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problème des barrages-réservoirs, ne serait-elle pas, en définitive, d'établir:

1° Un mur en maçonnerie calculé pour résister aux poussées de la retenue;

2o Un remblai à l'amont suffisamment épais pour être étanche; 3o Entre les deux, une couche filtrante, graviers ou briques creuses, recueillant et amenant dans une galerie d'évacuation les eaux qui auraient traversé le remblai. Elles seraient ainsi empêchées de venir baigner le mur de soutien sans avoir perdu leur pression hydrostatique, et par suite, de s'introduire avec cette pression dans les fissures que la maçonnerie aurait éprouvées pour une cause quelconque (*).

Le lecteur, qui m'aura suivi jusqu'au bout, ne se méprendra pas sur la portée que je prétends donner à ces indications. Ce sont, si l'on veut, de simples réflexions destinées à montrer que, malgré les inconnues redoutables du probleme des barrages-réservoirs, malgré la fatalité des fissures dues à la dilatation, il n'est pas impossible de donner à ces ouvrages « une solidité qui ne puisse même pas être mise en doute ».

Il était nécessaire, en terminant, d'affirmer cette possibilité : le nombre des grands réservoirs ne cessera pas, en effet, quelques dangers qui les accompagnent, d'augmenter sans cesse; parce qu'ils sont nécessaires au bon aménagement des eaux, que réclament de plus en plus, tantôt l'hygiène des grandes villes, tantôt la création industrielle de nouvelles forces motrices, quand ce n'est pas l'accroissement de la Production agricole elle-même.

Carcassonne, août 1904.

(**) Sous une charge d'eau, un remblai bien fait est étanche, mais il ne résiste pas s'il foire ou s'il est surmonté; taudis qu'un mur bien construit n'est pas souvent étanche, mais il peut offrir une résistance parfaite tant à la poussée qu'aux corrosions des eaux, pourvu qu'il soit à l'abri des sous-pressions

N° 13

WESTRUMITAGE DES ROUTES NATIONALES

EMPRUNTÉES

PAR LA COURSE ÉLIMINATOIRE FRANÇAISE

DU 20 MAI 1904

Note par M. PERRIN, Ingénieur-auxiliaire des Ponts et Chaussées.

Depuis quelques années de nombreux essais ont été entrepris en France et à l'étranger dans le but de combattre la poussière des routes si gênante pour la circulation des automobiles et pour les habitants au voisinage des voies très fréquentées.

Le procédé qui paraît le plus recommandé jusqu'à ce jour est le goudronnage des chaussées.

La présente note a pour but de donner quelques renseignements sur l'emploi d'une nouvelle substance d'un usage encore peu répandu, la «westrumite », qui n'est autre chose que du goudron d'huiles minérales rendu soluble dans l'eau par une saponification spéciale.

Cette matière qui est liquide se mêle particulièrement à l'eau. On en verse simplement dans le tonneau d'arrosage la quantité nécessaire pour former avec l'eau que l'on ajoute un mélange qui soit au dosage voulu, soit 5,7 p. 100 ou 10 p. 100. Le remplissage du tonneau avec l'eau suffit pour opérer le mélange.

C'est là le grand avantage sur le goudron auquel on peut reprocher de n'assurer l'absence de poussière et l'imperméabilité de la chaussée qu'au prix d'une série de conditions assez difficiles à rem

plir pour l'épandage en grand. Il faut que la chaussée soit absolument sèche ce qui nécessite plusieurs belles journées avant, pendant et après l'opération, car une pluie d'orage survenant peut compromettre un long travail. En outre il faut un matériel spécial pour chauffer et répandre le goudron et des équipes d'ouvriers assez coûteuses.

L'emploi des tonneaux ordinaires d'arrosage permet surtout d'aller vite et de supprimer la poussière sur une grande étendue de routes dans des circonstances particulières et à une date don

née.

L'Automobile-Club de France a été autorisé par l'Administration supérieure et par un arrêté préfectoral du 9 mai 1904 à établir ce qu'on a appelé le Circuit des Ardennes » pour la course éliminatoire de la «< Coupe Gordon-Bennett » c'est-à-dire pour le classement des véhicules français appelés à aller soutenir notre drapeau dans la course internationale qui a eu lieu en Allemagne le 17 juin dernier.

L'Administration supérieure n'a accordé cette autorisation qu'à la condition qu'on prendrait les plus grandes précautions pour éviter les accidents, afin de ne pas voir se renouveler les faits qui ont assombri la grande épreuve de Paris-Madrid en 1903.

Les délégués ont été invités à se mettre en rapport avec les chefs de service de voirie pour arrêter les mesures à prendre. Ces mesures concernant à la fois la préparation, la protection et la garde du circuit ont été discutées dans différentes réunions, proposées ensuite dans un rapport très complet des chefs de service (MM. R1gaux ingénieur en chef des Ponts et Chaussées et Charpentier agent-voyer en chef) et approuvées seulement quelques semaines avant le jour fixé pour la course.

L'une des grandes préoccupations des délégués de l'AutomobileClub était la poussière, aussi la société s'est-elle empressée d'offrir toute la westrumite nécessaire à l'arrosage complet de l'ensemble du parcours de la course.

Le circuit des Ardennes commençant à Mazagran entre Rethel et Vouziers sur la route nationale n° 46 comprend un parcours de 92*,880 dont 67*,560 de routes nationales.

Cette longueur devait être parcourue 6 fois afin de fournir une course d'au moins 500 kilomètres telle qu'elle devait avoir lieu en Allemagne.

La westrumite étant arrivée tardivement aux différentes gares avoisinant le circuit, on avait pensé tout d'abord qu'on pourrait ne westrumiter que les virages et les traverses non neutralisées en y faisant au moins deux arrosages (*). Grâce à une organisation et à une mobilisation rapides, on a pu en divisant le circuit par sections, faire dans les quatre jours qui ont précédé la course deux arrosages partout et même trois dans certaines sections.

On a répandu environ 73 mètres cubes de westrumite et 789 mètres cubes d'eau pour arroser une surface de 366.450 mètres carrés en deux ou trois passages ce qui donne 2,35 de mélange par mètre carré et 0,20 de westrumite.

On a employé sur les routes nationales 29 tonneaux d'arrosage d'une contenance totale de 31.000 litres, 58 chevaux, 29 voituriers et 49 ouvriers y compris 18 cantonniers et 5 chefs.

La dépense totale en transport et main-d'œuvre non compris la fourniture de la westrumite est de 3.640 francs ce qui fait ressortir le prix du mètre carré à environ 0 fr. 01.

La distance moyenne de transport de l'eau a été de 3 kilomètres pour la route no 51, de 3,100 pour la route n° 46 et de 1*,200 pour la route n° 77.

Le résultat fut excellent; ni les coureurs ni le public n'ont été gênés par la poussière malgré la vitesse à 100 kilomètres à l'heure des énormes voitures de course, tandis que sur les sections de routes voisines non westrumitées, on disparaissait dans un nuage opaque de poussière des plus dangereux pour la circulation.

Dans tout le parcours du circuit, on n'a constaté aucune désagrégation atteignant le corps de la chaussée. L'empierrement qui est constitué par des quartzites de la Basse-Meuse s'est maintenu intact et partout en bon état.

Des rechargements faits depuis moins d'un mois n'ont pas souffert de la course; on y a remarqué tout au plus des matériaux fins

(*) Dans un premier essai fait à Nice on a constaté qu'un seul arrosage est insuffisant pour abattre complètement la poussière.

comme du sable qui avaient été aspirés par les pneus des automobiles et qui provenaient des matières d'agrégation.

Il en fut tout autrement lors des courses de Paris-Berlin et ParisAmsterdam qui empruntèrent une partie des mêmes routes; certaines parties, notamment de la route nationale n° 51 ont été sérieusement dégradées.

On a observé que la pluie qui est tombée le lendemain de la course a produit moins de boue dans les parties westrumitées que dans celles qui ne l'étaient pas.

La westrumite forme un précipité fixe ou agglomérant devenu insoluble après l'évaporation de l'ammoniaque.

Aussitôt l'emploi, la route sèche par le beau temps en quelques heures et il n'est pas nécessaire qu'elle soit entièrement dépourvue d'humidité comme pour le goudronnage pour effectuer l'opération. S'il vient à pleuvoir après le séchage de la route, l'effet n'est pas amoindri et il semble que la pluie revivifie la westrumite qui dégage à nouveau son odeur particulière qui n'est pas d'ail leurs désagréable.

Plusieurs arrosages successifs peuvent être considérés comme un huilage progressif de la chaussée n'offrant pas les inconvé nients d'un huilage immédiat comme ceux qu'on a pratiqués dans différents essais.

L'effet se perd naturellement assez vite parce que la westrumite n'a pas pénétré dans la chaussée à une assez grande profondeur. Quand la poussière commence à se reformer après 8 ou 10 jours dans les parties fréquentées, on remarque néanmoins qu'elle est plus lourde et beaucoup moins soulevée par les automobiles que dans les parties non westrumitées. Cette différence a été observée pendant environ un mois après l'opération, puis a disparu tout à fait à la fin du mois de juin, environ 40 jours après la course.

Il est vraisemblable que la durée augmenterait à mesure qu'on élèverait le dosage de la westrumite dans les arrosages et qu'on la ferait pénétrer davantage dans la chaussée.

A cet égard il nous a paru intéressant de faire un essai dans l'exécution d'un rechargement en arrosant trois parties différentes de 200 mètres de longueur chacune à raison de 0',30, 0',60 et 0',90

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