pouvoir le oui et le non tout entier. C'est pour cela que (moi votre ser E ciò conoscer voi dovete, quando E s'egli avvien che gli risponda male, Chè morte n'ha più tosta, e più amara. viteur) je me tiens pour grand. La confiance que j'ai en vous vient de votre noble aspect; car, en vérité, quiconque vous regarde s'aperçoit, à vos traits, que la suprême Bonté réside en vous. V. Laissez donc aller votre Salut, ô noble Dame, comme je vous en ai priée, et qu'il vienne dans le cœur de celui qui l'attend. Mais sachez que l'entrée de ce cœur est barrée par la flèche qu'Amour y lança, le jour que je fus pris; et que cette entrée est fermée pour tous autres que les envoyés d'Amour, qui la savent ouvrir en vertu de la même puissance qui la leur fait fermer. Aussi, dans le trouble où je suis, votre Salut me serait-il nuisible, si il venait sans être accompagné des messagers du Seigneur qui me tient en sa puissance. VI. Chanson, il faut que tu marches rapidement parce La fede ch'io v'assegno, Muove dal vostro portamento umano ; Ch' Amor lanciò lo giorno eh' io fu' preso, Onde nella mia guerra La sua venuta mi sarebbe danno, S'ella venisse senza compagnia De' messi del Signor, che m'ha in balia. VI. Canzone, il tuo andar vuol esser corto; que tu sais bien que celui pour qui tu te mets en route, a peu de temps à sa disposition. CHANSON. III. I. Je suis si mécontent de mon état, que la pitié me fait souffrir autant que la douleur. Car je sens, hélas bien contre ce que je voudrais, se former l'air du dernier soupir dans mon cœur que ces beaux yeux ont blessé quand Amour le lui ouvrit de ses propres mains, dans le dessein de m'amener à l'instant suprême où j'arrive. Ah! comme ils se levèrent purs, doux et gracieux, quand ils commencèrent l'œuvre de ma mort, de cette Chè tu sai ben, che picciol tempo omai CANZONE. III. I. E' m' incresce di me sì malamente Mi reca la pietà, quanto 'l martiro : Sento, contra mia voglia, Raccoglier l'aer del sezza' sospiro Entro quel cor, ch' e' begli occhi feriro Quando gli aperse Amor con le sue mani, Per conducermi al tempo, che mi sface, Oimè ! quanto piani Soavi e dolci ver me si levaro, Quando egli incominciaro mort qui m'est si amère maintenant; quand ces yeux disaient « Notre lumière apporte la paix ! II. « Nous donnerons la paix à votre cœur », disaient quelquefois à mes yeux ceux de cette belle Dame. Mais dès que leur intelligence se fut aperçue que le pouvoir de cette personne m'avoit totalement ravi l'esprit, ils se sont enfuis avec les enseignes d'Amour; en sorte que je ne revis plus une seule fois leurs regards victorieux. De là est arrivé que mon âme, qui comptait sur leur assistance, est demeurée triste; qu'elle voit le cœur auquel elle était épousée, presque mort; et qu'enfin mon âme, toute ennamourée qu'elle soit, est forcée de se séparer de lui (le cœur). III. Pleine d'amour, pleurant, mon âme s'en va donc |