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nouvelle loi exige le payement de deux cents francs de contributions directes dans le département; ainsi, à la différence de l'électeur auquel, suivant la loi du 19 avril 1831, l'on compte pour composer le cens électoral les contributions directes qu'il paye dans toute la France, l'éligible au conseil général ne peut se prévaloir que des contributions qu'il paye dans le département où il est élu membre du conseil général. Le motif de cette différence est indiqué dans la discussion à la chambre des députés. M. le rapporteur, repoussant un amendement qui avait pour objet de faire admettre le principe que tout électeur fût éligible, disait : « Le conseil général fonctionne seul, et <«< il a le droit souverain de frapper le département

d'impôts considérables; il faut donc trouver dans << le conseil les garanties nécessaires; il faut que, par «<lui-même et par lui seul, il présente toutes les "conditions capables de rassurer le pays sur le bon «<et sage emploi de son autorité, et c'est à la pos<< session seule dans le département que cette ga<< rantie peut s'attacher. >>

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7. Du reste, cet article n'exige pour être éligible au conseil général aucune condition de domicile dans le département (Circulaire du 15 septembre 1833).

:

8. L'art. 18 du projet portait que les dispositions contenues dans les lois pour l'élection des députés, relativement au domicile, à la délégation et à l'attribution des contributions, étaient applicables aux citoyens qui devaient faire partie des listes électorales organisées pour les conseils de département et d'arrondissement.

La commission avait étendu cette disposition à la formation du cens d'éligibilité.

L'article avait été adopté avec cette addition, mais il a été omis devant la chambre des pairs.

Dans le silence de la loi, devra-t-on appliquer aux élections départementales et d'arrondissement les dispositions de la loi du 19 avril 1831 relatives aux attributions de contributions et au droit de délégation?

M. le ministre de l'intérieur, dans une circulaire du 15 septembre 1833, a adopté l'affirmative.

Cette opinion nous paraît conforme au vœu du législateur et la seule qui soit logique. M. de Barante disait effectivement à la chambre des pairs « qu'il y « avait analogie à peu près complète entre le choix «< d'un député et celui d'un conseiller de départe«< ment, et qu'il était naturel de confier l'élection à << un même corps électoral. >>

Il y a donc même raison de dire que, dans le silence de la loi du 22 juin, celle sur les élections lé– gislatives, qui fait le droit commun, pour ainsi dire, en matière électorale, devra être suivie. Ajoutons que la solution donnée par M. le ministre est plus libérale que tout autre système.

En effet, donner aux éligibles le droit de profiter des attributions et des délégations de contributions autorisées par la loi du 19 avril 1831, c'est étendre le cens d'éligibilité, c'est augmenter le nombre des éligibles. C'est donc rendre hommage au principe admis constamment en matière d'élection, que, dans le silence de la loi ou en cas de doute, la loi doit être interprétée en faveur du droit d'élection et d'éligibi

L'avis émis par M. le ministre a été adopté, au surplus, par un tribunal de première instance et par la conférence des avocats à la cour royale de Paris, présidée par Me Parquin, bâtonnier de l'ordre.

Il faut remarquer que lorsqu'il y a lieu d'admettre comme éligibles complémentaires, les plus imposés au-dessous de 200 francs ou de 150 francs, la qualité d'éligible résulte, à l'égard de ces plus imposés, de l'inscription sur une liste arrêtée par le préfet et soumise à des garanties de contrôle et de vérification (Circulaire du 16 septembre 1833).

ART. 5. Ne pourront être nommés membres des conseils généraux :

1o Les préfets, sous-préfets, secrétaires généraux et conseillers de préfecture';

2o Les agents et comptables employés à la recette, à la perception ou au recouvrement des contributions, et au payement des dépenses publiques de toute nature;

3o Les ingénieurs des ponts et chaussées, et les architectes actuellement employés par l'administration dans le département;

4o Les agents forestiers en fonctions dans le département et les employés des bureaux des préfectures et sous-préfectures.

9. Sous l'empire du décret du 22 décembre 1789 les causes d'incompatibilité et d'exclusion des conseils généraux étaient fort restreintes (1).

(1) Voyez le chapitre servant d'introduction, n° 4.

Aucune incompatibilité de fonctions n'avait été reproduite par les lois de l'an vii.

Pendant l'empire et la restauration, les conseillers généraux pouvaient donc être choisis parmi tous les citoyens français, indistinctement.

La loi nouvelle, conséquente avec le principe posé dans celle du 19 avril 1831 sur les élections législatives, a créé, avec raison, des causes d'incompatibilité entre les fonctions de conseiller de département et certaines fonctions déterminées.

Ces causes d'incompatibilité sont absolues ou relatives.

10. Les deux premiers paragraphes de l'art. 5 établissent une incompatibilité absolue entre les fonctions de conseiller général de département et les fonctions de préfet, sous-préfet, secrétaires généraux, conseillers de préfecture, et les agents et comptables employés à la recette, à la perception et au recouvrement des contributions, et au payement des dépenses publiques de toute nature.

Cette incompatibilité est absolue en ce sens qu'il est impossible d'être à la fois préfet, sous-préfet, etc., et membre d'un conseil général. Les fonctionnaires et agents ci-dessus indiqués ne peuvent être admis à faire partie d'aucun conseil de département qu'après s'être démis de leurs fonctions.

Le motif qui a porté le législateur à exclure des conseils généraux ces fonctionnaires, pendant la durée de leurs fonctions, est facile à expliquer.

En fermant d'une manière absolue l'entrée des conseils de département à une certaine classe de fonctionnaires salariés par l'état, le législateur a voulu

évidemment favoriser l'indépendance des conseils généraux, et mettre le choix des électeurs à l'abri des influences actives, et quelquefois intéressées, de l'autorité administrative.

La loi ne s'explique pas sur les fonctionnaires, agents et comptables chargés de la perception de la recette et du recouvrement de certains droits, tels que droits de timbre, d'enregistrement, d'hypothèque, de douanes, de postes, droits sur les bois

sons, etc.

Ces agents sont-ils compris dans l'exclusion absolue prononcée par le second paragraphe de Fart. 5? Par ordonnance du 16 juin 1834, le conseil d'état a décidé l'affirmative à l'égard des receveurs de l'enregistrement.

Nous pensons qu'il en doit être de même pour les receveurs du timbre, les conservateurs des hypothè– ques et, en général, pour tous les agents, directeurs, inspecteurs, contrôleurs, receveurs et comptables, employés à la perception, au recouvrement et à la recette de toutes les contributions, 'droits et charges généralement quelconques, soit directs, soit indirects.

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y a évidemment même raison de décider dans tous les cas.

C'est ainsi qu'un arrêt de la cour d'Orléans du 20 mars 1840 a décidé qu'un contrôleur des contributions directes ne peut être élu membre d'un conseil général, et que l'élection ne devait pas être validée, même lorsque l'employé avait donné depuis sa démission et cessé ses fonctions. (Voy. Journal du Loiret du 20 mars 1840.)

La cour royale de Bordeaux a même jugé par ar

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