Page images
PDF
EPUB

Une chemise de béton de 0,17 et à plus forte raison de 0,12 d'épaisseur totale est éminemment fragile. Les bétonnages sont donc bien à leur place dans les parties de canal en déblai; sur les remblais, il est prudent d'attendre que ceux-ci aient subi un tassement complet. Un point capital est le dosage et la confection des mortiers et des bétons. Si l'on veut qu'ils soient aussi étanches que possible, dit M. de Mas, il faut que, dans les mortiers, la chaux ou le ciment remplisse bien exactement les vides du sable et qu'il en soit de même du mortier, par rapport aux interstices du gravier ou de la pierre cassée. Les dosages doivent donc être déterminés par des expériences dans chaque cas particulier. M. de Mas signale enfin le goudronnage des chapes ou même des chemises en béton exécutées sans chape, que pratiquent certains ingénieurs pour augmenter l'étanchéité. Il cite les expériences faites à ce sujet dans le service du canal de la Marne au Rhin et qui ont donné des résultats tout à fait suggestifs.

Le revêtement en terre est le correctif nécessaire et efficace de la fragilité des chemises en béton, mais il présente une région particulièrement délicate aux environs de la ligne d'eau; après un certain temps, la partie supérieure du béton, mise à nu, se trouve exposée à toutes les causes de destruction; une fissure longitudinale se produit peu à peu et constitue un véritable déversoir, par lequel se produisent d'abondantes déperditions. M. de Mas cite les procédes employés dans divers services pour remédier à cet inconvénient.

L'auteur termine ce chapitre par une comparaison entre les difrents procédés d'étanchement et par l'examen des cas dans lesquels chacun d'eux peut ou doit être employé.

Dans le chapitre suivant, le septième, il traite de l'alimentation des canaux; à ce point de vue, il examine successivement les canaux latéraux et les canaux à point de partage.

Pour les premiers, il commence en signalant la nécessité de prises d'eau multiples et en rappelant ce principe énoncé par un éminent ingénieur, M. Comoy : « L'eau doit avoir la moins grande << longueur possible de canal à parcourir pour arriver au point où << elle est utile. » La prise d'eau d'origine dans le cours d'eau laté

ral n'en constitue pas moins la prise d'eau principale. M. de Mas fait connaître les conditions que doit remplir cet ouvrage et signale, comme exemple, la prise d'eau de Roanne, établie en tête du canal de Roanne à Digoin pour l'alimentation de ce canal et du canal latéral à la Loire. Si de la prise d'eau principale on passe aux prises d'eau secondaires, on tombe dans un tout autre ordre d'idées; il est préférable d'emprunter, toutes les fois que la chose est possible, les eaux d'alimentation aux affluents du cours d'eau principal et de les amener au canal au moyen de rigoles alimentaires. M. de Mas aborde donc l'étude de ces rigoles d'accord avec M. Guillemain, il pose comme un desideratum que la rigole doit fournir au canal un mètre cube d'eau en moyenne par seconde ; mais il montre que, pour obtenir ce résultat, le débit maximum des rigoles, à pleins bords, doit être, toutes les fois que le permet le débit des affluents, double ou triple du volume moyen à fournir au canal. Il discute ensuite la vitesse à donner à l'eau et admet, comme normale, une vitesse de 0,50 par seconde. D'après cela, il détermine les dimensions de la section, qui est habituellement trapézoïdale avec des talus dont l'inclinaison varie entre 1 pour 1 et 3 de base pour 2 de hauteur. Il recommande, en vue de faciliter l'entretien, de donner à l'une des digues une largeur suffisante pour le passage d'une voiture. Connaissant le débit et la section mouillée, l'auteur établit que les formules d'hydraulique font connaitre la pente qui répond à la vitesse choisie et que le tracé s'ensuit. Quant aux ouvrages d'art, ils ne diffèrent des ouvrages-similaires des canaux que par les dimensions de la cuvette. Comme ouvrages d'art spéciaux, M. de Mas ne signale que les siphons que l'on emploie pour la traversée des vallées et qui remplacent maintenant les ponts-aqueducs, autrefois affectés à cet usage; à titre d'exemple, il mentionne les siphons de la rigole alimentaire du canal de la Marne au Rhin et du canal de l'Est. Dans la construction de ces ouvrages, il signale deux points essentiels. La convenance de placer les têtes des siphons en déblais ou tout au moins au niveau du sol naturel et celle de ménager des bondes de fond à la partie inférieure des conduites. Il termine en mentionnant les installations mécaniques pour remonter l'eau de bief en

bief et dont il cite un exemple au canal de Bourgogne, où les trois derniers biefs du versant de la Saône sont alimentés avec de l'eau prise dans cette rivière et remontée de bief en bief.

Des canaux latéraux il passe aux canaux à point de partage. La question de l'alimentation, dit M. de Mas, y devient absolument prépondérante. Toute autre considération doit lui être subordonnée. Pour exploiter un canal, il faut de l'eau; on peut même dire qu'il en faut en quantité abondante et surabondante. Cette conclusion s'impose quand on voit les mécomptes éprouvés sur les voies navigables construites par les ingénieurs les plus expérimentés.

A la hauteur où se trouve le bief de partage, les sources sont ordinairement faibles et leur débit insuffisant. Quelles qu'elles soient, M. de Mas signale la convenance de commencer par les utiliser, parce qu'elles constituent l'approvisionnement le plus économique; mais, en même temps, il fait observer qu'il faut tenir compte des besoins de la vallée, à laquelle doit se faire l'emprunt. Lorsque les eaux pérennes sont insuffisantes, la solution à laquelle on a le plus souvent recours consiste à recueillir les eaux en excès pendant la saison pluvieuse et à les emmagasiner dans des réservoirs créés à cet effet. La construction de ces réservoirs, vu l'importance du sujet, fait dans l'ouvrage de M. de Mas l'objet d'un chapitre spécial. L'auteur ne s'occupe ici que de la détermination des quantités d'eau susceptibles d'y être emmagasinées. Il insiste sur le déchet que subit l'eau recueillie dans les réservoirs et qui diminue d'autant le cube d'eau utile. Il est dû à la déperdition des rigoles plus ou moins longues qu'emprunte l'eau pour passer des réservoirs dans le canal et aux pertes qui se produisent dans les réservoirs mêmes, soit par évaporation, soit par imbibition, filtrations faites à travers les digues. Il signale incidemment la nécessité de distinguer entre l'évaporation absolue et la perte par évaporation, celle-ci n'étant que l'excès de celle-là sur la hauteur de pluie tombée. Il appuie cette observation par les résultats d'expériences faites dans le service du canal du Nivernais et de la Haute-Yonne.

Quand les eaux pérennes et les réservoirs ne fournissent pas des ressources suffisantes, il faut avoir recours aux machines. Mais

l'eau puisée dans la rivière principale n'est pas relevée de bief en bief, elle est remontée mécaniquemeut jusqu'au bief le plus élevé du groupe dont l'alimentation est en jeu et le plus souvent jusqu'au bief de partage. M. de Mas commence par mentionner les plus importantes de ces usines qui existent en France. Mais, il s'abstient de décrire en détail les machines motrices et les pompes qu'il regarde comme étrangères à son cours; par contre, il fournit des renseignements circonstanciés sur les résultats obtenus, le rendement, le prix de revient de l'eau montée. Il donne d'abord des monographies complètes de l'alimentation du bief de partage du canal de Briare et de l'alimentation commune au canal de la Marne au Rhin et au canal de l'Est, qui s'opère l'une et l'autre, au moins en partie, au moyen de machines; il mentionne ensuite, mais sans entrer dans les mêmes développements, l'usine hydraulique de Condé-sur-Marne qui sert à l'alimentation du bief de partage du canal de l'Aisne à la Marne, celle de Bourg et Comin pour l'alimentation du canal de l'Oise à l'Aisne, l'usine à vapeur de Saint-André à Lille, établie pour l'alimentation du canal de Roubaix. Puis, dans un tableau synoptique fort intéressant, il réunit les éléments principaux des usines à vapeur d'alimentation; pour chacune d'elles il fait ressortir le prix de revient du mètre cube effectivement amené au canal. Il montre qu'avec un bon entretien la durée de ces usines paraît devoir être pour ainsi dire indéfinie et que l'annuité à prévoir pour former un fonds de renouvellement, en prévision du remplacement périodique est, dans le cas d'usines hydrauliques, extrêmement faible et véritablement négligeable. Il termine en comparant le prix de revient des eaux pérennes amenées au canal au moyen de rigoles avec celui des eaux qui y sont refoulées au moyen de machines et il en conclut que ces prix se rapprochent singulièrement.

Le huitième chapitre n'est que la suite du précédent; il est spé. cial aux réservoirs d'alimentation. L'auteur expose d'abord quelques considérations générales sur le choix de l'emplacement, la capacité des réservoirs et les divers genres de digues. Il étudie successivement les réservoirs avec digue en terre, les réservoirs de systèmes mixtes et les réservoirs avec digue en maçonnerie.

[ocr errors]

En ce qui concerne les premiers, les digues sont formées par un massif homogène de bonne terre bien corroyée. M. de Mas commence par déterminer le profil transversal à leur attribuer et cite comme exemples les digues des réservoirs de Montaubry, de Mittersheim et la Liez. Il recommande de donner à la couronne, lors même qu'elle ne sert pas d'assiette à une voie publique, une largeur d'au moins 5 mètres, pour faciliter son entretien et lui permettre de résister aux vagues, qui, sur les grands réservoirs, véritables lacs, prennent une importance considérable. Le talus d'amont présente une inclinaison générale uniforme de trois de base pour deux de hauteur au plus; mais le revêtement dont il est muni forme une série de gradins superposés. Du côté d'aval, on trouve généralement une succession de plans inclinés, séparés par des banquettes horizontales, dont l'espacement vertical peut varier de trois à six mètres: Après cette description générale, M. de Mas fait connaître avec détails la nature des terres à employer dans la confection des digues, qui doivent autant que pos

2 3

18

sible présenter une composition de sable et d'argile, la prépara

tion du sol de fondation avec lequel le massif de la digue doit présenter une liaison parfaite et le mode d'exécution du corroi; sur ce dernier point, il indique les rouleaux corroyeurs, traînés par des chevaux et employés à Mittersheim, puis ceux dont on s'est servi plus récemment sur d'autres réservoirs et qui étaient mus par l'électricité; de toute façon, il recommande l'emploi de rouleaux cannelés lourds, travaillant toujours à pleine charge.

De là, il passe au revêtement du talus d'amont, qui doit être très solide, parce qu'il est exposé au choc de lames parfois très fortes et à celui de glaçons flottants. Il considère comme une règle à suivre l'établissement d'un revêtement en maçonnerie à bain de mortier formant une série de gradins superposés. Ce système a été appliqué à la digue du réservoir de Montaubry, qui sert à l'alimentation du canal et qui en offre un exemple qu'on peut qualifier de classique. M. de Mas indique les variantes du même système, qui ont été appliquées au réservoir de Mittersheim et à celui de la Liez. Le talus d'aval n'exige pas le même revêtement, mais il est

« PreviousContinue »