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chage. On étalait et pilonnait, dans le moule posé sur une aire en bitume, une première couche de béton sur 0,05 d'épaisseur ; on posait sur cette première couche trois fers ronds parallèles de 0,008, coupés à 0m,40 de longueur et régulièrement espacés, puis trois autres fers semblables dans l'autre sens, sans ligatures ; et l'on achevait de remplir le moule de béton, en damant avec soin; après quoi on laissait durcir deux ou trois jours. On démoulait alors, en retirant simplement les quatre chevilles, et les dalles demeuraient encore à l'air pendant un temps plus ou moins long, suivant la température, pour parvenir à un durcissement suffisant.

Elles pesaient alors 27,85. Avant l'emploi on en essayait quelques-unes, prises au hasard, en les plaçant sur quatre briques à plat, disposées aux quatre angles; dans ces conditions elles supportaient aisément un poids de 500 à 600 kilogrammes placé au milieu et se rompaient lorsqu'on portait ce poids à 800 kilogrammes.

On les a posées jointives et à sec, au-dessus d'un cours de briques, convenablement rangées sur le radier, pour former drainage général; puis on a rempli de mortier maigre les vides formés au pourtour par les chanfreins ménagés à la partie supérieure.

Le prix du mètre carré, tout compris, fabrication et pose, est revenu à 3 francs.

Le sable fin a été répandu, au-dessus du plancher ainsi constitué, en une couche unique et homogène de 0,87 d'épaisseur: puis le filtre a été remis en service en mai 1904.

Son fonctionnement, suivi de près et comparé avec celui des autres bassins filtrants, a immédiatement fait ressortir une supériorité certaine.

En effet le filtre n° 3 a fourni, après la remise en service, deux périodes d'activité successives de 96 et de 88 jours, permettant d'espacer les nettoyages, de manière à les réduire de 2 à 3 seulement, en six mois. D'un autre côté la perte de charge, qui va ordinairement en augmentant peu à peu, est demeurée longtemps très Ann. des P. et Ch. MEMOIRES. - 1905-1.

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réduite et n'a pas atteint 0,10 avant 57 jours durant la première période, avant 71 jours dans la seconde, tandis que les meilleurs filtres de l'établissement accusaient une perte égale après 30 jours au plus, ce qui est la marque évidente de la facilité avec laquelle l'eau s'écoule à travers le plancher perméable.

Après six mois d'usage, on voulut vérifier l'état des dalles, et l'on en découvrit une partie, en ouvrant simplement une tranchée en diagonale dans la masse de sable fin: elles se sont montrées absolument intactes, aussi poreuses qu'au premier jour, et plus résistantes; la rupture n'était plus obtenue que sous un poids de 1.800 kilogrammes. En outre pas le moindre dépôt de sable n'a été rencontré dans les canaux d'écoulement.

L'expérience à grande échelle se trouve donc avoir nettement conformné les résultats déjà obtenus au petit filtre d'essai en 1903. Et, cette fois, elle a paru assez concluante pour justifier l'extension de l'emploi des dalles filtrantes en béton armé à toute la surface des nouveaux filtres, prévus au nombre de 19, et qui, à raison de 900 mètres carrés chacun, représentent une superficie totale de de plus de 17.000 mètres carrés.

Les avantages du plancher filtrant, en carreaux de béton armé, apparaissent en effet multiples et considérables. On peut les formuler comme suit :

1o Réduction importante d'épaisseur du support inerte;

2o Augmentation consécutive de l'épaisseur de la couche de sable. fin, dont les rechargements pourront être dès lors plus rares, plus espacés, partant moins dispendieux;

3o Régularité plus parfaite de l'écoulement;

4° Augmentation de la durée des filtres et de la qualité de l'eau filtrée;

5° Homogénéité de la couche filtrante, d'où une facilité beaucoup plus grande pour la visite et les réparations des radiers et des murs.

Quant à la dépense, elle ne semble pas devoir dépasser sensiblement celle que comporte le dispositif habituel, au moment du premier établissement des bassins filtrants: y eût-il d'ailleurs une légère différence à ce point de vue qu'elle serait bien vite compen

sée et au-delà, par la diminution des frais d'exploitation. On peut donc dire qu'on obtient de la sorte, sans augmentation de prix, un instrument plus perfectionné, susceptible d'assurer dans l'exploitation des facilités nouvelles en même temps que des économies appréciables.

Les nouveaux filtres, qu'on va construire à Ivry, doivent recevoir une autre amélioration de détail qui mérite, sans doute aussi d'être signalée.

Elle a pour objet de remédier à une imperfection présumée du dispositif habituel des bassins filtrants, qui résulte de la possibilité d'un passage direct de l'eau brute entre la paroi lisse des murs de pourtour et les couches filtrantes on craint qu'une fraction, très faible sans aucun doute mais nullement négligeable cependant, du volume d'eau à épurer ne parvienne à gagner telle quelle les collecteurs, en même temps que l'eau filtrée, à travers la couche de sable fin, et n'y apporte des éléments de contamination.

Pour éviter cet inconvénient, dans quelques installations récentes, on a substitué, à l'enduit lisse des murs de pourtour, des crépis fouettés et rugueux, qui feraient obstacle au glissement de l'eau le long des parois : mais le mode de confection de ces crépis ne donne pas de garanties aussi grandes d'étanchéité que celui employé pour les enduits lisses, et l'on peut se demander par ailleurs si les rugosités d'un enduit fouetté seraient bien un obstacle effectif au glissement direct le long des parois.

Il serait plus sûr sans doute d'opposer au passage de l'eau, entre les murs et les masses filtrantes, une saillie suffisamment marquée, pour que le contournement par les filets liquides en soit pratiquement impossible: mais, outre que l'établissement de ces saillies n'irait pas sans dépense ni sujétions supplémentaires, il y aurait à craindre qu'elles ne viennent à être brisées au moindre choc, lors des remaniements périodiques de la couche de sable ou des travaux divers de réparation.

Le dispositif nouveau, qui va recevoir à Ivry une application générale dans les bassins en construction, consiste dans la limitation

du plancher perméable, en carreaux de béton armé, par une petite murette périmétrale étanche, suffisamment écartée des murs de pourtour. L'intervalle, qui serait en l'espèce de 0,25, formerait une sorte de rigole dans laquelle l'eau glissant le long des parois viendrait s'arrêter forcément et demeurerait immobile, la pesanteur opposant un obstacle absolu à la continuation du mouvement; aucun des filets liquides parvenus jusqu'à la rigole ne pourra dès lors contourner la murette, pour gagner le plancher perméable drainant; par suite il ne se produira, en réalité, aucun écoulement direct contre les parois; et l'on est péremptoirement assuré que toute l'eau reçue dans les collecteurs, à travers le plancher perméable, ne peut y parvenir sans traverser toute l'épaisseur de la couche filtrante de sable fin.

La critique qu'on ne manquera pas de faire, à l'encontre de ce dispositif, au sujet de la stagnation forcée de l'eau dans la rigole et des conséquences fâcheuses qui pourraient en résulter, peut être d'ailleurs aisément écartée, si l'on a le soin de ménager, en quelque point convenablement choisi de cette rigole, un orifice d'évacuation, qu'on pourra soit tenir constamment ouvert, soit ouvrir à volonté, de manière à réaliser un petit écoulement, continu ou intermittent, qui y assurera le renouvellement de l'eau.

*

Ces améliorations apportées à la pratique des filtres à sable, dans le service des eaux de Paris, ont été étudiées et mises en œuvre, sous la direction de M. l'Ingénieur en chef Bechmann, par MM. Dutoit, Ingénieur auxiliaire des Ponts et Chaussées, Inspecteur des machines et réservoirs; Dejust, Ingénieur municipal, Inspecteur-adjoint, et Tartary, Conducteur principal du Service des travaux de Paris.

Février 1905.

N° 10

NOTE

SUR

L'EXÉCUTION DU PUITS ARTÉSIEN

DE LA BUTTE-AUX-CAILLES, A PARIS

Par M. GESLAIN. Ingénieur des Ponts et Chaussées.

Le percement du puits artésien de la Butte-aux-Cailles, commencé il y a quarante ans, vient d'être terminé. Comme pour les autres puits artésiens de la Ville de Paris, l'opération a été longue et difficile et a passé par des phases multiples.

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Soumission de M. Saint-Just Dru en 1863. Ce travail a été entrepris en vertu d'un arrêté du Préfet Haussmann, portant la date du 19 juin 1863, qui approuvait à la fois une soumission de MM. Laurent et Degousée fils pour le puits de la place Hébert, et une autre de M. Saint-Just Dru (successeur de M. Mulot) pour celui de la Butte-aux-Cailles.

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Programme des travaux. M. Dru s'était engagé à descendre son forage jusqu'à la deuxième nappe des sables verts celle du puits de Passy - et au plus à 610 mètres de profondeur à partir du sol (cote 62 mètres au-dessus du niveau de la mer), moyennant le prix à forfait de 258.000 francs, le tubagé de revêtement en tôle devant être payé en plus à raison de 1 franc le kilogramme. La Ville s'était réservé la faculté d'exécuter en régie l'avant-puits à travers les terrains tertiaires et jusqu'à 20 mètres de profondeur dans la craie.

Il s'agissait de percer tout l'étage de la craie, puis les argiles du

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