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transporter dans les matières civiles, les dispositions de droit criminel,
et vice versa, en telle sorte que les attributions judiciaires n'offriraient
plus qu'un véritable chaos. Au surplus, pour en venir au mode d'exécu-
tion de l'art. 52 c. pén., il faut nécessairement, et avant tout, qu'il y ait
un délit constaté, et la cour l'a si bien compris, qu'elle n'a fait l'applica-
tion de l'art. précité qu'après avoir établi l'abus de confiance en vertu de
l'art. 408; c'est là principalement qu'est le vice de l'arrêt. S'il en était
ainsi, la contrainte par corps serait applicable en toutes matières civiles,
puisque l'art. 52 autorise à la prononcer, même pour les frais. Or, com-
ment un pareil principe pourrait-il être admis en présence du tit. 16 c.
civ., et notamment de l'art. 2063. Ainsi, malgré toute la subtilité de ré-
daction de l'arrêt, il n'en est pas moins évident que la question domi-
nante était celle du délit, et que le mode d'exécution n'était que l'acces-
soire. Or, on a déjà démontré que la question principale était en dehors
de la compétence de la juridiction civile.
Le défendeur répondait, sur le 1 moyen, qu'en jugeant que des écrits
et des circonstances il résultait, contre le sieur Barré la preuve d'un dé-
pôt volontaire, l'arrêt attaqué s'était livré à une appréciation qui échap-
pait à la censure de la cour.

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formellement exclu une communauté à partager après le décès de l'un d'eux et établi une communauté à titre universel; aucune mutation n'est donc survenue, et il n'y a lieu au paiement d'aucuns droits d'hérédité. » La régie, de son coté, prétendait qu'aux termes du contrat de mariage des époux Wetzels, il y avait donation et que le survivant ayant recueilli à ce titre la moitié des biens de la communauté formant la succession de sa femme, devait acquitter les droits de mutation par décès, sur la valeur de cette moitié.

6 janvier 1832, jugement du tribunal de Wissembourg, qui rejette les prétentions de la régie, en ces termes : - «Considérant que le contrat de mariage du demandeur en opposition, en date du 28 frim. an 6, enregistré le 14 nivôse suivant, renferme une stipulation de communauté universelle au profit du survivant des époux, en cas d'inexistence d'enfans; « Considérant que l'art. 1525 c. civ., conforme aux anciens principes, porte qu'une semblable stipulation n'est point réputée un avantage sujet aux règles relatives aux donations, soit quant au fond, soit quant à la forme, mais seulement une convention de mariage et entre associés; « Considérant que les expressions de donation réciproque et d'acceptation que renferme le contrat de mariage, ne changent pas l'essence de la convention intervenue entre les conjoints Wetzels, et qu'on doit rechercher dans les conventions l'intention des parties, plutôt que s'arrêter au sens littéral des termes;

« Considérant que le décès de la femme du demandeur en opposition n'a

n'a jamais eu sur les biens de la communauté qu'une expectative qui ne s'est point réalisée, et non des droits acquis, d'où il suit que la régie est mal fondée dans sa demande, puisque le sieur Wetzels ne tient pas de sa femme ses droits sur la communauté, et qu'il n'a fait que recueillir le fonds et les bénéfices de l'association conjugale qui a existé entre eux. >> le tribunal de Wissembourg a considéré comme simple convention de Pourvoi de la régie pour violation de l'art. 1525 duc. civ., en ce que mariage et entre associés, non sujette aux règles des donations, une stipulation qui renferme une donation mutuelle et réductible pour survenance d'enfans. Elle a dit :

Sur le second moyen, le défendeur a soutenu que du moment où la cause de l'obligation formant l'objet d'un litige, est un délit, et telle était l'hypothèse, puisqu'il y avait violation de dépôt, la condamnation prononcée prend le caractère de réparation civile dans le sens de l'art. 52 c. pén., et cette condamnation doit entraîner, aux termes de l'article pré-point opéré au profit de ce dernier une mutation de propriété, puisqu'elle cité et comme voie d'exécution, la contrainte par corps, lors même qu'elle est prononcée par voie purement civile; que vainement on objecte que la qualification de délit ne peut résulter que d'un débat criminel, entouré des garanties qui lui sont propres ; qu'en effet, dès lors que l'on peut poursuivre la réparation d'un délit au civil, il est évident que la constatation et la qualification de ce délit peuvent être faites par le juge civil, dans les formes propres à sa juridiction, puisque, sans cela, il ne pourrait statuer sur le procès. ARRÊT (après délib, en ch. du cons.). LA COUR; Sur le 1 la juridiction civile Attendu moyen :que était compétente pour juger la question de savoir si les sommes remises par Gambier à Barre l'avaient été à titre de dépôt ; Attendu qu'en pro nonçant que les sommes ainsi confiées à Barre l'avaient été à ce titre, la cour royale de Paris s'est livrée à une appréciation des preuves écrites du dépôt, qui n'excède en rien les limites de ses attributions; - Rejette le pourvoi sur ce premier moyen; Sur le 2 moyen - Vu les art. 2059, 2060, 2061, 2062 et 2063 c. civ., les art. 52 et 408 c. pén. ;-Attendu que la contrainte par corps en matière civile ne peut être ordonnée par les tribunaux civils, que dans les cas déterminés par la loi; Attendu que le dépôt volontaire n'est pas compris dans ces cas; qu'en considérant donc les sommes remises par Gambier à Barre, comme l'ayant été à titre de dépôt volontaire, la contrainte par corps ne pouvait être attachée à la condamnation à la restitution de ces sommes; d'où il suit qu'en prononçant cette contrainte, la cour royale de Paris a faussement appliqué et par suite expressément violé les articles précités du c. civ.; Attendu, d'ailleurs, que la même cour, qui, en l'absence d'un texte formel dans la loi civile, à eu recours aux dispositions du c. pén. pour voir un délit dans les faits de la cause et pour prononcer la contrainte par corps contre Barre, a transformé sa juridiction en correctionnelle, de civile qu'elle était; ce qu'elle n'a pu faire, sans excéder les limites de sa compétence, et sans faussement appliquer et sans violer les art. 52 et 408 c. pén. ; - Casse.

Du 18 nov. 1834. - Ch. civ. - M. Portalis, p. pr. - M. Bérenger, rapp. M. de Gartempe, av. gén,, c. conf. - MM. Valton et Letendre de Tourville, av.

DONATION PAR CONTRAT DE MARIAGE, SOCIÉTÉ D'ACQUÊT, ENREGISTREMENT. La clause contractuelle, portant que la fortune tant mobilière qu'immobilière des époux, présente et à venir, formera une seule masse qui appartiendra au survivant, doit étre considérée, méme vis à-vis de la régie, comme une stipulation entre associés, autorisée par l'art. 1525 c. civ, et non comme une donation. Il importe peu que la clause contienne une stipulation de réduction, en cas d'existence d'enfant du mariage, ou que la stipulation soit qualifiée de donation mutuelle.

(Enreg. C. Wetzels.)

Le contrat de mariage du sieur Girard-Joseph Wetzels et de Marie-Salomé Wagner, passé le 28 frim. an 6, devant un notaire de Dahn, contenait les dispositions qui suivent :

«Art. 1o. La fortune réciproque des futurs, apportée en mariage, ainsi que les acquêts, tant mobiliers qu'immobiliers, sous quelque dénomination que ce puisse être, formeront une masse commune qui appatiendra en toute propriété au survivant.

«Art. 2. En cas d'existence d'enfans procréés dans le mariage, le survivant n'aura que l'usufruit de la moitié de cette masse.»>

Telles sont les conventions matrimoniales des parties acceptées par elles, avec reconnaissance qu'elles ont eu lieu à titre de donation mutuelle entre-vifs l'une de l'autre.

En 1831, décès de la femme Wetzels sans postérité.

Peu après, le sieur Wetzels fait à la régie la déclaration que voici : «La défunte n'a laissé aucun meuble ni immeuble à elle appartenant, vu que par le contrat de mariage susdit, le soussigné et son épouse ont

Les époux forment, en vertu de l'art. 1525 du c. civ., une espèce de contrat aléatoire ayant pour objet de déterminer quel sera le propriétaire définitif de tous les biens de la communauté. Cette stipulation ne présente aucun caractère de libéralité. Elle n'est, dans aucuns cas, mêine dans le cas d'un héritier à réserve, sujette à réduction contre l'époux auquel elle profite, parce que ce n'est point comme donataire, mais comme propriétaire ab initio, qu'il se trouve investi de la propriété de la totalité des biens de la communauté.

Mais ce caractère et les effets qu'une telle clause produit sont modifiés dans l'espèce, 10 parce que les dispositions qui attribuent au survivant des époux la totalité de la communauté sont acceptées par eux avec reconnaissance et à titre de donation mutuelle; ces termes, en effet, ne sontils pas exclusifs du caractère de convention entre associés et plutôt les signes distinctifs d'une libéralité? 2° Parce que les époux Wetzels ont stipulé que la donation serait réductible en cas d'existence d'enfans; cette dernière clause, en effet, n'est pas applicable à la convention permise par l'art. 1525, laquelle a son effet, qu'il y ait on non des enfans. Cette dernière considération fait voir que dans la clause attaquée il n'y a que l'exercice de la faculté accordée aux époux de se faire donation réciproque par leur contrat de mariage de leurs biens présens et à venir. A l'appui de cette opinion, on cite un arrêt du 15 fév. 1832, Rec. pér.,

32. 1.107.

Le défendeur répondait que l'interprétation du contrat du 28 frim. an 6 était dans les attributions du tribunal de Wissembourg; que si les juges ont puisé leur conviction et les motifs de leur jugement dans les clauses et le sens de ce contrat, ils n'ont fait que l'application de l'art. 1156, qui veut qu'on recherche dans les conventions quelle a été la commune intention des parties plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes. Les expressions donation mutuelle ne sont point un obstacle à cette interprétation, lorsque les premières expressions de la stipulation indiquent clairement que les époux voulaient que leurs pactions matrimoniales fussent irrévocables; -Que la stipulation à raison des enfans étant soumise à leur survenance pour recevoir son exécution, il était superflu de la discuter, puisque la dame Wetzels était décédée sans enfans;

Que l'arrêt cité ne peut servir d'autorité dans cette question, puisque les motifs de cet arrêt ne reposent pas sur une circonstance analogue, mais bien sur la réunion d'un grand nombre de stipulations dont on ne rencontre aucune trace dans le contrat du 28 frim. an 6;

ARRÊT (après délib. en ch. du cons.).

LA COUR;-Attendu que par le contrat du 28 frim. an 6, qui a réglé les clauses de leur association conjugale, dont l'expédition, traduite de la langue allemande par un interprète juré, et dûment légalisée par le président du tribunal de première instance de Wissembourg, a été produite à la cour, les époux Wetzels ont déclaré vouloir que «la fortune de quelque nature qu'elle soit, tant mobilière qu'immobilière, apportée ou « déjà héritée réciproquement, ou qui pourrait être héritée ou acquise dans « la suite, fit une seule masse qui appartiendrait au survivant, en pleine « propriété sans aucun empêchement; »

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Que la nature et le caractère de cette stipulation n'ont été altérés, ni par la clause portant réduction éventuelle de cet avantage à l'usufruit de

moitié de cette masse, dans le cas, non réalisé, de survenance d'enfans, ni par les mots : donation mutuelle, qu'on lit dans la suite du même contrat de mariage;

Et qu'en décidant que « cette stipulation n'est pas un avantage, sujet << aux règles relatives aux donations, soit quant au fond, soit quant à la «<forme, mais simplement une convention de mariage et entre associés » de la nature de celles que définit l'art. 1525 c. civ., le tribunal de Wissembourg u'a violé aucune loi; - Rejette.

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Du 24 nov. 1834. Ch. civ. - M. Dunoyer, f. f. de pr. - M. Quéquet, rapp.-M. Laplague-Barris, 1" av. gén., concl. contr.- MM. Teste-Lebeau et Moreau, av.

JUGEMENT, MOTIFS, RESPONSABILITÉ.

Déclarer responsable et passible de dommages-intérêts un individu actionné en réparation de certain fait, mais sans exprimer la cause de cette responsabilité, laquelle était contestée par le defendeur, c'est, de la part d'une cour royale, contrevenir à l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810.

Cette décision ne sera pas lue sans quelque surprise. Certes, lorsque sur l'action en réparation du préjudice d'un fait que les conclusions du demandeur font connaitre, une cour royale condamne le défendeur à réparer le dommage, il semble que de ce rapprochement il résulte manifestement que c'est du fait énoncé dans les conclusions qu'elle a entendu rendre celui-ci responsable. - La chambre civile de la cour de cassation, dans l'arrêt qu'on rapporte ici, n'a cependant pas pensé que cela fût suffisant, se fondant sur ce que l'individu actionné en réparation avait prétendu n'être pas auteur du fait qu'on lui imputait, elle a cassé avec raison l'arrêt de la cour royale, parce qu'il ne mentionnait pas dans ses motifs la cause du dommage.

Peut-être trouvera-t-on que la cour a poussé les conséquences du principe qui exige des motifs dans les jugemens, à un point de rigueur que l'état encore peu avancé de la théorie sur cette matière semblait ne pas comporter; mais en matière si grave, et lorsqu'il s'agit d'un principe si propre à assurer aux citoyens une bonne justice, on doit faire des vœux pour que la science judiciaire arrive à ce point de précision, et l'on se tromperait, à notre avis, si l'on voulait expliquer la cassation qu'on lira plus bas, par la faveur plus ou moins grande dont la position du demandeur se trouvait environnée.

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Ceux-ci interjetèrent appel et se hâtèrent de faire recevoir leur cau. tion: ce qui eut lieu par jugement du 15 mai 1829.

Néanmoins, la cour de Paris, par arrêt du 20 du même mois, considéra qu'il n'était pas justifié que la caution eût été fournie, et confirma le jugement du 29 avril.

En vertu d'une expédition de cet arrêt et avant même qu'elle fût signifiée, le sieur Courtin se fit mettre en liberté.

Alors les époux Sauclières, nantis de l'expédition du jugement qui acceptait leur caution, et avant toute signification de l'arrêt, formèrent opposition à l'élargissement de Courtin; mais c'était trop tard.

Aussitôt ils assignèrent le sieur Gaillard, directeur de Ste.-Pélagie, en réparation du dommage qu'il leur avait causé. Les époux Sauclières prétendaient que l'exécution donnée au jugement du 29 av. était nulle, pour n'avoir pas été précédée de la signification à avoué de l'arrêt confirmatif. Gaillard soutint au contraire que la loi n'exigeait pas, pour l'exécution des arrêts comme pour celle des jugemens, leur signification préalable à avoué; 2° Qu'au surplus, ce n'était pas lui, mais le sieur Duchesne, greffier de Ste.-Pélagie, dont les fonctions étaient indépendantes des siennes, qui devait être responsable,

Le tribunal de la Seine repoussa la prétention des époux Sauclières; mais la cour de Paris l'accueillit par arrêt du 11 juin 1831, ainsi conçu « Considérant que l'arrêt confirmatif du jugement n'avait point été signifié à avoué, avant l'exécution qu'il a reçue par la mise en liberté de Dussaulsoy; qu'ainsi, cette exécution est nulle, et que Gaillard, directeur de Ste.-Pélagie, est responsable du préjudice éprouvé par Sauclières-IIarisson et femme de cette mise en liberté ; condamne Gaillard à payer aux appelans, à titre de dommages-intérêts, 10,500 fr., sauf son recours contre qui de droit. >>

Pourvoi par Gaillard, pour violation 1o de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810; 2o Pour violation de l'art. 147 c. pr.

ARRÊT (après délib. en ch. du cons.).

LA COUR ; - Vu l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810; - Attendu qu'il est constaté et non dénié que l'élargissement de Dussaulsoy était le fait de Duchesne, greffler de la maison de Ste.-Pélagie; que Gaillard, directeur de cette maison, a soutenu qu'il ne pouvait être responsable de cet élargissement, parce que les fonctions de greffier étaient indépendantes des siennes, et qu'il n'existait entre eux aucun rapport de commettant à préposé

Attendu que l'arrêt attaqué s'est contenté de déclarer Gaillard responsable du préjudice occasioné aux mariés Sauclières par l'élargissement de Dussaulsoy, sans énoncer les causes de cette responsabilité contestée par

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Il en est de même à l'égard du moyen pris de ce qu'ils auraient été à tort condamnés solidairement.

La première de ces décisions, quoique le moyen qu'elle a écarté ait présenté à l'examen une irrégularité de laquelle il résultait un défaut de qualité, nous paraît à l'abri de toute critique, et rentrer dans une jurisprudence très constante.

A l'égard de la seconde, elle fait plus de difficulté. Des individus qui sont actionnés individuellement ne s'attendent pas à une condamnation qui les placera dans les liens de la solidarité. C'est par cette raison que déjà l'année dernière, nous avons élevé des doutes sur la justesse d'une décision qui consacrait le même principe. Rec. pér. 34. 2. 81. - Il est à regretter que les questions de la nature de celle-ci ne soient presque jamais l'objet d'un débat approfondi devant la cour. Et la raison de ce silence, c'est que, devant la chambre des requêtes qui les admet d'office, les avocats ont intérêt à les passer sous silence.

Les deux décisions qu'on vient de retracer ont été rendues par l'arrêt qui suit.

MONT-DE-PIÉTÉ, DÉFICIT, PREUVE, RESPONSABILITÉ.

Le déficit entre l'évaluation d'un appréciateur du mont-de-piété et le prix de vente des objets estimés peut, quant à la responsabilité qui en résulte contre l'appréciateur, étre établi autrement que par écrit émané de lui ou par la représentation de son bulletin (C. civ., 1315, 1325).

Et, spécialement, le déficit peut étre déclaré résuller des mentions consignées sur le registre du caissier du mont-de-piété, quoique ce dernier serait le préposé des administrateurs et non celui de l'appréciateur....... surtout s'il y a présomption que ce dernier s'est contenté de son bulletin, pour la constatation du déficit, en ce qui l'intéressait ou ses garans.

Le fait par la commission administrative d'un mont-de-piété d'avoir, contrairement aux prescriptions formelles de son réglement, laissé élever les débets de l'appréciateur bien au-dessus de son cautionnement, ne la rend pas non recevable dans son recours contre les garans qui, aux termes de ce réglement, s'étaient engagés à payer au défaut de l'appréciateur.

pénètre de plus en plus dans nos usages, nous paraissent échapper à la Ces décisions qui toutes sont neuves et touchent à une législation qui critique. Telles étaient, en effet, les circonstances consignées dans l'arrêt de la cour royale, qu'elles affaiblissaient beaucoup la rigueur des principes auxquels on voulait subordonner leur solution. Voici l'espèce qui leur a donné naissance : (Commiss.-priseurs de Strasbourg C. l'administ. du mont-de-piété.) En 1826, création d'un mont-de-piété à Strasbourg et nomination d'un membre de la compagnie des commissaires-priseurs de la ville, le sieur Goubert, pour appréciateur.

Le réglement l'établit garant de ses appréciations et met à sa charge la différence entre les prix de vente et ceux d'évaluation; son cautionnement est spécialement affecté à cette garantie, et dans le cas où il ne suffirait pas, la responsabilité frappe la compagnie même des commissaires.

Le réglement statue ensuite qu'à l'effet de constater les évaluations, l'appréciateur signe la mention 1° sur le registre des prêts, qui reste aux mains du caissier, et 2° sur un bulletin qui reste joint au nantissement. Il a été soutenu qu'on avait cherché à hausser le plus possible les prisées, pour triompher de la concurrence des maisons de prêt clandestines que le nouvel établissement était destiné à faire tomber. Le sieur Goubert va jusqu'à prétendre que le directeur le contraignit à élever malgré lui les estimations, soit en usant de menaces, soit en lui promettant qu'on ne le rendrait pas garant des évaluations.

Quoi qu'il en soit, après plusieurs ventes successives de nantissemens, un déficit vint à se manifester; l'appréciateur adressa une pétition à la commission des hospices, pour démontrer que ce déficit ne pouvait Ini être attribué, et demander, en conséquence, qu'on usât de l'article du réglement, qui autorisait à ne pas le mettre à sa charge. — La pétition resta sans réponse.

En 1829, un arrêté du préfet ordonne à la commission administrative

de faire combler le déficit qu'une délibération du 16 janv. 1830 constate s'élever à 40,611 fr.

Des demandes en paiement de cette somme furent formées contre le sieur Goubert et chacun des membres de la compagnie des commissairespriscurs, à la date des 18 fév. et 14 mai 1830.

Le tribunal, en décidant que le déficit n'était pas prouvé, se trouva dispensé d'examiner 1° s'il provenait du fait de Goubert; 2° s'il devait, dans une certaine proportion et dans quelle proportion, peser tant sur Goubert que sur ses confrères. Appel; Et le 14 août 1833, arrêt de la cour de Colmar qui infirme en ces termes : - «Considérant que la commission administrative du mont-de-piété a demandé à la compagnie des commissaires-priseurs si elle entendait qu'un appréciateur fût choisi dans son sein, en faisant connaître sa responsabilité et celle de sa compagnie; que le 16 janv. 1827, cette compagnie..... rappelle la double responsabilité suffisamment garantie, dit-elle, par les 38,400 fr. des cautionnemens de la compagnie; que huit jours plus tard, ils s'adressèrent au préfet, afin d'obtenir un droit plus élevé pour les prisées et les ventes, en faisant observer surtout combien était grave cette double responsabilité.....

« Que déjà, le 24 avril 1829, Goubert, nommé appréciateur, demandait à la commission la remise du déficit qui pouvait résulter de l'exercice des quatorze premiers mois..... sans alléguer ni promesses faites, ni violences exercées, et surtout en reconnaissant virtuellement qu'il avait procédé ou fait procéder à toutes les estimations. Il se gardait bien de prétendre, comme il l'a plaidé récemment, que des prêts avaient pu dépasser les 4/5 et les 2/3 des estimations prescrites par l'art. 74, d'après la nature des objets.....

« Considérant que, dans le registre des prêts qui est produit, on ne voit que la somme prêtée, et non l'estimation, signée par l'appréciateur, mais que l'appréciateur et le caissier semblent avoir regardé cette forma lité comme superflue; car l'indication de la somme prêtée offrait l'estimation même, puisque, d'après l'art. 74, on ne pouvait donner, selon la nature des effets, que les 4/5 ou les 2/3 de la valeur ; qu'aussi, dans le registre du compte des ventes, énonce-t-on seulement le prêt avec intérêts et frais, le produit de la vente, le boni pour l'emprunteur, et le déficit à la charge de l'appréciateur qui devait représenter les pièces sur lesquelles seules pouvait être rédigé le compte de vente; que sans doute il était du devoir de l'appréciateur de remplir la formalité de la signature, après la mention de la prisée ;

«Mais que Goubert a négligé ce devoir, parce qu'il a regardé comme suffisant son bulletin signé, portant l'évaluation et le prêt; et que sa compagnie en a jugé de même, elle qui n'a pas réclamé et à qui son délégué a cependant produit les ventes, bulletins et autres pièces qui établissaient les déficits; qu'ainsi Goubert et sa compagnie ne peuvent invoquer contre la commission leur propre négligence.....

«........... Considérant, d'ailleurs, qu'on ne peut reprocher à la commission d'avoir gardé le silence jusqu'en 1831, puisqu'on l'a vue agir avec vigueur dès le commencement de 1830;..... déclare les commissaires-priseurs responsables, etc. »

prou

Pourvoi des commissaires-priseurs; 1° Contravention aux art. 1315, 1331, 1325, 1348 c. civ., et au réglement du mont-de-piété de Strasbourg. Aux termes du droit général, les demandeurs avaient à ver par écrit le déficit par eux allégué; aux termes du droit spécial à la cause, établi par le réglement, ce déficit constitutif de l'obligation se devait constater par autant d'actes qu'il y a de parties, par les mentions du registre pour le mont-de-piété, par les mentions du bulletin pour les commissaires-priseurs.

Au mépris de droits si formels, la cour a admis la commission à se présenter armée d'un registre des prêts qui, pendant trois années, mentionne simplement les sommes prêtées, sans offrir un chiffre d'estimation des objets, signé de l'appréciateur. Elle ne donne pour base à sa décision que cette mention de la somme prêtée, mention qui, n'étant pas signée de l'appréciateur, reste l'oeuvre entière du caissier, c'est-à-dire de l'administration qui l'invoque, et ne peut aider à retrouver le prix de l'estimation, deuxième terme de comparaison indispensable à connaître, puisqu'il s'agissait de vérifier si les deux sommes avaient toujours été, ainsi que le prescrit le réglement, dans le rapport de 2 à 3 ou de 4 à 5.La cour, tout en taxant le caissier de négligence, induit du silence gardé par Goubert et la compagnie à laquelle il produisait les bulletins de ses opérations, qu'ils considéraient ces bulletins comme suffisant à établir à leur égard l'évaluation et le prêt. Mais une pareille induction ne saurait jamais équivaloir à une preuve par écrit.

--

2° Contravention au réglement du mont-de-piété et aux art. 1382, 1383 et 1384 c. civ. Le réglement du mont-de-piété faisait un devoir à ses administrateurs de ne pas laisser le déficit s'élever au-dessus du cautiounement, sans exiger la réintégration immédiate d'un cautionnement nouveau : c'est en vue de cette mesure offrant tout à la fois une garantie et une limite à sa responsabilite, que la compagnie des commissaires a consenti à s'engager à payer à défaut du sieur Goubert. La commission administrative s'est écartée de ces conditions; par son fait et sa volonté, elle a laissé accumuler sans mesure les débets de Goubert, et aggraver la charge de ses garans; les juges devaient donc annuler son recours en garantie ou compenser au moins le préjudice éprouvé par la compagnie, par une garantie subsidiaire contre le directeur.

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13

3° Contravention au réglement du mont-de-piété et aux art. 1203, 1213, 1862, 1863, 1864, 2025, 2026, 2027 et 2033 c. civ. — Aux termes compagnie des commissaires- priscurs, cette compagnie sera responsable du réglement qui porte, art. 57 « Si l'appréciateur est membre de la des suites des estimations de cet appréciateur. » La commission avait pour garant la compagnie, comme être collectif, et non pas chacun de ses membres personnellement. C'est en effet la compagnie qui seule a reçu et accepté les propositions; l'arrêt n'a pu, sans violer le code civil, condamner personnellement, in solidum, chacun des membres d'une société, qui ne pouvaient être actionnés que comme membres d'une société civile de gains et de pertes-Enfin et subsidiairement, la commission administrative, en actionnant personnellement tous les débiteurs, a par cela même consacré une divisibilité de la dette contre laquelle l'art. 2027 c. civ. ne lui permet pas de revenir, en admettant même que la dette fût solidaire dans le principe. ARRÊT.

taqué constate, en fait, 1° que les évaluations des nantissemens déposés LA COUR;- Sur le 1" et le 2° moyens :- - Considérant que l'arrêt atpriseur appréciateur; au mont-de-piété de Strasbourg ont été faites par Goubert, commissaire

lieu conformément au réglement du mont-de-piété, et qu'il en est résulté 2° Que ces évaluations et les prêts qui en ont été la suite, n'ont pas eu un dommage pour cet établissement;

des commissaires-priseurs, en lui communiquant les bulletins constatant 3° Que Goubert, garant de ce dommage, en a prévenu la compagnie les évaluations et les prêts;

4° Et que les demandeurs qui formaient alors avec Goubert la compagnie des commissaires-priseurs de Strasbourg sont, aux termes du réglement, responsables des suites des estimations de l'appréciateur;

--

Que cette décision, qui repose sur des appréciations de faits et sur l'interprétation du réglement qui faisait la loi des parties, ne contient aucune violation de lui; Sur le 3 moyen: Considérant qu'il porte uniquement sur la connaissance que Goubert aurait eue du déficit existant au préjudice du mont-de-piété ; Que c'est là une question de fait qui ne peut être soumise à la cour de cassation; Sur le 4° moyen : Considérant que ce moyen porte sur une question qui n'a pas été débattue devant la cour royale, et que, dès lors, il ne peut être proposé devant la cour de cassation; - Rejette. Du 5 nov. 1834. Ch. req. - M. Zangiacomi, prés. - M. Brière-Valigny, rapp. M. Tarbé, av. gén. - M. Letendre-de-Tourville, av.

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FRAIS, DEMANDE RÉDUITE.

La partie qui a succombé sur tous les chefs de contestations peut éire condamnée à tous les dépens, lors méme que le chiffre de la demande de son adversaire a été beaucoup réduit par le juge (C. pr., 130).

directement dans les termes de l'art. 130 c. pr., dont plusieurs arrêts Cette décision, qui est consacrée par l'arrêt qui va suivre, rentre trop sont même allés jusqu'à proclamer que cette disposition était facultative, pour qu'elle ait pu faire l'objet d'un doute sérieux. La jurisprudence est du Dictionnaire, v° Frais. allée beaucoup loin, ainsi qu'on le verra dans une prochaine livraison

INTÉRÊTS, DEMande, Indemnité.

L'art. 1153 c. civ., qui ne fait courir les intérêts que du jour de la demande, n'est applicable qu'aux obligations qui se bornent au paiement d'une somme certaine et fixe.

Et spécialement, l'individu condamné à rendre indemne un tiers, a pu étre condamné à payer des intérêts antérieurs au jour de la demande formée contre lui.

(Goubert C. Commiss. admin. du mont-de-piété de Strasbourg.) Le sieur Goubert s'était aussi pourvu de son côté, dans l'affaire qui' précède, contre l'arrêt de la cour de Colmar.-Aux deux premiers moyens que la cour a rejetés, il ajoutait les suivans: - - 3° Une violation des art. 1153 c. civ. et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué a condamné le demandeur et ses garans à payer des intérêts à partir du 1er janv. 1830, tandis que la 1" demande n'a été formée qu'à la date du 18 fév. 1830; -4° Violation de l'art. 130 c. pr., en ce que la cour royale a condamné le demandeur et ses garans en tous les dépens, alors qu'elle n'a adjugé à la commission qu'une partie de sa demande, c'est-à-dire 20,611 fr. au lieu de 40,611 fr. qu'elle réclamait.

ARRÊT.

LA COUR...; - Sur le 3o moyen, considérant que ce n'est que dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, que les intérêts sont dus, seulement à compter du jour de la demande, conformément à l'art. 1153 c. civ.;

Et que l'arrêt attaqué constate que l'obligation de Goubert ne se bornait pas au paiement d'une somme déterminée, mais consistait à rendre le mont-de-piété indemne du préjudice causé par des évaluations trop

élevées; que, par suite, la cour royale a pu condamner Goubert, pour réparation du dommage par lui causé, à payer des intérêts à partir d'une époque antérieure à celle de la demande;

Considérant que les motifs de cette disposition sont exprimés dans l'arret attaqué, qui porte qu'on ne peut reprocher à la commission du montde-piété d'avoir gardé le silence jusqu'en 1831, puisqu'on l'a vue agir avec vigueur dès le commencement de 1830; que dès lors il n'y a pas cu violation de l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810; Sur le 4 moyen, considérant que Goubert a succombé sur tous les chefs de contestation; que, par suite, il a dû être condamné en tous les dépens, et que la cour royale, en prononçant contre lui cette condamnation, loin de violer l'art. 130 c. pr., en a fait au contraire une juste application; - Rejette.

P

Du 5 nov. 1834. Ch. req. - M. Zangiacomi, prés. - M. Brière-Valigny, rapp. - M. Tarbé, av. gén. - M. Crémieux, av.

DOMAINE DE L'ÉTAT, ALIÉNABILITÉ, LORRAINE, FORÊTS.

Le domaine de l'élat était inaliénable en Lorraine.

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Ces décisions constatent des points de droit public d'un intérêt qui sera subsistant pendant plusieurs siècles encore. Elles sont préjugées en ce sens par l'arrêt rapporté au vol. 34. 1. 198; - Et, dans une note qui accompagne notre notice, nous avons cité l'arrêt de la cause de Nancy qui a été l'objet du pourvoi formé dans l'espèce.

En 1612, Henri II, duc de Lorraine, vend le bois de Xiroux, situé sur le territoire de la commune de Valfroicourt, aux sieurs Jean Bertrand, Didier, Rollet et Henri Philippe, moyennant 90,000 liv. barrois,

En 1615, Jean Bertrand devient seul acquéreur. Celui-ci le transmet à sa fille, qui entre par mariage dans la maison d'Hoffelize.

Le 30 octobre 1722, M. César d'Hoffelize solde un supplément de prix de 45,000 liv. pour satisfaire à la déclaration du duc de Lorraine, du 18 mars précédent, laquelle ne prononçait point la révocabilité de l'aliénation, mais obligeait les détenteurs à une indemnité.

Depuis deux siècles, le bois de Xiroux reste dans la famille d'Hoffelize. En 1829, l'administration des domaines fait sommation à M. Gaspard, comte d'Hoffelize, maréchal de camp, et à M. Thibault, comte d'Hoffelize, colonel de cavalerie, demeurant à Nancy, de payer, comme détenteurs de biens ayant appartenu à l'état de Lorraine, le quart de la valeur de ces biens, ou d'en faire abandon à l'état, aux termes de la loi du 14 ventôse an 7.

17 août 1829, MM. d'Hoffelize citent l'état en la personne de M. le préfet des Vosges et M. le directeur général des domaines, à l'effet de voir déclarer que les bois Xiroux ne sont pas atteints par la loi du 14 ven

tose an 7.

Ils concluaient à ce qu'il plût au tribunal de Mirecourt dire qu'il n'est point justifié que le bois Xiroux soit un domaine de la couronne, et non pas un domaine particulier du prince qui l'a aliéné ; — Que ce point fûtil établi, la loi du 14 ventôse an 7 ne pourrait être appliquée à ce bois, puisqu'en Lorraine le domaine de la couronne comme le domaine particulier du prince n'étaient pas inaliénables, et parce qu'au surplus toute action révocatoire et toute réclamation relativement à ce bois sont éteintes par la prescription; que cette même loi ne peut recevoir d'application au bois dont il s'agit, par la raison que l'acte d'aliénation est antérieur au janvier 1698; qu'elle ne peut y être appliquée sous un autre rapport, en ce que les traités de réunion de la Lorraine à la France, du 3 octobre 1735, ont maintenu les aliénations faites antérieurement, et par conséquent celle du bois dont il s'agit, faite en 1612, et en conséquence déclarer le préfet et l'administration des domaines non recevables dans les prétentions par eux élevées sur le bois dont il s'agit.

21 mars 1831, jugement du tribunal de Mirecourt, qui adopte ces conclusions.

Appel par l'administration des domaines et par le préfet devant la cour de Nancy.

28 mars 1833, arrêt de cette cour qui réforme en ces termes : «Considérant qu'en 1612 le domaine de la couronne était inaliénable en Lorraine, et que les ventes qui en étaient consenties étaient réputées simples engagemens toujours révocables à bon plaisir ; que l'ordonnance de 1446 avait établi sur ce point des principes certains et fondamentaux, qui par la suite sont devenus la règle de tous les ducs, et ont été observés comme loi de l'état et constitution inébranlable, dont les princes juraient l'observation à leur avénement au trône ; qu'on oppose en vain, sur le fondement de quelques opinions modernes, que cette ordonnance est restée inconnue pendant long-temps; qu'il est au contraire de fait que sa notoriété a été générale et constante, car elle est rappelée dans tous les édits domaniaux des 16, 17 et 18° siècles et dans les arrêts régle

mentaires de la cour souveraine; que les états de Lorraine eux-mêmes, en 1545, 1619 et 1626, ont réclamé l'application vigilante des principes qu'elle consacrait;

« .... Considérant qu'on ne saurait se placer en dehors de leur autorité, en soutenant que les lois des ducs de Lorraine n'ont remis tout au plus en question que le droit des aliénataires postérieurs à 1697; qu'il suffit de jeter un coup d'oeil sur leurs édits pour se convaincre que c'est à partir de l'année 1600 qu'ils ont voulu limiter l'application du principe de l'inalienabilité, renonçant pour des temps plus anciens à des recherches qui pourraient alarmer trop d'intérêts; qu'en effet, l'édit de Léopold, du 31 décembre 1690, ordonne la recherche de tous les domaines engagés, vendus ou concédés depuis le 1 janvier 1600; que l'édit du même prince, du 18 mars 1722, réduisant les aliénations sous certaines classes, permet d'octobre 1697, de se conserver leur jouissance, en payant la moitié du aux détenteurs des biens aliénés depuis le 1 janvier 1600 jusqu'au mois 5 faisant le prix de leur contrat; qu'il impose ensuite une taxe du tiers des aliénations aux détenteurs depuis 1697; qu'une déclaration du 16 mars 1712 confirme cette mesure, et qu'un arrêt du conseil du 15 sept. 1722 ordonne la réunion immédiate de tous les domaines engagés dont les possesseurs n'auront pas payé la taxe ;

«Que l'édit du duc François, du 14 juillet 1729, après avoir révoqué et annulé par l'art. 1 toutes les aliénations depuis 1697, maintient par son art. 6 la taxe imposée par Léopold aux possesseurs de domaines sortis des mains du prince depuis 1600, ordonne la réunion des droits domaniaux détenus par des individus qui ne paieront point cette taxe dans le délai d'un mois, et se réserve, quant aux autres, la revendication à bon plaisir des biens dépendant de sa couronne, dont l'acquittement de la taxe leur a conservé la jouissance actuelle;

« Que cette suite d'édits, déclarations et arrêts forme la loi qui, pour employer l'expression dont se sert l'art. 2 de la loi de ventôse an 7, était en usage dans l'ancienne Lorraine, lorsqu'elle a été incorporée à la France et les réunions opérées; que notamment l'auteur des intimés a soldé la finance de moitié de son prix, afin de se faire maintenir dans la possession précaire; qu'ainsi rien n'est plus évident en ce qui concerne les aliénations faites depuis 1600 ;.....

er

Considérant que la faculté de révoquer à bon plaisir les aliénations depuis 1600, stipulée d'une manière si solennelle par l'édit de 1729, est passée au roi de France lorsque la Lorraine est devenue partie intégrante de la France; que l'art. 23 de la loi du 1 décembre 179) a de nouveau proclamé cette faculté en renvoyant les aliénations aux lois alors en usage fors de la réunion; que bientôt la loi du 3 septembre 1792 a révoqué toutes les aliénations déclarées révocables par la loi du 1" décemb. 1790, et conséquemment les aliénations qui, en Lorraine, étaient passibles de révocation; que la loi du 14 ventôse an 7 a admis un tempérament fort équitable; qu'elle accorde aux aliénataires la faculté de se faire reconnaître propriétaires incommutables, en payant le quart de la valeur estimative de biens domaniaux qu'ils détiennent; qu'ainsi elle a substitué une taxe à la révocation prononcée par la loi de 1792; que, d'après l'art. 13, cette taxe doit être acquittée par les engagistes, qui ne sont maintenus par aucun des articles qui précèdent;

« Qu'ainsi le bois de Xiroux ne peut devenir une propriété incommutable dans les mains de ceux qui le possèdent qu'en purgeant le vice de domanialité dont il est entaché, et en accomplissant les conditions déterminées par la loi du 14 ventôse an 7. »

Pourvoi, 1° pour violation de l'art. 1" du titre 18 de la coutume de Lorraine, du principe de la non rétroactivité des lois, et fausse application des ordonnances des ducs de Lorraine des 29 septembre 1446, 27 juin 1561, 17 septembre 1661, 28 septembre 1714, 31 décembre 1719, l'art. 2 de la loi du 14 ventôse an 7 ; 18 mars 1722, 14 juillet 1729, art. 1o de la loi du 3 septembre 1792, et de

En ce qu'il n'a jamais existé en Lorraine, avant sa réunion à la France, de texte de loi authentique qui donne dans ce pays le caractère d'inaliénabilité au domaine public;

Et, par suite, en ce que l'art. 14 de la loi du 14 ventôse an 7 était inapplicable.

ARRÊT.

LA COUR-Considérant que l'arrêt attaqué a décidé, en fait, que le bois de Xiroux faisait partie du domaine ducal de Lorraine, à l'époque de la vente qui en a été consentie le 15 avril 1612 par le duc Henri, aux sieurs Bertrand, Rollet et Philippe ; que la domanialité de ce bien a été reconnue tant par la déclaration fournie par César Hoffelize des biens qu'il possédait, et qui provenaient du domaine ducal, dans laquelle il a compris le bois de Xiroux comme ayant cette origine, que par le paiement qu'il a effectué du supplément de prix imposé aux acquéreurs de biens domaniaux l'édit du 18 mars 1722;

par

er

Considérant que cette alienation de 1612 doit être réglée suivant les lois en usage dans la Lorraine, lors de sa réunion à la France; que les art. 37 de la loi du 1° déc. 1790 et 2 de celle du 14 vent. an 7 disposent à l'égard des aliénations domaniales qui n'étaient pas révoquées avant la promulgation de ces lois, et qui étaient seulement susceptibles de révocation d'après la législation observée lors de la réunion; qu'ainsi les demandears ne peuvent opposer le défaut de révocation opérée avant le traité de 1706;

Considérant que le principe de l'inaliénabilité du domaine public était admis et consacré en Lorraine par plusieurs dispositions législatives antérieures à la réunion de ce pays à la France, et mème à la vente de 1612, notamment par les ordonnances, édits et déclarations des 21 décembre 1446, 2 septembre 1661, 28 décembre 1714, 31 décembre 1719; 18 mars 1722 et 14 juillet 1729;

Considérant que l'existence de l'ordonnance de 1446 ne peut être révoquée en doute, puisqu'elle est énoncée dans tous les actes législatifs postérieurs, et que l'objet principal de ses dispositions, l'inalienabilité du domaine, y est rappelé; que les lois postérieures à 1612 qui ont proclamé ce principe n'ont pas introduit une régle nouvelle, mais ont seu lement maintenu celle qui était établie par le droit public de la Lorraine

et des autres nations;

Considérant que les ducs de Lorraine jouissaient de tous les droits qui caractérisent la souveraineté, et ont pu déclarer le domaine de leur état inaliénable ; que le concours des états n'était exigé par aucun statut pour imprimer à leurs dispositions législatives le caractère et l'autorité de lois; qu'on ne voit l'intervention des états dans aucune disposition qui n'avait pas pour objet la création d'un nouvel impôt ;

Que l'enregistrement par les corps judiciaires des actes législatifs n'était pas observé en Lorraine à la date de 1446 ni pendant le 15° siècle ; Considérant que la coutume qui avait admis la prescription contre le prince ne pouvait atteindre que les biens qui étaient sa propriété, et non pas ceux qui appartenaient à l'état ; qu'elle n'a pas dérogé au droit spécial établi par des dispositions expresses pour régir le domaine public; que cette dérogation n'aurait pu résulter que d'un article formel qui aurait soumis ce domaine à la prescription; que l'ordonnance de 1661, qui, en reproduisant la règle de l'inaliénabilité, a annulé les aliénations consenties depuis 1561, atteste par cette annulation, qui remonte à une époque antérieure à la rédaction de la coutume de 1594, que la disposition de cette coutume n'avait pas dérogé au droit spécial de l'inaliénabilité; Considérant enfin que les lois en vigueur en Lorraine à l'époque de sa réunion à la France avaient fixé la date du 1 janvier 1600 comme étant celle à partir de laquelle les aliénations pourraient être révoquées; qu'ainsi l'arrêt attaqué, en décidant que l'aliénation du bois Xiroux était soumise aux conditions imposées par la loi du 14 ventôse an 7, a fait une juste application de cette loi; Rejette.

Du 6 nov. 1834. - Ch. req. - M. Zangiacomi, prés. - M. Tripier, rapp. M. Tarbé, av. gén. - M. Berton, av.

ENREGISTREMENT, SOLIDARITÉ, PRIX UNIQUE.

§1. L'acquisition par plusieurs d'un seul immeuble, pour un prix unique, les rend débiteurs solidaires des droits d'enregistrement envers la régie (L. 22 frim. an 7, art. 28, 57; c. civ., 1202, 1218).

(Deroucy C. Enregistr.)

ARRÊT.

LA COUR ;-Attendu, sur la solidarité prononcée, que le droit d'enregistrement frappant sur les actes et non sur les personnes, il est indivisible comme le sont les actes eux-mêmes; qu'en conséquence l'un des acquéreurs des biens indivis acquis par même contrat, a pu être légalement contraint pour le tout; Rejette.

Du 7 nov. 1821. - Ch. req. - M. Henrion, pr. - M. Rousseau, rapp. M. Lebeau, av. gén. - M. Guibout, av.

§ 2. De méme, lorsqu'un immeuble adjugé à trois acquéreurs sans solidarité a été revendu sur eux à la folle enchère pour un prix moindre, ils sont tous tenus solidairement des droits de mutation sur ce qui forme la différence du prix.

(Enregistr. C. Labasse, etc.)

Les sieurs Moncourrier, Labasse et Hymond, par le fait d'un seul et même avoué, s'étaient rendus adjudicataires, pour 3,000 fr. et les frais, d'un domaine saisi immobilièrement sur Cauquot; mais on fut obligé de poursuivre la revente de ce bien sur folle-enchère, les adjudicataires n'ayant satisfait à aucune des conditions du cahier des charges.

Sur cette dernière poursuite, l'immeuble fut adjugé pour 1,230 fr. et les charges au sieur Monnant.

Celui-ci ayant payé les droits d'enregistrement sur cette somme, la régie décerna contre les trois premiers adjudicataires qui n'avaient pas payé l'enregistrement du jugement, une contrainte en paiement des droits dus sur la différence entre le prix de la deuxième et celui de la première adjudication, et du double droit.

Jean Hymond n'étant pas solvable, les sieurs Labasse et Moncourrier offrirent conjointement les deux tiers de la somme réclamée, et, sur le refus de leurs offres, ils ont assigné la régie devant le tribunal d'Ussel pour les voir déclarer valables et suffisantes.

la

Le 9 nov. 1832, jugement qui valide leurs offres en ces termes : « Attenda qu'il est de principe établi, par l'art. 1202 c. civ., , que solidarité ne se présume pas; qu'il faut qu'elle soit expressément stipulée, et que cette règle ne cesse que dans le cas où la solidarité a lieu de plein droit, en vertu d'une disposition de la loi ; qu'il ne résulte pas des clauses contenues au cahier des charges dressé par suite de la saisie-immobilière des biens du sieur Cauquot, ni d'aucune autre circonstance de l'adjudication du 13 avril 1832, que les adjudicataires se soient soumis

15

solidairement au paiement du prix, des frais et autres accessoires de la vente; que l'on ne rencontre dans le code aucune disposition qui les rende passibles de cette manière; que, dans la loi du 22 frim. an 7, on ne trouve aucun texte qui déclare que des acquéreurs d'un même objet sont tenus solidairement des droits d'enregistrement, à raison de la vente à eux consentie;

«Que l'art. 31 de cette loi dit bien que les droits des actes emportant translation de propriété d'immeubles seront supportés par les nouveaux possesseurs, mais qu'il n'ajoute pas qu'ils doivent être atteints par la solidarité s'ils sont plusieurs, tenant leurs droits du même titre; que si telle eût été l'intention du législateur, il l'aurait exprimée comme il l'a fait dans l'article suivant par une disposition bien distincte à l'égard des héritiers passibles solidairement des droits des déclarations des mutations par décès;

« Que les art. 11 et 57 de la loi précitée encore invoqués, ne concernent, le premier, que les droits particuliers à percevoir en cas de dispositions diverses ou indépendantes les unes des autres, et le deuxième, un devoir imposé au receveur de faire les énonciations qu'il prescrit dans la quittance des droits d'enregistrement;

« Attendu que l'art. 1200 c. civ. ne présente que la définition de la solidarité entre les débiteurs; qu'il doit être entendu en ce sens, qu'en général le total de la dette ne peut être exigé de chaque débiteur que lorsque, d'après le titre, il y a convention des parties à cet égard; appartenu à Pierre Cauquot n'ont pas été adjugés et ne sont pas censés « Attendu que, par jugement du 13 avril 1832, les immeubles ayant l'avoir été sous condition de solidarité pour le principal et les frais, aux avoué, d'avoir enchéri et s'être porté adjudicataire pour G. Labasse, J trois adjudicataires; que seulement il a été donné acte à M° Laborde, Moncourrier et J. Hymond, et acte à ceux-ci de leur acceptation; que quoique, par leur déclaration ainsi faite à l'audience, ils peuvent être considérés comme ayant acquis conjointement, cependant l'obligation qu'ils ont contractée était, par son objet, susceptible d'exécution partielle, et, par conséquent, divisible; chacun était réputé acquérir une égale part, et n'était tenu que de sa portion du prix et des charges ou d'un adjudicataire pour une plus forte part et tous solidairement; tiers, dès l'instant qu'eux trois ne déclaraient pas que l'un se rendait

« Attendu que la chose n'étant indivisible ni par sa nature, ni par l'exécution de l'obligation qui en dérive, il n'y a pas lieu d'appliquer les art. 1218 et 1222 c. civ., et il faut rentrer dans la règle générale qui veut que lorsque l'obligation d'une seule et même chose divisible a été contractée par plusieurs, chacun des débiteurs ne peut être poursuivi que pour sa part;

« Attendu que G. Labasse et la veuve Moncourrier, ayant offert, par leur acte du 30 août dernier, les deux tiers de la somme de 329 fr. 26 c. pour droits d'enregistrement résultant de la différence du prix de l'adjudication du 13 avril 1832, d'avec celui de la revente sur folle-enchère, et n'étant pas passibles du tout, c'est le cas de valider l'offre et d'en autoriser la consignation, en cas de nouveau refus ;

<«< Attendu que le commandement du 11 août dernier vaut toujours pour la quotité des deux tiers, puisque G. Labasse et la veuve Moncourrier étaient en retard et il n'y a pas lieu d'en prononcer la nullité. »

Pourvoi de la régie, pour fausse application des art. 1200, 1202, 1203, 1218 et 1222 c. civ., et violation des art. 28 et 57 de la loi du 22 frim.

an 7.

L'enregistrement, a-t-on dit, est une formalité qui ne peut être accomplie qu'en payant les droits, et, nulle part, on ne voit que les préposés chargés de les recevoir puissent les exiger en partic; il sait de là qu'un tribunal ne peut, sans violer la loi, ordonner, quand il reconnaît qu'un droit est du en entier, qu'il n'en sera payé qu'une partie, car la formalité ne pouvant être donnée partiellement, il est nécessaire que le droit, qui en est le salaire, soit perçu en totalité. C'est, d'ailleurs, ce qui résulte encore formellement de la prescription de l'art. 28 qui veut que le droit soit payé avant l'accomplissement de la formalité, et de celle de l'art. 57 qui veut que quittance du droit soit donnée sur l'acte mêine. On voit par là que la formalité et le droit sont indivisibles.

Le jugement attaqué, sans dire le contraire, prétend que l'obligation de payer le droit est divisible; mais cela est inexact: la perception est une, l'obligation de payer le droit est donc une aussi; il s'agit, dans l'espèce, d'une adjudication en bloc faite pour un prix unique; il n'était pas nécessaire, en pareil cas, de déclarer que des coacquéreurs devraient payer solidairement des droits dus pour un objet unique, acquis en bloc et conjointement entre eux, l'indivisibilité, en pareil cas, était de droit; c'est, d'ailleurs, ce que la cour a déjà jugé. ARRÊT.

-

LA COUR; Vu les art. 28 et 57 de la loi du 22 frim. an 7 ; - Considérant que le taux et le mode de paiement des droits d'enregistrement de tous actes et des droits de mutation en particulier sont l'objet d'une législation toute spéciale qui les règle exclusivement; que le paiement du droit ne peut être morcelé, mais doit être payé avant l'enregistrement pour la quotité entière du droit (art. 28 de la loi de frim. an 7); que la quittance du droit entier de l'enregistrement doit être mise sur l'acte enregistré aussitôt que le droit est payé, et que la quittance doit exprimer la date de l'enregistrement, le folio du registre, le n° et la somme des

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