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ses vertus; et si nous sommes fidèles, nous éprouve"rous infailliblement son secours."

Telles étoient les idées sublimes que se formoit la Sœur Bourgeois sur la perfection de son institut: mais comme elle sentoit, que pour en soutenir la dignité, elle avoit besoin d'un secours particulier de la très Ste. Vierge, elle savoit aussi, que dans une communauté, la fidélité et la ferveur dépendent principalement du caractère de l'esprit et du cœur des personnes qui la composent, et qu'il est surtout important que celles qu'on y reçoit, soient bien choisies, et ensuite bien formées à la vertu: voici comment, en s'adressant à la Ste. Vierge mênte, elle s'expliquoit à ce sujet.

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"Ma bonne mère et très chère institutrice, je ne 66 vous demande ni biens, ni honeurs, ni plaisirs, cette maison: mais je vous prie de nous obtenir la grace que Dieu y soit toujours bien aimé et servi, autant que notre petite condition pourra le permettre: qu'on ne reçoive donc jamais parmi ncus de ces filles qui sont d'un esprit orgueilleux et présomptueux, et 66 dont le cœur demeure attaché aux maximes du monde ; 66 qui sont médisantes, railleuses; qui se font un plaisir de critiquer, de contrefaire, ou de piquer le prochain; "ni de ces esprits mous et relâchés qui négligent l'af "faire de leur salut et ne font aucun cas de la perfection Evangélique, dont notre Seigneur nous a donné les rè"gles, qu'il a confirmées par son exemple, et scélées de 66 son sang, et que vous, ô trés Ste. Vierge, avez pratiquées si exactement,

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"Qu'une fille donc, qui désire d'être reçue dans cette "communauté, et qui se propose de devenir spéciale

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ment la fille de Marie, commence par renoncer entiè "rement au monde ; qu'elle conçoive une horreur şin. "cère pour toutes ses maximes, et pour tous les diver"tissemens qui s'y pratiquent, quelque indifferers qu'ils "puissent paraître aux mondains: qu'elle s'abstienne 66 de toute sorte de délicatesse dans le boire, dans le manger, dans le vêtir, dans le coucher et dans toutes "les autres nécessités de la vie qu'elle renonce à ses "biens, à ses parents, à ses amis, à ses habitudes,à ses 'bumeurs, à ses inclinations, et à tout ce qui pourroit

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occuper inutilement son esprit ou són cœur en un "mot qu'elle se renonce elle-même.

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"On l'avertit, qu'il faut qu'elle se resolve à être employée. toute sa vie, aux offices les plus bas et les "plus ravalés,et aux travaux les plus durs et les plus pé"nibles de la communauté. On lui déclare, que peut-être

on la fera taire pour faire parler une petite fille; qu'on "lui fera porter des habits de vile étoffe, rapiécés, et le "reste des autres: que si on l'envoie en Mission, on lui "donnera une compagne d'une humeur et d'un caractère "tout contraire au sien; et qu'on chargera peut-être de "la contrarier en tout en un mot qu'elle doit embras"6 ser la Croix toute pure, pour s'attacher à Jesus"Christ, qu'elle se propose et s'engage de suivre sur le "Calvaire, et dans le chemin de la perfection.

"Et lorsqu'une fois elle sera reçue, qu'elle se garde "bien de se rendre infidèle à Dieu, et à sa vocationa "mais qu'elle obéisse promptement, et en toute chose, 46 sans plainte et saus murmure, et à toutes les personnes qui auront quelque droit de lui commander: qu'elle " estime l'abjection, et la pauvreté d'esprit et de cœur; et qu'elle en pratique les actes dans toutes les occasions: "qu'en ses paroles, ses gestes, ses démarches, et dans

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tous les mouvemens de son corps, on ne voie jamais "rien qui sente la légèreté et la dissipation: mais qu'au "contraire, tout respire la retenue, la modestie et la "dévotion: qu'elle mortifie ses sens; qu'elle évite les "entretiens frivoles et inutiles; et qu'autant que cela "lui sera raisonablement possible, elle observe un si"lence rigoureux, en tâchant de conserver en tout la présence de Dieu.

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"Ces pratiques, à la vérité, peuvent paroître bien ri"goureuses à la nature: mais aussi elles sont bien sancέσ tifiantes, et elles doivent faire la gloire de la Congré"gation: car enfin on ne blâme pas St. François, Ste. "Thérèse, et tant d'autres fondateurs et fondatrices d'or"dres, d'avoir établi dans leurs communautés, tant de "jeûnes, de mortifications, et autres pratiques dures et humiliantes que nous admirons tous les jours, loisque nous les lisons dans la vie des Saints. Ne devonsS

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nous donc pas faire quelque chose pour imiter.leur "exemple, et pour plaire à Jésus et à Marie ?"

Donnez-en done souvent, Seigneur, devons-nous dire après elle, donnez à votre Congrégation, un grand nombre de filles du caractère que nous venons de dépeindre. Elles porteront avec elles leur recommendation et leur dot; et elles seront du nombre de celles que la Sœur Bourgeois assuroit, que quelque pauvre que fût une fille, qui auroit une véritable vocation, elle iroit elle-même la chercher sur ses épaules pour lui procurer l'entrée dans sa com munauté.

vœux de cette C'est dans cet C'est avec ces

Voilà quels étoient les sentimens et les fervente fille, à l'égard de son institut. esprit qu'elle en avoit conçu le projet. saintes dispositions qu'elle lui a donné naissance, et qu'elle a tâché dans la suite, avec des soins infatigables, de lui faire prendre son accroissement; afin que la Congrégation toute entière fût une fidèle copie de la très Ste. Vierge conversant avec Dieu et avec le prochain; d'où l'on peut évidemment juger de son excellence, et conclure avec vérité, que l'esprit propre de la Steur Bourgeois, qu'elle a pris soin de transmettre avec succès à la Congrégation, est un esprit de charité et de zèle, qui ayant pour principal objet, (comme le plas inportant et le plus couvenable à des filles,) l'instruction des jeunes personnes de leur sexe, se trouve accompagné, soutenu et animé par l'exercice et la pratique de toutes les vertus chrétiennes : mais surtout par les sentimens de petitesse, de simplici té, de docilité, d'obéissance, de pauvreté, d'un dégagement parfait de tout ce qui n'est pas Dieu, et d'un abandon total à la divine providence: le tout sur le modèle et sous la protection de la très Ste. Vierge, que toutes les Sœurs reconnoissent avec plaisir, et en esprit de foi, pour leur principale et première Supérieure; qu'elles honorent, et respectent comme leur véritable institutrice; qu'elles aiment tendrement comme leur bonne mère; et qu'elles font profession d'imiter en tout, comme leur plus parfait modèle. Mais nous trouverons encore de nouveaux traits de lumière, pour nous dévoiler de plus en plus l'esprit et le caractère de la Sœur Bourgeois, en parcourant les ma ximes qu'elle nous a laissées par écrit.

ARTICLE SECOND.

Des Maximes de la Soeur Bourgeois.

Pour porter ses filles à la perfection de leur état, et les prémunir contre l'ennui et le dégoût, ou au moins, contre l'habitude et la routine, qui naissent ordinairement d'une vie réglée et uniforme, la Sœur Bourgeois savoit se servir de mille pieuses industries capables de réveiller feur attention, en leur fournissant sans cesse de nouveaux modèles d'intentions pures et droites, et les motifs les plus pressants pour se conserver dans les sentimens et les pratiques de la vie intérieure, d'une constante union à Dieu présent partout, et d'une amoureuse application à Jésus et à Marie. C'est pour cela qu'elle leur représentoit souvent leur état sous différentes figures ou rapports qui dans leur totalité renferment toutes les règles de perfection qui leur étoient convenables.

Un jour ravie du point de vue que lui présentoit l'idée de perfection qu'elle se proposoit d'établir dans sa communauté, elle la dépeignoit à ses filles sous la figure d'un parterre délicieux, orné à la vérité, de toutes les plus belles fleurs: mais qu'il est nécessaire de cultiver avec soin pour en soutenir l'éclat et la beauté.

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"Représentez-vous, leur disoit-elle, l'Eglise chrétienne, sous la figure d'un vaste et beau jardin, que Dien "lui-même a créé, sur le modèle du Paradis Terrestre. "Il l'a divisé en une infinité de quarrés, ou compartimens, qui nous sont représentés par les différens instituta et "communautés que nous voyons dans le christianisme, 66 et dont chacune, selon son rang, occupe une partie de ce beau jardin. Notre communauté, toute petite qu'elle est, ne laisse pas d'être un de ces compartimens, que le jardinier s'est réservé pour en faire un "parterre distingué et de préférence, parcequ'il doit "être le jardin des délices de Marie, orné de toutes les "plus belles fleurs, et des vertus qui lui sont les plus agréables. Et c'est nous, mes chères Soeurs, qui sous "l'influence de la grace de Dieu, sommes chargées, chacune en son endroit, de cultiver ce beau parterre,

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par l'usage des moyens de salut et de perfection que nous avons entre les mains, ou à notre portée.

"Or comme un habile jardinier a grand soin de préparer la terre qu'il cultive, en y mettant les engrais convenables, qu'il en arrache exactement les plantes inutiles, et les mauvaises herbes qui pourroient étouf"fer le bon grain, qu'il chosit des graines saines et de "bonne espèce, qu'après les avoir jettées en terre, il a soin de les arroser à propos, et que lorsque le plant est levé, il rejette avec soin toutes les plantes imparfaites, qui paroissent ne pas profiter assez et occuper inutile“ment le terrain, pour les remplacer par de meilleurs sujets de même les Sœurs de la Congrégation, avant “d'être admises dans la communauté, doivent être choisies et approuvées. Reçues au noviciat, elles "doivent être purifiées par une bonne confession gé"nérale, et par les autres soins qu'on prend pour les "détacher de tout ce qui pourroit les empêcher de croî

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tre en toute sorte de vertu. Chaque semaine, et quel"quefois plus souvent, elles sont à même de sarcler le

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parterre de leur cœur, et d'en arracher les mauvaises herbes, par le moyen de leurs examens et confessions "ordinaires. La Ste. Communion, dont on peut s'ap"procher les Dimanches, et quelquefois plus souvent, "est un engrais admirable pour les nourrir, et faire croî"tre en toute sorte de vertus ; étant d'ailleurs, sans cesse "arosées par les graces célestes, fruit ordinaire des bon46 nes lectures, des intructions familières, et des différens

exercices de piété, auxquels elles doivent être conti"nuellement appliquées; la terre de leur cœur étant "broyée et travaillée quelquefois par le feu de la tribula"tion, par les mépris, les contradictions, les maladies, "les mortifications et autres semblables épreuves. Si "après tous ces soins, elles ne s'avancent pas dans la * vertu; si elles se laissent surmonter par les mauvaises "habitudes; quelle affliction pour Marie, lors qu'elle “vient dans son jardin de plaisance? et quel sera le sort "de ces plantes désagréables et de mauvaise odeur, ou "tout aumoins inutiles ? si non d'être arrachées et rejet "tées avec dédain.

"Travaillons donc, mes chères Sœurs, à cultiver des

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