Page images
PDF
EPUB

poussée excentrique, qui les chasse vers l'intérieur en les faisant pivoter. Quand, par contre, un abaissement de température fait contracter le parapet, l'adhérence des mortiers n'est généralement pas suffisante pour ramener la face latérale à sa position primitive de là cette ouverture du premier joint qu'on retrouve invariablement de part et d'autre de tous ces refuges.

[ocr errors]

c) A la clef. Les voûtes se dilatent à leur tour. De l'hiver à l'été, leur sommet subit des oscillations très appréciables dans les grandes arches. Cela fut constaté d'une façon précise à la grande. arche de 60 mètres d'ouverture du viaduc du Gour-Noir sur la ligne de Limoges à Brive. Dans un mémoire inséré aux Annales de 1892, M. Draux a fait connaître que, par rapport au niveau qu'elle occupait aussitôt après le décintrement, la clef de cette voûte s'est abaissée de 10 millimètres au cours de l'hiver 1889-90 et de 12 millimètres pendant celui de 1890-91, tandis qu'au cours de l'été intermédiaire elle s'était surélevée de 3 millimètres. Partant des coefficients donnés par Bouniceau, M. Draux a calculé que l'affaisement de 12 millimètres à la clef correspond à un abaissement de 20° de la température du corps de la voûte.

d) Aux tympans. Mais lorsque la voûte s'abaisse ainsi, le tympan, qui s'appuie sur elle, n'est plus soutenu. Il forme alors. comme une grande console portant sur la culée, et dont le porte-àfaux n'est plus maintenu que par l'adhérence des mortiers. Elle ne peut y suffire évidemment que dans les petites voûtes; mais dès que l'ouverture est un peu grande, le poids de la console entraîne, au droit de la culée ou de la pile, la cassure du tympan aussitôt que la voûte se dérobe sous lui.

Et c'est pourquoi l'on constate dans tous les viaducs de notre ligne, M. Draux dit l'avoir pareillement observé sur celle de SaintDenis au Buisson, une cassure dans les tympans au droit de chaque pile. Ainsi qu'on le voit sur la fig. 1 de la page 180, cette cassure est tantôt unique et à peu près vers l'axe de la pile; tantôt double et, de part et d'autre, de l'aplomb des parements: mais elle s'y retrouve toujours.

[ocr errors]

e) Au corps de la voûte. Rapportons encore une constatation négative qui a son prix.

Au viaduc de Lapradelle, le 22 janvier, par une température à huit heures du matin de 2 degrés seulement, on a dégagé de leur remplissage les reins des deux voûtes portant sur la pile no 7, celle où la cassure du tympan est la plus forte et descend le plus bas. Les chapes avaient été coaltarées, ainsi que les tympans. Elles présentaient le poli du verre; la moindre fissure y eût été apparente; elles n'en portaient aucune trace. Ceci tend à prouver que les voûtes en maçonnerie dans leurs oscillations thermiques se comportent comme un monolithe élastique; assez élastique du moins pour pouvoir obéir à ces faibles oscillations sans se fissurer. Cela peut s'expliquer par la compressibilité et le très grand nombre des joints de mortier (conséquence de la faible épaisseur relative des voussoirs) dans l'étendue du développement de la voûte où se répartit l'effet total de l'oscillation thermique de la clef.

f) Effets de la dilatation dans les tympans évidės. Tous les effets jusqu'ici rapportés de la dilatation dans les ponts et viaducs sont, comme on le voit, peu inquiétants dès qu'on les examine de près. Néanmoins la cassure des tympans au droit des appuis mérite quelque attention quand il s'agit d'une arche de très grande ouverture.

Il est aujourd'hui de pratique courante, peut-on dire, d'élégir les tympans des grandes arches par des voùtains parallèles aux génératrices de la voûte. Cette pratique est parfaitement justifiée, car on diminue, dans une proportion très notable pour les grandes ouvertures, la pression des matériaux dans le corps de la voûte. aussi bien que sur la base d'appui.

Mais cette disposition a l'inconvénient de reporter entièrement sur le premier voûtain à partir de l'appui, la cassure inévitable du tympan. C'est ainsi qu'au viaduc de Gour-Noir, le premier voûtain adossé au contrefort de la culée présente pendant l'hiver, quand la clef de la grande voûte est au plus bas, une fissure à la clef de deux millimètres et demi de largeur. Si à ce moment on la bouchait par un coulis de ciment, on pourrait craindre d'exposer tous les voûtains à de très fortes compressions quand la température, en s'élevant, ferait remonter la grande voûte. Il reste donc là deux demi-voûtes ne s'appuyant pas l'une sur l'autre ; et ce double en

corbellement qui parait irrémédiable n'est pas sans faire appréhender les dislocations qu'y peuvent produire le passage des trains. Aussi M. Draux s'arrête-t-il, dans le mémoire précité, à la conclusion que les évidements des tympans, par le moyen des voûtes transversales, doivent être abandonnés dans la pratique des constructions.

La conclusion est sans doute excessive si l'on s'en tient aux résultats de la pratique elle-même. Mais en outre il est un moyen très simple de parer à l'inconvénient signalé: c'est d'établir sur chaque tête de l'ouvrage, entre les piles des voûtains, un mur de masque de faible épaisseur, qui, rendant ces piles solidaires tout en chargeant peu les reins, répartit entre toutes les petites voûtes l'effet d'extension qu'y produit l'abaissement de la grande à la clef.

Nous avons en effet établi de pareils masques au viaduc de Rébuzo, dont l'arche centrale, comme il est dit plus haut, est un plein-cintre de 40 mètres. La cassure des tympans au voisinage des contreforts des culées s'est simplement traduite par l'ouverture de quelques dixièmes de millimètre du premier joint du bahut. La fissure se prolonge dans le corps du parapet, mais elle cesse d'être apparente au-dessous de la plinthe et n'atteint même. pas le voûtain, bien loin de l'avoir cassé à la clef comme au viaduc du Gour-Noir.

Deux autres fissures du parapet, toutes pareilles, se remarquent en outre au-dessus de la pile intermédiaire portant les deux voùtains. Cela tend bien à prouver que la solidarité des petites voûtes d'élégissement est réalisée d'une manière efficace par le mur de masque, qui a l'avantage au surplus d'abriter des intempéries les reins de la grande voûte (*).

*) Il donne aussi plus de fermeté à l'aspect général de l'ouvrage, en même temps que plus de légèreté au bandeau, qu'il permet d'extradosser parallèlement. Néanmoins, cette disposition qui n'est pas habituelle étonne un peu l'œil de l'observateur, qui demande, d'instinct, aux élégissements une franche apparence d'allègement de la grande voûte. A ce point de vue il serait préférable, au lieu de monter le masque jusqu'à la naissance des voûtains comme nous avons fait à Rébuzo, de l'arrêter plus bas, à la distance au moins d'un demi

rayon.

IV.

APPLICATION AUX MURS DE RÉSERVOIRS

Toutes ces constatations relatives aux ponts ou viaducs sont parfaitement rassurantes sur les effets qu'y produit la dilatation des maçonneries; tellement mème que notre étude, si elle se bornait là, risquerait d'être trompeuse par ses conclusions optimistes. C'est pourquoi nous croyons devoir la faire suivre d'une digression sur les murs de réservoirs car pour ceux-ci les effets de la dilatation sont au contraire extrêmement inquiétants.

Dans un mur, tel qu'un parapet, exposé à l'air ambiant sur ses deux faces et de faible épaisseur, les variations de température doivent se faire sentir intégralement. Si donc on lui attribue le coefficient de dilatation de 10 × 10−6 = 10-5, moyenne de ceux de la pierre et du mortier trouvés par Bouniceau, on voit qu'un abaissement de température de 20° produira, sur une simple longueur de 10 mètres un retrait de 2 millimètres. C'est plus qu'il ne faut pour y déterminer une cassure transversale; et de fait, dans la plupart de ces sortes d'ouvrages on découvre, avec un peu d'attention, des fissures à allure verticale rarement espacées de plus de 5 à 10 mètres. Leur caractéristique est de ne pas descendre jusqu'au sol des fondations, qui ne subit pas les mêmes variations de température; et de ne pas présenter des dénivellations d'une lèvre à l'autre, ce que les arrachements du mortier font aisément reconnaître s'il y avait dénivellation la cassure serait due à un tassement.

Le même effet doit se produire dans les murs de soutènement des terres; quoiqu'ils soient moins sensibles aux variations de température, à cause, tant de leur plus grande épaisseur, que de la protection du remblai appuyé sur l'une des faces. Mais ces sortes de fractures sont ici encore sans grande importance au point de vue de la stabilité de l'ouvrage, qui n'en reste pas moins capable de résister à la poussée des terres (*).

(*) Elles justifient toutefois, pour les longs murs de quai, les joints de dilatation, régularisant le phénomène, tels qu'on les a ménagés tous les 70 mètres environ. Dans les quais de la North-River à New-York. (Annales de 1888. Mission de MM. Lerond et Combarnous)

Tout autre sera la conclusion s'il s'agit d'un long mur de BarrageRéservoir. La pression de l'eau qui s'introduira dans les fissures, peut bouleverser entièrement les conditions de stabilité primitives; elle peut rendre vaine la confiance que le constructeur aura puisée dans les calculs de stabilité tels qu'on avait l'habitude de les faire. jusqu'à ces derniers temps, avant la catastrophe retentissante de Bouzey, au mois d'avril 1895.

Ces calculs conduisent en effet, pour la section théorique d'un barrage dont le parement amont est censé vertical, à la forme d'un triangle ayant son sommet au niveau de la retenue. Mais admettons pour fixer les idées, que le poids de la maçonnerie soit de 2.000 kilogrammes au mètre cube, exactement le double de celle de l'eau. Une construction géométrique fort simple montre que, si la base de la section triangulaire égale la moitié de la hauteur, la résultante des pressions dans tous les joints horizontaux du mur passera par l'arête extérieure: on sera à la limite de la stabilité. Que si l'on donne à la base une largeur égale à la hauteur, la résultante passera cette fois par le milieu du joint, et l'on se croira dans les meilleures conditions de résistance (Voir fig. 3).

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

Et cependant dans l'un et l'autre cas, comme dans tous les profils triangulaires, si grande qu'en soit la largeur à la base, s'il se

« PreviousContinue »